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09/09/2021 | FRANCE | N°20/007571

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 01, 09 septembre 2021, 20/007571


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

1ère CHAMBRE CIVILE

ARRET No 596 DU 09 SEPTEMBRE 2021

No RG 20/00757 - VMG/EK
No Portalis DBV7-V-B7E-DH5O

Décision déférée à la Cour : jugement au fond, du tribunal d'instance de Pointe-à-Pitre, décision attaquée en date du 19 Août 2020, enregistrée sous le no 20-000472

APPELANTE :

S.A. SA CREATIS SA CREATIS,
au capital de 52.900.000 €uros, inscrite au RCS de Lille sous le numéro B 419 446 034, dont le siège est [Adresse 2], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cet

te qualité audit siège.
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représentée par Me Agnès BOURACHOT, (toque 14) avocat au ...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

1ère CHAMBRE CIVILE

ARRET No 596 DU 09 SEPTEMBRE 2021

No RG 20/00757 - VMG/EK
No Portalis DBV7-V-B7E-DH5O

Décision déférée à la Cour : jugement au fond, du tribunal d'instance de Pointe-à-Pitre, décision attaquée en date du 19 Août 2020, enregistrée sous le no 20-000472

APPELANTE :

S.A. SA CREATIS SA CREATIS,
au capital de 52.900.000 €uros, inscrite au RCS de Lille sous le numéro B 419 446 034, dont le siège est [Adresse 2], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représentée par Me Agnès BOURACHOT, (toque 14) avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMES NON REPRÉSENTÉS :

Monsieur [N] [Q]
[Adresse 3]
[Localité 3]
signification de la déclaration d'appel et des conclusions à personne physique

Madame [W] [Q] NÉE [X]
[Adresse 3]
[Localité 3]
signification de la déclaration d'appel et des conclusions à domicile

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 799-3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile avant le 17 mai 2021.

Par avis du 17 mai 2021, le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de :

Madame Claudine FOURCADE, présidente de chambre,
Mme Valérie MARIE GABRIELLE, conseillère,
Madame Christine DEFOY, conseillère,
qui en ont délibéré

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la Cour le 24 juin 2021, llequel a été prorogé le 09 septembre 2021 pour des raisons de service.

GREFFIER

Lors du dépôt des dossiers : Mlle Claudie SOLIGNAC,Greffier placé.
Lors du prononcé : Mme Esther KLOCK, Greffier.

ARRET :

Par défaut, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du code de procédure civile.
Signé par Madame Valérie MARIE-GABRIELLE, conseillère, présidente empêchée, et par Mme Esther KLOCK, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Selon offre préalable acceptée le 06 août 2015, la SA Creatis a consenti à M. [N] [Q] et Mme [W] [X] épouse [Q] (M. et Mme [Q]), un crédit no28980000138216 d'un montant en capital de 57 500 euros remboursable en une mensualité de 178,17 euros et 143 mensualités de 679,76 euros, au taux effectif global de 8,40%, ayant pour objet un regroupement de crédits.

Par acte du 07 avril 2017, les parties ont signé un accord amiable de règlement de dette portant réaménagement de ce prêt et fixant le montant des échéances à la somme de 579,13 euros jusqu'au 30 avril 2028.

Suite à une mise en demeure demeurée infructueuse en date du 05 août 2019, par courrier recommandé avec accusé de réception du 07 octobre 2019, la SA Creatis a prononcé la déchéance du terme et mis en demeure M. et Mme [Q] de lui payer immédiatement la somme de 60 500,56 euros.

Par acte d'huissier de justice du 28 janvier 2020, la SA Creatis a fait assigner M. et Mme [Q] devant le juge des contentieux et de la protection de Pointe-à-Pitre afin d'obtenir à titre principal, leur condamnation à lui payer la somme de 60 053,56 euros assortie des intérêts au taux conventionnel au taux de 6,60%, la capitalisation des intérêts ainsi que la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 19 août 2020, le juge des contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, a :
-condamné solidairement M. et Mme [Q] à payer à la SA Creatis la somme de 34 663,45 euros pour solde du crédit no28980000138216 avec intérêts au taux légal non majoré à compter du prononcé de la présente décision,
-rejeté la demande de capitalisation des intérêts,
-rappelé que l'exécution provisoire est de droit,
-condamné solidairement M. et Mme [Q] à payer à la SA Creatis la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 20 octobre 2020, la SA Créatis a relevé appel de cette décision.

Suite à l'avis d'avoir à signifier cette déclaration d'appel délivré par notre greffe le 30 novembre 2020, la SA Creatis a fait procéder à cette signification par acte d'huissier délivré le 21 janvier 2020 à la personne de M. [Q] et à domicile pour Mme [Q], lesquels n'ont pas constitué avocat.

L'affaire dont l'ordonnance de clôture est intervenue le 5 mai 2021, a été retenue à l'audience du 17 mai 2021 puis mise en délibéré au 24 juin 2021, lequel délibéré a été prorogé pour des raisons de service au 26 juillet 2021,date de son prononcé par mise à disposition au greffe.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Par conclusions en date du 17 décembre 2020, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la SA Creatis demande à la cour, de :
-la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions, y faire droit,
-voir infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels minorant ainsi la créance de la SA Creatis et rejeté la demande de capitalisation des intérêts,
*statuant à nouveau sur ce points,
-dire n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels,
-voir ainsi condamner solidairement M. et Mme [Q] à payer à la SA Creatis la somme de 60 053,56 euros avec intérêts au taux contractuel de 6,60% l'an à compter des mises en demeure du 07 octobre 2019,
-voir ordonner la capitalisation annuelle des intérêts par application de l'article 1343-2 du code civil,
-voir à titre infiniment subsidiaire, si la juridiction de céans devait prononcer la déchéance du droit aux intérêts pour uniquement un manquement aux dispositions du code de la consommation en ce qui concerne la consultation FICP, voir alors dire et juger que cette déchéance du droit aux intérêts ne sera que partielle et conamner alors solidairement M. et Mme [Q] à payer à la SA Creatis la somme de 60 053,56 euros au taux légal à compter de la mise en demeure du 07 octobre 2019,
-en tout état de cause, voir condamner solidairement M. et Mme [Q] à payer à la SA Creatis la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La SA Creatis soutient que contrairement à l'analyse du premier juge, elle ne peut être déchue du droit aux intérêts du prêt contracté le 06 août 2015 par M. et Mme [Q], lesquels ont reconnu être restés en possession d'un exemplaire de l'offre de prêt comprenant le formulaire de rétractation prévue par le code de la consommation et leur solvabilité ayant été vérifiée avec une double consultation du fichier des incidents de paiement (FICP), avant la décision effective d'octroyer le crédit consenti.

MOTIFS

Sur la demande en paiement du crédit

En application de l'article 472 du code de procédure civile, si l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond, et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés après avoir examiné la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'était déterminé.

Selon l'article 1134 ancien du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi.

L'article L. 311-9 du code de la consommation dans sa version applicable en la cause, prévoit qu'avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l'article L.333-4, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L.333-5, sauf dans le cas d'une opération mentionnée au 1 de l'article L. 511-6 du code monétaire et financier.

L'article 13 de l'arrêté du 26 octobre 2010 dispose qu'en application de l'article L. 333-5 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu'ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes mentionnés à l'article 1er doivent, dans les cas de consultations aux fins mentionnées au I de l'article 2, conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable. Ils doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation du résultat des consultations garantissent l'intégrité des informations ainsi collectées.

En l'espèce, pour justifier de l'accomplissement de cette formalité, la SA Creatis verse au dossier deux photocopies de fiches de consultation du FICP en date des 17 juillet 2015 et 18 août 2015 concernant chacun des emprunteurs, M. et Mme [Q], portant la mention "aucun incident déclaré et aucune procédure de surendettement pour cette clef BDF".

Quand bien même la première fiche de consultation du FICP datée du 17 juillet 2015 est antérieure à l'offre de prêt réalisée le 06 août 2015, la SA Creatis justifie d'une autre consultation, également négative, à la date du 18 août 2015.

Ainsi, il est démontré que lors de la signature du crédit dont s'agit puis y compris lors de la remise des fonds, M. et Mme [Q] n'avaient pas eu d'incident bancaire. Contrairement à l'appréciation du premier juge, il y aura donc lieu de considérer que l'appelante justifie en réalité du respect de son obligation de vérification de la solvabilité des emprunteurs, ce en temps utile.

Par ailleurs, à l'énoncé de l'article L. 311-12 du code de la consommation dans sa version applicable à la cause, l'emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit comprenant les informations prévues à l'article L.311-18. Afin de permettre l'exercice de ce droit de rétractation, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit. L'exercice par l'emprunteur de son droit de rétractation ne peut donner lieu à enregistrement sur un fichier. En cas d'exercice de son droit de rétractation, l'emprunteur n'est plus tenu par le contrat de service accessoire au contrat de crédit.

La sanction du défaut de respect de cette obligation par le prêteur est la déchéance du droit aux intérêts en application de l'article 311-48 dudit code dans sa rédaction en vigueur lors de la conclusion du contrat en cause lequel énonce que le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l'emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par les articles L. 311-6 (...) ou sans remettre à l'emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-12 (...) est déchu du droit aux intérêts.

Il incombe au créancier qui réclame l'exécution d'un contrat d'en établir la conformité au regard des textes d'ordre public du code de la consommation et de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations de prêteur.

En l'espèce, s'il ressort de l'offre de prêt signée le 06 août 2015 que M. et Mme [Q] "reconnaissent rester en possession d'un exemplaire de ce contrat de crédit doté d'un formulaire détachable de rétractation", cette mention constitue seulement un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

Pour se faire, à hauteur de cour, la SA Creatis a versé au dossier la liasse du dossier de financement qu'elle aurait adressé à ces derniers de laquelle il apparaît complètement au bas des pages 26 et 28/44 de celle-ci, sous la mention "à découper selon les pointillés et retourner à Creatis [Localité 1]", un paragraphe intitulé "bordereau de rétractation - A renvoyer au plus tard 14 jours après la date d'acceptation du contrat de crédit. Le délai commence à courir du jour de votre acceptation du contrat de crédit. La présente rétractation n'est valable que si elle est adressée lisiblement et parfaitement remplie, avant l'expiration des délais rappelés ci-dessus, par lettre recommandée avec accusé de réception, à Creatis, [Localité 1] - Je soussigné: [Q] [N], [Q] [W] déclarons renoncer au contrat de crédit no28932000140031 de 57 500€ que nous avons accepté le ---. Date ? Signature de l'emprunteur et du co-emprunteur".

Aussi, cette liasse non paraphée par ces derniers et dont la preuve n'est pas rapportée qu'elle leur a été valablement adressée, ne peut suffire à être considérée comme un élément complémentaire tendant à établir la remise effective de ce bordereau de rétractation imposée au prêteur dans le cadre de ses obligations précontractuelles et de respect des droits du consommateur.

Ce faisant, en la cause, il est de juste appréciation de considérer que la SA Créatis échoue à rapporter la preuve de la remise effective dudit bordereau de rétractation à M. et Mme [Q] et par suite du respect, en sa qualité de professionnel du crédit, du texte susvisé. Dés lors, c'est à raison que le premier juge a tiré les conséquences légales de ce manquement en prononçant la déchéance du droit aux intérêts.

En conséquence, peu important que les débiteurs aient pu temporairement honorer leurs engagements, vu la sanction du manquement par le prêteur à ses obligations d'informations précontractuelles concernant le droit de rétractation en matière de crédit à la consommation, le calcul fait par la juridiction de premier ressort sera justement retenu à hauteur de cour.

Il y aura donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts et condamner solidairement M. et Mme [Q] à payer à la société Creatis le capital de 34 663,45 euros assorti des intérêts au taux légal, au titre du solde du prêt en cause.

Sur la capitalisation des intérêts

Aux termes de l'article L 311-23, alinéa 1 du code de la consommation dans sa version applicable en la cause, aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L311-24 et L. 311-25 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.

L'anatocisme prévu par l'article 1343-2 du code civil est exclu pour les prêts octroyés à un consommateur dans l'hypothèse où celui-ci est défaillant dès lors qu'aucune autre indemnité que celles prévues par le code la consommation ne peut être mise à la charge du consommateur. Ces dispositions sont d'ailleurs reprises dans le contrat en cause lequel ne prévoit pas, du reste, une telle clause de capitalisation des intérêts.

Dés lors, c'est à raison que cette demande sollicitée par la société Creatis a été rejetée par le premier juge de sorte que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

A hauteur de cour, il n'est pas inéquitable que la SA Creatis supporte les frais irrépétibles engagés par elle pour la présente instance. Cette demande sera donc rejetée sauf à préciser que les dispositions de première instance seront sur ce point confirmées.

La SA Creatis supportera les entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut, prononcé par mise à disposition au greffe ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré rendu le 19 août 2020 par le juge des contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre ;

Y ajoutant,

Rejette la demande faite au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Laisse les dépens d'appel à la charge de la SA Creatis ;

Signé par Claudine FOURCADE, président et par Esther KLOCK, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 01
Numéro d'arrêt : 20/007571
Date de la décision : 09/09/2021
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2021-09-09;20.007571 ?
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