COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
2ème CHAMBRE CIVILE
ARRÊT No 581 DU 09 JUIN 2008
R. G : 08 / 00489
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de POINTE A PITRE en date du 13 mars 2008, enregistrée sous le no 07 / 00086
APPELANTE :
LA Société Civile Immobilière L'OISEAU DU PARADIS
Boulevard Marquisat de Houelbourg
ZI de Jarry
97122 BAIE-MAHAULT
Représentée par Me Virginie DUBOIS-NICOLAS (TOQUE 69), avocat au barreau de GUADELOUPE
INTIMEE :
SAS SOFIAG (SOCIETE FINANCIERE ANTILLES GUYANE) venant aux droits de la SOCIETE DE CREDIT POUR LE DEVELOPPEMENT DE LA GUADELOUPE DITE SODEGA venant elle-même aux droits de la SOCIETE DE DEVELOPPEMENT REGIONAL ANTILLES-GUYANE dite SODERAG dont le siège social est 12 Boulevard Général De Gaulle
97242 FORT-DE-FRANCE
Représentée par Me Bénédicte BRUILLON (TOQUE 25), avocat au barreau de GUADELOUPE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 28 avril 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, conseillère, présidente suppléante désignée par ordonnance du premier président en date du 18 février 2008
Mme Monique BEHARY LAUL SIRDER, conseillère,
Mme Nadine CONQUET, vice-présidente placée faisant fonction de conseillère, rapporteure
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait rendu par sa mise à disposition au greffe de la cour le 09 JUIN 2008
GREFFIER,
Lors des débats : Mme Maryse PLOMQUITTE
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du NCPC.
Signé par Mme Nadine CONQUET, Conseillère en remplacement de Mme Danielle DEMONT-PIEROT, régulièrement empêchée conformément aux dispositions de l'article 456 du NCPC et par Mme Nita CEROL, Adjointe administrative, faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La société civile immobilière L'OISEAU DU PARADIS a été crée en 1990 pour acquérir un immeuble sis à Baie-Mahault cadastré AN 226 lieudit HOUELBOURG d'une contenance de 40 ares et d'y faire construire un bâtiment à usage de bureaux, d'exposition et d'entrepôts.
L'acquisition du terrain fut concrétisée par acte notarié du 14 octobre 1991 de Me A... et financé par un prêt accordé par le Crédit Martiniquais d'un montant de 1 260 000 F soit 192 085, 76 €.
La construction d'un hangar commercial et des bureaux fut financée par la SODERAG selon acte notarié du 14 octobre 1991 établi par la SCP A... pour un montant en principal de 7 450 000 F soit 1 135 745, 10 €.
Le 22 décembre 1995, un avenant à l'acte précédent dûment en forme exécutoire était signé entre les parties pour un montant de 7 945 898 F soit 1 211 344, 30 €.
Le 10 mars 1998, la SCP BEDES, huissiers de justice signifiait à la SCI L'OISEAU DU PARADIS une déchéance du terme du prêt susvisé et sollicitait le règlement de la somme de 13 874 309, 80 F soit 2 115 124, 70 €.
Le 23 juillet 2007, la SOFIAG délivrait un commandement de payer valant saisie qui visait une créance de 2 297 233, 55 € à la SCI L'OISEAU DU PARADIS ; le 6 novembre 2007 une assignation à comparaître pour l'audience d'orientation du 31 janvier 2008 était délivrée sur le fondement des dispositions des articles 2191 et 2193 du Code civil, 49 à 62 du décret du 27 juillet 2006.
Le 12 septembre 2007, le commandement de payer était publié régulièrement au Bureau des Hypothèques de Pointe-à-Pitre et le cahier des conditions de vente déposé le 9 novembre 2007.
Par jugement en date du 13 mars 2008 le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre a :
Après vérification des conditions de la poursuite,
- déclaré irrecevable la demande de nullité du procès-verbal de description
-rejeté la demande de sursis à statuer
-rejeté la demande subsidiaire de mainlevée
-rejeté la demande d'expertise comptable
-rejeté les contestations
-ordonné la vente forcée de l'immeuble susdit à l'audience du 19 juin 2008 à 10 heures
-dit que par application de l'article 51 du décret du 27 juillet 2006 le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et accessoires est le suivant : 2 297 233, 55 € outre les intérêts au taux conventionnel de 11 % ayant commencé à courir le 31 janvier 2007
- dit qu'au titre des modalités de visite de l'immeuble saisi, le président de la chambre des huissiers, avec possibilité de délégation est désigné pour organiser les dites visites de l'immeuble saisi, dans les 8 jours précédent l'audience d'adjudication, selon les dispositions qu'elle déterminera plus précisément, et avec ci besoin est, le concours de la force publique
-dit que la présente décision, susceptible d'appel, sera notifiée par le greffe conformément aux dispositions de l'article 52 du décret du 27 juillet 2006, après notification entre avocats conformément à l'article 678 du NCPC
-condamné la SCI L'OISEAU DU PARADIS à payer à la SA SOFIAG la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC
-ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de poursuite de saisie immobilière
-prononce l'exécution provisoire de la décision.
Par déclaration remise et enregistrée le 1er avril 2008, la SCI L'OISEAU DU PARADIS a interjeté appel de cette décision et elle demande à la cour :
- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement querellé du 13 mars 2008
- à titre principal de surseoir à statuer dans l'attente du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre dans l'instance introduite par assignation du 25 avril 2007 et en cours sous le no RG 07 / 1079
- à titre subsidiaire ordonner la mainlevée de la saisie immobilière en cours
-à titre très subsidiaire avant dire droit ordonner une expertise comptable pour faire les comptes entre les parties
-la condamnation de la SOFIAG à lui payer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du NCPC.
Par conclusions déposées le 28 avril 2008, la société financière Antilles Guyane dite SOFIAG soutient :
- l'irrecevabilité de la demande de sursis à statuer conformément aux articles 49, 52 et 7 du Décret du 26 juillet 2006
- l'irrecevabilité de la demande de nullité du procès-verbal de description conformément aux dispositions de l'article 74 du NCPC
Subsidiairement, elle conclut au débouté des demandes de la SCI L'OISEAU DU PARADIS et la confirmation du jugement d'orientation en date du 13 mars 2008.
En conséquence elle réclame :
Au vu, notamment, des dispositions des articles 2191 et 2193 du Code civil, 49 et 62 du décret no 2006-936 du 27 juillet 2006 que soit :
- constaté que le créancier poursuivant, titulaire d'une créance liquide est exigible, agit en vertu d'une grosse notariée dûment exécutoire dressée par Me Michel A..., Notaire Associé à Pointe-à-Pitre, en date du 14 octobre 1991, ayant fait l'objet d'un avenant dûment en forme exécutoire dressée par Me Patricia X...-A..., Notaire Associé à Pointe-à-Pitre, en date du 22 décembre 1995 ; comme il est dit à l'article 2191 du Code civil ;
- constaté que la saisie pratiquée porte sur des droits saisissables au sens de l'article 2193 du Code civil ;
- qu'il soit statué sur les éventuelles contestations et demandes incidentes
-et déterminé les modalités de poursuite de la procédure ;
- qu'il soit fixé la créance de la SOFIAG à la somme de 2 297 233, 55 € outre les intérêts aux taux conventionnels de 13 % ayant commencé à courir le 31 janvier 2007, date du décompte de créance
-fixé comme suit, la demande de l'audience de vente et déterminer les modalités de visite de l'immeuble, visite organisée par la SCP SIZAM-GADET-PIOCHE, ou tel autre huissier désigné avec le concours de la force publique si nécessaire, dans la semaine précédant l'audience d'adjudication.
Elle demande enfin la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du NCPC et la condamnation de la SCI L'OISEAU DU PARADIS aux dépens employés en frais privilégiés de vente.
Il est renvoyé expressément aux écritures des parties pour l'exposé exhaustif de leurs moyens et arguments.
MOTIFS
Attendu que l'appel a été interjeté dans les formes et délais ; qu'il sera déclaré recevable en la forme ;
Attendu comme elle l'avait fait en première instance la SCI L'OISEAU DU PARADIS fait valoir que le sursis à statuer s'impose dans l'attente du jugement que rendra le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre saisie, pour que la SOFIAG justifie sa qualité de créancier, du caractère certain, liquide et exigible de sa créance, et que la déchéance des intérêts du prêt soit prononcée en raison du manquement de la Banque à son obligation d'information relative au taux du prêt et aux assurances ;
Attendu, comme l'a relevé le premier juge par des motifs pertinents que la cour adopte, qu'il résulte de l'application de l'article 1 du décret du 31 juillet 1992 et du décret du 26 juillet 2006, en ses articles 6, 7, 49 à 52, article 67, et ses articles 55 et 51 outre les 3 premiers alinéas de l'article L 213-6 du Code l'organisation judiciaire qu'à partir du moment où les moyens précités soulevés devant le tribunal de grande instance s'analysent comme des contestations ou des demandes qui s'élèvent à l'occasion de la procédure de saisie immobilière ou qui s'y rapportent directement, ils relèvent de la compétence exclusive du juge de l'exécution
qu'ainsi comme le fait plaider la SOFIAG, la demande de sursis à statuer ne peut prospérer et la décision du premier juge confirmée ;
De même elle soutient comme en première instance que doit être ordonnée la mainlevée de la saisie engagée en l'absence du caractère exécutoire des actes notariés, fondement de la saisie et à défaut de justificatif de la qualité de créancier de la SOFIAG ni de sa capacité et son pouvoir pour agir ;
De plus elle rappelle les fluctuations du quantum de la créance prouvant l'absence de liquidité de la créance et la mesure avant dire droit d'ordonner une expertise ou tout le moins que soit déclarée nulle la saisie ;
Attendu que conformément à l'article 2191 du Code civil, la saisie ne peut être pratiquée qu'en vertu d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, et ce conformément aux conditions générales des procédures d'exécution telles qu'elles résultent de la loi du 9 juillet 1991 ;
A partir du moment où la société SOFIAG fonde ses poursuites sur les actes notariés en date du 14 octobre 1991 et en date du 22 décembre 1995, dont les originaux sont versés aux débats et revêtus de la formule exécutoire, alors qu'aucune procédure d'inscription en faux n'est même pas mentionnée, ils conservent leur valeur exécutoire et fondent la saisie (cf. arrêt ca Basse-terre 14-03-2005 de la 2ème chambre) ;
De même comme l'a relevé le premier juge la société SOFIAG rapporte la preuve de sa qualité de créancière de la SCI L'OISEAU DU PARADIS en raison de la justification aux débats :
- de la cession de la SODERAG (prêteur des deniers initial) à la société SODEGA, cession notifiée par acte d'huissier le 26 novembre 1999 et le 25 juillet 2000 à la SCI L'OISEAU DU PARADIS ;
- de la fusion d'absorption de la SODEGA avec la SAS Antilles Guyane Participation conformément à une assemblée générale du 23 décembre 2004 consignée dans procès-verbal du conseil d'administration de la SOFIAG (en cette matière les règles étant régies par l'article L 123- p du Code de commerce) ;
De surcroît, il convient enfin de confirmer que :
- les articles L 312-4 à 33 du Code de la consommation ne sont pas applicables s'agissant d'un prêt professionnel, ce qui est le cas en l'espèce s'agissant d'un prêt consenti par la société SODERAG à une SCI en vue de l'acquisition d'un immeuble, et rend inopérant le moyen tiré de l'éventuel défaut de mention du TEG ;
- le défaut d'assurance décès de M. C..., associé, qui relèverait de la négligence commise par le banquier dans les conditions d'octroi du prêt initial ne ressort pas de la compétence du juge de l'exécution conformément à l'article L 311-12-1 du Code de l'organisation judiciaire ;
- que le moyen tiré de la nullité du cahier des conditions de vente pour non-respect des prescriptions de l'article 44 du décret du 27 juillet 2006 en raison du caractère incomplet du procès-verbal descriptif de l'huissier est irrecevable pour n'avoir pas été soulevé in limine litis par application de l'article 74 du NCPC ;
Attendu dès lors qu'il ressort des pièces versées aux débats que la SCI L'OISEAU DU PARADIS ne conteste pas être débitrice des sommes d'argent sur le principe en vertu des actes notariés de prêt, qu'elle se contente de contester le montant de cette dette, que la qualité de créancière a été reconnue à la société SOFIAG partie poursuivante, la créance a été jugée à juste titre au sens de l'article 4 de la loi du 9 juillet 91, liquide et exigible (cf. arrêt de CA Basse-Terre du 14-03-2000 s'agissant d'une saisie attribution fondée sur la même créance) ;
Attendu que la société SOFIAG a versé aux débats tous les actes fondant la poursuite et tous les éléments chiffrés nécessaires et suffisants pour que sa créance puisse être fixée à la somme de 2 297 233, 55 € comme indiqué dans le commandement valant saisie immobilière et qui détermine le montant du capital et les arriérés au 31 janvier 1998 de 128 504, 57 €, les pénalités, intérêts de retard conventionnels du 31 janvier 1998 au 31 janvier 2007 ;
qu'il n'y a donc pas lieu à faire procéder à une expertise comptable ;
Attendu en conséquence que la décision querellée sera confirmée en toutes ses dispositions ;
Aucune considération d'équité ne commande de faire applications des dispositions de l'article 700 du NCPC ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclare l'appel recevable et régulier,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de poursuite de saisie immobilière,
Et ont signé la présidente et la greffière.