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18/11/2002 | FRANCE | N°01/00521

France | France, Cour d'appel de Bastia, 18 novembre 2002, 01/00521


ARRET N° du 18 NOVEMBRE 2002 R.G : 01/00521 R-MCB 99/3239 18 mai 2001 S.A. C... C/ S.A.R.L. D...

COUR D'APPEL DE BASTIA CHAMBRE CIVILE ARRET DU DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DEUX APPELANTE : S.A. C... Prise en la personne de son représentant légal en exercice 12 Place Vendôme 75001 PARIS représentée par la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avoués à la Cour assistée de Me Jean-Louis RINIERI, avocat au barreau de BASTIA, substituant Me Serge HOFFMAN, avocat au barreau de PARIS INTIMEE : S.A.R.L. D... Prise en la personne de son représentant légal en exercice 20 Boulevard Paoli 20200 BAST

IA représentée par Me Antoine CANARELLI, avoué à la Cour assisté...

ARRET N° du 18 NOVEMBRE 2002 R.G : 01/00521 R-MCB 99/3239 18 mai 2001 S.A. C... C/ S.A.R.L. D...

COUR D'APPEL DE BASTIA CHAMBRE CIVILE ARRET DU DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DEUX APPELANTE : S.A. C... Prise en la personne de son représentant légal en exercice 12 Place Vendôme 75001 PARIS représentée par la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avoués à la Cour assistée de Me Jean-Louis RINIERI, avocat au barreau de BASTIA, substituant Me Serge HOFFMAN, avocat au barreau de PARIS INTIMEE : S.A.R.L. D... Prise en la personne de son représentant légal en exercice 20 Boulevard Paoli 20200 BASTIA représentée par Me Antoine CANARELLI, avoué à la Cour assistée de Me Pierre-Louis MAUREL, avocat au barreau de BASTIA COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Marie-Colette BRENOT, Président de Chambre Monsieur Bernard ROUSSEAU, Conseiller Monsieur Michel HUYETTE, GREFFIER : Madame Martine COMBET, Greffier, lors des débats et du prononcé, DEBATS : A l'audience publique du 07 octobre 2002, ARRET : Contradictoire, signé par Madame Marie-Colette BRENOT, Président de Chambre, l'ayant prononcé à l'audience publique du 18 novembre 2002, date indiquée à l'issue des débats, et par Madame Martine COMBET, Greffier. * * * LES FAITS ET LA PROCEDURE :

La société C... a déposé auprès de l'Organistation Mondiale de la Propriété Intellectuelle le 11 septembre 1995 un modèle de bague "Lien" dans sa ligne de collection sur ce thème.

Exposant que la SARL D..., bijoutier à BASTIA, s'est rendue coupable d'actes de contrefaçon en commercialisant une copie servile de cette bague réalisée dans son atelier, la société C..., après avoir procédé à une saisie contrefaçon du bijou le 16 juillet 1999, l'a faite

assigner en contrefaçon et concurrence déloyale et en paiement de dommages et intérêts.

Par jugement du 18 mai 2001, le tribunal de commerce de BASTIA :

- a mis hors de cause Monsieur Bruno X...,

- a déclaré l'action recevable en la forme,

- au fond, a débouté la société C... de ses demandes envers la société D...,

- a rejeté la demande reconventionnelle de la société D...,

- a condamné la société C... à payer à la société D... la somme de 5.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- a condamné la société C... aux dépens.

Par déclaration du 4 juillet 2001, la SA C... a régulièrement interjeté appel de cette décision. * * * LES DEMANDES DES PARTIES :

Par conclusions du 18 octobre 2001 auxquelles il convient de se référer pour le détail de ses moyens, la société C... fait valoir pour l'essentiel :

- que le modèle de bague "Lien" déposé à l'O.M.P.I le 11 septembre 1995 est un modèle original et nouveau, digne de bénéficier de la protection du code de la propriété intellectuelle,

- que la société D..., en commercialisant un modèle de bague exactement semblable à celle lui appartenant, s'est rendue coupable d'actes de contrefaçon au sens des dispositions du code de la propriété intellectuelle,

- que la société D... s'est également rendue coupable d'actes de concurrence déloyale au sens de l'article 1382 du code civil.

La société C... demande :

- qu'il soit fait interdiction à la société D... de poursuivre la

commercialisation du modèle contrefaisant sous astreinte de 10.000 francs par modèle, soit 1.524,49 euros,

- la condamnation de la société D... à lui verser la somme de 300.000 francs, soit 45.734,71 euros, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de la contrefaçon et celle de 300.000 francs, soit 45.734,71 euros, en réparation du préjudice du fait des actes de concurrence déloyale,

- l'insertion de la décision à intervenir dans dix journaux au choix de la société C... et aux frais de la société D... sans que le coût total de ces insertions n'excède la somme de 250.000 francs hors taxes, soit 38.112,25 euros,

- la condamnation de la société D... à lui verser la somme de 7.622,45 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 16 novembre 2001 auxquelles il convient de se référer, la SARL D... invoque le défaut de qualité pour agir de la SA C... qui, en tant que personne morale, ne peut être auteur et l'absence totale de contrefaçon, la bague saisie ne correspondant nullement au modèle "Lien" de C....

Elle sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de la SA C... à lui payer la somme de 22.867,35 euros à titre de dommages et intérêts ainsi que 3.048,98 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. * * *

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la qualité pour agir de la société C...:

La société C... justifie avoir déposé auprès de l'O.M.P.I le modèle

de bague "Lien" le 11 septembre 1995 ainsi que le démontre le récépissé versé aux débats.

En application de l'article L 513-2 du code de la propriété intellectuelle, l'enregistrement de ce modèle lui confère un droit de propriété sur celui-ci et la société C... est présumée en être le créateur. Au surplus, il est constant qu'une personne morale bénéficie non seulement de la présomption de l'article L 113-5 du code de la propriété intellectuelle concernant les oeuvres collectives mais d'une présomption de propriété résultant de la simple exploitation de l'oeuvre.

La société C... produit aux débats de nombreux catalogues et publicités parues dans de nombreux journaux féminins qui établissent d'une façon incontestable que le modèle de bague litigieux est divulgué sous son nom.

Ainsi, la société C..., qui démontre avoir divulgué sous son nom le modèle de bague "Lien" et l'avoir déposé à l'O.M.P.I le 11 septembre 1995, a une qualité pour agir qui ne peut lui être déniée. Son action est parfaitement recevable. Sur la contrefaçon :

L'article 511-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que "seul est protégé le dessin ou modèle qui est nouveau et présente un caractère propre".

La société D... ne démontre nullement que le modèle de la société C... ne soit pas nouveau. Elle ne produit aucune pièce établissant une antériorité.

En effet, les catalogues M... Bijoux et V... qu'elle verse aux débats datent de 1999 pour le second et est sans date pour le premier et ne présentent nullement des bagues pouvant ressembler à la bague litigieuse.

C'est à tort que le premier juge a considéré que le modèle de bague litigieux était dans le domaine public.

Si une bague se présente habituellement comme un anneau décoré d'une pierre précieuse ou semi-précieuse et si le thème du lien est classique en bijouterie, la combinaison qui en est faite dans le modèle C..., qui juxtapose deux anneaux reliés entre eux par un lien en X serti de diamants, présente un caractère nouveau et original permettant de le distinguer de modèles antérieurs et lui assurant la protection prévue par le code de la propriété intellectuelle.

Il est constant que la contrefaçon s'apprécie par les ressemblances et non par les différences. En l'espèce, la ressemblance entre les deux modèles est flagrante et leur aspect est quasiment identique. Il s'agit de deux anneaux plus étroits à l'intérieur de la main qu'à l'extérieur liés entre eux par un X sur lequel sont sertis des diamants.

Peu importe que dans le cas de la bague C... il s'agisse de deux anneaux, que l'or soit très brillant et qu'il y ait deux rangées de diamants sur le lien alors que la bague D... n'est composée que d'un anneau godronné, c'est à dire ayant un pli lui donnant l'apparence de deux anneaux, qu'il n'y ait qu'une rangée de diamants sur le lien et que l'or soit plus terne. Ces différences minimes n'atténuent pas la parfaite ressemblance entre les deux bagues et le risque de confusion dans l'esprit du consommateur. En commercialisant une copie quasi servile de la bague lien de la société C..., la société D... a commis un acte de contrefaçon. Sur la concurrence déloyale :

Il est constant que l'action en concurrence déloyale fondée sur l'article 1382 du code civil peut être accueillie en présence de faits distincts des faits de contrefaçon lorsqu'en commercialisant des copies à vil prix ou à un prix moindre, l'imitateur a utilisé le travail de création d'autrui sans avoir à le financer et a cherché à

détourner la clientèle de son concurrent par cette pratique de prix bas. En l'espèce, la société D... est située sur le même boulevard que la bijouterie concessionnaire de la marque C... sur BASTIA.

La bague C... est vendue au prix de 17.600 francs et la bague D... au prix de 4.750 francs. La seule comparaison de ces deux prix suffit à établir l'acte de concurrence déloyale. Sur les demandes :

Pour mettre fin à tout acte de contrefaçon et de concurrence déloyale, il sera fait interdiction à la société D... de commercialiser la bague litigieuse sous astreinte de 5.000 francs par infraction constatée.

La saisie contrefaçon n'a porté que sur un modèle. Néanmoins, le modèle contrefait figure dans le catalogue de Monsieur Bruno C... qui fabrique pour la société D....

Il convient de fixer à la somme de 50.000 francs le préjudice subi par la société C... du fait de cette contrefaçon et à la même somme son préjudice pour les faits de concurrence déloyale, la société C... justifiant par la production de ses catalogues et la publicité faite autour de sa marque de ses investissements importants, notamment autour de sa gamme "Lien" et du préjudice que lui fait subir toute atteinte à son modèle prestigieux.

La publication de la présente décision ne sera pas ordonnée à titre de dommages et intérêts complémentaires, les sommes allouées à la société C... couvrant son préjudice et le dommage ayant eu un impact assez faible, la CORSE étant peu peuplée et très éloignée de PARIS.

Il y a lieu de fixer à la somme de 10.000 francs le montant des frais non compris dans les dépens que l'équité commande de ne pas laisser à la charge de la société C... en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

* * * PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement,

Déclare recevable l'action de la société C...,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit que le modèle "Lien" déposé à l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle le 11 septembre 1995 par la société C... bénéficie de la protection du code de la propriété intellectuelle,

Dit que la société D..., en commercialisant un modèle imitant de façon quasi-servile la bague de la société C... bénéficiant de la protection du code de la propriété intellectuelle, s'est rendue coupable d'actes de contrefaçon,

Dit que la société D... en commercialisant ladite bague à un prix nettement inférieur, s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale,

Fait interdiction à la société D... de poursuivre la commercialisation du modèle contrefait sous astreinte de SEPT CENT SOIXANTE DEUX EUROS ET VINGT CINQ CENTS (762,25 euros) par infraction constatée,

Condamne la société D... à payer à la société C... la somme de SEPT MILLE SIX CENT VINGT DEUX EUROS ET QUARANTE CINQ CENTS (7.622,45 euros) à titre de dommages et intérêts pour contrefaçon et de SEPT MILLE SIX CENT VINGT DEUX EUROS ET QUARANTE CINQ CENTS (7.622,45

euros) pour concurrence déloyale ainsi que celle de MILLE CINQ CENT VINGT QUATRE EUROS ET QUARANTE NEUF CENTS (1.524,49 euros) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Déboute la société C... du surplus de ses demandes,

Condamne la société D... aux dépens de première instance et d'appel. LE GREFFIER, LE PRESIDENT, FEUILLE DE SUIVI APRES ARRET 01/00521 Infirmation arrêt du DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DEUX

S.A. C... Rep/assistant : la SCP RIBAUT-BATTAGLINI (avoués à la Cour) Rep/assistant : Me Jean-Louis RINIERI (avocat au barreau de BASTIA) Rep/assistant : Me Serge HOFFMAN (avocat au barreau de PARIS) C/ S.A.R.L. D... Rep/assistant : Me Antoine CANARELLI (avoué à la Cour) Rep/assistant : Me Pierre-Louis MAUREL (avocat au barreau de BASTIA) DOSSIERS AVOUES MANQUANTS :

NON RENDRE LES DOSSIERS AUX AVOUES DOSSIERS RENDUS LE NOMBRE DE PHOTOCOPIES :7


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Numéro d'arrêt : 01/00521
Date de la décision : 18/11/2002
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2002-11-18;01.00521 ?
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