COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
1ère CHAMBRE CIVILE
ARRET No 860 DU 09 DECEMBRE 2019
No RG 19/00223 - CF/EK
No Portalis DBV7-V-B7D-DB5U
Décision déférée à la Cour : jugement au fond, origine tribunal d'instance de POINTE-A-PITRE, décision attaquée en date du 30 novembre 2018, enregistrée sous le no 11-17-0009
APPELANTE :
SA SOCRAM BANQUE
[...]
[...]
Représentée par Me Robert VALERIUS de la
SCP CHEVRY-VALERIUS, (TOQUE 97) avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
INTIMÉS NON REPRÉSENTÉS :
Madame M... K...
[...]
[...]
signification de la déclaration d'appel le 17 avril 2019 par dépôt en l'étude et des conclusions le 20 juin 2019 à personne physique habilitée
Monsieur C... K...
[...]
[...]
signification de la déclaration d'appel le 17 avril 2019 par dépôt en l'étude et des conclusions le 24 juin 2019 par dépôt en l'étude
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 779-3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile avant le 07 octobre 2019.
Par avis du 07 octobre 2019, le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de :
Madame Claudine FOURCADE, présidente de chambre,
Mme Valérie MARIE GABRIELLE, conseillère,
Madame Christine DEFOY, conseillère,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la Cour le 09 décembre 2019.
GREFFIER
Lors du dépôt des dossiers : Mme Esther KLOCK, greffière
ARRET :
Par défaut, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablemnt avisées. Signé par Madame Claudine FOURCADE, présidente de chambre, et par Mme Esther KLOCK, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRETENTIONS
Selon offre de contrat [...] émise le 5 mai 2014 et acceptée le 7 mai 2014, la société SOCRAM BANQUE SA a consenti à Monsieur C... K... et Madame M... B... épouse K... un prêt de 22 500 euros au taux de 5,26% l'an (Taux effectif global de 6,86 %), remboursable en 72 mensualités de 384,94 euros avec assurance, pour l'acquisition d'un véhicule automobile de marque TOYOTA de type YARIS.
Les échéances de septembre, octobre et novembre 2016 n'ayant pas été honorées, la société SOCRAM BANQUE a, par lettre recommandée avec avis de réception en date du 7 décembre 2016, mis en demeure les coemprunteurs de payer la somme de 1 210,33 euros, leur notifiant à défaut de règlement sous quinze jours, la sanction de déchéance du terme.
Suivant actes d'huissier en date des 12 mai 2017, 18 octobre 2017, 5 février 2018 et 13 septembre 2018, la société SOCRAM BANQUE a assigné Monsieur C... K... et Madame M... K... devant le tribunal d'instance de Pointe à Pitre en paiement solidaire du solde de prêt et dommages et intérêts.
Par jugement réputé contradictoire en date du 30 novembre 2018, le tribunal d'instance de Pointe à Pitre a:
- déclaré l'action de la société anonyme SOCRAM BANQUE en paiement de l'offre de prêt [...] acceptée le 7 mai 2014 recevable,
* en conséquence,
- prononcé la déchéance pour la société anonyme SOCRAM BANQUE de son entier droit aux intérêts concernant l'offre de prêt affecté à l'achat du véhicule TOYOTA YARIS acceptée le 7 mai 2014,
- débouté la société anonyme SOCRAM BANQUE de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la société anonyme SOCRAM BANQUE aux dépens,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Le 18 février 2019, la société SOCRAM BANQUE a interjeté appel de cette décision.
La déclaration d'appel a été signifiée en l'étude de l'huissier le 17 avril 2019, à Monsieur C... K... et Madame M... K..., intimés non constitués, et ce en application de l'article 902 du code de procédure civile, laquelle n'a pas constituée avocat.
Le 13 juin 2019, la société SOCRAM BANQUE a remis au greffe ses conclusions, qu'elle a fait notifier à Monsieur C... K... le 24 juin 2019 (en l'étude de l'huissier) et à Madame M... K... le 20 juin 2019 (à personne).
L'ordonnance de clôture est intervenue le 30 septembre 2019 fixant le dépôt des dossiers le 7 octobre 2019, date à laquelle l'affaire a été mise en délibéré jusqu'au 9 décembre 2019, date de son prononcé par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu qu'en application de l'article 1315 du code civil ancien (devenu 1353 du code civil), celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ;
Qu'au soutien de ses prétentions, la société SOCRAM BANQUE verse aux débats:
- une offre de contrat [...] émise le 5 mai 2014 et acceptée le 7 mai 2014 par les coemprunteurs C... K... et M... K..., prêt de 22 500 euros au taux de 5,26% l'an (Taux effectif global de 6,86 %), remboursable en 72 mensualités de 384,94 euros pour l'acquisition d'un véhicule automobile de marque TOYOTA de type YARIS,
- le détail des échéances
- une attestation d'adhésion à l'assurance facultative,
- les informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs,
- un tableau d'amortissement,
- la consultation du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers ( FICP),
- une demande de mise à disposition des fonds et la facture du véhicule automobile Toyota Yaris,
- une fiche de dialogue revenus et charge, deux passeports et une déclaration de revenus 2013 le 24 mai 2014auprès du service des impôts particuliers Basse-Terre Sud,
- le détail de la créance au 7 décembre 2016,
- les lettres adressées le 7 décembre 2016, aux co-emprunteurs portant déchéance du terme à défaut de règlement dans le délai de quinze jours, (avis de réception signé le 28 décembre 2016 par Madame M... K... et présenté le 13 décembre 2016 mais non réclamé par M.C... K...),
- le détail de créance du 22 février 2017,
- un extrait du compte ;
Qu'au regard des articles cumulés L. 311-22-2 et L. 311-24 du code la consommation, alors en vigueur, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur est tenu d'informer l'emprunteur qu'il encourt une déchéance du terme et ainsi le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés et d'une éventuelle indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance ; qu'en l'espèce, l'article 12 du contrat intitulé Défaillance de l'emprunteur stipule: "la créance de Socram Banque deviendra exigible quinze jours après mise en demeure préalable adressée par lettre recommandée en cas de défaut de paiement d'une seule échéance à la date fixée au contrat. (...)"; qu'en adressant à chacun des deux coemprunteurs une mise en demeure, portant déchéance du terme à défaut de règlement dans le quinze jours, l'organisme prêteur a satisfait aux conditions contractuelles et légales lui imposant la délivrance préalable d'une mise en demeure avant constat de la déchéance du terme, à défaut de paiement, ce sans autre formalité; qu'en effet, le la déchéance du terme pouvant être sous condition, la lettre par laquelle le prêteur exige le règlement des échéances impayées et prévient l'emprunteur que, «à défaut de règlement de ce montant sous quinze jours, et si votre dossier est toujours en cours, j'appliquerai la déchéance du terme de votre crédit» vaut ainsi, à l'échéance annoncée, déchéance du terme, sans autre formalisme ;
Que dès lors, la déchéance du terme, régulièrement acquise 15 jours après les mises en demeure susvisées, a eu pour effet de rendre exigible la totalité des sommes restant dues;
Que toutefois, au titre d'un crédit à la consommation, il appartient au créancier qui réclame des sommes de justifier de la régularité de l'opération, en produisant spontanément les documents nécessaires, et notamment :
- l'original du contrat de crédit,
qu'en l'espèce, il n'est communiqué qu'en copie, ce qui fait échec à toute vérification de la lisibilité et de la hauteur des caractères prescrites par l'article R 311-5, I, al. 1 devenu R 312-10 al. 1 et 2 du Code de la consommation, ce qu'avait déjà relevé le juge de première instance ,
- le double de la notice d'assurance, conformément à. L 311-12, devenu L 312-29 du code de la consommation;
que cette pièce ne peut être suppléée par la mention de la reconnaissance par les emprunteurs de sa réception insérée dans l'offre de contrat de crédit ,
- s'agissant d'une opération supérieure à 3.000 €, la copie des pièces justificatives (identité, domicile et revenu) exigées par l'article D 311-10-3 devenu D 312-8 du Code de la consommation,,
- qu'en effet, avant de conclure le contrat de crédit, quel qu'en soit le montant, le prêteur doit, en application de l'article art. L 311-9 devenu L 312-16 du code de la consommation vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur ; que de simples déclarations non étayées faites par un consommateur ne peuvent, en elles-mêmes, être qualifiées de suffisantes si elles ne sont pas accompagnées de pièces justificatives ; qu'ici, il n'est versé, outre les passeports des emprunteurs, qu'une déclaration de revenu 2013 au nom M. C... K... et Mme M... K... née B... le 24 mai 2014; que cette pièce qui concerne les revenus de manière indifférenciée au cours de l'année antérieure et repose sur une simple déclaration ne saurait valoir justification des revenus à la date de conclusion du contrat, suivant offre de crédit du 5 mai 2014 et acceptée le 7 mai 2014 ;
Qu'en raison des manquements précités, le prêteur doit être déchu du droit aux intérêts ;
Attendu que conformément à l'article L 311-48 al. 3 devenu L 341-8 du Code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, le débiteur n'est tenu qu'au remboursement du seul capital restant dû ; que cette déchéance s'étend donc aux intérêts et à tous leurs accessoires ;
Que les sommes dues se limiteront dès lors à la différence entre le montant effectivement débloqué d'un montant de 22 500 € et les règlements effectués par ce dernier soit la somme de 10 393,38 euros, tels qu'ils résultent du décompte, soit à la somme de 12 106,62 euros ;
Attendu qu'afin d'assurer l'effectivité du droit de l'Union européenne dont les dispositions nationales ne sont que la transposition, exigence réaffirmée par l'arrêt CJUE du 27/03/2014, C-565/12, il convient d'écarter toute application des articles 1153, devenu 1231-6 du code civil et L 313-3 du code monétaire et financier et de dire que cette somme ne produira aucun intérêt, même au taux légal ;
Que dès lors, les consorts K..., dont il n'est pas établi la libération, seront condamnés à payer à l'organisme bancaire la somme de 12 106,62 euros ;
Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la société SOCRAM BANQUE la charge des frais irrépétibles qu'elle a pu exposer ; que le caractère abusif du comportement des coemprunteurs n'étant justifié par aucune pièce, les deux demandes indemnitaires formulées par l'organisme bancaire seront rejetées ; qu'en revanche, en application des dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile, les époux K... B... , parties perdantes sont condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par décision par défaut, mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société anonyme SOCRAM BANQUE de l'ensemble de ses demandes, et l'a condamnée aux dépens,
Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées :
Condamne solidairement Madame M... B... épouse K... et Monsieur C... K... à payer à la société SOCRAM BANQUE SA la somme de 12 106,62 euros,
Déboute la société SOCRAM BANQUE du surplus de ses demandes,
Condamne Madame M... B... et Monsieur C... K... aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel, lesquels pourront être recouvrés par la société CHEVRY VALERIUS SCP d'avocats conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Et ont signé le présent arrêt.
Le greffier Le président