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20/06/2001 | FRANCE | N°2001/00145

France | France, Cour d'appel de Bastia, 20 juin 2001, 2001/00145


ARRET N : 145 ---------------- 20 JUIN 2001 ---------------- X... Y... P Carine
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CORRECTIONNELLE Prononcé publiquement le MERCREDI 20 JUIN 2001, par la Chambre des Appels Correctionnels, par Monsieur LEMONDE, Président, Sur appel d'un jugement du tribunal correctionnel d'AJACCIO du 20 OCTOBRE 2000 PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR : - P... Carine, née le 7 Décembre 1962 à ELISABETHVILLE (CONGO BELGE), fille de P... Roger et de M... Chantal, de nationalité française, séparée, sans profession, demeurant LA FALEP - ... - 20000 AJACCIO, Prévenue, compara

nte, libre, Appelante, Assistée de Maître SAVELLI Joseph, avoca...

ARRET N : 145 ---------------- 20 JUIN 2001 ---------------- X... Y... P Carine
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CORRECTIONNELLE Prononcé publiquement le MERCREDI 20 JUIN 2001, par la Chambre des Appels Correctionnels, par Monsieur LEMONDE, Président, Sur appel d'un jugement du tribunal correctionnel d'AJACCIO du 20 OCTOBRE 2000 PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR : - P... Carine, née le 7 Décembre 1962 à ELISABETHVILLE (CONGO BELGE), fille de P... Roger et de M... Chantal, de nationalité française, séparée, sans profession, demeurant LA FALEP - ... - 20000 AJACCIO, Prévenue, comparante, libre, Appelante, Assistée de Maître SAVELLI Joseph, avocat au barreau de BASTIA, - X... Y..., né le 6 Août 1960 à AJACCIO, fils de X... S et de N Antoinette, de nationalité française, séparé, sans profession, demeurant V.... - actuellement sans domicile connu, Prévenu, non comparant, libre, Appelant, Sans avocat, LE MINISTÈRE PUBLIC Appelant, COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré, Président : Monsieur LEMONDE, Conseillers : Madame Z..., Madame A..., GREFFIER : Madame B..., MINISTÈRE PUBLIC : représenté aux débats et au prononcé de l'arrêt par Monsieur C..., Avocat Général. RAPPEL DE LA PROCÉDURE : LE JUGEMENT : Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré P Carine épouse X... et X... Y... coupables de corruption de mineur de 15 ans, entre 1990 et 2000, à AJACCIO et BASTELICACCIA, infraction prévue par l'article 227-22 AL.1 du Code pénal et réprimée par les articles 227-22 AL.1, 227-29, 227-31 du Code pénal, Et par application de ces articles, a condamné : P Carine épouse X... X... Y... à la peine de 15 mois d'emprisonnement dont 12 mois avec sursis et mise à l'épreuve pendant 3 ans (art.132-45-3 du CP - obligation de soins) - LES APPELS
: Appel a été interjeté par : - X... Y..., le 23 Octobre 2000, - M. le Procureur de la République, le 23 octobre 2000, contre X... Y..., - P Carine, le 23 Octobre 2000, - M. le Procureur de la République, le 23 Octobre 2000 contre P Carine, DÉROULEMENT DES DÉBATS : A l'audience publique du 23 mai 2001, le Président a constaté l'absence de X... Y..., Maître SAVELLI sollicite le huis clos, Le ministère public ne s'y oppose pas, Après délibération, la Cour rejette la demande, Ont été entendus : Monsieur le Président, en son rapport ; P Carine épouse X..., en son interrogatoire et moyens de défense ; Monsieur l'avocat général, en ses réquisitions ; Maître SAVELLI Joseph, avocat en sa plaidoirie ; P Carine épouse X... ayant eu la parole en dernier. Le Président a ensuite déclaré que l'arrêt serait prononcé le 20 JUIN 2001. DÉCISION : Rendue, après en avoir délibéré conformément à la loi,
RAPPEL DES FAITS :
Le 8 février 2000, les services de la Sous-Direction Enfance-Famille de la DISS d'AJACCIO signalaient à l'autorité judiciaire le cas de la famille X... : les parents en conflit depuis l'ouverture d'une procédure de divorce, semblaient avoir eu pendant une dizaine d'années des pratiques sexuelles (partenaires multiples, prostitution consentie de la mère, etc) gravement perturbatrices pour leurs trois enfants, ....né en 1987, ....né en 1990 et ....né en 1992.
Dans le cadre de l'enquête ouverte sur ces faits, Carine P épouse X... confirmait que, si la vie de couple avait été normale jusqu'en 1990, son mari lui avait alors demandé d'avoir des relations sexuelles avec d'autres hommes, gratuitement ou en faisant payer, ce
qu'elle avait accepté. Elle ajoutait que les enfants avaient été mis au courant et qu'ils avaient également eu l'occasion de voir des films pornographiques enregistrés par son mari ou des objets à caractère sexuel (vibromasseurs, etc...)
Lors de son audition, Y... X... confirmait les détails donnés par son épouse, précisant qu'il lui était arrivé d'enregistrer les dessins animés sur des cassettes pornographiques non intégralement effacées, lesquelles avaient été visionnées par les enfants. Il ajoutait que ceux-ci avaient eu également à leur portée divers objets sexuels ainsi que le catalogue y afférent. Enfin, il indiquait qu'il avait enlevé la porte de la chambre des parents, dans laquelle avaient lieu les relations sexuelles organisées par le couple, prenant ainsi le risque de voir les enfants arriver à l'improviste.
A l'issue de l'enquête, les prévenus étaient renvoyés devant le tribunal pour avoir à AJACCIO et BASTELICACCIA, entre 1990 et 2000, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, favorisé ou tenté de favoriser la corruption de trois enfants mineurs, ..., né le 21 novembre 1987 à AJACCIO, ...., né le 6 janvier 1990 à AJACCIO et ..., né le 10 juin 1992 à AJACCIO, en laissant à leur disposition des cassettes, ouvrages à caractère pornographique, objets sexuels et en ayant des relations sexuelles auxquelles les enfants pouvaient assister.
C'est dans ces conditions qu'a été rendu le jugement frappé d'appel. A l'audience de la Cour, Y... X... ne comparaît pas. Il n'est pas établi qu'il ait eu connaissance de la date de l'audience.
Le conseil de Carine N demande le huis clos. Le ministère public ne s'oppose pas à cette demande.
SUR LA DEMANDE DE HUIS CLOS :
L'article 400 du code de procédure pénale pose en principe que les audiences sont publiques et que c'est uniquement dans le cas où la publicité est dangereuse pour l'ordre ou les moeurs que les débats peuvent avoir lieu à huis clos. La Cour considère que tel n'est pas le cas en l'espèce et que la publicité, bien loin d'être dangereuse, est de nature à avoir un effet préventif salutaire. En conséquence, il ne sera pas fait droit à cette demande.
***
La prévenue Carine N confirme ses déclarations antérieures, soutenant que c'est son mari qui l'a pervertie. Elle précise que le couple est aujourd'hui divorcé et que les enfants ont été confiés à la mère. Son conseil, soulignant qu'en l'absence d'élément intentionnel l'infraction de corruption de mineurs n'est pas caractérisée, sollicite sa relaxe. Subsidiairement, la défense demande que la condamnation soit intégralement assortie du sursis.
Le ministère public requiert la confirmation du jugement.
MOTIFS DE LA DECISION :
Les appels, régulièrement interjetés dans les formes et délais légaux, sont recevables.
Pour entrer en voie de condamnation sur le fondement de l'article 227-22 du code pénal, le premier juge a relevé d'une part que les enfants du couple X... avaient à leur portée des objets, revues ou cassettes vidéo pornographiques, d'autre part qu'ils avaient visionné certaines de ces cassettes, enfin qu'ils pouvaient assister aux relations sexuelles ayant lieu dans la chambre conjugale du fait de l'absence de porte dans celle-ci.
En statuant ainsi, le tribunal a certes mis en évidence un comportement parental aux effets éducatifs lamentables, mais n'a pas caractérisé l'infraction de corruption de mineurs. En effet, ce délit suppose que l'auteur des faits ait eu en vue la perversion de la jeunesse ; son comportement doit être guidé par la volonté d'éveiller les pulsions sexuelles des enfants et de favoriser ainsi leur corruption, et non par la satisfaction de ses propres passions seulement. Tel n'est pas le cas en l'espèce, les prévenus ayant davantage agi par inconscience, mettant de toute évidence la moralité de leurs enfants en danger, que par volonté de pervertir ceux-ci.
De même, les relations sexuelles organisées à proximité de la chambre des enfants ne sont pas punissables en application de l'article 227-22 du code pénal, ce texte réprimant le fait, commis par un majeur, d'organiser des réunions comportant des exhibitions ou des relations sexuelles auxquelles un mineur "assiste ou participe", et non pas "serait susceptible d'assister".
Au vu de ces éléments, les éléments constitutifs du délit reproché aux prévenus ne paraissent pas réunis. En revanche, les agissements des prévenus caractérisent, de toute évidence, des manquements éducatifs tombant sous le coup de l'article 227-17 du code pénal, (le
nouveau code pénal étant seul applicable puisque les faits antérieurs à 1997 sont prescrits), qui réprime notamment, le fait par le père ou la mère de se soustraire, sans motif légitime, à ses obligations légales (en l'espèce, la protection de la moralité de l'enfant et le devoir d'éducation, tels que prévus par l'article 371-2 du code civil) au point de compromettre gravement la moralité ou l'éducation de son enfant mineur. Les faits seront donc requalifiés en ce sens et les prévenus déclarés coupables de l'infraction d'abandon moral d'enfants mineurs, qui n'est d'ailleurs pas sérieusement contestée.
Les agissements des prévenus sont particulièrement graves en ce qu'ils ont sans doute traumatisé de manière durable les enfants victimes. Eu égard à la durée des faits, à l'âge des enfants, et à l'impact psychologique occasionné, la peine d'emprisonnement partiellement assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve prononcée par le premier juge est parfaitement justifiée.
***
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant publiquement par défaut à l'égard de Y... X..., contradictoirement à l'égard de Carine P...,
Déclare les appels recevables,
Constate la prescription des faits antérieurs à février 1997,
Infirme le jugement entrepris sur la culpabilité et, statuant à
nouveau, requalifie les faits en abandon moral d'enfants mineurs, délit prévu et réprimé par l'article 227-17 du code pénal,
Déclare les prévenus coupables de cette infraction, étant précisé que les faits ont été commis entre 1997 et 2000,
Confirme le jugement sur la peine,
L'avertissement prévu par l'article 132-40 du code pénal n'a pas été donnée à la condamnée,
La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800,00 francs dont est redevable chaque condamné, ainsi que les frais de première instance ;
Le tout en application des articles 357-1 ancien, 227-17, 132-40 à 132-53 du code pénal, 496 à 520 du code de procédure pénale. LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Numéro d'arrêt : 2001/00145
Date de la décision : 20/06/2001

Analyses

ABANDON DE FAMILLE - Abandon moral d'enfant - Eléments constitutifs

Le délit de corruption de mineurs, prévu et réprimé par l'article 227-22 du Code pénal, suppose que l'auteur des faits ait eu en vue la perversion de la jeunesse, c'est-à-dire la volonté d'éveiller les pulsions sexuelles des enfants et de favoriser leur corruption, et non pas seulement la satisfaction de ses propres passions. Les premiers juges, relevant en l'espèce que les enfants d'un couple avaient à leur portée des objets, revues, ou cassettes vidéos pornographiques dont ils avaient visionné certaines, et qu'ils pouvaient assister aux relations sexuelles ayant lieu dans la chambre conjugale du fait de l'absence de porte, ont certes mis en évidence un comportement parental aux effets éducatifs lamentables, mais n'ont pas caractérisé l' infraction de corruption de mineurs. De tels agissements caractérisent, en revanche, le délit d'abandon moral de mineur prévu et réprimé par l'article 227-17 du même code


Références :

Code pénal, articles 227-17, 227-22

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2001-06-20;2001.00145 ?
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