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04/04/2023 | FRANCE | N°23/00312

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre étrangers / ho, 04 avril 2023, 23/00312


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE



ORDONNANCE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

DU 04 AVRIL 2023



R.G : N° RG 23/00312 - N° Portalis DBV7-V-B7H-DRSN



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre, décision attaquée en date du 01 Avril 2023, enregistrée sous le n° 23/00205







Par devant nous, Marie Josée BOLNET, conseillère, agissant sur délégation du premier président de la cour d'appel de Basse -Terre,



assistée de Mme Murielle LOYSON, gre

ffière,



Vu la procédure entre :



Mme [Y] [H] [L]

née Le 27 décembre 2004 à [Localité 1] (Cameroun)

de nationalité Camerounaise



actuell...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

ORDONNANCE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

DU 04 AVRIL 2023

R.G : N° RG 23/00312 - N° Portalis DBV7-V-B7H-DRSN

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre, décision attaquée en date du 01 Avril 2023, enregistrée sous le n° 23/00205

Par devant nous, Marie Josée BOLNET, conseillère, agissant sur délégation du premier président de la cour d'appel de Basse -Terre,

assistée de Mme Murielle LOYSON, greffière,

Vu la procédure entre :

Mme [Y] [H] [L]

née Le 27 décembre 2004 à [Localité 1] (Cameroun)

de nationalité Camerounaise

actuellement retenue au CRA

Assistée de Maître DJIMY Vérité, avocat du barreau de la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy, avocat choisi substitué à l'audience par Maître Olivier CHIPAN avocat du barreau de la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy

En présence de Mme [I] [X], interprète en langue anglaise, serment préalablement prêté avant les débats

et

Monsieur le Préfet de Saint-Martin, Saint-Barthélémy

autorité administrative régulièrement convoquée, non comparante.

Le Ministère Public représenté par Mme Elodie ROUCHOUSE, substitut général du parquet général, présente à l'audience et entendue en ses réquisitions

*********************************

Le 29 mars 2023, à 07h30, le centre opérationnel de la gendarmerie de [Localité 4] demandait l'intervention [Adresse 2] à [Localité 4] suite à plusieurs appels reçus signalant la présence d'étrangers en situation irrégulière, arrivés par bateau le matin, marchant dans la rue.

Huit personnes, sept femmes et un homme étaient trouvés [Adresse 2] dans une allée face au concessionnaire Suzuki « Concept Powersport ». Un contrôle d'identité de ces personnes était mené par les gendarmes. Interrogées sur la raison de leur présence à cet endroit, les forces de gendarmerie étaient informées qu'elles venaient d'arriver sur l'île en Bateau, le capitaine de ce bateau les ayant fait descendre à terre, s'était ensuite enfui.

À 8h15, ces personnes étaient informées de leur placemement en retenue judiciaire et de leurs droits.

A 8h20 Mme BELLET, vice-procureure à Saint-Martin était informée des faits.

Mme BELLET dessaisissait la gendarmerie de Saint-Martin/Saint-Barthélémy au profit de la police de l'air et des frontières de Saint-Martin, présente sur place.

Le 29 mars 2023, le préfet de Saint-Barthélémy/Saint-Martin prenait à l'encontre de Mme [Y] [H] [L], ressortissante camerounaise, un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai, assorti d'une décision de placement en rétention administrative.

Justifiant de ne pouvoir éloigné l'intéressée dans le temps de rétention initiale de quarante-huit heures, le représentant de l'Etat a, par requête du 31 mars 2023 reçue à 16h09 au greffe de la juridiction, saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre en prolongation du maintien en rétention pour vingt-huit jours.

Par ordonnance du 1er avril 2023 à 13h45, le juge des libertés et de la détention a :

- rejeté les moyens d'irrecevabilité,

- déclaré recevable la requête en prolongation administrative,

- rejeté les moyens de nullité soulevés,

- déclaré la procédure diligentée à l'encontre de Mme [Y] [H] [L] régulière,

- ordonné la prolongation de la rétention pour une durée maximale de vingt-huit jours.

Appel de cette décision a été interjeté le 02 avril 2023 à 18h51.

Par conclusions motivées reçues le 02 avril 2023, et soutenues à l'audience de plaidoirie du 03 avril 2023, il est demandé par le conseil de Mme [Y] [H] [L] :

- d'infirmer l'ordonnance déférée,

- de prononcer l'irrecevabilité de la requête aux fins de prolongation de la rétention administrative de l'intéressée,

- de déclarer nulle la procédure de rétention administrative,

- de prononcer l'irrégularité de la procédure de rétention administrative,

en tout état de cause

- de rejeter la demande de prolongation de la rétention administrative du Représentant de l'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélémy et Saint-Martin à l'encontre de Mme [Y] [H] [L].

Le ministère public a conclu au rejet des demandes et à la confirmation de l'ordonnance déférée.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la déclaration d'appel

L'appel, interjeté dans les formes et délais prévus par l'article R.741-11 du CESEDA, sera déclaré recevable.

Sur l'irrecevabilité de la requête du préfet aux fins de prolongation

Le conseil de Mme [Y] [H] [L] soutient le défaut, en annexe de la requête en application de l'article de R.743-2 du CESEDA, des pièces justificatives suivantes :

- fiche saisine de l'OFPRA,

- arrêté préfectoral portant refus au titre de l'asile et maintien en rétention,

- procédure complète du contrôle effectué par la gendarmerie de Marigot.

Ces manquements ne permettant pas au juge de pouvoir exercer son contrôle de la régularité de la procédure et des conditions de l'interpellation.

Aux termes des dispositions de l'article R.743-2 du CESEDA, à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention. Lorsque la requête est formée par l'autorité administrative, elle est acompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2. (').

Il est constant que les textes ne précisent pas les pièces justificatives utiles qui doivent accompagner la requête , à l'exception de la copie du registre de rétention. Sont réguilièrement considérées comme pièces justificatives utiles devant accompagner la requête :

- la mesure d'éloignement visée par l'arrêté,

- l'arrêté de placement en rétention,

- la copie du registre,

- le PV de notification des droits en rétention,

- le PV de contrôle d'identité,

- le PV d'interpellation.

'..

En l'espèce, il ressort du dossier que les pièces utiles à l'information du juge des libertés et de la détention, citées ci-dessus par le conseil de Mme [Y] [H] [L] qui en déplore l'absence au dossier, ont été, pour l'essentiel, ainsi établies :

Le pv n°00812/2023 établi le 29 mars 2023 par le gendarme [W] [V], officier de police judiciaire en résidence à [Localité 4] , indiquant les conditions d'interpellation de Mme [Y] [H] [L], [Adresse 2], le même jour, avec sept autres personnes, dans une allée face au concessionnaire Suzuki «concept powersport », suite à plusieurs appels reçus signalant des étrangers en situation irrégulière, arrivés par bateau. Il y est mentionné nommément ces autres personnes, interrogées sur la raison de leur présence à cet endroit. Les gendarmes sont informés qu'elles viennent d'arriver sur l'île par bateau, le capitaine les ayant fait descendre à terre et ayant abandonné ensuite le navire. A 08H15, elles ont été placées en retenue judiciaire et à 08h20, Mme BELLET, vice-procureur à Saint-Martin, magistrat de permanence, en a été informée. Le dossier a été clôturé à cette heure conformément aux directives reçues du vice-procureur, au bénéfice de la police de l'air et des frontières, présente sur place.

Il n'est rapporté aucun élément prouvant que l'appellante ait présenté une demande d'asile instruite par l'autorité administrative qui aurait conclu au rejet de la demande.

Dès lors, les seuls documents susvisés, en sus des autres pièces du dossier ont amplement participé à la parfaite information du juge des libertés et de la détention. Le moyen tiré de l'irrecevabilité de la requête du préfet aux fins de prolongation ne peut prospérer en l'état et est écarté.

Sur la nullité de la procédure de retenue administrative

Le conseil de Mme [Y] [H] [L] soutient que la procédure de retenue administrative est irrégulière et nulle à plusieurs titres :

* le procès- verbal de saisine de la gendarmerie de Marigot du 29

mars 2023 à 10H50 ne fait état d'aucun fondement juridique pour

justifier l'interpellation des individus dont fait partie Mme [Y]

[H] [L]. L'absence de texte ne permet pas de s'assurer

de la motivation du contrôle et de sa régularité et cause ainsi un

grief à la personne interpellée.

* Par ailleurs, les conditions de flagrance ne sont pas réunies.Les appels dont il est fait mention sont des appels anonymes puisque l'identité des appelants n'est pas mentionnée. Selon une jurisprudence constante, un ou des appels anonymes ne suffisent pas en eux-mêmes à constituer une raison plausible qu'une personne ait commis ou tenté de commettre une infraction. Ces appels ne sont pas corroborés par d'autres éléments d'informations ou confortés par des vérifications.

* L'absence de procès-verbal d'interpellation de Mme [Y]

[H] [L] en contravention des articles L.812-1 et

L.812-2 du CESEDA, les gendarmes et les policiers se contentant

d'indiquer dans leur procès-verbal de saisine qu'ils interpellent huit

personnes marchant dans la rue à [Adresse 5].

* La tardiveté de l'information « immédiate » du placement en

retenue administrative de Mme [Y] [H] [L] au

procureur de la République. Il n'y a aucun aucun avis à parquet.

Cette irrégularité a nécessairement portée atteinte aux droits de

l'intéressée.

* la notification tardive des droits en retenue administrative au regard des dispositions de l'article L.813-1 qui dispose que l'étranger auquel est notifié un placement en retenue est aussitôt informé dans une langue q'il comprend des motifs de son placement en retenue, de la durée maximale de la mesure et du fait qu'il bénéficie des droits suivants. Privée de liberté et retenue depuis le 29 mars 2023 à 08H15.

Le conseil de l'appelante conclut in fine que la prolongation de la

rétention administrative émanant du Préfet doit être rejetée et

Mme [Y] [H] [L] doit être remise immédiatement.

L'article L. 812-1 du CESEDA dispose que tout étranger doit être en mesure de présenter les pièces et documents sous le couvert desquels il est autorisé à circuler ou à séjourner en France à toute réquisition d'un officier de police judiciaire ou de la gendarmerie nationale et sur l'ordre et sous la responsabilité de celui-ci, des agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés à l'article 20 et au 1°de l'article 21du code de procédure pénale, dans les conditions prévues à la présente section.

L'article L. 812-2 suivant précise que les contrôles des conditions de détention, de port et de présentation des pièces et documents prévus à l'article L.812-1 peuvent être effectués dans les situations suivantes :

1° En dehors de tout contrôle d'identité, si des éléments objectifs déduits de circonstances extérieures à la personne même de l'intéressé sont de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger ; ces contrôles ne peuvent être pratiqués que pour une durée n'excédant pas six heures consécutives dans un même lieu et ne peuvent constituer un contrôle systématique des personnes circulant dans ce lieu ;

2° A la suite d'un contrôle d'identité effectué en application des articles 78-1 à 78-2-2 du code de procédure pénale, selon les modalités prévues à ces articles, si des éléments objectifs déduits de circontances extérieures à la personne même de l'intéressé sont de nature à faire apparaître sa qualité d'étanger ;

(').

En l'espèce, le procès-verbal de saisine établi le 29 mars 2023 par le gendarme [W] [V], officier de police judiciaire en application des articles 16 à 19 et articles 53 à 67 du code de procédure pénale, a permis l'interpellation et sept autres personnes suite à des appels téléphoniques reçus signalant la présence de personnes étrangères, en situation irrgulière, arrivées par bateau le matin du 29 mars, marchant dans la rue. Ces personnes, sept femmes et un homme, ont été retrouvées [Adresse 2]. A 08h15, ces personnes ont été placées en retenue judiciaire. Dans un délai extrêmement court, à 08h20, le vice-procureur de Saint-Martin en a été informé, a dessaisi les services de gendarmerie et a confié le dossier à la police de l'air et des frontières. Poursuivant l'enquête en cours le même jour, ce service a régulièrement constaté, par PV N°2023/313/03 établi à 08h40 que Mme [Y] [H] [L] se trouve dans l'impossibilité de justifier de son droit de circuler et de séjourner sur le territoire français au visa des articles L.813-1 à L.813-7 du CESEDA ; la retenue de Mme Mme [Y] [H] [L] a donc été organisée aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français. La notification des droits a immédiatement été effectuée à 08h40 (PV N°2023/313/03).

Il ressort de ces éléments et de ceux qui résultent de l'examen des autres pièces de la procédure que la rétention administrative de Mme [Y] [H] [L] est parfaitement régulière, étant en outre rappelé que le critère d'extranéité a été apprécié de manière objective par le service de gendarmerie eu égard à la présence du voilier « BARBARELLA » échoué le 29 mars 2023 sur la plage de [Adresse 5] et aux appels anonymes reçus par ce service.

Dans ces conditions, il y a lieu de débouter Mme [Y] [H] [L] de sa demande tendant à l'annulation de la mesure de rétention adminstrative ordonnée à son encontre par le préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de [Localité 3] et [Localité 4] et de confirmer l'ordonnance déférée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et en dernier ressort,

Déclarons l'appel interjeté par Mme [Y] [H] [L] recevable ;

Déboutons Mme [Y] [H] [L] de sa demande tendant à l'annulation de la mesure de rétention administrative ordonnée à son encontre par le préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de [Localité 3] et [Localité 4] ;

Confirmons l'ordonnance rendue le 1er avril 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre à l'encontre de Mme [Y] [H] [L] ;

Fait à Basse-Terre, au Palais de justice, le 04 avril 2023 à 16H05

La Greffière La conseillère déléguée


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre étrangers / ho
Numéro d'arrêt : 23/00312
Date de la décision : 04/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-04;23.00312 ?
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