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28/03/2024 | FRANCE | N°24/00338

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre étrangers / ho, 28 mars 2024, 24/00338


COUR D'APPEL

DE

BASSE-TERRE





N° RG 24-338

N° Portalis

DBV7-V-B7I-DVOD









ORDONNANCE







Suivant appel d'une décision du juge des libertés et de la détention relative au contrôle de la régularité d'une décision de placement en rétention et demande de prolongation de rétention administrative



Devant nous, Mme Judith Deltour, président de chambre à la cour d'appel de Basse-Terre, désigné par ordonnance du premier président, assistée de Mme Yolande Mode

ste, greffier,



Vu les dispositions des articles L.614-1 et suivants, L.744-1et suivants, L742-1à L742-3, L743-3 à L743-17 et R.74 l-3, R.742-I, et R.743-1 à R.743-8 du c...

COUR D'APPEL

DE

BASSE-TERRE

N° RG 24-338

N° Portalis

DBV7-V-B7I-DVOD

ORDONNANCE

Suivant appel d'une décision du juge des libertés et de la détention relative au contrôle de la régularité d'une décision de placement en rétention et demande de prolongation de rétention administrative

Devant nous, Mme Judith Deltour, président de chambre à la cour d'appel de Basse-Terre, désigné par ordonnance du premier président, assistée de Mme Yolande Modeste, greffier,

Vu les dispositions des articles L.614-1 et suivants, L.744-1et suivants, L742-1à L742-3, L743-3 à L743-17 et R.74 l-3, R.742-I, et R.743-1 à R.743-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

Vu l'extrait individualisé du registre prévu par l'article L.744-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

Vu l'obligation de quitter le territoire français du 4 mars 2024 notifiée le 4 mars 2024 à 17h30,

Vu la décision écrite et motivée du 24 mars 2024 par laquelle le préfet a placé l'intéressé dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire à compter du 24 mars 2024 à 19h00,

Considérant que l'autorité administrative, n'est pas en mesure d'assurer le rapatriement de l'intéressé vers son pays d'origine dans les 48 heures,

Vu la requête de l'Administration aux fins de prolongation de la rétention administrative réceptionnée par le greffe du juge des libertés et de la détention le 26 mars 2024 à 14h50,

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre rendue le 27 mars 2024 à 9 h18,

Par déclaration reçue le 27 mars 2024 à 13h28, adressée par courriel, M. [H] [C] a interjeté appel de la décision.

Parties

Autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention :

M. le préfet représentant l'Etat à [Localité 4] et [Localité 2]

préalablement avisé,

ni présent, ni représenté,

Personne retenue :

X se disant M. [H] [C], né le 31 octobre 1980 à [Localité 1] ([Localité 3])

de nationalité christophienne,

préalablement avisé,

actuellement maintenu en rétention administrative

présent à l'audience

Assisté de Me Joanna Podan, avocat au barreau de la Guadeloupe, avocat commis d'office.

En présence de Mme [N] [F], interprète en langue anglaise, déclarée comprise par l'intéressé, inscrite sur la liste de la cour d'appel,

Le ministère public

Préalablement avisé,

Absent, a pris des réquisitions écrites

Débats

À l'audience publique, tenue au palais de justice, de Basse-Terre, le 28 mars 2024 à 15h00

Après rappel de l'identité des parties,

Après rappel des droits reconnus à la personne maintenue en rétention, par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pendant sa rétention, à savoir la possibilité de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin et de communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix,

Par sa déclaration d'appel communiquée le 27 mars 2024, M. [H] [C] a sollicité

- de fixer une audience,

- d'infirmer l'ordonnance,

- prononcer sa remise en liberté immédiate,

A titre subsidiaire de

- de l'assigner à résidence

- de condamner le Préfet à payer à son conseil la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il a fait valoir la recevabilité des nouveaux moyens en cause d'appel s'agissant de moyens d'irrégularité antérieurs au placement, qu'il avait eu une altercation avec son voisin, qu'il était une victime et que son interpellation avait été déloyale et entachait de nullité la procédure. Il a soutenu qu'il appartenait à la juridiction de s'assurer que les parquets des lieux de départ et d'arrivée avaient été avisés dans les plus brefs délais de son transfert, qu'il disposait d'une adresse fixe et stable depuis plusieurs années, que le passeport n'est pas obligatoire pour une assignation à résidence administrative contrairement à une assignation à résidence judiciaire, que l'absence de son passeport ne pouvait valablement fonder le refus d'assignation à résidence.

Le Ministère public, faisant valoir l'irrecevabilité de l'exception, a requis la confirmation de la décision du juge des libertés et de la détention.

Sur ce

L'appel interjeté dans les formes et délais légaux, compte tenu des dispositions de l'article 642 du code de procédure civile, est recevable.

Sur les moyens nouveaux

Si le juge judiciaire doit se prononcer, comme gardien de la liberté individuelle sur une éventuelle irrégularité, invoquée par l'étranger, affectant les procédures préalables à la rétention, s'agissant notamment des contrôles d'identité, contrôles des titres de séjour, de la garde à vue, du placement en retenue pour vérification du droit au séjour, pour être recevable, le moyen tiré d'une irrégularité affectant la procédure préalable à la rétention administrative doit :

- concerner la procédure qui précède immédiatement le placement en rétention,

- être soulevé in limine litis puisque le moyen est considéré comme une exception de procédure et doit, en vertu de l'article 74, alinéa 1er du code de procédure civile être soulevé, à peine d'irrecevabilité, avant toute défense au fond .

Autrement dit le moyen soulevé de l'éventuelle déloyauté de son interpellation est irrecevable, à défaut d'avoir été soulevé devant le premier juge.

Selon l'article L. 743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Suivant l'article L. 741-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la rétention administrative est une mesure privative de liberté de sorte que le législateur a prévu parmi les garanties entourant cette mesure l'information immédiate du procureur de la République, qu'il s'agisse de celui du lieu de décision de cette mesure ou celui du lieu de rétention.

Il résulte des pièces du dossier que le parquet a été régulièrement avisé de son transfert le 25 mars 2024 et cet avis est suffisant.

Il découle des éléments analysés que la procédure est régulière.

Sur la demande d'infirmation

En application des dispositions de l'article L741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.

Au terme de ce texte, le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;

6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;

7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;

8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.

En l'espèce, M. [C] ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, puisqu'il est entré irrégulièrement sur le territoire, qu'il ne peut pas présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il n'a pas présenté de passeport en cours de validité et qu'il n'a entamé aucune démarche de régularisation.

S'il indique avoir un enfant scolarisé à [Localité 4], il est démontré qu'il ne l'a pas reconnu et selon ses propres déclarations cet enfant a été remis à sa soeur. De plus, lors de son interpellation par les services de gendarmerie, l'intéressé était mis en cause pour des faits de violence avec arme sur un voisin, il n'était donc pas dans les locaux en qualité de victime et une convocation par officier de police judiciaire pour être jugé devant le tribunal correctionnel lui a été notifiée. L''intéressé qui est dépourvu d'un passeport en cours de validité et d'un document de voyage, ne peut pas raisonnablement soutenir qu'il présente des garanties de représentation et qu'il n'existe aucun risque qu'il se soustraie à la mesure d'éloignement.

S'agissant des diligences mises en oeuvre, l'article L.741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise qu'en tout état de cause «un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet. »

En l'espèce, un laisser-passer consulaire lui a été délivré et son voyage est prévu le 2 avril 2024.

En application des dispositions de l'article L743-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives. L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution. Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.

En l'espèce, l'intéressé qui est dépourvu d'un titre de séjour sur le territoire national et de tout document d'identité valide est en situation irrégulière sur le territoire français. Il ne remplit pas les conditions d'une assignation à résidence.

La décision critiquée doit être confirmée en ce qu'elle a ordonné la prolongation de la mesure de rétention pour une durée de 28 jours à compter de l'expiration des 48 premières heures de cette rétention administrative. M. [H] [C] est débouté de ses demandes.

M. [H] [C] qui succombe est débouté de sa demande en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par ces motifs

Statuant publiquement, après débats en audience publique et en dernier ressort

- déclarons le recours recevable ;

- relevons l'irrecevabilité de l'exception de procédure ;

- confirmons la décision critiquée en toutes ses dispositions ;

- déboutons M. [H] [C] de ses demandes ;

- disons que la présente décision sera notifiée par le greffe de la cour d'appel et transmise au procureur général.

Fait à Basse-Terre le 28 mars 2024 à 16 h 00

La présidente La greffière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre étrangers / ho
Numéro d'arrêt : 24/00338
Date de la décision : 28/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-28;24.00338 ?
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