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22/02/2021 | FRANCE | N°17/01566

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 22 février 2021, 17/01566


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE


CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 94 DU VINGT DEUX FEVRIER DEUX MILLE VINGT ET UN


AFFAIRE No : No RG 17/01566 - No Portalis DBV7-V-B7B-C4PB


Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 24 octobre 2017-Section Encadrement.


APPELANTE


S.A. BANQUE NATIONALE DE PARIS PARIBAS ANTILLES GUYANE
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Maître Florence BARRE AUJOULAT (Toque 1), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART


INTIMÉ


Monsieur [Y] [

N]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représenté parr Maître Isabel MICHEL-GABRIEL (Toque 114), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BA...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 94 DU VINGT DEUX FEVRIER DEUX MILLE VINGT ET UN

AFFAIRE No : No RG 17/01566 - No Portalis DBV7-V-B7B-C4PB

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 24 octobre 2017-Section Encadrement.

APPELANTE

S.A. BANQUE NATIONALE DE PARIS PARIBAS ANTILLES GUYANE
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Maître Florence BARRE AUJOULAT (Toque 1), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉ

Monsieur [Y] [N]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représenté parr Maître Isabel MICHEL-GABRIEL (Toque 114), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 janvier 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Rozenn Le Goff, conseiller, présidente,
Mme Gaëlle Buseine, conseiller,
Mme Annabelle Clédat, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 22 février 2021

GREFFIER Lors des débats : Mme Lucile Pommier, greffier principal.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Mme Rozenn Le Goff, conseiller, présidente, et par Mme Souriant Valérie, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [Y] [N] a été engagé par contrat à durée indéterminée à compter du 1er décembre 1981 par la SA Banque Nationale de Paris (BNP), laquelle a fusionné avec la banque Paribas le 23 mai 2000, devenant ainsi la BNP Paribas.

Monsieur [Y] [N] a ensuite intégré la BNP Paribas Guadeloupe, filiale de la société BNP Paribas.

Au dernier état de la relation contractuelle, Monsieur [Y] [N] occupait le poste de directeur d'agence moyennant un salaire mensuel brut de base de 4 883,73 euros.

Le 30 juin 2014, Monsieur [Y] [N] a fait valoir ses droits à la retraite et a perçu à cette occasion la somme de 45 367,71 euros à titre d'indemnité de fin de carrière.

Estimant qu'un complément au titre de la prime de fin de carrière lui est dû, Monsieur [Y] [N] a saisi par requête réceptionnée au greffe le 22 juin 2016, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins de versement de ce complément et de dommages et intérêts.

Le 18 octobre 2016, la société BNP Paribas Guadeloupe a fusionné avec les sociétés BNP Paribas Martinique et BNP Paribas Guyane pour devenir la société BNP Paribas Antilles Guyane.

Par jugement rendu contradictoirement le 24 octobre 2017, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre a :

- dit et jugé la demande de Monsieur [Y] [N] bien fondée,
- condamné la BNP Paribas Guadeloupe, en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur [Y] [N] les sommes suivantes :
- 18 147,07 euros au titre du complément de l'indemnité de fin de carrière,
- 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la partie défenderesse de ses prétentions,
- condamné l'employeur aux éventuels dépens de l'instance.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 13 novembre 2017, la SA Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane a formé appel dudit jugement.

Par ordonnance du 10 septembre 2020, le magistrat chargé de la mise en état a fixé le prononcé de la clôture de l'instruction au 10 décembre 2020, et a renvoyé la cause à l'audience du 4 janvier 2021 à 14h30.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 8 avril 2020 à Monsieur [Y] [N], la société Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane demande à la cour de :

- constater la recevabilité de l'appel interjeté,
- infirmer le jugement rendu le 27 octobre 2017 par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre en toutes ses dispositions,
- débouter Monsieur [Y] [N] de toutes ses demandes,
- condamner Monsieur [Y] [N] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane soutient que :

- son appel est recevable, dès lors que la société BNP Paribas Guadeloupe a fusionné avec les sociétés BNP Paribas Martinique et BNP Paribas Guyane pour devenir la société BNP Paribas Antilles Guyane,
- Monsieur [Y] [N] a été rempli de tous ses droits dans le cadre de son départ à la retraite,
- les conditions légales d'un accord de groupe ne sont pas réunies,
- les accords des 29 novembre 2002 et 15 novembre 2006 n'ont été conclus ni par l'employeur de l'entreprise dominante ou un ou plusieurs représentants mandatés à cet effet par la société BNP Paribas Guadeloupe, ni par des organisations syndicales représentatives en son sein,
- l'accord de groupe ne vise pas dans son champ d'application la société BNP Paribas Guadeloupe,
- l'accord ne prévoit pas qu'il s'applique dans les départements et collectivités d'outre-mer,
- en l'absence de toute adhésion de la société BNP Paribas Guadeloupe à l'accord d'entreprise de BNP Paribas SA, celui-ci ne saurait trouver application aux salariés de la société BNP Paribas Guadeloupe,
- les accords d'entreprise étant clairs et précis, ils sont d'interprétation stricte,
- la méthode de calcul de l'indemnité de fin de carrière alors applicable au sein de la BNP Paribas Guadeloupe, résultait d'un usage plus favorable que les dispositions de la convention collective du travail du personnel des banques de la [Localité 3], de [Localité 4] et de [Localité 5],
- la société BNP Paribas Guadeloupe n'a pas appliqué volontairement les accords d'entreprise de BNP Paribas SA,
- le contrat « IFC » conclu avec la société AXA a pour objet de couvrir le montant des indemnités de fin de carrière calculé par la société BNP Paribas Guadeloupe selon l'usage qui l'oblige, et non pas calculé selon des stipulations d'un accord d'entreprise qui ne la concernent pas,
- par les arrêts rendus le 6 janvier 2020, la cour d'appel de céans a confondu l'obligation qui résulte d'un usage, avec le contrat collectif d'assurance qui permet de faire face à cette charge financière.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 septembre 2020 à la société Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane, Monsieur [Y] [N] demande à la cour de :

- constater in limine litis, l'irrecevabilité de l'appel interjeté par la SA Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane venant aux droits de la SA BNP Paribas Guadeloupe du fait de l'absence de personnalité juridique de la SA Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane,
- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre le 24 octobre 2017,
- dire que son action est recevable,
A titre principal,
- dire et juger que l'accord d'entreprise auquel il se réfère est un accord de groupe applicable à la SA Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane venant aux droits de la SA BNP Paribas Guadeloupe,
A titre subsidiaire,
- dire et juger que l'accord d'entreprise auquel il se réfère est applicable à la SA Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane venant aux droits de la SA BNP Paribas Guadeloupe au titre de son application volontaire expresse,
En tout état de cause,
- dire et juger qu'il justifie de ses demandes,
- dire et juger qu'il a subi un préjudice,
- faire droit à l'ensemble de ses demandes,
Par conséquent,
- condamner la SA Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane venant aux droits de la SA BNP Paribas Guadeloupe à lui verser les sommes suivantes :
- 18 147,07 euros à titre d'indemnité de fin de carrière,
- 6 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Michel-Gabriel,
- débouter la SA Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane venant aux droits de la SA BNP Paribas Guadeloupe de ses demandes.

Monsieur [Y] [N] expose que :

- l'appel formé par la société est irrecevable en raison d'un défaut de personnalité juridique,
- à titre principal, l'accord du 29 novembre 2002 relatif à la caisse de prévoyance du personnel de la banque nationale de Paris ainsi que l'avenant à l'accord du 29 novembre 2002, en tant qu'accords de groupe engageant la société BNP Paribas Guadeloupe, s'appliquent à tout collaborateur d'origine BNP,
- il n'est pas nécessaire que l'accord mentionne expressément la société dans son champ d'application,
- l'applicabilité des accords de 2002 et de 2006 aux salariés de la société a été expressément reconnue par la direction de la société lors de la réunion de la délégation du personnel en date du 19 mars 2013,
- ni l'accord de 2002, ni l'avenant de 2006, ne prévoient une autre base de calcul que le salaire mensuel de base à la date du départ,
- dès lors, rien ne justifie d'appliquer une réfaction de 40 % sur le salaire mensuel de base à la date du départ pour déterminer le montant de l'indemnité de fin de carrière,
- à titre subsidiaire, la société appliquait volontairement les dispositions conventionnelles de l'accord relatif à la caisse de prévoyance du personnel de la BNP du 29 novembre 2002 et de son avenant du 15 novembre 2006,
- la société a adhéré au contrat IFC souscrit avec Axa,
- avoir subi un préjudice moral et financier car depuis la fin du mois de juin 2014, il a été privé de la somme de 18 147,07 euros au titre de son indemnité de fin de carrière, ce qui lui aurait permis d'organiser sa retraite afin d'améliorer sa qualité de vie.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la déclaration d'appel

Il résulte de la combinaison des articles 901 et 58 du code de procédure civile que pour l'appelant personne morale, il est nécessaire que la déclaration d'appel contienne l'indication de sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement.

En l'espèce, Monsieur [Y] [N] fait valoir que la société inscrite sous le numéro RCS 395 059 447 figurant sur la déclaration d'appel a fait l'objet d'une radiation le 18 octobre 2016 alors que la déclaration d'appel est datée du 9 novembre 2017. Ainsi, la déclaration d'appel identifie l'appelante par son numéro d'immatriculation au RCS qui renvoie à une société dépourvue de qualité à agir. Cette erreur entraîne une confusion sur l'identité de la société appelante. L'appelante n'existait plus à la date de la déclaration d'appel. Dès lors, l'appel est irrecevable.

Il résulte de la consultation du RPVA et de la lecture de la déclaration d'appel, que l'appel a été interjeté au nom de la SA Banque Nationale de Paris Paribas Antilles Guyane sous le numéro d'immatriculation RCS 395 059 447.

Cependant, ce numéro d'immatriculation désigne en réalité l'entreprise BNP Paribas Guadeloupe qui a été radiée le 18 octobre 2016.

Le 18 octobre 2016, la société BNP Paribas Guadeloupe a fusionné avec les sociétés BNP Paribas Martinique et BNP Paribas Guyane pour devenir la société BNP Paribas Antilles Guyane.

Cette dernière est quant à elle enregistrée sous le numéro d'immatriculation RCS 393 095 757.

Pourtant par jugement du 24 octobre 2017, la société BNP Paribas Guadeloupe était directement désignée en qualité de défenderesse par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre, alors qu'elle était devenue la société BNP Paribas Antilles Guyane depuis le 18 octobre 2016.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments, que l'irrégularité relevée par Monsieur [Y] [N] constitue une simple erreur matérielle qui ne lui fait pas grief, et qui ne saurait emporter confusion sur l'identité de la société appelante.

En conséquence, la déclaration d'appel est recevable.

Sur le champ d'application de l'accord collectif du 29 novembre 2002

Il résulte notamment de l'article L.2222-1 du code du travail, que les conventions et accords collectifs de travail, ci-après désignés « conventions » et « accords » dans le présent livre, déterminent leur champ d'application territorial et professionnel. Le champ d'application professionnel est défini en termes d'activités économiques. Les conventions et accords collectifs de travail dont le champ d'application est national s'appliquent, sauf stipulations contraires, en [Localité 3], en [Localité 6], en [Localité 7], à [Localité 8], à [Localité 9], à [Localité 5], à [Localité 4] et à [Localité 10], dans un délai de six mois à compter de leur date d'entrée en vigueur. Ce délai est imparti aux organisations syndicales de salariés et d'employeurs habilitées à négocier dans ces collectivités pour conclure des accords dans le même champ si elles le souhaitent.

Selon l'article L.2232-30 du code du travail, la convention ou l'accord de groupe fixe son champ d'application constitué par tout ou partie des entreprises constitutives du groupe.

En l'espèce, la société BNP Paribas Antilles Guyane soutient que l'accord du 29 novembre 2002 et l'avenant du 15 novembre 2006 dont Monsieur [Y] [N] revendique l'application, ne revêtent pas les caractéristiques d'un accord de groupe, les conditions légales n'étant pas réunies.

Monsieur [Y] [N] fait valoir à titre principal, que la société était tenue par les dispositions des statuts et règlement intérieur de la caisse de prévoyance, et invoque en l'occurence, l'accord relatif à la caisse de prévoyance du personnel de la Banque Nationale de Paris du 29 novembre 2002 et son avenant du 15 novembre 2006.

Cependant, l'accord collectif du 29 novembre 2002 ne vise aucune autre société que la société BNP Paribas dont le siège social est à [Localité 11] 9ème, et l'avenant du 15 novembre 2006 vise expressément « l'accord d'entreprise du 29 novembre 2002 ».

Il s'ensuit que l'accord du 29 novembre 2002 ne peut être considéré comme un accord de groupe et ne s'impose pas, à ce titre, à la société BNP Paribas Antilles Guyane.

Le jugement est infirmé sur ce point.

Sur l'application volontaire de l'accord collectif du 29 novembre 2002 et de son avenant du 15 novembre 2006

Il est constant que l'application volontaire d'une convention collective par l'employeur a la valeur d'un usage qui, tant qu'il n'a pas été dénoncé (ou remplacé par un accord collectif ayant le même objet), s'applique au salarié.

En l'espèce, la société BNP Paribas Antilles Guyane soutient que la société BNP Paribas Guadeloupe n'a pas adhéré à l'accord d'entreprise de BNP Paribas SA.

Monsieur [Y] [N] fait valoir à titre subsidiaire, que la société BNP Paribas Antilles Guyane appliquait volontairement l'accord relatif à la caisse de prévoyance du personnel de la BNP du 29 novembre 2002 et de son avenant du 15 novembre 2006.

Il résulte des éléments du dossier que la société BNP Paribas Guadeloupe, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société BNP Paribas Antilles Guyane, a entendu appliquer volontairement l'accord du 29 novembre 2002 et son avenant du 15 novembre 2006 :

- L'adhésion au contrat IFC souscrit auprès de la société Axa

Le préambule de l'avenant à l'accord du 29 novembre 2002 en date du 15 novembre 2006 est rédigé dans les termes suivants :

« Le présent avenant a pour objet de modifier partiellement les dispositions de l'article 3 section II Prime de fin de carrière de l'accord relatif à la caisse de prévoyance du personnel de la Banque Nationale de Paris du 29 novembre 2002.

Après avoir rappelé que :
- Les primes de fin de carrière des collaborateurs d'origine BNP font l'objet de provisions actualisés annuellement conformément à la réglementation et en application des normes IAS.
- Ces provisions sont composées d'une part des actifs financiers de la caisse de prévoyance du personnel de la Banque Nationale de Paris et d'autre part de provisions constituées par la banque.
- Le rôle actuel de la caisse de prévoyance est d'assurer une gestion optimale de ses actifs financiers, et dans la limite de ceux ci, d'assurer le paiement, pour les salariés d'origine BNP, de la quote-part de l'indemnité de fin de carrière versées au-delà du barème prévu par la convention collective de la banque.
- Le nombre et l'augmentation des départs en retraite à partir de 2007 vont modifier les flux financiers relatifs au paiement des prestations. En conséquence, les règles de gestion actuelles (70 % obligatoires, 30 % actions) appliquées à la gestion mobilière de la caisse ne peuvent pas être conservées en l'état.
- La BNP Paribas a souscrit auprès d'Axa en 2005 pour plusieurs de ses filiales, un contrat d'assurance groupe spécifiquement dédié à la couverture des indemnités de fin de carrière.

Il a été décidé :
Article I – Transfert de la totalité de l'actif financier de la caisse de prévoyance du personnel de la Banque Nationale de Paris sur le contrat IFC souscrit chez Axa
Par le présent avenant, il est convenu de transférer la totalité de l'actif financier de la caisse de prévoyance BNP sur le contrat IFC souscrit chez Axa, en couverture des indemnités de fin de carrière de salariés de BNP Paribas SA. Ce transfert pourra intervenir en une ou plusieurs fois. L'extinction des actifs de la caisse de prévoyance BNP entraînera sa dissolution.

Article 2 – Financement des primes de fin de carrière des salariés d'origine BNP
Les prestations seront payées soit par prélèvement sur les actifs du fonds dans le cadre du contrat souscrit auprès d'Axa, soit par reprise des provisions constituées par la banque, les deux formules étant cumulables. La banque se réserve la possibilité de transférer sur le contrat Axa une partie des provisions qu'elle a constituées au titre des primes de fin de carrière.
En cas de dénonciation du présent avenant ou de l'accord du 29/11/2002, la banque s'interdit de décompter le solde des actifs du fonds constitués par transfert des actifs de la caisse de prévoyance, dans le cadre du contrat souscrit avec Axa, des provisions constitués au titre du paiement des indemnités de fin de carrière prévues par la convention collective de la banque. (...) »

En l'espèce, il est établi que la société BNP Paribas Guadeloupe a adhéré au contrat IFC négocié auprès de la société Axa par la société BNP Paribas et que ses salariés ont cotisé dans le cadre de ce contrat.

Cette adhésion démontre la volonté de la société BNP Paribas Guadeloupe d'appliquer volontairement l'accord susmentionné et son avenant, ayant précisément pour objet de financer le paiement des indemnités et primes de fin de carrière, pour palier la dissolution de la caisse de prévoyance et assurer aux salariés le bénéfice de prestations plus favorables.

Cette volonté est confirmée par deux procès-verbaux de réunion et un message électronique émanant de la direction de la société BNP Paribas Guadeloupe.

- Le courriel et les compte-rendus de réunion des représentants du personnel

Le procès-verbal dressé lors de la réunion de la délégation du personnel du mardi 19 mars 2013 mentionne notamment, l'échange suivant :

« CFDT : l'avenant du 15/11/2006 à l'accord d'entreprise du 29 novembre 2002 entre la BNP Paribas et les organisations syndicales représentatives sur le plan national, relatif à la caisse de prévoyance du personnel est-il appliqué dans notre groupe ?
Direction : cet avenant est bien appliqué au sein de BNP Paribas Guadeloupe. »

Le procès-verbal dressé lors de la réunion du comité d'entreprise du 21 mars 2013 indique que la direction a rappelé le mode de calcul de la prime de fin de carrière, lequel correspond à celui qui figure dans l'accord du 29 novembre 2002 et son avenant du 15 novembre 2006, à l'exception du coefficient de minoration.

Par courriel en date du 23 septembre 2013, la société a également reconnu « qu'après sa filialisation, BNP Paribas Guadeloupe a maintenu sans signer d'accord, le barème IFC appliqué avant la filialisation, c'est-à-dire le barème BNP issu de la caisse de prévoyance BNP, avec comme assiette de rémunération, la rémunération du salarié, minorée de 40 % pour vie chère (...) »

Il apparaît ainsi que la société BNP Paribas Guadeloupe a manifesté la volonté claire et non équivoque d'appliquer volontairement l'accord collectif du 29 novembre 2002 et son avenant du 15 novembre 2006, dont elle a toutefois modifié les règles de calcul, en minorant d'office le salaire de base de 40 %.

Force est de constater cependant, que les bulletins de salaire produits par Monsieur [Y] [N] ne laissent apparaître aucune ligne qui isolerait lesdits 40 % alors, au surplus, que toutes les cotisations payées par le salarié, y compris à l'IFC, ont toujours été assises sur la totalité du salaire, sans une quelconque minoration.

La cour considère que, dans ces conditions, l'accord collectif du 29 novembre 2002 et son avenant du 15 novembre 2006 s'imposent tels quels à la société BNP Paribas Guadeloupe.

Sur les demandes financières de Monsieur [Y] [N]

L'ancienneté de Monsieur [Y] [N] était de 32 ans, 6 mois et 29 jours au jour de son départ en retraite.

L'article 3.2-a de l'accord du 29 novembre 2002 prévoit que la prime est calculée en fonction du salaire mensuel de base à la date du départ, en précisant que la mensualité de base correspond à un treizième du salaire annuel de base.

Monsieur [Y] [N] percevant à la date de son départ, en juin 2014, un salaire de base mensuel de 4 883,73 euros sur 14,5 mois, son salaire annuel de base s'élève à la somme de 70 814,08 euros.

En conséquence, le salaire de base mensuel à retenir pour le calcul de la prime est égal à un treizième de cette somme, soit 5 447,46 euros.

Le nombre maximal de mensualités de base étant de 11,66 selon le texte précité, la prime de fin de carrière due à Monsieur [Y] [N] s'élève à la somme de 63 517,38 euros.

Monsieur [Y] [N] n'ayant perçu que la somme de 45 367,71 euros, il sera fait droit à sa demande de versement de la somme de 18 147,07 euros à titre de complément d'indemnité de fin de carrière.

Le jugement est confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts

Selon l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Le préjudice moral et financier subi par Monsieur [Y] [N] et résultant du retard de paiement de la totalité de l'indemnité de fin de carrière, sera indemnisé conformément aux dispositions de l'article précité, par les intérêts au taux légal qui ont couru sur le montant de sa créance depuis la demande en justice devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, soit le 13 septembre 2016.

Le jugement est réformé sur ce point.

Sur les autres demandes

Au regard de la solution apportée au règlement du litige, il convient de débouter la société BNP Paribas Antilles Guyane de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a alloué à Monsieur [Y] [N] la somme de 1 500 euros pour ses frais irrépétibles.

Les dépens sont mis à la charge de la société BNP Paribas Antilles Guyane.

De surcroît, les dépens de l'instance d'appel sont mis à la charge de la société BNP Paribas Antilles Guyane.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre le 24 octobre 2017 sauf en ce qu'il a considéré l'accord du 29 novembre 2002 comme un accord de groupe, et condamné la société BNP Paribas Antilles Guyane à verser à Monsieur [Y] [N] la somme de 2000 euros à titre de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau,

Dit que l'accord du 29 novembre 2002 ne peut être considéré comme un accord de groupe,

Dit que la SA BNP Paribas Antilles Guyane a fait une application volontaire de l'accord collectif du 29 novembre 2002 et de son avenant du 15 novembre 2006,

Dit que la condamnation de la SA BNP Paribas Antilles Guyane à payer à Monsieur [Y] [N] la somme de 18 147,07 euros à titre de complément d'indemnité de fin de carrière, devra produire intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2016,

Y ajoutant,

Dit que les dépens de l'instance d'appel sont à la charge de la SA BNP Paribas Antilles Guyane,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Numéro d'arrêt : 17/01566
Date de la décision : 22/02/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-02-22;17.01566 ?
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