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15/09/2008 | FRANCE | N°06/00574

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 15 septembre 2008, 06/00574


1ère CHAMBRE CIVILE

ARRÊT No 734 DU 15 SEPTEMBRE 2008

R. G : 06 / 00574

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de POINTE A PITRE, décision attaquée en date du 02 Février 2006, enregistrée sous le no 02 / 01466

APPELANTS :

Monsieur Etienne Thomas X...


...

97123 BAILLIF

Monsieur Rony Jacques X...


...


...

97160 LE MOULE

Représentés par la SCP PAYEN-PRADINES (TOQUE 74), avocat au barreau de GUADELOUPE



INTIMEE :

SARL POMONA IMPOR

T
dont le siège social est 2 et 4 Place du Général de Gaulle
92160 ANTONY
Représentée par la SCP PANZANI-FRESSE (TOQUE 20), avocat postulant au barreau de G...

1ère CHAMBRE CIVILE

ARRÊT No 734 DU 15 SEPTEMBRE 2008

R. G : 06 / 00574

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de POINTE A PITRE, décision attaquée en date du 02 Février 2006, enregistrée sous le no 02 / 01466

APPELANTS :

Monsieur Etienne Thomas X...

...

97123 BAILLIF

Monsieur Rony Jacques X...

...

...

97160 LE MOULE

Représentés par la SCP PAYEN-PRADINES (TOQUE 74), avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMEE :

SARL POMONA IMPORT
dont le siège social est 2 et 4 Place du Général de Gaulle
92160 ANTONY
Représentée par la SCP PANZANI-FRESSE (TOQUE 20), avocat postulant au barreau de GUADELOUPE et plaidant par Me Isabelle RAFFAELLI, avocat au barreau de FORT DE FRANCE.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Juin 2008, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Robert PARNEIX, président de chambre, président,
Mme Marie-Hélène CABANNES, conseillère, rapporteure,
Mme Claudine PAGE, vice-présidente placée faisant fonction de conseillère.
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 15 SEPTEMBRE 2008.

GREFFIER :

Lors des débats : Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative, faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du NCPC.
Signé par Mme Marie-Hélène CABANNES, Conseillère, aux lieu et place du président PARNEIXempêché, conformément aux dispositions de l'article 456 du Nouveau Code de Procédure Civile et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative, faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par jugement en date du 02 février 2006, le tribunal de grande instance de Pointe à Pitre a :
- dit n'y avoir lieu à une mesure d'instruction,
- condamné Etienne X... à payer à la société POMONA IMPORT la somme de 105 936, 96 € en principal assortie de l'intérêt conventionnel de 9 % à compter du 9 juin 1998, au titre du contrat du 12 février 1995, complété par des avenants des 15 mai, 29 mai, 28 août, 3 octobre, 9 novembre et 16 novembre 1995,
- condamné Rony X... à payer à la société POMONA IMPORT la somme de 99 963, 42 € en principal assortie de l'intérêt conventionnel de 9 % à compter du 9 juin 1998, au titre du contrat du 30 septembre 1996,
- condamné in solidum Etienne X... et Rony X... à payer à la société POMONA IMPORT la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement et celle de 3000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- prononcé l'exécution provisoire de la décision hors dispositions relatives à l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens,
- condamné in solidum Etienne X... et Rony X... aux entiers dépens.

Par déclaration remise au greffe de la cour d'appel de Basse-Terre, Monsieur Etienne X... et Monsieur Rony X... ont interjeté appel de cette décision.

Par conclusions récapitulatives en date du 03 avril 2008, les appelants exposent qu'à la fin de l'année 1994, la société POMONA IMPORT, professionnel de l'IMPORT-EXPORT de fruits et légumes, leur proposait de financer la mise en place d'une production de bananes sur leur exploitation agricole d'une superficie de 15 hectares située au Moule. Il leur était précisé que l'opération serait rentable puisqu'ils auraient l'assurance de l'écoulement de leur production, le quota de production et d'exportation de la Guadeloupe destinées aux marchés européens étant loin d'être atteint. Il leur était en outre indiqué que le financement de l'opération était assuré par les soins de la société POMONA IMPORT par le biais de contrats de fournitures exclusives et d'avances sur vente.

Forts des garanties qui leur étaient données, Etienne et Rony X... ont procédé à la réalisation d'importants travaux de modernisation de l'exploitation en vue de satisfaire aux critères de qualité imposés par la société POMONA IMPORT qui pour ce faire leur consentait des prêts successifs d'un montant total de 209 034, 15 €

pour Rony X... et de 150 162, 25 € pour Etienne X.... En garantie du règlement de ces sommes, les exploitants s'engageaient à expédier à la société POMONA la totalité de leur production de bananes et ils signaient à l'occasion de chaque avance une traite du même montant que l'avance consentie.

Or, selon les appelants, au cours de l'année 1997, les prix de vente n'ont plus couvert ni le coût de la production, ni les frais d'exportation, ce qui devait les contraindre à cesser la production courant 1998.

Messieurs Etienne et Rony X... soutiennent que la société POMONA IMPORT qui ne pouvait ignorer l'évolution des cours du marché de la banane du fait notamment de son rôle dans l'importation massive de bananes en provenance d'Afrique et de la zone dollar à un
prix moindre, les a sciemment trompés en leur faisant espérer des gains irréalisables.

De même, en prêtant des sommes importantes aux consorts X..., sans aucune garantie, la société POMONA IMPORT démontrerait qu'elle espérait rentrer dans ses fonds, non pas en sollicitant le remboursement des sommes prêtées, mais par les profits importants qu'elle allait réaliser par l'importation des bananes d'Afrique et de la zone dollar. En effet, compte tenu de la nouvelle organisation du commerce de la banane, mise en place par la communauté européenne, impliquant une combinaison de tarifs douaniers et de quotas, la société POMONA IMPORT avait tout intérêt, dans le cadre de son activité, à privilégier la vente des bananes autres que celles traditionnelles venant de la Guadeloupe, puisque l'obtention des certificats d'importation était calculée sur les quantités moyennes de bananes vendues, sans distinction.

Ainsi, sous couvert de permettre la relance de la production de bananes des appelants, la société POMONA n'avait en réalité pour unique objectif que de récupérer des quotas ou des licences découlant de l'absence ou de l'insuffisance de production de bananes des producteurs guadeloupéens, ce qui lui permettait d'aller produire des bananes en Afrique et en Amérique du Sud à des prix défiants toute concurrence et de contrôler une partie du commerce de la banane dans ces régions.

En outre, la société POMONA, qui se serait comportée comme un banquier, aurait incité les consorts X... à un endettement important puisqu'entre février 1995 et septembre 1996, les emprunteurs se sont vus allouer une somme de 2 356 160, 80 francs, soit 359 194, 40 euros, somme disproportionnée par rapport à leur capacité de remboursement.

Ainsi, pendant que Messieurs Etienne et Rony X... respectaient leurs engagements, la société POMONA IMPORT oeuvrait à leur détriment en n'écoulant pas leur production de bananes.

Les appelants font valoir à l'appui de leur appel, que la société POMONA IMPORT ne démontre pas le caractère certain de sa créance, les documents établis par ses soins et intitulés " tableau d'amortissement " ou " comptes de vente " étant inopérants à démontrer

le montant de la somme due. Le caractère incertain de la créance résulterait des affectations arbitraires du remboursement des avances effectuées par la société POMONA IMPORT, des frais supportés par les consorts X... en violation des conventions conclues, et à l'application d'un taux d'intérêt conventionnel qui ne pouvait être réclamé. S'agissant des frais, il ne leur appartenait pas notamment de prendre en charge les faux frais, la palettisation, les frais d'expertise, de dépotage, de destruction et de matériel. Ils auraient ainsi réglé de façon indue la somme de 29 823, 98 €, qui doit être déduite de la créance invoquée par l'intimée.

Les consorts X... soutiennent également que la société POMONA IMPORT ne pourrait se prévaloir du taux d'intérêt conventionnel de 9 %, le TEG n'ayant pas été mentionné dans le contrat de prêt en violation des dispositions de l'article L313-2 du Code de la Consommation. Ils sollicitent ainsi la déduction de l'intégralité des intérêts conventionnels qui leur ont été imputés, des sommes réclamées par la société POMONA IMPORT, faisant grief aux juges d'avoir rejeté cette demande.

Enfin, les appelants font valoir, que seule une mesure d'expertise serait de nature à éclairer la cour sur les raisons pour lesquels la production de bananes n'a pas été écoulée et les raisons pour lesquelles une somme aussi importante a été mise à la disposition des producteurs.

Cette mesure d'expertise permettrait d'établir les comptes entre les parties, de rechercher les sommes prélevées par la société POMONA IMPORT sur les comptes de vente de Messieurs X..., et de dire quel a été le rôle exact de la société POMONA IMPORT dans le montage financier et commercial de l'opération de production de bananes.

Messieurs Rony et Etienne X... demandent ainsi à la cour, à titre principal de débouter la société POMONA IMPORT de toutes ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'au paiement des entiers dépens tant d'instance que d'appel, et à titre subsidiaire, avant dire droit sur le fond, d'ordonner une expertise, l'expert ayant pour mission :
- d'examiner le montage financier de l'opération,
- de préciser dans quelles circonstances et dans quelles conditions il a été effectué et quel a été le rôle de la société POMONA IMPORT,
- de préciser sur quels documents la société POMONA IMPORT s'est basée pour donner son accord pour le financement,
- de retracer la situation financière de Messieurs X... pour l'exploitation de la propriété de ...,
- de dire si la situation de Messieurs X... aurait pu s'améliorer et redevenir bénéficiaire si de nouvelles avances lui avaient été consenties,
- de dire si les consorts X... auraient pu rembourser les avances consenties dans le délai qui leur était imparti et à quelles conditions,
- de dire si les avances consenties, au regard de l'évolution du marché connue de la société POMONA IMPORT, étaient ou non disproportionnées par rapport aux facultés de remboursement de Messieurs X..., tirées de la production qui devait en découler,

- de fournir tous éléments de nature à permettre au tribunal de déterminer si la société POMONA IMPORT a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité,
- de dire si la société POMONA IMPORT avait un intérêt particulier à financer une opération comme celle des consorts X... en Guadeloupe,
- dans l'affirmative, de dire lequel,
- de dire si la société POMONA IMPORT a commercialisé la production de bananes de Messieurs X..., comme elle s'y était engagée par contrat,
- de dire si les frais figurants sur les comptes de vente des années 1996, 1997 et 1998, sont bien imputables à Messieurs X...,
- dans la négative de les individualiser et de les chiffrer,
- de dire si la société POMONA IMPORT a réglé conformément à ses engagements contractuels Messieurs X... dans les délais prévus,
- dans la négative, d'indiquer l'importance du retard et les conséquences financières pour les producteurs,
- de dire si les consorts X... ont subi un préjudice,
- d'évaluer le montant de celui-ci,
- de faire le compte entre les parties, et de réserver les dépens.

La société POMONA IMPORT intimée, demande à la cour de lui donner acte de son changement de siège social, de sa transformation en société par action simplifiée, ainsi que de son intervention à la procédure par son président en exercice domicilié en cette qualité au dit siège, et :
à titre principal :
- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il n'a pas prononcé la condamnation conjointe et solidaire de Messieurs X... au paiement des sommes dues en principal, et statuant à nouveau de dire et juger que les appelants seront conjointement et solidairement tenus du paiement des sommes dues à la société POMONA IMPORT en principal et intérêts conventionnels,
à titre subsidiaire :
- de confirmer la décision en toutes ses dispositions,
à titre infiniment subsidiaire :
- si le tribunal ordonnait une expertise, de dire que la mission confiée à l'expert sera limitée à la vérification des bordereaux de vente et des prélèvements effectués par la société POMONA IMPORT au regard des contrats liant les parties afin de faire les comptes entre les parties,
- dans cette hypothèse de mettre le coût et les frais de cette expertise à la charge exclusive des appelants qui en sont les demandeurs et les bénéficiaires,
en tout état de cause :
- de condamner conjointement et solidairement Messieurs Etienne et Rony X... à verser à la société POMONA IMPORT la somme de 10 000 € chacun à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, et à la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'au paiement des entiers dépens.

La société POMONA IMPORT expose que des avances ont été consenties à Messieurs Rony et Etienne X... afin de pré-financer leur production, dans le cadre de contrats de fourniture de bananes, par lesquels les exploitants ont confié la commercialisation de leur production de bananes, pour la vente à la commission, selon un usage courant dans ce domaine d'activité.

Ces avances sont consenties par la société de commercialisation, en contrepartie d'un engagement de fourniture exclusive de la production, et sont remboursées par des retenues sur les paiements destinés aux fournisseurs sur les ventes des produits fournis, le montant de ces retenues étant égal à un franc par kilo net vendu.

Conformément aux dispositions contractuelles, la société POMONA IMPORT a procédé à quelques retenues sur les comptes de vente au titre du remboursement d'avance.

Or, les exploitants ont subitement cessé de fournir des bananes à la société POMONA IMPORT et ne l'ont pas remboursée sur les ventes de leur production.

Conformément aux termes du contrat, le montant du solde restant dû est devenu immédiatement et de plein droit exigible, le contrat prévoyant également un taux d'intérêt conventionnel applicable à ces avances à hauteur de 9 % l'an, à compter de la date de mise à disposition des fonds.

C'est ainsi que le 30 / 09 / 2006, la dette de Monsieur Rony X... s'élevait à la somme de 191 919, 26 €, et la dette de Monsieur Etienne X... s'élevait à la somme de 213 033, 96 €.

Selon la société POMONA IMPORT, Messieurs Etienne et Rony X... ont reconnu être débiteurs des sommes réclamées sans la moindre réserve, et contestent des déductions faites au titre de certains frais qui ont pourtant été opérées conformément aux termes clairs et précis des contrats acceptés.

S'agissant de la demande des appelants relative à la suppression du taux d'intérêt conventionnel, l'intimée fait valoir que cette demande ne peut être formulée que dans un délai de 5 ans à compter de la signature du contrat, et qu'ainsi la prescription est acquise.

S'agissant enfin de la demande de condamnation conjointe et solidaire de Rony X... et Etienne X..., la société POMONA IMPORT soutient que l'existence d'un compte de vente unique ouvert au nom de Messieurs Etienne et Rony X..., ainsi que le fait que les débiteurs eux-mêmes ont sollicité une jonction des deux procédures, permet d'affirmer que les contrats concernent une seule et même exploitation et qu'ainsi les deux débiteurs doivent être tenus solidairement au paiement de la dette.

Répondant à l'argumentation des appelants selon laquelle la société POMONA les a ruinés en leur prêtant des sommes totalement disproportionnées au regard de leurs capacités de remboursement et en ayant la main mise sur la totalité de la chaîne, de la production à la vente, l'intimée précise qu'à aucun moment elle n'est intervenue dans la gestion de la production, son activité étant limitée à l'importation, l'exportation, le négoce en gros et la vente à la commission de tous produits alimentaires et notamment de fruits et légumes et que de même, elle n'est aucunement investie dans la production de bananes en Afrique et en Amérique latine, commercialisant des bananes antillaises comme des bananes africaines.

Concernant la demande relative à la communication des déclarations en douane formée par les appelants, la société POMONA IMPORT soutient que selon les termes du contrat, " le commissionnaire effectuera des ventes de bananes au stade wagon-départ, aux ports du Havre, d'Anvers, ou tout autre port de l'union européenne. Le stade Wagon-départ s'entend marchandises déchargées du navire et chargées sur wagon ou camion à quai, tous frais et droits acquittés ", et qu'ainsi les formalités d'exportation au départ de la Guadeloupe appartenaient aux exploitants, le commissionnaire ne prenant en charge les bananes qu'à leur arrivée en Europe.

S ‘ agissant de la demande d'expertise, la société POMONA fait valoir qu'elle n'est pas justifiée, les débiteurs n'ayant à aucun moment tant pendant les relations commerciales que lors de la procédure, contesté le montant des avances et le montant des sommes qui ont été prélevées conformément aux accords commerciaux.

Enfin, l'intimée juge particulièrement abusive la résistance manifestée par messieurs X... et leur mauvaise foi, caractérisées par le fait que ne contestant pas la créance de la société POMONA IMPORT, ils n'ont rien fait pour tenter de s'en acquitter, multipliant les
incidents et n'ayant pas versé les sommes mises à leur charge par la décision frappée d'appel, malgré l'exécution provisoire.

SUR CE

Attendu que Monsieur Etienne X... exploitant, a signé un contrat de fourniture exclusive de bananes et d'avances sur vente en date du 12 février 1995 ;
Que ce contrat précisait notamment que :
- la société POMONA IMPORT interviendrait en qualité de commissionnaire à la vente pour la production de Monsieur Etienne X...,
- elle percevrait une commission de 5 % du montant brut hors taxe de ventes de bananes en rémunération de ses services,
- en contrepartie de l'engagement de fourniture exclusive de la production de Monsieur Etienne X..., elle lui consentirait des avances versées par tranches sur les ventes qu'elle effectuera pour son compte, ces avances portant intérêts au taux de 9 % l'an ;

Attendu qu'une première avance a été prévue par ce contrat initial, d'une montant de 132 730 francs soit 20 234, 55 € ;
Que les 29 mai 1995, 19 juillet 1995, 28 août 1995 et 03 octobre 1995, des avenants étaient signés pour quatre nouvelles avances, la somme prêtée s'élevant au 03 octobre 1995 à 704 000 francs ;
Que le 09 novembre 1995 une nouvelle avance d'un montant de 133 008, 73 francs était consentie à Monsieur Etienne X... par la société POMONA IMPORT ;

Attendu que le 30 septembre 1996, Monsieur Rony X... également exploitant, a signé le même type de contrat, une somme totale de 1 371 167, 97 € lui étant prêtée par la société POMONA IMPORT ;

Attendu qu'il ressort des termes de ces contrats que " le commissionnaire effectuera les ventes des bananes au stade wagon-départ, aux ports du Havre, d'Anvers, ou tout autre port de l'union européenne. Le stade wagon-départ s'entend de marchandises déchargées du navire et chargées sur wagon ou camion à quai, tous frais et droits acquittés " ;
Que la société POMONA IMPORT qui a pour activité l'importation, l'exportation, le négoce en gros et vente à la commission de tous produits alimentaires et notamment fruits et légumes, prend en charge la commercialisation de ces produits ;
Que compte tenu des termes du contrat, elle n'a pas à prendre en charge les démarches douanières qui sont effectuées par les producteurs par l'intermédiaire du groupement de producteurs de bananes auquel ils adhéraient ;
Qu'ainsi la demande de production de bordereaux de déclaration en douane n'est pas fondée ;

Attendu que la réalité des avances consenties n'est pas contestée par les appelants, ni même leur montant ;
Que les modalités de remboursement de ces avances, à savoir une retenue sur les paiements destinés aux fournisseurs sur les ventes des produits fournis, ne sont pas non plus contestées ;

Attendu que selon les appelants, la société POMONA n'a pas respecté ses engagements contractuels en n'écoulant pas leur production de bananes alors même qu'ils continuaient à lui fournir la totalité de leur production respectant en cela quant à eux les termes du contrat ;
Qu'ils soutiennent que le comportement de la société d'importation est dolosif car elle n'a jamais eu l'intention finalement de commercialiser les bananes provenant de Guadeloupe, ayant monté un marché fictif afin de feindre le respect de quotas européens et de s'implanter sur le marché d'importation de bananes provenant d'Afrique et de la zone dollar beaucoup plus lucratif ;
Que ce faisant, l'intimée aurait prêté des sommes aux consorts X..., non pas pour qu'elles soient remboursées, mais pour s'assurer la possibilité d'importer davantage de bananes en provenance d'Afrique ;

Attendu que selon la société POMONA IMPORT, les consorts X..., après quelques mois de vente, ont subitement cessé de fournir leurs bananes afin qu'elles soient commercialisées ;

Attendu que la société intimée produit à l'appui de cette affirmation plusieurs courriers de réclamation adressés aux exploitants le 09 juin 1998, le 20 juillet 1998, le 24 octobre 2001 ;
Qu'elle produit également un courrier adressé le 18 juin 1998 par Monsieur Rony X... aux termes duquel il fait part des grandes difficultés rencontrées par son exploitation en raison des grèves de 1997, indiquant qu'il ne peut plus faire face à ses obligations tant vis à vis de ses fournisseurs que de ses employés ;
Qu'il indique également qu'il se voit contraint d'abandonner pour un certain temps la production de bananes, d'autant plus que son associé doit se rendre régulièrement en Europe pour des raisons de santé ;

Attendu que Monsieur Rony X... propose en outre dans cette correspondance un financement afin d'honorer le paiement de sa
dette (abandon de 50 % de la dette, remboursement de 25 % en 1998, remboursement de 25 % en 1999 par concours bancaires ou autre), précisant que la reprise de l'activité de production prévue en février 1999, donnera à la société POMONA IMPORT la préférence jusqu'au complet remboursement de la dette ;

Attendu que ces échanges de correspondances démontrent que la société POMONA IMPORT n'a pas failli à ses engagements contractuels ;
Que les consorts X... ont cessé de fournir leur production de bananes car ils rencontraient des difficultés (grève, sécheresse, problèmes personnels), totalement étrangers à la société de commercialisation ;
Qu'à aucun moment ils ne mettent en cause le prix de vente comme étant à l'origine de leurs difficultés ;

Attendu que les exploitants qui ne pouvaient se méprendre sur les termes clairs du contrat, ont quant à eux failli à leur obligation de remboursement des avances consenties ;
Qu'ils ne démontrent pas le comportement dolosif de leur cocontractant qui aurait favorisé volontairement leur ruine, en privilégiant volontairement la commercialisation des bananes en provenance d'Afrique ou d'Amérique du sud, au détriment de celles produites en Guadeloupe et qui leur aurait prêté des sommes inconsidérées au regard de leurs capacités de remboursement ;
Que notamment les appelants ne communiquent aucune pièce permettant de connaître leur situation financière, tant au moment de la signature des contrats qu'à ce jour ;

* *
*
Attendu que s'agissant du montant de la créance, Messieurs Rony et Etienne X... contestent les déductions faites au titre de certains frais ;
Qu'il est cependant prévu à l'article II 3 des contrats que " outre le montant de la commission, le commissionnaire déduira du montant brut des ventes, sur les comptes de vente, tous les débours pris en charge pour le compte du commettant jusqu'au stade de wagon départ (tels que le fret, les frais de déchargement, de manutention, de transit) " ;
Qu'ainsi aux termes des contrats et contrairement aux affirmations des débiteurs, les frais tels que faux frais, palettisation, expertise, dépotages, frais de destruction, matériel, sont à la charge des exploitants ;
Que les comptes de vente faisant apparaître un montant net à devoir au créancier ont été adressés régulièrement aux producteurs qui ne les ont pas contestés ;

Attendu que les débiteurs font valoir également que la société POMONA IMPORT ne démontre pas avoir pris en compte :
- un remboursement d'avaries d'un montant de 53 655, 97 francs,
- une subvention KARUBANA d'un montant de 46 200 francs ;
Que pourtant les documents produits par l'intimée, notamment l'historique des remboursements sur l'avance consentie à Monsieur Rony X..., attestent de ce que sur le montant en principal réclamé au débiteur (655717, 03 francs), la somme de 53 655, 97 francs sous le libellé " remboursement d'avarie 12 / 98 ", la somme de 46200 francs sous le libellé " remise chèque KARUBANA ", mais également une somme de 8329, 87 francs correspondant à un remboursement d'avarie, ont été prises en compte ;
Que la société POMONA IMPORT justifie également avoir reçu paiement de subventions versées par FEODA et l'ODEADOM, par l'intermédiaire du groupement de producteurs la SICA KARUBANA par lequel transitaient les fonds provenant d'organismes publics, pour un montant de 66 060, 00 francs, et avoir déduit cette somme du total dû par Monsieur Etienne X... ;

Attendu qu'au demeurant, les différents comptes de vente produits par les débiteurs portent la mention " ok " écrite de leur main ;
Qu'ils n'ont en outre pas contesté ces comptes avant d'informer la société POMONA IMPORT, de ce qu'ils cessaient provisoirement toute production ;

Attendu qu'ainsi, le montant de la créance en principal, est justifié par les comptes de vente produits aux débats, sans qu'il soit besoin d'ordonner un expertise comptable ;
Qu'au demeurant, s'agissant de ce chef de demande, il convient de rappeler que conformément aux dispositions de l'article 146 du Nouveau Code de Procédure Civile, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve ;
Que les appelants qui ne produisent aucun élément permettant de connaître leur situation financière tant à la signature des contrats qu'à ce jour, ne sauraient solliciter une mesure d'expertise visant notamment à rechercher des éléments qu'ils se devaient de communiquer à la cour ;

Attendu que s'agissant de l'application du taux d'intérêt conventionnel de 9 % prévu au contrat, c'est par des motifs pertinents qui méritent adoption, que les juges ont rappelé que l'action en nullité est en l'état prescrite ;

Attendu que les obligations contractuelles des débiteurs sont fondées sur deux contrats distincts ;
Que s'agissant du remboursement des sommes dues, ils ne sauraient être condamnés solidairement et conjointement au paiement de la totalité de ces sommes ;

Attendu que les consorts X... ont soumis à plusieurs reprises des incidents de procédure aux magistrats de la mise en état ;
Que par ordonnance en date du 09 décembre 2004, le juge de la mise en état prés le tribunal de grande instance de Basse-Terre a accueilli l'exception de connexité soulevée par Monsieur Etienne X... afin que les deux dossiers l'un pendant devant le tribunal de grande instance de Basse-Terre et l'autre devant de tribunal de grande instance de Pointe à Pitre soient joints ;
Qu'il ne peut ainsi être reproché aux appelants d'avoir multiplié les incidents de procédure alors même que leur demande était fondée ;
Que la société POMONA ne démontre pas l'existence d'une faute ayant fait dégénérer en abus de droit d'ester en justice, l'exercice des droits de la défense par Messieurs Etienne et Rony X... ;
Que le jugement sera infirmé en ce qu'il les a condamnés au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Que de même la demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du Nouveau Code de procédure Civile, formulée devant la cour d'appel, n'est pas fondée sur l'existence d'une faute caractérisant la mauvaise foi des appelants ;
Que la société POMONA IMPORT sera déboutée de ce chef de demande ;

Attendu qu'il ne paraît pas équitable de laisser à la charge de l'intimée, la totalité des frais irrépétibles engagés pour la présente instance et non compris dans les dépens ;
Que Monsieur Rony X... et Monsieur Etienne X... seront condamnés solidairement au paiement d'une indemnité de 2500 € en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS

Déclare l'appel recevable ;

Donne acte à la société POMONA IMPORT de son changement de siège social, de sa transformation en société par action simplifiée, ainsi que de son intervention à la procédure par son Président en exercice domicilié en cette qualité au dit siège ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement frappé d'appel, sauf en ce qu'il a condamné Monsieur Etienne X... et Monsieur Rony X... au paiement de la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Statuant à nouveau sur ce point ;

Déboute la société POMONA IMPORT de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Y ajoutant :

Déboute la société POMONA IMPORT de sa demande de dommages et intérêts formulée devant la cour d'appel ;

Condamne solidairement Monsieur Etienne X... et Monsieur Rony X... à payer à la société POMONA IMPORT une indemnité de 2500 € en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne solidairement Monsieur Etienne X... et Monsieur Rony X... au paiement des entiers dépens.

Et ont signé le présent arrêt,

La greffière, P / le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Numéro d'arrêt : 06/00574
Date de la décision : 15/09/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-09-15;06.00574 ?
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