La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/06/2023 | FRANCE | N°23/00572

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre étrangers / ho, 14 juin 2023, 23/00572


COUR D'APPEL DE BASSE - TERRE

---------------------------------------------





SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT



RG 23/572

N° PORTALIS DBV7-V-B7H-DSKR





ORDONNANCE SUR APPEL EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

DU 14 JUIN 2023



Dans l'affaire entre d'une part :



La personne faisant l'objet de soins :



Mme [I] [K] [S]

Née le 19 juin 1993 à [Localité 4]

Demeurant [Adresse 6]

[Localité 2]



Actuellement hospitalisée à

l'[3],



Assistée de Maître Murielle RODES, Avocat au barreau de la GUADELOUPE, de SAINT-MARTIN et de SAINT-BARTHELEMY,



Appelante



Et :



Le Ministère Public,





M. Le Préfet ...

COUR D'APPEL DE BASSE - TERRE

---------------------------------------------

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

RG 23/572

N° PORTALIS DBV7-V-B7H-DSKR

ORDONNANCE SUR APPEL EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

DU 14 JUIN 2023

Dans l'affaire entre d'une part :

La personne faisant l'objet de soins :

Mme [I] [K] [S]

Née le 19 juin 1993 à [Localité 4]

Demeurant [Adresse 6]

[Localité 2]

Actuellement hospitalisée à l'[3],

Assistée de Maître Murielle RODES, Avocat au barreau de la GUADELOUPE, de SAINT-MARTIN et de SAINT-BARTHELEMY,

Appelante

Et :

Le Ministère Public,

M. Le Préfet de la région Guadeloupe,

ARS de la Guadeloupe

[Adresse 5]

[Localité 1]

************

Nous, Annabelle CLEDAT, conseillère à la cour d'appel de Basse-Terre, déléguée par le premier président de cette cour pour statuer en matière de soins psychiatriques sans consentement, assistée de Prescillia ROUSSEAU, greffière,

Vu les dispositions des articles L.3211-12-4 et L.3211-12 du code de la santé publique,

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de POINTE-À-PITRE en date du 25 mai 2023 ordonnant la poursuite de l'hospitalisation complète dont Mme [I] faisait l'objet depuis le 17 mai 2023 suite à son admission dans le cadre d'une mesure de soins psychiatriques à la demande d'un tiers,

Vu la requête en mainlevée d'une mesure d'hospitalisation complète formée par Mme [I] et reçue au greffe du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de POINTE-À-PITRE le 31 mai 2023,

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de POINTE-À-PITRE en date du 1er juin 2023, rejetant la demande de mainlevée de l'hospitalisation complète de Mme [I],

Vu l'appel interjeté par Mme [I] à l'encontre de cette décision par courrier reçu au greffe de la cour d'appel le jeudi 08 juin 2023 à 16h38,

Vu le certificat médical en date du 13 juin 2023 établi par le Docteur [R],

Vu l'audience publique qui s'est tenue le 14 juin 2023 à 09 heures 00 au siège de la juridiction,

En présence de :

Mme [K] [S] [I],

Assistée de Maître Murielle RODES, avocate au barreau de la GUADELOUPE, de SAINT-MARTIN et SAINT-BARTHELEMY,

M. SCHUSTER, Vice-procureur placé délégué aux fonctions de substitut général,

M. [G] [P], cadre de santé à l'[3], et Mme [M] [Z], infirmière à l'[3],

RAPPEL DE LA PROCEDURE :

Le 17 mai 2023, Mme [I] a été admise en soins psychiatriques sans consentement sur décision du directeur de l'établissement prise à la demande d'un tiers, pour désorganisation de la pensée et des propos.

Suivant avis du 22 mai 2023, le psychiatre de l'établissement participant aux soins a indiqué que Mme [I] avait été hospitalisée pour un épisode maniaque avec troubles du comportement et refus de soins, qu'elle nécessitait un maintien en isolement et qu'elle ne pouvait être entendue par le juge.

La poursuite de cette mesure a été autorisée par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de POINTE-À-PITRE le 25 mai 2023, ce dernier ayant relevé que Mme [I] n'était pas en mesure de donner un consentement éclairé et que son état mental justifiait la poursuite de l'hospitalisation.

Par requête du 31 mai 2023, Mme [I] a sollicité la mainlevée de l'hospitalisation complète.

Aux termes de son avis motivé rédigé le 31 mai 2023, le Docteur [V], psychiatre participant à la prise en charge, a indiqué :

- que Mme [I] avait été hospitalisée en raison de troubles du comportement qui s'étaient déclenchés alors qu'elle était sortie d'hospitalisation depuis quelques jours,

- qu'elle prenait son traitement mais était excitée anormalement et produisait des troubles sur la voie publique ; qu'elle haranguait les passants sans aucun inhibition,

- que la résurgence précoce de ce trouble montrait que la première hospitalisation avait été insuffisante,

- qu'actuellement elle était calme mais que le cours de sa pensée demeurait accéléré et qu'elle restait très excitable,

- que son état clinique nécessitait la poursuite de la prise en charge en hospitalisation complète, et que la patiente pouvait être entendue.

Par ordonnance du 1er juin 2023, le juge des libertés et de la détention a rejeté sa demande, considérant à nouveau que Mme [I] n'était pas en mesure de donner un consentement éclairé et que son état mental justifiait la poursuite de l'hospitalisation.

Mme [I] A interjeté appel de cette décision le 08 juin 2023 en indiquant:

- qu'elle avait conscience de sa pathologie et que l'observance de son traitement était assurée par l'intervention d'un infirmier,

- qu'elle était malade depuis 2015, qu'elle connaissait sa pathologie et qu'elle savait l'expliquer de façon à être comprise,

- qu'elle aurait 30 ans le 19 juin, qu'elle avait des projets pour son avenir, son travail, sa famille et les gens qui l'entouraient, et qu'elle ne pensait pas pouvoir les réaliser en restant hospitalisée.

Aux termes du certificat médical daté du 13 juin 2023, le Docteur [R] a indiqué : 'Cette patiente présente des troubles psychiatriques depuis l'année 2015. Ce trouble a été caractérisé comme trouble bipolaire de type 1. Il est à déplorer de nombreuses hospitalisations depuis 2015, à raison d'environ une par an, avec ou sans rupture de traitement.

La patiente est dans le déni des troubles et des difficultés rencontrées suite à celui-ci. Ceci complique alors la prise en charge en ambulatoire et la bonne observance du traitement médicamenteux qui est nécessaire pour permettre une stabilité des symptômes.'

Lors de l'audience, Mme [I], qui a eu la parole en dernier, a maintenu qu'elle n'était pas dans le déni de sa pathologie, dont elle a décrit le fonctionnement. Elle a demandé à pouvoir quitter l'hôpital, considérant que son environnement à l'extérieur, dans son propre logement, était aussi important pour une bonne évolution que le traitement médicamenteux.

Le Ministère Public a requis la confirmation de l'ordonnance déférée, tout en indiquant que le dernier certificat médical était laconique et que Mme [I] apparaissait lucide sur sa situation.

L'avocate de Mme [I] a indiqué que, si son état n'était pas encore stabilisé, une levée de l'hospitalisation pouvait être envisagée à brève échéance, car l'hôpital n'était pas un cadre idéal pour l'évolution de cette patiente. Elle a conclu à l'infirmation de l'ordonnance et a sollicité la mainlevée de l'hospitalisation sous contrainte.

MOTIFS :

Sur la recevabilité de l'appel :

Conformément aux dispositions de l'article R.3211-18 alinéa 1 du code de la santé publique, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, dans un délai de dix jours à compter de sa notification.

L'appel formé par Mme [I] le 08 juin 2023 à l'encontre de la décision rendue le 1er juin 2023 est donc recevable.

Sur le fond :

L'article L.3212-1-1 du code de la santé publique dispose qu'une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies:

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1.

L'article L.3211-12 dispose que le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil peut être saisi, à tout moment, aux fins d'ordonner, à bref délai, la mainlevée immédiate d'une mesure de soins psychiatriques prononcée en application des chapitres II à IV du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale, quelle qu'en soit la forme.

La mainlevée ne peut donc être ordonnée que si l'une ou les deux conditions prévues par l'article L.3212-1-1 précité ne sont plus remplies à la date à laquelle le juge statue.

Par ailleurs, il convient de rappeler que le juge ne peut substituer son avis à celui des médecins, tel qu'il ressort des certificats médicaux qui lui sont produits.

En l'espèce, le Docteur [R] a indiqué dans son certificat médical du 13 juin 2023 que Mme [I] était atteinte de troubles psychiatrique depuis 2015, diagnostiqués comme des troubles bipolaires.

Elle a par ailleurs précisé que cette patiente était dans le déni des troubles, ce qui caractérise l'impossibilité pour elle de consentir aux soins dont elle fait l'objet en raison de ses troubles mentaux.

Le fait que Mme [I] ait conscience de sa maladie et sache en expliquer le fonctionnement n'est pas de nature à contredire efficacement l'appréciation du psychiatre, dans la mesure où ce dernier se réfère au déni des troubles consécutifs à la maladie, et non au déni de la maladie elle-même. Or, sur ce point, Mme [I] n'a pas spontanément évoqué lors de l'audience les problèmes comportementaux qui ont entraîné son hospitalisation d'office, se contentant d'indiquer qu'elle était alors dans une phase mixte, ce qui est tend bien à confirmer le déni des troubles graves découlant de la maladie.

En conséquence, la première condition tenant à l'impossibilité de consentir aux soins en raison des troubles mentaux est toujours remplie à ce jour.

En ce qui concerne la seconde condition, le certificat médical du 31 mai 2023 rappelait que l'hospitalisation de Mme [I] à la demande d'un tiers avait dû intervenir seulement quelques jours après une précédente hospitalisation, qui avait donc été insuffisante.

Dans son certificat médical du 13 juin 2023, le Docteur [R] indique que la bonne observance du traitement médicamenteux pour permettre une stabilité des symptômes est nécessaire, et que le déni des troubles auxquels est confrontée Mme [I] complique la prise en charge en ambulatoire.

Il se déduit nécessairement de cette appréciation que son état mental impose toujours des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète. Le constat d'une absence de stabilisation du traitement à l'heure actuelle a d'ailleurs été fait lors de l'audience tant par l'avocate de Mme [I] que par cette dernière, qui a évoqué la persistance de nombreux effets indésirables des médicaments.

En conséquence, il convient à ce jour de confirmer l'ordonnance déférée qui a rejeté la demande de mainlevée de la mesure formée par Mme [I].

PAR CES MOTIFS,

Nous, magistrat délégué par le premier président, statuant par ordonnance rendue en dernier ressort, par mise à disposition au greffe après avis donné aux parties,

Déclarons recevable l'appel interjeté par Mme [K] [S] [I],

Confirmons l'ordonnance déférée ;

Disons que les dépens resteront à la charge de l'Etat.

Fait à Basse-Terre le 14 juin 2023 à 10 heures 30.

Le greffier Le conseiller délégué


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre étrangers / ho
Numéro d'arrêt : 23/00572
Date de la décision : 14/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-14;23.00572 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award