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13/02/2001 | FRANCE | N°2002/00055

France | France, Cour d'appel de Bastia, 13 février 2001, 2002/00055


CABINET DE Mr GENTIL DOSSIER N 2002/00005 ARRET N° 55/2002 DU13 Février 2002 C/ X... Antoine Louis Joseph

ARRET sur REQUETE

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION

A R R E T

n 55/2002 La chambre de l'instruction de BASTIA réunie en chambre du conseil à l'audience du 16 Janvier 2002 a prononcé le présent arrêt en chambre du conseil le 13 Février 2002 PARTIES EN CAUSE : PERSONNES MISES EN EXAMEN : Antoine Louis X... Né le 19 mars 1939 à BONIFACIO Détenu à la Maison d'Arrêt de BORGO (M.D. du 4 octobre 2001) Ayant pour Avocats : Maître

Don Georges PINTREL et Patrick MARCIALIS

Avocats au Barreau d'AJACCIO. Jean-Jacques Louis...

CABINET DE Mr GENTIL DOSSIER N 2002/00005 ARRET N° 55/2002 DU13 Février 2002 C/ X... Antoine Louis Joseph

ARRET sur REQUETE

COUR D'APPEL DE BASTIA

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION

A R R E T

n 55/2002 La chambre de l'instruction de BASTIA réunie en chambre du conseil à l'audience du 16 Janvier 2002 a prononcé le présent arrêt en chambre du conseil le 13 Février 2002 PARTIES EN CAUSE : PERSONNES MISES EN EXAMEN : Antoine Louis X... Né le 19 mars 1939 à BONIFACIO Détenu à la Maison d'Arrêt de BORGO (M.D. du 4 octobre 2001) Ayant pour Avocats : Maître Don Georges PINTREL et Patrick MARCIALIS

Avocats au Barreau d'AJACCIO. Jean-Jacques Louis X... Né le 12 novembre 1970 à NEUF BRISACH (68) Détenu à la Maison d'Arrêt d'AJACCIO (M.D. du 4 octobre 2001) Ayant pour Avocat : Maître Pascal GARBARINI

Avocat au Barreau de PARIS Jacques Marie X... Né le 28 juin 1955 à BONIFACIO Contrôle Judiciaire (du 4 octobre 2001) Ayant pour Avocat :

Maître Valérie GUISEPPI

Avocats au Barreau d'AJACCIO. Qualification des faits : Abus de biens sociaux, présentation de comptes infidèles, travail dissimulé par dissimulation d'activité et d'emploi salarié. COMPOSITION DE LA COUR lors des débats, du délibéré et du prononcé de l'arrêt Monsieur LEMONDE, Président Monsieur ROUSSEAU, Conseiller Monsieur WEBER, Conseiller tous trois désignés en application des dispositions de l'article 191 du Code de Procédure Pénale Madame Y..., Greffier, lors des débats Madame Z..., Greffier lors du prononcé de l'arrêt Monsieur A..., Substitut Général, lors des débats Monsieur B... lors du prononcé de l'arrêt RAPPEL DE LA PROCEDURE

Par requête du 31 octobre 2001, le Conseil de Jean Jacques X... a saisi la Chambre de l'instruction aux fins de nullité de procédure.

Le Président de la Chambre de l'Instruction a rendu une ordonnance de transmission du dossier au Parquet général le 23 novembre 2001.

La date à laquelle l'affaire serait appelée à l'audience a été notifiée le 4 Janvier 2002 aux personnes mises en examen et aux avocats.

Le dossier comprenant le réquisitoire écrit de M. le Procureur Général en date du 11 janvier 2002 a été déposé au Greffe de la Chambre de l'Instruction et tenu à la disposition des parties.

Maître PINTREL, avocat d' Antoine X..., et Maître GUISEPI, avocat de Jacques X... ont déposé chacun un mémoire le 14 JANVIER 2002 à 15 heures, et 17 heures 30 qui a été visé par le greffier, communiqué au ministère public et classé au dossier. DEBATS ont été entendus M. LEMONDE, Président de Chambre, en son rapport M. A..., Substitut Général, en ses réquisitions Maître PROSPERI substituant Maître

GARBARINI avocat de Jean Jacques X..., personne mise en examen, en ses observations sommaires. Maître PINTREL, avocat d'Antoine X..., personne mise en examen en ses observations sommaires.

DECISION

Prise après en avoir délibéré conformément à l'article 200 du Code de Procédure Pénale

EN LA FORME Considérant que cette requête est régulière en la forme, qu'elle est donc recevable.

AU FOND Considérant que les faits et observations suivants résultent du dossier et des débats : Le 19 janvier 2000, le S.R.P.J. d'AJACCIO ouvraient une enquête préliminaire sur le fonctionnement de l'entreprise de promenades en mer exploitée par la famille X... à BONIFACIO et plus particulièrement sur la situation de la S.A.R.L. Christina. A l'issue de cette enquête, une information était ouverte contre X le 28 mars 2000, des chefs d'abus de biens sociaux, présentation de comptes infidèles, et travail dissimulé. Les investigations se poursuivaient alors sur commission rogatoire. Il apparaissait notamment que le créateur de l'entreprise, Antoine Louis Joseph X..., ayant été condamné par la Cour d'Assises de Corse du Sud le 25 juin 1994 à 10 ans de réclusion criminelle pour tentative de meurtre, s'était trouvé dans l'incapacité d'assurer matériellement la gestion. Il avait alors cédé ses 6 navires à son fils Jean-Jacques X..., pour un montant symbolique (370 000 francs selon le document remis par les douanes, alors qu'en juillet 1994, la flotte avait été estimée par un expert de compagnie d'assurance à une valeur de 4 millions 350 francs), et l'exploitation des navires avait été confiée à la S.A.R.L. Christina créée pour l'occasion avec son fils Jean-Jacques X... et son frère Jacques Marie X.... En septembre 1998, à la sortie de prison d'Antoine Louis Joseph X..., la

S.A.R.L. se trouvait en état de cessation de paiements. Le passif était estimé par les enquêteurs à 500 000 francs, montant constitué de dettes fiscales, sociales et bancaires. Par recoupement, projection, analyse des documents saisis, des consommations de carburant, du nombre moyen de passagers embarqués sur les six bateaux, des salaires versés et des surveillances de l'activité des vedettes, les enquêteurs évaluaient les recettes annuelles pour l'entité commerciale à 3,6 millions de francs. De nombreux éléments confortaient l'hypothèse de détournements de recettes : -

sur certaines pièces de comptabilité saisies, aucun versement en espèce n'apparaissait en août 1996, ni de janvier à juillet 1997; -

courant 1995 à 1998, Jean-Jacques X... bénéficiait régulièrement, sur son compte personnel, de virements ou de chèques en provenance de la SARL; -

le compte personnel de son épouse était de la même façon crédité de sommes importantes non justifiées (300 000 francs de 1999 à 2000); -

les billets de transport délivrés aux passagers étaient établis sur de simples coupons de papier non numérotés; -

aucune comptabilité complète n'était retrouvée par les enquêteurs tant pour la S.A.R.L. que pour les entreprises individuelles propriétaires des bateaux; -

Antoine Louis X... avait encaissé sur ses comptes bancaires, de 1998 à 2000, une somme d'environ 200 000 francs dont l'origine reste suspecte; -

Jean-Jacques X... avait réglé pour son compte sa dette à l'égard du Fonds de Garantie des victimes d'infractions (120 000 francs en décembre 1995, 80 000 francs en décembre 1998, 600 000 francs en septembre 1999) et, à chaque fois, ces opérations avaient été permises par le virement d'équivalents en espèces quelques jours avant l'émission des chèques sur le compte personnel de Jean-Jacques

X...; -

alors qu'il était en détention, ses enfants avaient réglé ses frais d'avocat (environ 300 000 francs) à partir de fonds suspects.

Les enquêteurs évaluaient le montant global des détournements de recettes à des fins personnelles, au profit de chacun des membres de la famille X..., à 600 000 francs par an de 1995 à 1998. A l'initiative de Antoine Louis Joseph X..., la S.A.R.L. déficitaire a été dissoute amiablement le 2 décembre 1999, aucun créancier ne s'étant manifesté. En 1998, les bateaux ont été revendus en dessous de leur valeur réelle par Jean Jacques X... à son épouse, son frère Antoine, sa soeur Christine et son oncle Jacques. Des indices laissent à penser que la gestion réelle du groupe pendant la période considérée a été assurée par Jean Jacques X... et son épouse. Enfin, de nombreux témoignages et documents saisis permettent d'estimer que le recours à de la main d'oeuvre non déclarée était une pratique structurelle de l'entreprise. Ainsi, seulement deux équipages avaient été déclarés en 1995, 1996 et 1998 pour six vedettes. Au vu de ces éléments, Antoine Louis Joseph X... a été mis en examen le 04 octobre 2001 en qualité de gérant de fait de la S.A.R.L. Christina, pour abus de biens sociaux, présentation de comptes infidèles, travail dissimulé, courant 1998 et 1999, et pour recel d'abus de biens sociaux commis par les gérants de la S.A.R.L. Christina courant 1995 à 1998. Il a notamment expliqué avoir dû faire face à la situation économique désastreuse de la société à sa sortie de détention n'avoir aucune connaissance comptable et assumer la responsabilité de son erreur. Jean Jacques X... a été mis en examen pour la période de 1995 à 1999 inclus en sa qualité de gérant de la S.A.R.L. Christina des chefs d'abus de biens sociaux, présentation de comptes infidèles et travail dissimulé. Il a indiqué n'avoir rien à dire. Jacques Marie X... a été mis en examen des

mêmes chefs. Il a indiqué n'avoir jamais été gérant de la S.A.R.L. mais seulement associé. *** Par la présente requête en nullité, il est sollicité, sur le fondement des articles 14 et 75 du Code de Procédure Pénale, 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, l'annulation de l'enquête préliminaire et de toute la procédure subséquente au motif que "cette enquête a été ouverte sans aucun indice préalable d'infraction pénale". Dans les mémoires déposés, les conseils de Jacques et Antoine X... s'associent à la requête. Ils soulèvent en outre un second moyen, soutenant que la nullité est encourue sur le fondement de l'article 75-2 du Code de Procédure Pénale, "le procureur de la République ayant été avisé plusieurs semaines après l'ouverture de l'enquête".

DISCUSSION Sur le premier moyen Les conditions dans lesquelles a été ouverte l'enquête préliminaire en question sont rapportées dans trois procès verbaux en date du 19 janvier 2000. Dans un premier procès verbal (D2) le lieutenant de police RASSAT se borne à mentionner qu'il reçoit pour instructions du Directeur du SRPJ de "procéder à une enquête en la forme préliminaire sur le fonctionnement de la SARL Christina sise à BONIFACIO et ayant pour gérant le dénommé Jean-Jacques X..., laquelle société serait en liquidation amiable depuis le 31 décembre 1998". Dans un deuxième procès-verbal (D3), le même officier de police judiciaire rapporte que, lors de l'assistance à une perquisition effectuée par la Division Nationale Antiterroriste le 11 janvier 2000, il a pu faire diverses constatations relatives notamment au train de vie du couple X..., apparemment disproportionné à ses revenus potentiels. Dans un troisième procès-verbal du même jour (D4), établi donc avant même qu'aucun acte de police judiciaire ait été accompli, le commissaire JACQUEME

informe le Procureur de la République de l'ouverture de l'enquête, ce magistrat ordonnant aux enquêteurs de lui rendre compte régulièrement de l'évolution du dossier. En l'état de ces constatations, la procédure n'est entachée d'aucune irrégularité. En effet, par application combinée des articles 14, 41 et 75 du Code de Procédure Pénale, l'enquête préliminaire a pour finalité la recherche et la constatation des infractions : dès lors qu'ils ont le soupçon qu'un délit est susceptible d'avoir été commis, les officiers de police judiciaire et agents de police judiciaire ont la possiblité de procéder à une enquête préliminaire, sur les instructions du Procureur de la République ou d'office, sans autre condition préalable, contrairement à ce que soutient à tort le requérant, qui manifestement confond l'enquête préliminaire et l'enquête de flagrance, dont l'article 53 du Code de Procédure Pénale définit exactement et strictement le domaine. En l'occurrence, les enquêteurs étant fondés à rechercher si des infractions à la législation sur les sociétés n'avaient pas été commises, ils pouvaient légitimement ouvrir une enquête préliminaire.

Sur le second moyen On ne saurait, en l'espèce, reprocher aux enquêteurs une violation de l'article 75-2 du Code de Procédure Pénale, ce texte n'ayant été adopté par le Parlement que plusieurs mois après l'ouverture de l'enquête. Surabondamment, on se doit de relever que l'officier de police judiciaire a avisé le procureur de

la République avant même de commencer ses investigations. Ce moyen ne peut donc qu'être rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR Vu les articles 81, 183, 185, 186, 187, 194, 197, 198, 199, 200, 207, 216, 217, et 801 du Code de Procédure Pénale.

EN LA FORME DECLARE LA REQUETE RECEVABLE

AU FOND LA DIT MAL FONDEE LA REJETTE Ordonne que le présent arrêt sera exécuté à la diligence de M. le Procureur Général. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Numéro d'arrêt : 2002/00055
Date de la décision : 13/02/2001

Analyses

ENQUETE PRELIMINAIRE

Par application combinée des articles 14, 41 et 75 du Code de procédure pénale, l'enquête préliminaire a pour finalité la recherche et la constatation des infractions. Dès lors qu'ils ont le soupçon qu'un délit est susceptible d'avoir été commis, les officiers et agents de police judiciaire ont la possibilité de procéder à une enquête préliminaire, sur les instructions du procureur de la République ou d'office, sans autre condition préalable, contrairement à l'enquête de flagrance dont l'article 53 du Code de procédure pénale définit exactement et strictement le domaine


Références :

Code de procédure pénale, articles 14, 41, 53, 75

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2001-02-13;2002.00055 ?
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