COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
1ère CHAMBRE CIVILE
ARRET No 655 DU 16 SEPTEMBRE 2019
No RG 18/00698 - VMG/EK
No Portalis DBV7-V-B7C-C63K
Décision déférée à la Cour : jugement au fond, origine tribunal de grande instance de BASSE-TERRE, décision attaquée en date du 03 mai 2018, enregistrée sous le no 18/00023
APPELANT :
Monsieur Y... E...
[...]
[...]
Représenté par Me Augusta HUREAUX, (toque 28) avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
INTIMÉ NON REPRÉSENTÉ :
Monsieur B... K...
[...]
signification par dépôt en l'étude
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 779-3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile avant le 15 avril 2019.
Par avis du 15 avril 2019, le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de :
Mme Valérie MARIE GABRIELLE, conseillère,
M. Serge GRAMMONT, conseiller,
Mme Joëlle SAUVAGE, conseillère,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la Cour le 1er juillet 2019 et prorogé le 16 septembre 2019.
GREFFIER
Lors du dépôt des dossiers : Mme Maryse PLOMQUITTE, greffière.
Lors du prononcé de l'arrêt : Mme Esther KLOCK, greffière.
ARRET :
Par défaut, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées. Signé par Mme Valérie MARIE GABRIELLE, conseillère, et par Mme Esther KLOCK, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte d'huissier de justice délivré le 22 décembre 2017, M. Y... E..., soutenant avoir été victime le 23 juillet 2012 d'une agression violente de la part de B... K..., a fait assigner ce dernier, aux fins d'indemnisation des préjudices subis.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 03 mai 2018, le tribunal de grande instance de Basse-Terre a constaté que le jugement réputé contradictoire du tribunal de grande instance de Basse-Terre en date du 7 janvier 2016 est non avenu en l'absence de signification dans le délai de 6 mois de sa date, constaté la reprise de la procédure, rejeté la demande de dommages et intérêts formée par M. E..., rejeté la demande fondée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné celui-ci aux dépens de l'instance.
Le premier juge a considéré que M. E... ne rapportait pas la preuve de la faute commise par K... et le lien de causalité avec le préjudice décrit.
Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 30 mai 2018, M. E... a relevé appel de cette décision.
Suite à l'avis du greffe délivré le 05 juillet 2018, la déclaration d'appel et les dernières conclusions de l'appelante ont été signifiées le 26 juillet 2018 en l'étude de l'huissier instrumentaire. M. K... n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 01 avril 2019.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Les dernières conclusions de M. E... en date du 18 juillet 2018, au visa de l'article 1382 du code civil (devenu 1240 du même code), auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, peuvent se résumer ainsi qu'il suit.
M. E... demande d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 mai 2018 par le tribunal de grande instance de Basse-Terre en ce qu'il a rejeté ses demandes pourtant fondées et justifiées, statuant à nouveau, dire et juger que M. K... a commis une faute à l'encontre de M. E... par la commission le 23 juillet 2012 à Vieux-Habitants de faits de violence ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas 8 jours sur sa personne, condamner par voie de conséquence M. K... à lui verser la somme totale de 17 490 euros à titre de dommages et intérêts venant en réparation des préjudices subis (soit 7490€ au titre des frais dentaires - 10 000€ au titre du pretium doloris), le condamner à lui verser une indemnité de procédure de 2 000 euros ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article 1382 du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 applicable aux faits de la cause) dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.
A l'appui de ses prétentions, M. E... expose que le 23 juillet 2012, vers 10 heures, alors qu'il passait la débroussailleuse dans son jardin, il a été violemment frappé par son voisin, M. K..., est tombé au sol, a perdu connaissance et ne s'est réveillé qu'à cause des hurlements de son épouse laquelle a été également violentée ; s'il il a eu le réflexe pour se défendre, de sortir de sa poche un petit couteau et a été poursuivi pour des faits de violences sur la personne de M. S... I..., intervenu pour les séparer, M. K... a été condamné par jugement du 20 février 2014 du tribunal de police de Basse-Terre à une amende contraventionnelle de 200 euros de sorte qu'il rapporte la preuve d'une faute commise par celui-ci sur sa personne, les préjudices par lui subis étant importants notamment plusieurs hématomes et 2 dents cassées ; suivant jugement réputé contradictoire du 07 janvier 2016 du tribunal de grande instance de Basse-Terre, il a obtenu les sommes de 7 490 euros pour les séquelles physiques, 2 500 euros au titre de son préjudice moral et 3 000 euros au titre du pretium doloris mais faute d'avoir fait signifier ce jugement dans le délai de 6 mois en raison de l'état de santé détérioré de sa femme, ce dernier est devenue caduque, d'où la réitération de la citation primitive du 27 mars 2015 ; contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, la faute de M. K... ressort clairement des pièces du dossier tout comme le lien de causalité avec les dommages à lui causés, pour certains encore persistants comme des maux de tête, des douleurs quotidiennes à l'orteil, ou la crainte d'être agressé à son domicile.
Il résulte des pièces du dossier notamment de l'enquête de gendarmerie de Vieux-Habitants comprenant les auditions des intéressés et des témoins de la scène que des violences réciproques ont bien été commises le 23 juillet 2012 entre M. E... et M. K.... Des auditions de ces derniers recueillies par les gendarmes, il apparaît que M. K... a reconnu ces faits, déclarant "avec mes mains, j'ai donné un coup de poing dans le visage du monsieur ; lorsqu'il était par terre, je lui ai donné deux coups de poing ; c'est après que le mari de ma soeur, M. I... est arrivé pour nous séparer, j'étais le seul à le frapper (...)".
Ainsi, M. E... et M. K... étaient condamnés le 20 février 2014 par le tribunal de police de Basse-Terre pour des faits de violences ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas 8 jours, l'appelant à deux amendes contraventionnelles de 200 euros à titre de peine principale (M. E... étant également poursuivi pour des faits de même nature à l'endroit de M. I...) et M. K... à une amende contraventionnelle de 200 euros à titre de peine principale. Il est clair que l'enquête de gendarmerie et le jugement précité (en dépit de l'omission du nom de la victime dans l'incrimination concernant M. K...) permet de retenir une faute commise par ce dernier à l'origine des dommages causés à M. E..., les procés-verbaux d'auditions relatant sans équivoque que c'est exclusivement M. K... qui est l'auteur des coups portés à celui-ci.
Aussi, il est décrit dans le certificat médical du 23 juillet 2012 de M. U... L... médecin généraliste que ces violences ont causé à M. E..., un gros hématome frontal de 6cm de diamètre, un hématome médian de la lèvre supérieure de 3cm, une perte de 2 dents inférieures droites (incisive et pré-molaire dont photographies prises dans le cadre de l'enquête pénale jointe au dossier), un gonflement de l'articulation métatarso-phalangienne du gros orteil droit et un hématome occipital de 10 cm de diamètre, blessures entraînant une incapacité de travail de 5 jours.
Aussi, contrairement au raisonnement retenu par le premier juge, vu la concordance entre les déclarations précitées de M. K... aux forces de l'ordre, la condamnation de celui-ci pour des violences contraventionnelles et les constatations médicales précitées, il est rapporté un lien de causalité direct, certain et exclusif entre la faute retenue à l'endroit de M. K... et le préjudice subi par M. E....
Au soutien de ses demandes d'indemnisation, ce dernier produit une proposition de traitement de M. Serge Q..., chirurgien dentiste pour un montant total de 7490 euros concernant 04 dents. Aussi, la preuve des violences retenues commises par l'intimé, étant à l'origine de la perte de 2 dents de M. E..., il est de juste appréciation de lui allouer la moitié de cette somme soit 3 745 euros .
Au titre des lésions décrites supra et des souffrances endurées, il est de juste appréciation de faire droit à la demande présentée par M. E... à hauteur de la somme de 3 000 euros.
En conséquence, le jugement querellé sera infirmé en toutes ses dispositions et M. K... déclaré responsable au sens des dispositions de l'article 1382 du code civil précité des préjudices subis par M. E... suite aux violences à lui portées le 23 juillet 2012 et sera condamné à les réparer.
L'équité commande que l'intimé supporte une partie des frais irrépétibles engagés par M. E... pour la présente instance.
Succombant, M. K... supportera les entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par défaut, par arrêt mis à disposition au greffe ;
Infirme le jugement rendu le 03 mai 2018 en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts et fondée sur l'article 700 du code de procédure civile formées par M. Y... E... et condamné celui-ci aux dépens de l'instance ;
Statuant à nouveau de ces chefs infirmés ;
Déclare que M. B... K... a commis une faute à l'encontre de M. Y... E... par la commission le 23 juillet 2012 à Vieux-Habitants de faits de violence ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas 8 jours sur la personne de ce dernier ;
Condamne en conséquence M. B... K... à verser à M. Y... E... les sommes de 3 745 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des frais dentaires et de 3 000 euros au titre des souffrances endurées soit au total 6 745 euros;
Condamne M. B... K... à verser à M. Y... E... une indemnité de procédure de 1 000 euros ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profit de Me Augusta Hureaux avocate au barreau de Guadeloupe, constituée en lieu et place de Me Jennifer Thomas ;
Déboute M. Y... E... de ses demandes plus amples ou contraires.
Et ont signé le présent arrêt.
La Greffière La Présidente