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16/01/2019 | FRANCE | N°17/00251

France | France, Cour d'appel de Bastia, 16 janvier 2019, 17/00251


ARRET No
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16 Janvier 2019
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R No RG 17/00251 - No Portalis DBVE-V-B7B-BW56
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N... A... H... M... T...
C/
Q... U...
----------------------Décision déférée à la Cour du :
13 septembre 2017
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BASTIA
F16/00164
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COUR D'APPEL DE BASTIA


CHAMBRE SOCIALE




ARRET DU : SEIZE JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF




APPELANT :


Monsieur N..

. A... H... M... T...
[...]
[...]
Représenté par Me Martine CAPOROSSI POLETTI, avocat au barreau de BASTIA


INTIME :


Monsieur Q... U...
[...]
[...]
Représenté par Me Laurence ...

ARRET No
-----------------------
16 Janvier 2019
-----------------------
R No RG 17/00251 - No Portalis DBVE-V-B7B-BW56
-----------------------
N... A... H... M... T...
C/
Q... U...
----------------------Décision déférée à la Cour du :
13 septembre 2017
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BASTIA
F16/00164
------------------

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU : SEIZE JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF

APPELANT :

Monsieur N... A... H... M... T...
[...]
[...]
Représenté par Me Martine CAPOROSSI POLETTI, avocat au barreau de BASTIA

INTIME :

Monsieur Q... U...
[...]
[...]
Représenté par Me Laurence GAERTNER DE ROCCA SERRA, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/002966 du 23/11/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 novembre 2018 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme BETTELANI, Vice-présidente placée près Monsieur le premier président, chargée d'instruire l'affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme LORENZINI, Présidente de chambre,
M. EMMANUELIDIS, Conseiller
Mme BETTELANI, Vice-présidente placée près Monsieur le premier président

GREFFIER :

Mme COMBET, Greffier lors des débats.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2019

ARRET

Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe.
Signé par Mme LORENZINI, Présidente de chambre faisant fonction de président et par Mme COMBET, Greffier présent lors de la mise à disposition de la décision.

***
EXPOSE DU LITIGE

Monsieur Q... U... a saisi le Conseil de prud'hommes de Bastia, par requête reçue le 2 juin 2016, de diverses demandes, en se prévalant de l'existence d'une relation de travail le liant à Monsieur N... T....

Selon jugement du 13 septembre 2017, le Conseil de prud'hommes de Bastia a :
- dit le contrat de travail de Monsieur Q... U... illégal,
- prononcé la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur à la date du 30 avril 2016,
- condamné Monsieur N... T... à verser à Monsieur Q... U... les sommes suivantes:
4 195,20 euros brut de rappel de salaire de février à avril 2016,
8 390 euros brut au titre du travail dissimulé,
1 398,40 euros brut à titre de l'emploi d'un salarié en situation irrégulière,
- ordonné à Monsieur N... T... de remettre à Monsieur Q... U... les documents légaux (bulletin de paie de février à avril 2016, attestation Pôle emploi et certificat de travail) sous astreinte de 20 euros par jour de retard dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, en se réservant le droit de liquider l'astreinte,
- débouté Monsieur Q... U... de son autre chef de demande,
- dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe le 10 octobre 2017, Monsieur N... T... a interjeté appel de ce jugement, en ce qu'il a dit le contrat de travail de Monsieur Q... U... illégal, prononcé la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur à la date du 30 avril 2016, condamné Monsieur N... T... à verser à Monsieur Q... U... les sommes suivantes: 4195,20 euros brut de rappel de salaire de février à avril 2016, 8390 euros brut au titre du travail dissimulé, 1 398,40 euros brut à titre de l'emploi d'un salarié en situation irrégulière, ordonné à Monsieur N... T... de remettre à Monsieur Q... U... les documents légaux (bulletin de paie de février à avril 2016, attestation Pôle emploi et certificat de travail) sous astreinte de 20 euros par jour de retard dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, en se réservant le droit de liquider l'astreinte.

Aux termes des dernières écritures de son conseil transmises au greffe en date du 24 mai 2018, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, Monsieur N... T... a sollicité :
- de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- principalement, de prononcer un sursis à statuer dans l'attente de la décision de Madame la Procureure de la République,
- à titre subsidiaire:
* de dire n'y avoir lieu à résiliation judiciaire, les parties n'étant pas liées par un contrat de travail,
* les sommes de 4 195,20 euros brut de rappel de salaire de février à avril 2016, 8 390 euros brut au titre du travail dissimulé, 1 398,40 euros brut à titre de l'emploi d'un salarié en situation irrégulière, et à lui remettre des documents rectifiés sous astreinte de 20 euros par jour de retard dans le délai d'un mois à compter de la notification dudit jugement, en se réservant le droit de liquider l'astreinte,
* de condamner Monsieur Q... U... à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il a fait valoir :
- qu'aucune relation de travail n'avait été existante avec Monsieur Q... U..., celui-ci l'ayant en réalité sollicité à plusieurs reprises au cours des semaines précédant le 30 avril 2016 pour obtenir une embauche, vainement, puis s'étant blessé malencontreusement au doigt (coincé dans l'encadrement d'une portière de véhicule) le 30 avril 2016 lors d'une discussion où il tentait à nouveau d'obtenir son embauche auprès de Monsieur T...,
- la fiche d'intervention des pompiers ne relatait que les dires de Monsieur Q... U..., prétendant avoir été victime d'un accident du travail, totalement inexistant, la demande de Monsieur Q... U... sur ce point ayant d'ailleurs été rejetée par la MSA,
-que l'incidence de l'enquête pénale était fondementale pour l'issue du litige opposant les parties à la Cour, justifiant d'un sursis à statuer,
- que subsidiairement, il n'existait pas d'indices concordants permettant de conclure à une relation de travail, sur laquelle Monsieur Q... U..., qui ne s'exprimait aucunement en français, était incapable de donner des détails, de même qu'il était incapable de donner l'adresse de Monsieur T... (résidant à Pietroso et non Ghisonaccia) qui n'était pas propriétaire des vignes, celles-ci appartenant à une E.A.R.L. (n'ayant pas les ressources d'embaucher des salariés), dont Monsieur Q... U... était incapable donner le nom ou situer le siège, étant observé que les seuls éléments corrects communiqués par Monsieur Q... U... étaient ceux donnés par Monsieur T... le jour de l'accident pour l'indemnisation par la compagnie d'assurance.

Aux termes des écritures de son conseil transmises au greffe en date du 29 janvier 2018 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, Monsieur Q... U... a demandé :
- de confirmer le jugement rendu en ses dispositions querellées,
- de condamner Monsieur N... T... à lui verser une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,
- de dire et juger que chaque partie conservera ses propres dépens.

Il a exposé :
- qu'il était embauché auprès de Monsieur T... depuis 2011, de manière non déclarée, et pouvait communiquer des renseignements précis sur celui-ci (tenant à sa situation maritale, son adresse, son numéro de téléphone, le domicile des parents, la contenance approximative des terres exploitées),
- que la version donnée par Monsieur T... sur les circonstances de l'accident du 30 avril 2016 étaient fantaisistes, puisque le doigt avait été déchiqueté et non écrasé dans l'embrasure d'une portière,
- qu'aucune procédure pénale n'était ouverte auprès d'un magistrat instructeur,
- dès lors, outre des rappels de salaire, diverses indemnités étaient dues (indemnité au titre du travail dissimulé et indemnité forfaitaire).

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 12 septembre 2018, avec appel de l'affaire à l'audience de plaidoirie du 13 novembre 2018, où la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2019.

MOTIFS

1) Sur les limites de l'appel

Attendu que l'appel interjeté par Monsieur N... T... est limité à certaines dispositions du jugement du Conseil de prud'hommes de Bastia du 13 septembre 2017 ;

Que l'annulation du jugement entrepris n'est pas sollicitée, tandis qu'il n'est pas argué d'une indivisibilité de l'appel;

Qu'aucun appel incident n'est intervenu ;

Que les autres dispositions du jugement (tenant au débouté de Monsieur Q... U... de son autre chef de demande et au fait que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens), non déférées à la Cour, sont devenues irrévocables et il n'y a pas lieu à statuer les concernant ;

2) Sur le sursis à statuer

Attendu qu'au regard des données du litige et en l'absence de tout élément précis relatif à la procédure pénale en cause, ouverte en mai 2016, et à son état d'avancement, il convient de rejeter, au visa des articles 378 et suivants du code de procédure civile, la demande, formée à titre principal, par Monsieur N... T..., tendant à prononcer un sursis à statuer dans l'attente de la décision de Madame la Procureure de la République ;

3) Sur les demandes afférentes à une relation de travail

Attendu qu'un contrat de travail se définit comme une convention par laquelle une personne s'engage à mettre son activité à la disposition d'une autre sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant rémunération ; qu'en l'absence de contrat de travail écrit, il appartient au salarié, qui se prévaut de l'existence d'une relation de travail, d'en rapporter la preuve par tout moyen ;

Attendu qu'en l'espèce, Monsieur Q... U... se prévaut de l'existence d'une relation de travail, l'ayant lié à Monsieur N... T... depuis l'année 2011, sans contrat écrit signé entre les parties ; que Monsieur T... dénie quant à lui toute relation de travail entre les parties ;

Attendu que force est de constater qu'à l'appui de ses demandes, Monsieur U... ne produit pas d'éléments objectifs suffisants à même de démontrer de l'existence d'une relation de travail ;

Qu'aucune pièce n'est produite, venant démontrer que l'accident subi le 30 avril 2016 par Monsieur U... est un accident du travail et non un simple accident hors de toute relation de travail, étant observé que la M.S.A., par courrier du 8 novembre 2016, a refusé une prise en charge au titre d'un accident du travail ; qu'il n'est pas versé de pièce médicale, venant exclure, s'agissant de la plaie au pouce droit constatée, l'origine factuelle avancée par Monsieur T... (blessure suite à la fermeture d'une portière dans l'embrasement de laquelle Monsieur U... avait mis sa main) ;

Que le document de "prise en compte de demande d'attestation d'intervention des sapeurs pompiers du Sdis 2B" relate les dires de Monsieur U... quant à l'origine de l'accident ;

Qu'il en va de même du procès-verbal d'audition du 18 mai 2016 de Monsieur U..., qui transcrit uniquement la relation des faits donnée par celui-ci ;

Que les quelques renseignements donnés par Monsieur U... dans ce procès-verbal d'audition sur la situation de Monsieur T..., renseignements dont certains sont inexacts, sont trop parcellaires pour donner crédit à l'existence d'une relation de travail liant les parties depuis 2011;

Qu'il convient de noter que n'est pas mis en évidence, au travers des pièces versées aux débats, un lien de subordination juridique entre les parties, pas davantage qu'une rémunération versée par Monsieur T... à l'égard de Monsieur U..., qui ne mentionne à aucun moment l'E.A.R.L. Ajalta, dénomination sociale de l'entreprise de Monsieur T..., alors qu'il affirme travailler auprès de celui-ci depuis 2011 ;

Attendu qu'en conséquence, faute d'une relation de travail démontrée entre les parties, il convient de dire n'y avoir lieu à résiliation judiciaire et à condamnation de Monsieur T... à verser à Monsieur U... diverses sommes à titre de rappel de salaire, travail dissimulé, emploi d'un salarié en situation irrégulière et remise de documents sous astreinte ;

Que le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a :
- dit le contrat de travail de Monsieur Q... U... illégal,
- prononcé la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur à la date du 30 avril 2016,
- condamné Monsieur N... T... à verser à Monsieur Q... U... les sommes suivantes:
4 195,20 euros brut de rappel de salaire de février à avril 2016,
8 390 euros brut au titre du travail dissimulé,
1 398,40 euros brut à titre de l'emploi d'un salarié en situation irrégulière,
- ordonné à Monsieur N... T... de remettre à Monsieur Q... U... les documents légaux (bulletin de paie de février à avril 2016, attestation Pôle emploi et certificat de travail) sous astreinte de 20 euros par jour de retard dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, en se réservant le droit de liquider l'astreinte ;

4) Sur les demandes accessoires

Attendu que Monsieur Q... U..., succombant à l'instance, sera condamné aux dépens de l'instance d'appel, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle ;

Que l'équité ne commande pas de prévoir de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, la demande de Monsieur N... T... étant rejetée;

Que Monsieur U... étant condamné aux dépens, sa demande de condamnation au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sera rejetée ;

Que les parties seront déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires à ces égards ;

PAR CES MOTIFS

L A C O U R,

Statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

Statuant dans les limites de l'appel,

CONSTATE que l'annulation du jugement entrepris n'est pas sollicitée, tandis qu'il n'est pas argué d'une indivisibilité de l'appel,

CONSTATE qu'aucun appel incident n'est intervenu,

DIT dès lors que les dispositions du jugement rendu le 13 septembre 2017 par le Conseil de prud'hommes de Bastia, qui n'ont pas été déférées à la Cour (tenant au débouté de Monsieur Q... U... de son autre chef de demande et au fait que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens de première instance), sont devenues irrévocables et qu'il n'y a pas lieu à statuer les concernant,

INFIRME le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Bastia le 13 septembre 2017, tel que déféré, dans les limites de l'appel,

Et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DEBOUTE Monsieur N... T... de sa demande de sursis à statuer,

DIT n'y avoir lieu, faute d'une relation de travail démontrée entre les parties, à résiliation judiciaire d'un contrat de travail et à condamnation de Monsieur N... T... à verser à Monsieur Q... U... les sommes de 4 195,20 euros brut à titre de rappel de salaire, 8 390 euros brut au titre d'un travail dissimulé, 1 398,40 euros brut au titre d'un emploi d'un salarié en situation irrégulière et remise de documents rectifiés sous astreinte de 20 euros par jour de retard dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision,

REJETTE dès lors l'ensemble de ses demandes de Monsieur Q... U...,

DEBOUTE Monsieur N... T... de sa demande de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

DEBOUTE Monsieur Q... U... de sa demande de condamnation sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

CONDAMNE Monsieur Q... U... aux dépens de l'instance d'appel, qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Numéro d'arrêt : 17/00251
Date de la décision : 16/01/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-16;17.00251 ?
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