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27/03/2002 | FRANCE | N°2002/00113

France | France, Cour d'appel de Bastia, 27 mars 2002, 2002/00113


CABINET DE Mr DUCHAINE DOSSIER N 2002/00074 ARRET N 113 du 27 mars 2002 COUR D'APPEL DE BASTIA CHAMBRE DE L'INSTRUCTION APPEL D'UNE ORDONNANCE DE NON-LIEU A R R E T N Prononcé en chambre du conseil le 27 mars 2002. PARTIES EN CAUSE :

X.. PARTIE-CIVILE :

Antoine X... Ayant pour Avocat :

Maître X... Gilles

Avocat au Barreau de BASTIA COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré: M. LEMONDE , Président M. ROUSSEAU , Conseiller M. WEBER, Conseiller et lors du prononcé de l'arrêt M. LEMONDE , Président M. ROUSSEAU , Conseiller M. CALLOCH, Conseiller

tous désignés conformément à l'article 191 du code de procédure pénale. GREFFIER ...

CABINET DE Mr DUCHAINE DOSSIER N 2002/00074 ARRET N 113 du 27 mars 2002 COUR D'APPEL DE BASTIA CHAMBRE DE L'INSTRUCTION APPEL D'UNE ORDONNANCE DE NON-LIEU A R R E T N Prononcé en chambre du conseil le 27 mars 2002. PARTIES EN CAUSE :

X.. PARTIE-CIVILE :

Antoine X... Ayant pour Avocat :

Maître X... Gilles

Avocat au Barreau de BASTIA COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré: M. LEMONDE , Président M. ROUSSEAU , Conseiller M. WEBER, Conseiller et lors du prononcé de l'arrêt M. LEMONDE , Président M. ROUSSEAU , Conseiller M. CALLOCH, Conseiller tous désignés conformément à l'article 191 du code de procédure pénale. GREFFIER aux débats et au prononcé de l'arrêt : Mme FIRROLONI MINISTERE Y... représenté aux débats et au prononcé de l'arrêt par M. Z..., Substitut Général DEBATS

A l'audience, en chambre du conseil, le 27 février 2002 , ont été entendus : M. LEMONDE, Président, en son rapport; M. Z..., Substitut Général, en ses réquisitions; Me X... en ses observations sommaires. RAPPEL DE LA PROCEDURE

Par ordonnance du 18 décembre 2001 le Juge d'Instruction du Tribunal de Grande Instance de BASTIA a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque.

Ladite ordonnance a été notifiée aux parties, ainsi qu'à leurs conseils, conformément aux dispositions de l'article 183 alinéas 2, 3

et 4 du code de procédure pénale.

Le 21 décembre 2001 le conseil de la partie civile a interjeté appel de cette ordonnance au greffe du Tribunal de Grande Instance de BASTIA .

La date à laquelle l'affaire serait appelée à l'audience a été notifiée par lettre recommandée du 19 février 2002.

Le dossier comprenant le réquisitoire écrit de M. le Procureur Général en date du 21 février 2002 a été déposé au Greffe de la Chambre de l'instruction et tenu à la disposition des parties.

Le 26 février 2002, Maître X... a déposé un mémoire qui a été visé par le greffier, communiqué au ministère public et classé au dossier. DECISION Prise après en avoir délibéré conformément à l'article 200 du Code de Procédure Pénale EN LA FORME Considérant que cet appel, régulier en la forme, a été interjeté dans le délai légal ; qu'il est donc recevable. AU FOND Le 12 Août 1997, Antoine X..., exploitant agricole affilié à la Mutualité Sociale Agricole de la Corse (M.S.A.), déposait plainte avec constitution de partie civile contre personne non dénommée pour abus d'autorité, infraction prévue et réprimée par les articles 123 à 126 anciens, 432-1 et 432-2 du Code Pénal. Cette plainte visait à dénoncer une pratique déjà ancienne, mais officiellement portée à sa connaissance par lettre adressée le 30 Juillet 1993 par la M.S.A. au Syndicat des Propriétaires Privés Forestiers dont il était le président. Il exposait qu'en application de l'arrêté ministériel du 26 Janvier 1988 et du schéma directeur départemental des structures agricoles, l'assujettissement au régime de protection sociale agricole supposait, en Corse, la direction d'une exploitation correspondant à tout le moins à une demi surface minimum d'installation (S.M.I.), soit à 12, 5 hectares. Or une dérogation concernant l'assujettissement des éleveurs bovins avait

été mise en place sur la base de l'équivalence suivante : un hectare pouvant nourrir un bovin, un bovin suppose un hectare. Donc toute personne qui, à défaut de pouvoir justifier de la détention de 12, 5 hectares, justifiait de celle de 13 bovins était autorisée à s'inscrire à la M.S.A. en qualité d'éleveur. Antoine X... exposait avoir sollicité en vain des explications de la part de la M.S.A. et de l'autorité préfectorale. Ce n'était qu'après avoir saisi la Commission d'Accès aux Document Administratifs, qui avait conclu au caractère communicable des documents réclamés, que la M.S.A. avait admis l'existence d'une équivalence mise en place "après concertation avec la D.D.A.", soutenant que "ce système dérogatoire n'était plus en vigueur". Par lettre du 03 Août 1994, le préfet de Haute-Corse avait admis que la MSA, "pour tenir compte des spécificités corses" avait retenu l'équivalence en question, le représentant de l'Etat ajoutant : "actuellement, ce système et cette équivalence sont toujours en vigueur". Par lettre du 28 Août 1995, Antoine X... avait demandé au Préfet de faire cesser cette situation et de veiller, conformément à ses attributions, à l'exécution des lois et des règlements. Par lettre du 18 octobre 1995, le Préfet lui avait répondu "quoi qu'il en soit des errements antérieurs, la MSA s'efforce de régulariser la situation tout en faisant en sorte qu'à chaque affilié corresponde une superficie minimale, conformément à la réglementation en vigueur". C'est au vu de cette réponse, analysée comme une décision implicite de rejet, qu'Antoine X... déposait la présente plainte, exerçant parallèlement un recours pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative. *** Le 6 juillet 1998, une ordonnance de refus d'informer était rendue par le magistrat instructeur, sur réquisitions conformes du parquet. Appel ayant été interjeté par la partie civile, la Chambre d'accusation infirmait l'ordonnance entreprise. Un information était alors ouverte du chef

d'abus d'autorité, par réquisitoire introductif du 19 octobre 1999. Entendu le 03 Novembre 1999, Antoine X... mettait en cause, comme responsables du système critiqué, le Président de la M.S.A et le Directeur Départemental de l'Agriculture et de la Forêt, à l'origine de cet accord, ainsi que le Préfet, qui ne s'était pas opposé à sa mise en oeuvre et s'y était même associé, "notamment en participant à un certain nombres d'instances au cours desquelles cet accord avait été mis en oeuvre". Louis A..., administrateur provisoire de la Caisse de Mutualité Sociale Agricole de la Région Corse, était entendu le 26 Novembre 1999. Il indiquait que le système dérogatoire était toujours en vigueur et précisait qu'il s'efforçait précisément d'y mettre un terme. Il remettait la copie d'une lettre adressée le 06 Février 1989 par le Directeur de la MSA de Corse au Directeur Départemental de l'Agriculture et de la Forêt de Haute-Corse, dans laquelle était envisagée la mise en place de l'équivalence litigieuse. Ce courrier était revêtu du timbre humide "DDAF HAUTE-CORSE 17 FEV.1989-COURRIER ARRIVEE". Antoine B..., cadre de la M.S.A et rédacteur de la lettre du 06 Février 1989, indiquait que ce système dérogatoire avait été mis en place à l'initiative de la MSA et que les affiliations irrégulières s'étaient poursuivie jusqu'en 1998-1999. Jeanne C..., adjointe de Jean-Noùl FRAGAGLIA, directeur de la MSA, décédé entre-temps, déclarait avoir signé la lettre litigieuse en accord avec ce dernier à la suite d'entretiens qu'il avait eus avec le Directeur Départemental de l'Agriculture et de la Forêt. Elle précisait que l'administration n'avait jamais apporté de réponse écrite à cette lettre du 06 Février 1989. Michel D..., Directeur Départemental de l'Agriculture et de la Forêt de l'époque, contre toute attente, déclarait avoir sans doute reçu le courrier litigieux "puisqu'il portait le tampon d'arrivée à la DDAF" mais n'en avoir aucun souvenir, pas plus d'ailleurs que des

entretiens préalables avec le Directeur de la MSA. Fabien E..., Directeur Départemental de l'Agriculture et de la Forêt de Haute-Corse en exercice, était entendu le 13 Janvier 2000. Sans être en mesure d'affirmer si ce système dérogatoire avait, au moment de sa mise en place, reçu l'approbation explicite ou tacite du Préfet de l'époque, il affirmait qu'il était "néanmoins évident que cette situation était notoirement connue", ce qui n'empêchait pourtant pas Bernard BOUCAULT, Préfet de l'époque, de soutenir qu'il n'en avait jamais eu connaissance. *** A l'issue de l'information, le magistrat instructeur a rendu l'ordonnance de non-lieu ici frappée d'appel aux motifs "qu'un système illégal d'assujettissement des éleveurs bovins avait été mis en place courant 1989 avec l'assentiment des services déconcentrés de l'Etat, avec toutes les conséquences dommageables et toutes les dérives financières qui ont pu en résulter jusqu'à une période très récente puisque ce n'est qu'en 1998-99 que les services compétents ont tenté d'y mettre fin ; que pour autant, l'inertie coupable du préfet et du directeur Départemental de l'Agriculture et de la Forêt de Haute-Corse en exercice en février 1989 ne saurait permettre, sous la qualification proposée ou sous une autre, de mettre en oeuvre la responsabilité de leurs successeurs, lesquels, mis devant le fait accompli et connu des plus hautes autorités de l'Etat, n'ont été personnellement les auteurs d'aucun acte positif susceptible d'être réprimé par la loi pénale". DISCUSSION L'information judiciaire a incontestablement démontré que le système dérogatoire dénoncé constituait une nouvelle illustration du "laisser-aller" trop souvent constaté en Corse, dans des domaines variés. En l'espèce, comme le relève à juste titre la partie civile, outre les incidences négatives évidentes sur l'ordre public économique (concurrence déloyale pour les éleveurs en règle, modification artificielle des règles de fonctionnement de la MSA...),

cet accomodement avec la règlementation, conduisant à la multiplication des troupeaux auxquels ne correspond aucune parcelle à exploiter, a des effets secondaires désastreux : divagation des animaux sur les routes, incendies criminels dans le maquis, etc... On ne peut donc que condamner la mise en place d'un tel système. Il reste cependant à démontrer que celui-ci tombe sous le coup de la loi pénale. Quoique cela n'ait pas été précisé dans l'ordonnance de non-lieu, il est incontestable que les responsables de la mise en place de l'équivalence contestée (Directeur de la MSA, Directeur Départemental de l'Agriculture et de la Forêt, Préfet) ne peuvent être poursuivis, du fait de la prescription : les mesures litigieuses ayant été adoptées en 1989 et la plainte datant de 1997, l'action publique est éteinte à leur encontre. S'agissant de leurs successeurs, l'inertie dont ils ont fait preuve face à des pratiques d'ores et déjà installées à leur arrivée et notoirement connues des plus hautes autorités de l'Etat ne saurait être assimilée aux mesures positives destinées à faire échec à l'exécution de la loi, exigées par les textes réprimant l'abus d'autorité. Aucune autre qualification pénale ne paraissant pouvoir être retenue pour sanctionner cette inaction, c'est à bon droit que le magistrat instructeur a prononcé un non-lieu.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Vu les articles 177, 183, 185, 186, 194, 198, 199, 200, 207, 216, 217 et 801 du code de procédure pénale,

EN LA FORME

DECLARE L'APPEL RECEVABLE

AU FOND

LE DIT MAL FONDE

CONFIRME L'ORDONNANCE ENTREPRISE ORDONNE que le présent arrêt sera

exécuté à la diligence de M. le Procureur Général.

LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Numéro d'arrêt : 2002/00113
Date de la décision : 27/03/2002

Analyses

ATTEINTE A L'AUTORITE DE L'ETAT - Atteinte à l'administration publique commise par des personnes exerçant une fonction publique

L'infraction d'abus d'autorité prévue et réprimée par les articles 432-1 et 432-2 du Code pénal suppose l'accomplissement d'actes positifs destinés à faire échec à l'exécution de la loi. La simple inertie consistant à s'abstenir d'empêcher la pratique d'un système illégal d'assujétissement des éleveurs bovins ne saurait constituer les mesures positives exigées par ces textes


Références :

Code pénal, articles 432-1, 432-2

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2002-03-27;2002.00113 ?
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