La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/05/2022 | FRANCE | N°22/00502

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre étrangers / ho, 19 mai 2022, 22/00502


COUR D'APPEL DE BASSE -TERRE







Ordonnance du 20 mai 2022







N° RG 22/00502

N° Portalis : DBV7-V-B7G-DOE2







Dans l'affaire concernant :



Monsieur le Préfet de la Région Guadeloupe

Pôle départemental de l'Immigration et de l'intégration

Section de l'éloignement et du contentieux



Appelant le 18 mai 2022 à 16 heures 47 d'une ordonnance statuant sur la requête de Monsieur [K] [W] tendant à ce qu'il soit mis fin à sa rétention dans les locaux ne relev

ant pas de l'administration pénitentiaire et ordonné sa remise en liberté, rendue par le juge des libertés et de la détention de Pointe le 18 mai 2022



ni présent, ni représe...

COUR D'APPEL DE BASSE -TERRE

Ordonnance du 20 mai 2022

N° RG 22/00502

N° Portalis : DBV7-V-B7G-DOE2

Dans l'affaire concernant :

Monsieur le Préfet de la Région Guadeloupe

Pôle départemental de l'Immigration et de l'intégration

Section de l'éloignement et du contentieux

Appelant le 18 mai 2022 à 16 heures 47 d'une ordonnance statuant sur la requête de Monsieur [K] [W] tendant à ce qu'il soit mis fin à sa rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et ordonné sa remise en liberté, rendue par le juge des libertés et de la détention de Pointe le 18 mai 2022

ni présent, ni représenté

d'une part

Monsieur [K] [W],

né le 8 juin 1968 à Goodwill (Dominique)

Non comparant

Représenté par Me Joanna PODAN, avocat au barreau de la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy

Les débats ont lieu en audience publique au palais de justice de Basse ' Terre le 19 mai 2022 à 10 heures,

En l'absence du ministère public représenté par Monsieur Éric RAVENET, substitut général près Madame la procureure générale, qui a déclaré s'en remettre à la sagesse de la cour par visa inscrit au dossier transmis.

Vu l'exception de nullité soulevée in limine litis par Me [D] [F] considérant que Monsieur [K] [W] n'a pas été régulièrement convoqué à l'audience,

Vu la décision de joindre au fond cette exception ;

Vu l'ordonnance du 18 mai 2022 du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre qui a notamment :

ordonné la mainlevée de la mesure de rétention administrative dont Monsieur [K] [W] a fait l'objet depuis le 2 mai 2022,

déclaré irrecevable la demande de condamnation du préfet à une amende civile,

rappelé que l'ordonnance n'est pas suspensive de l'exécution de la mesure d'éloignement ;

Vu la déclaration d'appel de Monsieur le Préfet de la Région Guadeloupe reçue au greffe de la cour d'appel le 18 mai 2022 à 16 heures 47 ;

Vu les dispositions de articles L.743-21, L.743-22, R.743-10, R.743-11, R743-18, R743-19, R743-21 du CESEDA ;

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :

Par déclaration d'appel motivée du 18 mai 2022 valant conclusions, à laquelle il a été fait référence pour l'exposé des moyens, Monsieur le Préfet de la Région Guadeloupe demande :

d'infirmer l'ordonnance déférée,

de rejeter à la demande de remise en liberté de Monsieur [K] [W]

Monsieur le Préfet fait valoir en substance  :

Sur les diligences de l'administration entreprises pour l'examen médical

- que le juge des libertés et de la détention note dans son ordonnance que l'autorité administrative a conduit Monsieur [K] [W] au CHU le 15/05/2022 et que les médecins présents ont refusé de procéder à son examen ; qu'en effet les médecins ont estimé que le seul médecin habilité à compléter le certificat médical à transmettre au collège des médecins de l'OFII est actuellement hors du département et ne reviendra que le 23/05/2022,

- qu'il en résulte que l'autorité administrative a fait toutes les diligences qui lui incombait afin que l'état de santé de l'intéressé puisse être évalué par un médecin de l'OFII, étant rappelé qu'elle n'a aucun pouvoir de contrainte à l'égard du service médical (Cour d'appel de Paris, 12 avril 2022, n°22/01077),

- qu'en conséquence, le moyen du défaut de diligences n'est pas fondé.

Sur la compatibilité de l'état de santé avec la rétention administrative

- qu'en outre, il apparaît que Monsieur [K] [W] ayant été détecté comme étant séropositif, des démarches médicales ont été faites et qu'un suivi médicamenteux peut très bien se faire sur place et que le principe de rétention n'est pas incompatible avec des soins, qu'il convient de souligner que cette situation n'entraîne pas forcément un suivi hospitalier et un traitement médical en urgence qu'il ne saurait recevoir sur place,

- qu'il n'est pas certain que Monsieur [K] [W] ne puisse pas recevoir à la Dominique de tels soins, le pays ayant un système médical reconnu et développé,

- que Monsieur [K] [W], placé au centre de rétention administrative depuis plusieurs jours déjà, bénéficie d'un suivi médical rigoureux tel qu'en atteste son dossier médical,

- que par conséquent, le moyen selon lequel l'état de santé de l'intéressé serait incompatible avec un placement au centre de rétention n'est pas fondé et doit être rejeté.

Sur le bien-fondé de la demande de prolongation

que le maintien en rétention permettrait de donner effectivité à la mesure d'éloignement dès lors que Monsieur [K] [W] a été condamné à 15 reprises, notamment à de lourdes peines d'emprisonnement, que la commission d'expulsion considère que le risque de renouvellement d'infractions est particulièrement élevé,

que bien que l'intéressé déclare avoir une compagne et un enfant, il ressort des éléments du dossier qu'il a été condamné en 2020 à 9 mois d'emprisonnement pour des faits de violences habituelles sur sa compagne et que son enfant fait l'objet d'une placement à l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE).

En défense, Maître [D] [F] sollicite la confirmation de l'ordonnance du 18 mai 2022 et le rejet de la demande de Monsieur le préfet tendant au maintien de Monsieur [K] [W] en rétention administrative.

Elle rappelle l'état de santé de Monsieur [K] [W] et expose que ce dernier n'a pas été vu par le médecin régulateur de l'OFII ; que l'absence de consultation porte atteinte aux droits de Monsieur [K] [W] et qu'un retour à la Dominique serait dangereux pour lui compte tenu de son état de santé.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de la déclaration d'appel

Selon l'article R.743-10 du CESEDA, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel dans les vingt-quatre heures de son prononcé. Ce délai est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.

L'article R.743-11 précise qu'à peine d'irrecevabilité, la déclaration d'appel est motivée. Elle est transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel qui l'enregistre avec mention de la date et de l'heure.

En l'espèce, l'appel du Préfet de la Région Guadeloupe a été formé dans les conditions de forme et de délai prévues par les articles susvisés.

Dès lors l'appel est recevable.

Sur l'exception de nullité soulevée in limine litis

En application de l'application de l'article L.743-21 du CESEDA, les ordonnances du juge des libertés et de la détention peuvent faire l'objet d'un appel interjeté par l'étranger, le préfet ou par le ministère public.

Le greffier de la cour d'appel fait connaître aux parties et au ministère public la date de l'audience. Les parties sont convoquées par tout moyen. Il importe seulement que les parties aient été régulièrement avisées de l'audience.

En l'espèce, Monsieur [K] [W] ayant été remis en liberté par ordonnance du juge des libertés et de la détention du 18 mai 2022, avec la seule mention de Pointe-à-Pitre comme adresse sur la décision, était difficilement joignable pour la convocation à l'audience à la cour d'appel. L'examen du dossier, notamment le certificat médical établi le 11 mai 2022 par le docteur [E] [X] du service infectiologie du CHU de Pointe -à-Pitre a toutefois permis de noter l'adresse suivante déclarée par Monsieur [K] [W] en consultation : Chez LACROSSE Léopole, Carénage 97139 Les Abymes.

Les forces de police de Pointe -à-Pitre, saisies par le greffe le 18 mai 2022 aux fins de délivrer à Monsieur [K] [W] à cette adresse la convocation à l'audience du 19 mai, ont informé en retour par mail du résultat de recherches infructueuses.

Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter l'exception de nullité.

Sur le bien ' fondé de l'appel de l'autorité administrative

Selon l'article L.742-8 du CESEDA, hors des audiences de prolongation, l'étranger peut demander qu'il soit mis fin à sa rétention en saisissant le juge des libertés et de la détention.

L'article L.743-18 du même code précise que le juge des libertés et de la détention, saisi par l'étranger aux fins de mise en liberté hors des audiences de prolongation de la rétention en application de l'article L.742-8, peut rejeter la requête sans avoir préalablement convoqué les parties s'il apparaît qu'aucune circonstance nouvelle de fait ou de droit n'est intervenue depuis le placement en rétention ou sa prolongation, ou que les éléments fournis à l'appui de la demande ne permettent manifestement pas de justifier qu'il soit mis fin à la rétention.

Si l'étranger en rétention peut sur le fondement de ces articles demander au juge des libertés et de la rétention qu'il soit mis fin à sa rétention dès lors que des circonstances nouvelles de droit ou de fait le justifient, la circonstance nouvelle ne peut résulter de faits antérieurs à la décision prolongeant la rétention.

Il ressort de l'ordonnance déférée que la circonstance nouvelle est constituée par l'absence de consultation par un médecin lors du passage de l'étranger à l'hôpital le 15 mai 2022.

Monsieur [K] [W] a fait valoir en première instance qu'il n'a pas pu bénéficier d'un examen médical par un médecin délégué de l'OFII, alors qu'il en avait formulé la demande le 6 mai 2022.

En outre, il est relevé par le juge des libertés et de la détention que l'autorité administrative a effectivement conduit Monsieur [K] [W] le 15 mai 2022 au CHU et que les médecins présents ont refusé de procéder à son examen, un médecin absent ayant indiqué qu'il n'examinerait l'intéressé que le 23 mai 2022.

C 'est donc à bon droit que le juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre a considéré au regard des dispositions de l'article L. 743-12 du CESEDA que le délai entre le 6 mai et le 15 mai, soit 9 jours entre la demande de voir un médecin en vue de la saisine du collège des médecins de l'OFII et la démarche de l'administration qui n'intervient que le 15 mai, est manifestement excessive, sans qu'il soit démontré aujourd'hui par l'administration une circonstance exceptionnelle justifiant le retard de la consultation sollicitée. Dès lors, la décision de reporter l'examen médical au 23 mai 2022 porte atteinte aux droits de l'intéressé.

Il y a lieu de juger mal fondé l'appel de Monsieur le Préfet de la Région Guadeloupe, de rejeter en conséquence cet appel et confirmer l'ordonnance du 18 mai 2022 du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pointe -à-Pitre

PAR CES MOTIFS :

Nous Marie Josée BOLNET, conseillère, magistrate déléguée par ordonnance du Premier Président, assistée de Prescillia ROUSSEAU, greffière ;

Déclarons recevable l'appel de Monsieur le Préfet de la Région Guadeloupe formé à l'encontre de l'ordonnance du 18 mai 2022 du juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre ;

Rejetons l'exception de nullité soulevée in limine litis par Me [D] [F] ;

Rejetons l'appel de Monsieur le Préfet de la Région Guadeloupe ;

Confirmons l'ordonnance du 18 mai 2022 du juge des libertés et de la détention de Pointe-à-Pitre  ;

Fait à Basse -Terre le 20 mai 2022 à 9 heures 30

La GreffièreLa conseillère déléguée


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre étrangers / ho
Numéro d'arrêt : 22/00502
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;22.00502 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award