COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
1ère CHAMBRE CIVILE
ARRÊT No 778 DU 17 SEPTEMBRE 2007
R. G : 06 / 01421
Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance de Pointe-à-Pitre, en date du 06 avril 2006, enregistrée sous le
n 04 / 1762.
APPELANTE :
LA S. C. I. GISSAC
42 Lot. Faraux
97190 LE GOSIER
Représentée par la SELARL Jean-Yves X... (TOQUE 03), avocat au barreau de Guadeloupe.
INTIMES :
1o)-Maître Jean-Paul Y...
...
...
97150 ST MARTIN
Non représenté.
2o)-LA CAISSE REGIONALE DE GARANTIE DES NOTAIRES DE LA GUADELOUPE
Immeuble Le Diamant-rue F. Forest Prolongée
Z. I. de Jarry
97122 BAIE-MAHAULT
Représentée par Me Hugues JOACHIM (TOQUE 34), avocat au barreau de la Guadeloupe.
3o)-LA COMPAGNIE MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD
10 Bd Alexandre Oyon-
72030 LE MANS CEDEX 09
Représentée par Me Hugues JOACHIM (TOQUE 34), avocat au barreau de Guadeloupe.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 21 mai 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Robert PARNEIX, Président de chambre, Président,
M. Jean-Luc MARTIN, Conseiller,
M. Marc SALVATICO, Conseiller, rapporteur,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 17 septembre 2007.
GREFFIER :
Lors des débats : Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative, faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du NCPC.
Signé par M. Robert PARNEIX, Président de Chambre, Président et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative, faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
Vu le jugement rendu le 6 avril 2006 par le Tribunal de Grande Instance de Pointe-à-Pitre entre d'une part, la SCI GISSAC et, d'autre part, Me Y..., la Caisse Régionale de Garantie des Notaires de Guadeloupe et la Compagnie Mutuelle du Mans Assurances-IARD ;
Vu l'appel régulièrement interjeté par la SCI GISSAC à l'encontre de cette décision, le 20 juillet 2006.
Vu les conclusions déposées par l'appelante le 9 octobre 2006,
Vu les conclusions déposées par la Caisse Régionale des Notaires de Guadeloupe et les Mutuelles du Mans Assurances, le 18 janvier 2007,
M. Jean-Paul Y... n'ayant pour sa part pas constitué avocat et étant non comparant, l'arrêt sera réputé contradictoire,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 19 avril 2007.
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Statuant sur une demande en responsabilité de notaire et en réparation du préjudice consécutif à cette responsabilité, le jugement entrepris a, après avoir reconnu que le notaire avait manqué à son obligation d'assurer l'efficacité juridique de son acte et réduit ainsi la portée de la garantie y afférente, estimé que l'appelante ne saurait cependant se prévaloir d'un quelconque préjudice en l'état du manquement pouvant lui être reproché ayant consisté à se montrer négligente dans l'usage de ses droits, négligence à l'origine de son entier préjudice.
Partant le Tribunal a débouté la SCI GISSAC de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens ainsi qu'à payer une somme de 1. 000 € à la Caisse Régionale des Notaires et la Compagnie Mutuelles du Mans sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
C'est le jugement querellé.
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La SCI GISSAC, appelante, demande à la Cour :
-de la déclarer recevable et fondée en son appel,
Y faisant droit,
-confirmer le jugement entrepris du 6 avril 2006 en ce qu'il a dit qu'en ne procédant pas à l'inscription du privilège du vendeur, le notaire a manqué à son obligation d'assurer l'efficacité juridique de la sûreté et a ainsi réduit la portée de la garantie afférente,
-infirmer le jugement entrepris le 6 avril 2006 par le Tribunal de Grande instance de Pointe à Pitre en ce qu'il a débouté la SCI GISSAC de ses demandes et écarté la responsabilité du notaire,
Statuant à nouveau
-dire et juger que Maître Jean-Paul Y... a commis une faute professionnelle de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la SCI GISSAC,
-condamner en conséquence Maître Y... à réparer le préjudice subi par la SCI GISSAC du fait de la non-inscription de son préjudice, soit la somme de 358. 560,09 €,
-dire et juger que la Compagnie Mutuelle du Mans est tenue de garantir le paiement des condamnations prononcées à l'encontre de Maître Y...,
-dire et juger que la Caisse Régionale des Notaires est tenue de garantir le paiement des condamnations prononcées à l'encontre de Maître Y...,
-condamner solidairement les défendeurs à payer à la SCI GISSAC la somme de 5. 000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
-condamner les défendeurs aux dépens dont distraction au profit de la SELARL Jean Yves X..., avocat.
Elle soutient :
-qu'elle n'a été admise au passif de la SARL CONVENANCE qu'à titre de créancier chirographaire et ce par la faute de Me Y... qui a manqué à ses obligations professionnelles de conseil et de diligence en n'inscrivant pas son privilège de prêteur de deniers.
-que le notaire devait s'assurer de la validité et de l'efficacité de son acte en inscrivant le privilège de vendeur dans les deux mois de la rédaction dudit acte,
-qu'il est constant que la responsabilité de procéder à l'inscription pèse sur le notaire, mandataire professionnel rédacteur de l'acte qui fait naître une sûreté réelle, même légale comme un privilège de vendeur d'immeuble ; qui est censé avoir reçu mandat de procéder à l'inscription,
-qu'en ne procédant pas à cette inscription telle que stipulée dans l'acte qu'il a pourtant instrumenté et authentifié le 17 octobre 1995, Maître Y... a commis une faute professionnelle dans l'exécution de son mandat,
-qu'à supposer que ce mandat soit dénié ou contesté, force sera de sanctionner le notaire au titre des manquements à son devoir de conseil et d'information,
-qu'en effet la SCI GISSAC n'a à aucun moment été informée par le notaire rédacteur qu'il lui appartenait personnellement de procéder à la formalité d'inscription du privilège du vendeur et les documents nécessaires à cette formalité ne lui ont jamais été remis,
-qu'ainsi le jugement querellé devra être confirmé de ce chef puisqu'à l'évidence le notaire a manqué à son obligation d'assurer l'efficacité juridique de la sûreté et a ainsi réduit la portée de la garantie afférente,
-qu'en revanche le lien de causalité entre le préjudice de la SCI GISSAC et la faute du notaire est avéré,
-que la motivation retenue par le premier juge s'appuie sur des faits erronés puisque notamment le Tribunal a retenu que la créance de la SCI a été admise à titre priviliégié alors qu'il est justifié aux débats qu'elle n'a été admise qu'à titre chirographaire,
-que par suite la SCI ne pouvait bénéficier d'une quelconque option comme prévu par Me A... ès qualités de représentant des créanciers dans sa lettre du 24 mars 2000, mais disposait que de l'option 3, à savoir règlement de 15 % de sa créance,
-que ce n'est ainsi que par la faute du notaire que son sort s'est trouvé aligné sur celui des créanciers chirographaires et qu'elle n'a perçu que 15 % du montant de sa créance,
-qu'en aucune manière elle n'a été négligente puisqu'elle n'avait pas d'option entre un règlement de 64 % de sa créance ou celui obtenu de 15 %,
-qu'ainsi la responsabilité de Me Y... devra être retenue, ce dernier devant être condamné solidairement avec la Compagnie les Mutuelles du Mans Assurances à l'indemniser de son préjudice s'élevant à la somme de 358. 560,09 €,
-qu'en ce qui concerne la Caisse Régionale de Garantie des Notaires de Guadeloupe elle sera tenue de garantir le paiement des condamnations prononcées à l'encontre du notaire.
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La Caisse Régionale de garantie des Notaires et les Mutuelles du Mans Assurances, intimées et appelante incidente pour la Caisse, demandent quant à elle à la Cour :
-de confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Pointe-à-Pitre du 6 avril 2006 dans ses dispositions déboutant la SCI GISSAC de toutes ses demandes et celles qui la condamnent à verser la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à la Caisse Régionale de Garantie des Notaires de la Guadeloupe et à la Compagnie les Mutuelles du Mans.
Sur l'appel incident :
-déclarer la SCI GISSAC irrecevable en ses demandes dirigées contre la Caisse Régionale de Garantie des Notaires en vertu de l'article 11 et 12 du décret du 20 mai 1955 ;
-condamner la SCI GISSAC à payer à la Caisse Régionale de Garantie des Notaires de la Guadeloupe la somme de 5. 000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et 3. 000 € en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
-débouter la SCI GISSAC de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la compagnie les Mutuelles du Mans ;
-la condamner à payer aux Mutuelles du Mans la somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
-la condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Hugues JOACHIM, avocat aux offres de droit.
Elles font valoir :
a)-En ce qui concerne la Caisse Régionale des Notaires :
-que la mise en jeu de la garantie collective du notariat est subordonnée à la démonstration par le demandeur de la défaillance du notaire et de l'exigibilité de la créance du demandeur contre lui ;
-que tel n'est pas le cas en l'espèce puisque Me Y... est régulièrement assuré et n'est donc pas défaillant ; de plus l'appelante ne peut se prévaloir d'aucune créance exigible à son encontre ;
-qu'une jurisprudence constante est désormais bien établie en la matière, la Cour de céans ayant d'ailleurs déjà statué en ce sens ;
-que si la Caisse commune des notaires garantit leur responsabilité, à l'égard de leur clientèle, elle n'est en revanche pas l'assureur des notaires et n'a pas vocation à être condamnée solidairement avec un notaire dont la responsabilité n'est pas établie et contre lequel aucune condamnation n'a été définitivement prononcée ;
-qu'en l'état, la Caisse, qui estime avoir été attraite de façon abusive sollicite incidemment la condamnation de la SCI GISSAC à lui payer la somme de 5. 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre 3. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
b)-En ce qui concerne les Mutuelles du Mans
-que l'acte litigieux passé par Me Y... le 17 octobre 1995 prévoit que l'inscription de privilège de vendeur sera prise à la diligence du vendeur dans les deux mois de ce jour ;
-que la rédaction de l'acte ne peut prêter à confusion et il est clair que la SCI GISSAC devait s'assurer de cette inscription d'autant plus qu'elle ne verse aux débats aucun document démontrant qu'elle aurait sollicité de Me Y... une telle formalité ; ce dernier n'ayant de ce fait jamais reçu mandat pour ce faire ;
-qu'en outre le notaire n'a pas non plus manqué à son devoir de conseil et d'information puisqu'il est mentionné dans l'acte :
" Toutefois, le vendeur est informé par le notaire soussigné qu'à défaut pour lui d'avoir pris cette inscription dans le délai de deux mois des présentes, cette dernière sera transformée en hypothèque légale... ".
-Qu'au surplus la SCI n'a pas non plus cru devoir répondre à Me A... sur les divers plans d'apurement proposés, acceptant ainsi tacitement de n'être remboursée qu'à hauteur de 15 % de sa créance admise, et concourant ainsi à la réalisation du préjudice qu'elle allègue ;
-que le tribunal a donc fait une juste appréciation des faits en jugeant que la SCI GISSAC est à l'origine de son entier préjudice, en se montrant négligente dans l'usage de ses droits ;
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Me Y... ne comparait pas, l'arrêt sera donc réputé contradictoire.
ET SUR CE,
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1-Sur la responsabilité du notaire :
a)-Sur les manquements de Me Y... à ses obligations professionnelles de conseil et de diligence
Il est constant que dans le cadre de son devoir de conseil
" le notaire est tenu d'éclairer les parties et de s'assurer de la validité et de l'efficacité des actes rédigés par lui ".
C'est dire que le devoir de conseil du notaire doit être distingué du simple devoir de renseignement puisque cet officier ministériel doit orienter le choix et les décisions de celui qui reçoit ce conseil.
Le notaire devant ainsi assurer l'efficacité de son acte, savoir faire en sorte que ledit acte, une fois rédigé, produise toutes les conséquences attendues.
Au cas particulier l'acte litigieux stipule que l'inscription du privilège de vendeur sera faite à la diligence du vendeur dans les deux mois de la rédaction.
Il est aujourd'hui acquis en jurisprudence que la responsabilité de procéder à l'inscription pèse sur le notaire ; en effet en matière de privilège de vendeur notamment, il est constant que le notaire auteur de l'acte constitutif est tenu de faire procéder d'office à l'inscription, fût-ce en l'absence de mandat express.
En effet le mandataire professionnel (notaire en l'espèce), bénéficiant d'un monopole de rédaction des contrats d'hypothèque et rédacteur de l'acte qui fait naître une sûreté réelle, est censé avoir reçu mandat de procéder à l'inscription.
Aucune dispense n'a été donnée à Me Y... de prendre cette inscription de nature à assurer l'efficacité de son acte, la mention en litige dans l'acte du 17 octobre 1995 ne pouvant s'analyser en une véritable dispense et en outre, ainsi que l'a fort pertinemment relevé le Tribunal, il n'est pas allégué-ni démontré-que la SCI GISSAC soit " un professionnel de l'immobilier particulièrement compétent et avisé ".
Ainsi, en ne procédant pas à l'inscription du privilège de vendeur, le notaire a manifestement manqué à son obligation d'assurer l'efficacité juridique de la sûreté et a ainsi réduit la portée de la garantie afférente.
b)-Sur le lien de causalité entre la faute du notaire et le préjudice subi par la SCI GISSAC
La cour observe liminairement que l'ordonnance d'admission de créance en date du 21 mars 2000 laisse apparaître que la SCI a été admise à titre chirographaire pour la somme de 4. 800. 000 Francs.
Ainsi c'est à tort que le premier juge a estimé que l'appelante ne saurait se prévaloir, eu égard au déroulement de la procédure collective suivie à l'encontre de la SARL CONVENANCE, d'un quelconque préjudice lié au manquement du notaire.
En effet, en l'état, la SCI ne pouvant bénéficier d'une quelconque option en sa qualité de créancier chirographaire, ne pouvait de plus fort se prononcer sur les options 1 ou 2, mais ne disposait que de l'option 3 ; savoir le règlement de 15 % de sa créance.
Cette qualité de simple créancier chirographaire (à défaut d'inscription prise par le notaire) l'a privée de toute possibilité de peser sur les propositions d'apurement des dettes de la SARL CONVENANCE, mais surtout elle ne pouvait bénéficier des modalités d'apurement plus favorables (et notamment le paiement comptant de 64 % de sa créance) bénéficiant aux seuls créanciers privilégiés ainsi que cela appert de la lettre de Me A... ès qualités en date du 24 mars 2000.
Ladite correspondance par lettre recommandée avec accusé de réception mentionnant clairement que seules les créances privilégiées liées aux opérations immobilières (privilèges de prêteur de deniers) ouvraient droit à l'option 1, c'est à dire paiement à hauteur de 64 % de la créance admise comptant à la sortie de l'opération ; ou à l'option 2 à savoir remboursement à hauteur de 100 % sur une période de 10 ans.
A l'évidence cette option là n'était pas ouverte aux créanciers chirographaires et aucune négligence ne saurait être retenue à l'endroit de la SCI GISSAC qui n'avait pas d'option possible.
Le lien de causalité entre la faute avérée du notaire et le préjudice subi par la SCI est donc établi puisqu'il ne peut être retenu, contrairement à ce qu'a estimé devoir juger le tribunal, que l'appelante serait à l'origine de son entier préjudice.
2-Sur le préjudice de la SCI GISSAC
La faute caractérisée du notaire cause à l'appelante un préjudice certain, direct et actuel.
Le fait de ne pas pouvoir revendiquer la qualité de créancier privilégié l'a empêchée de bénéficier des modalités d'apurement proposées par le représentant des créanciers.
Le plan d'apurement permet aux créanciers privilégiés d'être remboursés à hauteur de 64 % de la créance admise, comptant à la sortie de l'opération.
La créance de l'appelante ayant été admise pour un montant en principal de 4. 800. 000 Francs (soit 732. 755,28 €), cette dernière est recevable et fondée à solliciter le règlement à concurrence de 3. 072. 000 Francs. (4. 800. 000 Francs x 64 %) dans le cadre du plan de continuation de la SARL CONVENANCE ;
Puisque c'est une somme de 720. 000 Francs qu'elle a effectivement reçue du commissaire à l'exécution du plan en sa qualité de créancier admis à titre chirographaire, le préjudice de l'appelante s'élève en conséquence à 2. 352. 000 Francs savoir (3. 072. 000 Francs-720. 000 Francs) ; soit 358. 560,09 €.
Partant Me Y... sera condamné au paiement de ladite somme à titre de réparation du préjudice subi par la SCI GISSAC du fait des manquements de ce notaire.
3-Sur la mise en cause de la Caisse Régionale de Garantie des Notaires et de la Compagnie les Mutuelles du Mans Assurances
En ce qui concerne la Caisse Régionale de Garantie des Notaires la mise en jeu de la garantie collective est subordonnée à la démonstration par le demandeur de la défaillance du notaire et de l'exigibilité de la créance du demandeur contre lui.
Au cas particulier ces deux conditions ne sont pas réunies puisque d'une part, Me Y... n'est pas défaillant, car régulièrement assuré et, d'autre part, l'appelante ne peut se prévaloir d'aucune créance exigible (la Compagnie d'Assurances étant en la cause) et préalable à son encontre.
En l'occurrence, à l'époque où la Caisse a été poursuivie et jusqu'au jour du présent arrêt, la SCI GISSAC ne justifie pas d'une telle créance ; l'action intentée contre le notaire ayant au contraire pour objet de l'établir, puisqu'elle tend à voir reconnaître la responsabilité de Me Y... dans les conditions sus-mentionnées.
Or l'article 12 du décret du 20 mai 1955 subordonne le recours exercé contre la Caisse de Garantie à l'existence d'une créance exigible préalable, ce qui n'est manifestement pas le cas.
Partant la Caisse Régionale de Garantie des Notaires de Guadeloupe sera mise hors de cause sans que pour autant il soit fait droit à sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, l'action de la SCI à son encontre ne pouvant être considérée comme ayant dégénéré en abus d'ester en justice et la Caisse n'établissant pas que l'action avait été introduite de mauvaise foi, dans l'intention de lui nuire ou avec une légèreté blâmable équipollente au dol.
En ce qui concerne par contre la Compagnie Mutuelles du Mans Assurances qui ne dénie pas sa garantie et qui se borne à soutenir que l'appelante aurait concouru à la réalisation de son préjudice, celle-ci sera tenue de garantir le paiement des condamnations prononcées contre Me Y....
4-Sur les frais irrépétibles et les dépens
Par considération d'équité il y a lieu de condamner Me Jean-Paul Y... au paiement de la somme de 2. 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Enfin les dépens suivant la succombance, Me Y... devra encore intégralement les supporter.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Déclare l'appel recevable en la forme,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu la responsabilité de Me Y... et rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par la Caisse de Garantie des Notaires.
L'infirme en ce qu'il a débouté la SCI GISSAC de ses demandes et,
Statuant à nouveau,
Dit que Me Y... a commis une faute professionnelle de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la SCI GISSAC.
Condamne en conséquence Me Y... à réparer le préjudice subi par ladite SCI en lui payant la somme de 358. 560,09 €.
Dit que la Compagnie Mutuelles du Mans Assurances sera tenue de garantir le paiement des condamnations prononcées à l'encontre de Me Y... ;
Met hors de cause la Caisse Régionale de Garantie des Notaires de la Guadeloupe.
Condamne Me Y... à payer à la SCI GISSAC la somme de 2. 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.
Condamne Me Y... aux dépens et dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
Et ont signé le Président et la Greffière.