COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
1ère CHAMBRE CIVILE
ARRÊT No 819 DU 25 NOVEMBRE 2019
R.G : No RG 18/01255 - VMG/EK
No Portalis DBV7-V-B7C-DAI7
Décision déférée à la Cour : Ordonnance de mise en état du tribunal de grande instance de BASSE TERRE, décision attaquée en date du 02 août 2018, enregistrée sous le no17/00526
APPELANTE :
SARL LES BRUYERES
SARL au capital social de 7 622,45 euros,
agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice
Madame O... J... X...
née R... domiciliée es qualité audit siège
[...]
[...]
[...]
[...]
Représentée par Me Myriam WIN BOMPARD, (toque 114) avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
INTIMÉS :
Monsieur K... L...
[...]
Représenté par Me Michel PRADINES de la SCP PAYEN - PRADINES, (toque 74) avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
Monsieur A... N...
Chez M. V... D... N... -
[...]
SCI LOUISIANA
[...]
SCI ROGERS
[...]
[...]
Représentés tous les trois par Me Béatrice FUSENIG de la SELARL DERUSSY-FUSENIG-MOLLET, (toque 48) avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
INTIMÉ NON REPRÉSENTÉ :
Monsieur I... C...
[...]
[...]
signification déclaration d'appel et conclusions le 12 octobre 2018 à personne physique
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 Juin 2019, en audience publique, devant la cour composée en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile de Mme Valérie MARIE-GABRIELLE, chargée du rapport, a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés. Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré, composé de :
Mme Valérie MARIE GABRIELLE, conseillère,
Madame Christine DEFOY, conseillère,
Mme Joëlle SAUVAGE, conseillère,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 16 septembre 2019 prorogé le 25 novembre 2019 pour des raisons de service.
GREFFIER :
Lors des débats : Mme Maryse PLOMQUITTE, greffière
Lors du prononcé de l'arrêt : Mme Esther KLOCK, greffière.
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile. Signé par Mme Valérie MARIE GABRIELLE, conseillère, et par Mme Esther KLOCK, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par ordonnance rendue le 02 août 2018, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Basse-Terre :
-a déclaré nulle et de nul effet l'assignation délivrée par la société Les Bruyéres à M. K... L... par acte en date du 08 juin 2017,
-a rejeté la société Les Bruyères de ses demandes reconventionnelles,
-a condamné la société Les Bruyères à payer à M. K... L... la somme de 1 200 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-s'est dessaisi de la présente procédure au profit de la chambre détachée de Saint-Martin, désormais compétente pour en connaître,
-a réservé les dépens.
Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 28 septembre 2018, la société Les Bruyères a relevé appel de cette décision.
Suite à l'avis donné par le greffe le 08 octobre 2018 informant les appelants de la fixation de l'affaire à bref délai, la société Les Bruyères a fait respectivement signifier à M. I... C..., cette déclaration d'appel puis ses conclusions par actes des 12 octobre 2018 (à personne) et 26 novembre 2018 (en l'étude de l'huissier instrumentaire), lequel n'a pas constitué avocat.
La SCI Louisiana, la SCI Rogers et M. A... Q... ainsi que M. K... L... ont constitué avocat et conclu.
L'affaire a été retenue à l'audience du 03 juin 2019.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Vu les dernières conclusions identiques remises au greffe le 20 novembre puis le 08 décembre 2018, auxquelles il est renvoyé pour plus ample informé, aux termes desquelles la société Les Bruyéres demande à la cour, de :
-dire justifié l'appel interjeté,
-infirmer en conséquence la décision entreprise en toutes dispositions,
-statuant à nouveau, débouter M. L... de toutes ses demandes, fins et conclusions, -condamner M. L... à payer à la société les Bruyéres les sommes de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner M. L... aux entiers dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel distraits au profit de maître Win-Bompard, avocat postulant.
Vu les dernières conclusions remises au greffe le 07 janvier 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample informé, aux termes desquelles M. K... L... demande à la cour, de :
-prononcer sa mise hors de cause par suite de la vente intervenue le 19 septembre 2018,
-déclarer recevable la société Restaurant Developpement en son intervention volontaire en ce qu'elle vient aux droits de M. L... par suite de la vente du 19 septembre 2018,
-déclarer la société Les Bruyères mal fondée en son appel pour les causes sus énoncées,
-confirmer l'ordonnance du 02 août 2018 en toutes ses dispositions,
-condamner la société Les Bruyères à payer à la société Restaurant Developpement la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel.
Vu les dernières conclusions remises au greffe le 14 décembre 2018, auxquelles il est renvoyé pour plus ample informé, aux termes desquelles la SCI Louisiana, la SCI Rogers, M. A... Q... demandent à la cour, de:
-déclarer mal fondé l'appel interjeté et confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Basse-Terre,
-condamner la société Les Bruyères à leur payer, chacun, la somme de 1 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la SELARL DFM représentée par maître Fusenig.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la mise hors de cause de M. L... et l'intervention volontaire de la société Restaurant Developpement
Rapportant suivant attestation du 19 septembre 2018 de M. Z... G..., notaire associé à [...], de la vente le même jour, par M. K... L... à la SCI Restaurant Developpement de l'ensemble immobilier dénommé l'[...] sis [...], du lot numéro 23 des biens et droits immobiliers vendus comprenant le droit d'user de deux servitudes décrites à l'acte et la licence d'exploitation de débit de boissons et spiritueux obtenue le 16 février 1984, il y a lieu de considérer que c'est à raison que la SCI Restaurant Developpement demande d'accueillir son intervention volontaire.
Cependant, à ce stade de la procédure, vu les prétentions des parties notamment celles dirigées à l'endroit de M. K... L..., la mise hors de cause de ce dernier, sera écartée.
Sur la nullité de l'assignation
L'article 648 du code de procédure civile dispose que tout acte d'huissier de justice indique indépendamment des mentions prescrites par ailleurs, sa date (...), si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui le représente légalement (...).
L'article 114 du même code prévoit qu'aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public, la nullité ne pouvant être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
L'article 115 du code de procédure civile ajoute que la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.
Sur ces fondements, il est admis que la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée pour vice de forme qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité.
En l'espèce, il est constant que l'assignation introductive de cette instance délivrée le 08 juin 2017 à l'initiative de la société Les Bruyéres indique que le siège social de cette dernière est sis "[...]".
Or, il apparaît des actes des procédures antérieures ayant opposé les parties que cette adresse est inexacte puisque procès-verbal de recherches infructueuses y a été dressé le 03 octobre 2017 par Mme F... P... huissier de justice chargée de notifier à l'appelante un arrêt du 28 novembre 2016 rendu par la cour d'appel de Basse-Terre.
Cependant, cette mention erronée constituant une nullité de forme a été couverte par le changement de siège social opéré suivant assemblée générale de la société Les Bruyéres tenue le 01 septembre 2017, désormais fixé "[...] chez Ideali [...]", enregistré le 20 avril 2018 au greffe du tribunal mixte de commerce de Basse-Terre et figurant sur la déclaration d'appel du 28 septembre 2018.
A cet effet, il est produit le contrat de domiciliation et de prestations de services conclu le 01 septembre 2017 entre la société Idéali et la société Les Bruyéres de sorte que l'identification de cette dernière est établie sans preuve du caractère fictif ou frauduleux de ce nouveau siège social. Aussi, M. K... L... ne peut se prévaloir de l'absence du maintien d'un compte bancaire professionnel au nom de cette dernière ou de difficultés antérieures, lesquelles n'ont pas empêché le paiement le 04 mars 2017 par le biais des comptes Carpa des avocats de la somme de 5238 euros due par l'appelante et les risques envisagés d'un défaut d'exécution de la décision à intervenir ne rapportant pas en l'espèce la preuve d'un grief au sens des articles précités.
Dés lors, il y aura lieu de considérer que l'assignation introductive d'instance délivrée le 08 juin 2017 est régulière. En conséquence, l'ordonnance querellée sera infirmée de ce chef.
Sur les dommages et intérêts
II est admis que l'exercice d'une action en justice constitue un droit fondamental qui ne peut engager la responsabilité de celui qui l'intente qu'en cas d'abus caractérisé et l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute.
En l'espèce, les éléments de la cause ne suffisent pas à caractériser une quelconque mauvaise foi ou faute commise par les intimés ayant dégénéré en abus de droit devant les premiers juges ou devant la cour.
Dés lors, la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par la société Les Bruyères sera rejetée.
Sur les demandes accessoires
L'article 700 du code de procédure civile prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
En l'espèce, vu les circonstances de la cause, il n'est pas inéquitable que chacune des parties supporte les frais irrépétibles engagés par elle pour la présente instance. Ces prétentions seront donc rejetées.
L'adresse erronée du siège social de la SARL Les Bruyères figurant dans l'acte introductif d'instance ayant initialement motivé la présente procédure, les dépens de l'instance resteront en l'espèce à la charge de l'appelante.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe ;
Reçoit la SCI Restaurant Developpement en son intervention volontaire ;
Infirme l'ordonnance querellée rendue le 02 août 2018 par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Basse-Terre sauf en ce qu'elle s'est dessaisit au profit de la chambre détachée de Saint-Martin ;
Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,
Déclare régulière l'assignation délivrée le 08 juin 2017 par la société Les Bruyères ;
Déboute M. K... L... et la SCI Restaurant Developpement de leurs demandes contraires ;
Déboute la société Les Bruyéres de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Rejette les demandes faites au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que les dépens d'appel demeureront à la charge de l'appelante ;
Ecarte les autres demandes plus amples ou contraires.
Et ont signé le présent arrêt.
La Greffière La Présidente