COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
Ch. civile B
ARRET du 15 DECEMBRE 2010
R. G : 09/ 00060 C-MPA
Décision déférée à la Cour : jugement du 08 décembre 2008 Tribunal de Grande Instance de BASTIA R. G : 08/ 1600
X...
C/
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE Y...
APPELANT :
Monsieur Hervé X...né le 18 Mars 1949 à PRUNELLI DI FIUMORBU (20243) ...20243 PRUNELLI DI FIUMORBU
représenté par la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avoués à la Cour assisté de Me Marie Rose CITOLLEUX, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/ 754 du 09/ 04/ 2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
INTIMES :
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE Prise en la personne de son Directeur en exercice 1 Avenue Napoléon III 20000 AJACCIO
représentée par la SCP R. JOBIN ET PH. JOBIN, avoués à la Cour assistée de Me Christian GIOVANNANGELI, avocat au barreau de BASTIA et Me Thomas VALERI, avocat au barreau de BASTIA
Maître Y...Pris en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur Hervé X......Bâtiment B 20200 PIETRANERA BASTIA
représenté par la SCP Antoine CANARELLI-Jean-Jacques CANARELLI, avoués à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 octobre 2010, devant Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean BRUNET, Président de Chambre Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2010.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée le 10 mai 2010 et qui a fait connaître son avis, dont les parties ont pu prendre connaissance.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Jean BRUNET, Président de Chambre, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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* *FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES
Vu l'assignation en date du 16 septembre 2008 par laquelle la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE a sollicité l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de Monsieur Hervé X....
Vu le jugement en date du 8 décembre 2008 par lequel le tribunal de grande instance de Bastia a constaté que Monsieur Hervé X..., exploitant agricole, était en état de cessation des paiements, fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 26 mai 2008, ordonné sa liquidation judiciaire par Maître Y..., nommé mandataire liquidateur, désigné un huissier de justice aux fins de réaliser l'inventaire, imparti aux créanciers un délai de deux mois pour la déclaration de leurs créances, dit que Maître Y...disposerait d'un délai de six mois pour procéder à la vérification des créances, fixé à deux ans le terme prévisible de la procédure de liquidation judiciaire, ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Vu la déclaration d'appel déposée par Monsieur Hervé X...le 26 janvier 2009.
Vu les dernières conclusions de Maître Y...du 21 septembre 2009 dans lesquelles ce dernier s'en remet à la sagesse de la Cour sur les mérites de l'appel.
Vu les dernières conclusions déposées le 21 octobre 2009 par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE.
Elle conclut à l'irrecevabilité de la prétention de Monsieur Hervé X...en ce qu'elle doit s'analyser en une demande nouvelle au sens des dispositions des articles 564 et 565 du code de procédure civile et en application du principe de la concentration des moyens. Elle prétend donc à la confirmation du jugement entrepris et réclame le paiement de la somme de 1. 300 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions de Monsieur Hervé X...en date du 5 novembre 2009.
Il soutient que sa demande est recevable en application des articles 564 et 565 du code de procédure civile et que le principe de la concentration des moyens ne peut lui être applicable en sa qualité de défendeur.
Il prétend à la réformation du jugement entrepris et invoque les dispositions de l'article L. 640-5 du code de commerce.
Vu l'arrêt en date du 5 mai 2010 par lequel la Cour d'appel de Bastia a, avant dire droit, renvoyé l'affaire à la mise en état pour communication au ministère public et éventuelles observations des parties.
Vu l'avis du parquet général en date du 20 mai 2010 qui s'en rapporte.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 30 juin 2010 ayant renvoyé l'affaire pour être plaidée à l'audience du 22 octobre 2010.
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MOTIFS :
Attendu sur la recevabilité de la nouvelle prétention émise en cause d'appel qu'en application de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ;
Attendu en l'espèce que la demande initiale portait sur une demande de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE de voir prononcer une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de Monsieur Hervé X...; qu'en formant appel et soulevant l'application de l'article L. 640-5 du code de commerce, Monsieur Hervé X...invoque manifestement un moyen pour faire écarter la prétention de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE ; que cette demande sera donc déclarée recevable en cause d'appel ;
Attendu sur le principe de la concentration des moyens juridiques que, s'agissant d'un appel formé par le défendeur à l'encontre d'une décision de première instance, les principes relatifs à l'application des articles 480 du code de procédure civile et 1351 du Code civil ne peuvent recevoir application ; que ce moyen tendant à faire déclarer irrecevable la prétention de Monsieur Hervé X...en cause appel sera donc également écarté ;
Attendu sur le bien-fondé de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire en application de l'article L. 640-5 du code de commerce, que cette procédure peut être aussi ouverte sur l'assignation d'un créancier, quelle que soit la nature de sa créance ; que toutefois, lorsque le débiteur a cessé son activité professionnelle, ce qui est le cas en l'espèce, cette assignation doit intervenir dans le délai d'un an à compter de la cessation de l'activité s'il s'agit d'un agriculteur ;
Attendu sur ce point que la cessation d'activité visée par le texte est une notion de fait dont la preuve peut être rapportée par tout moyen ; que le délai prescrit par l'article précité est un délai préfix qui n'est susceptible ni d'interruption ni de suspension ; que c'est donc en fonction de la date de la saisine du tribunal qu'il convient d'apprécier si le délai légal a été respecté ;
Attendu que Monsieur Hervé X...soutient qu'il a cessé d'exploiter les amandes depuis l'année 2004 et qu'il a terminé l'exploitation des clémentines au printemps 2006 ; qu'il produit en ce sens des rapports d'expertise établis par la SAFER et le cabinet Z... qui permettent de constater que les terrains agricoles lui appartenant sont à l'état d'abandon et ne présentent plus de valeur agronomique ; qu'il justifie également ne pas avoir été imposé au titre de ses revenus pour l'année 2007 ; qu'il verse également au débat les attestations d'un transporteur et du président d'une société coopérative agricole qui certifient que depuis la fin de l'année 2004 et l'année 2005 Monsieur Hervé X...n'a plus exploité et récolté d'amandes ; que l'ensemble de ces éléments permette donc de considérer que la cessation d'activité de Monsieur Hervé X...doit s'établir durant l'année 2006 ;
Attendu que l'assignation aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire a été délivrée le 16 décembre 2008 soit plus d'un an après la cessation d'activité effective de Monsieur Hervé X...; que la demande de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE sera donc rejetée en application de l'article L. 640-5 du code de commerce et le jugement entrepris infirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE, qui succombe, doit supporter la charge des dépens, conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile et être déboutée en sa demande fondée sur l'article 700 du même code.
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Bastia en date du 8 décembre 2008 en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Rejette la demande de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire de Monsieur Hervé X...en sa qualité d'agriculteur,
Condamne la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE aux entiers dépens,
Rejette toutes les autres demandes des parties.
LE GREFFIER LE PRESIDENT