COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - CIVILE
CM/CG
ARRET N°
AFFAIRE N° RG 20/00593 - N° Portalis DBVP-V-B7E-EVAL
arrêt du 23 Janvier 2020 Cour de Cassation de PARIS n° : 18-23.154
arrêt du 03 Juillet 2018 Cour d'Appel de POITIERS RG n°16/2037
jugement du 29 Avril 2016 TGI de SAINTES RG n°15/245
ARRET DU 03 SEPTEMBRE 2024
APPELANT DEMANDEUR AU RENVOI :
Monsieur [A] [H]
né le 11 Novembre 1946 à [Localité 23] (59)
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Me Julien TRUDELLE, avocat postulant au barreau d'ANGERS
et par Me Quentin VIGIE, avocat plaidant au barreau de SAINTES
INTIME DEFENDEURS AU RENVOI :
Monsieur [U] [F], en snon nom personnel et venant aux droits de Mme [O] [F], décédée,
né le 20 Octobre 1966 à [Localité 24] (93)
[Adresse 6]
[Localité 18]
Représenté par Me Laurence NOSSEREAU de la SELARL LEXCAP, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 21A02138 et par Me Christian CALFAYAN, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du 12 Septembre 2023 à 14H00, Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la Cour composée de :
Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
M. WOLFF, conseiller
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
qui en ont délibéré
Greffière lors des débats : Madame LEVEUF
Greffier lors du prononcé : Monsieur DA CUNHA
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 3 septembre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, conseillère faisant fonction de présidente et par Tony DA CUNHA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Exposé du litige
Selon acte authentique en date du 8 décembre 1978, M. [H] a acquis de M. [I] et son épouse un immeuble bâti cadastré section G n°[Cadastre 4], [Cadastre 8], [Cadastre 10] et [Cadastre 16] lieudit «[Localité 21]» à [Localité 1] (Charente Maritime) pour une superficie totale de 3 a 56 ca et devenu la parcelle G [Cadastre 20].
M. [F] et sa mère Mme [S] veuve [F] (ci-après les consorts [F]) étaient propriétaires au sud de cet immeuble, d'une part, des parcelles G [Cadastre 5], [Cadastre 9], [Cadastre 12] et [Cadastre 15] acquises par cette dernière et son époux défunt de Mme [W] divorcée [N] remariée [D] selon acte authentique en date du 12 octobre 1978 et devenues la parcelle G [Cadastre 19], d'autre part, des parcelles G [Cadastre 7] et [Cadastre 17] acquises par les époux [F] de M. [I] et son épouse selon acte authentique en date du 8 décembre 1978.
Les parcelles G [Cadastre 16] (au nord) et [Cadastre 17] (au sud) proviennent de la division, selon document d'arpentage dressé par un géomètre-expert le 26 septembre 1978 et reproduit ci-après, de la parcelle G (anciennement Ba) [Cadastre 11] acquise par M. [I] avec les parcelles G (anciennement Ba) [Cadastre 4], [Cadastre 7], [Cadastre 8] et [Cadastre 10] le 19 juin 1969 et il est précisé dans l'acte de vente du 19 juin 1969 et dans celui du 8 décembre 1978 au profit des époux [F], mais non dans celui du 8 décembre 1978 au profit de M. [H], que les biens vendus confrontent du midi à un 'passage' appartenant à M. [V] et cadastré section Ba puis G [Cadastre 13] 'sur lequel l'immeuble vendu a droit de passage pour accéder au terrain en contre-bas de l'[Adresse 22]'.
Estimant que le garage en cours d'édification sur la parcelle G [Cadastre 17] l'empêcherait d'accéder à l'arrière de sa propriété en usant de son droit de passage sur la parcelle G [Cadastre 13], M. [H] a fait assigner les consorts [F] le 28 janvier 2015 devant le tribunal de grande instance de Saintes afin d'obtenir, en l'état de ses dernières conclusions, qu'il soit dit que la parcelle G [Cadastre 20] lui appartenant bénéficie d'une servitude de passage sur la parcelle G [Cadastre 17] afin de permettre l'accès à la parcelle G [Cadastre 13] et que cette servitude de passage s'exerce à partir de la porte se trouvant entre la limite est de la parcelle G [Cadastre 19] et la limite ouest de la parcelle G [Cadastre 7] et que les défendeurs soient condamnés sous astreinte à procéder à la démolition de la dalle de ciment à l'état brut se trouvant à cet endroit et au remblaiement du terrain à hauteur de sa porte, condamnés solidairement à lui payer la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts, déboutés de leurs demandes et condamnés solidairement à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec application de l'article 699 du même code.
Les consorts [F] ont demandé au tribunal de débouter M. [H] de ses demandes, de le condamner sous astreinte à faire cesser le débordement de sa propriété sur leur propriété par la démolition de ses ouvrages et de le condamner à leur verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Par jugement en date du 29 avril 2016, le tribunal a débouté M. [H] de l'ensemble de ses demandes, débouté les consorts [F] de leur demande reconventionnelle et de leur demande d'astreinte et condamné M. [H] à payer aux consorts [F] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Pour statuer ainsi, il a considéré :
- sur la demande principale fondée sur l'article 686 du code civil, que la servitude de passage invoquée étant discontinue, il convient d'appliquer l'article 691 du même code qui dispose qu'une telle servitude ne peut s'établir que par titre, la possession, même immémoriale, ne suffisant pas, que M. [H] démontre bénéficier, en application de l'article 700 du même code, d'une servitude de passage conventionnelle sur la parcelle G [Cadastre 13] dans la mesure où le fonds dont est issu le sien par division en bénéficiait et où son titre de propriété ne spécifie pas qu'il y est mis fin, que, s'il se prévaut de l'article 696 du même code selon lequel, quand on établit une servitude, on est censé accorder tout ce qui est nécessaire pour en user, ce texte ne saurait faire peser la servitude sur un fonds autre que le fonds servant et que, dès lors, M. [H] ne présente aucun titre établissant une servitude de passage conventionnelle à son profit sur le fonds G [Cadastre 17] et échoue à démontrer l'existence d'une telle servitude, la production d'une attestation ne pouvant l'établir,
- sur la demande reconventionnelle fondée sur l'article 545 du code civil, que le constat d'huissier réalisé le 10 février 2015 produit par les consorts [F] établit que la toiture du garage de M. [H] déborde sur leur fonds de 10 à 12 cm sur une longueur de 5 mètres, que ce dernier reconnaît cet empiétement à la date du constat mais affirme avoir scié les tuiles qui débordaient et produit trois photographies faisant apparaître que les tuiles sont désormais à l'aplomb du mur du garage qui marque la limite de propriété et que, de ce fait, aucun empiétement n'est constitué au jour de la décision.
Sur appel total interjeté le 1er juin 2016 par M. [H], la cour d'appel de Poitiers a, par arrêt en date du 3 juillet 2018, confirmé ce jugement et condamné M. [H] à payer aux consorts [F] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.
Sur pourvoi de l'appelant, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation a, par arrêt en date du 23 janvier 2020, cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juillet 2018 par la cour d'appel de Poitiers, renvoyé l'affaire et les parties devant la cour d'appel d'Angers, condamné les consorts [F] aux dépens, ainsi qu'à payer in solidum à M. [H] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et rejeté leur demande au même titre, au motif qu'en retenant, pour rejeter la demande de M. [H], que l'héritage des consorts [F] est situé au sud de la parcelle qui a été divisée, tandis que celui de M. [H] est situé au nord de la même parcelle, qu'il s'en déduit que le passage mentionné aux actes avait pour finalité de permettre l'accès aux parcelles anciennement cadastrées G [Cadastre 14] et [Cadastre 17], qui forment la propriété actuelle des consorts [F], et que, pour ces motifs, M. [H] n'est pas fondé à se prévaloir d'un droit de passage grevant à son profit la parcelle cadastrée section G n°[Cadastre 17], propriété des consorts [F], la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une renonciation sans équivoque à la servitude conventionnelle, ni une cause d'extinction de celle-ci, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 700 du code civil.
Suivant déclaration en date du 20 mai 2020, l'appelant a saisi la cour d'appel de renvoi.
Il a déposé ses conclusions au greffe le 15 juin 2020 et les a notifiées le 7 octobre 2021 au conseil constitué le 4 octobre 2021 pour les intimés, avant de lui notifier la déclaration de saisine le 13 octobre 2021 suite à l'avis de clôture et de fixation du 7 octobre 2021, tandis que le conseil des intimés a transmis le 28 décembre 2021 des conclusions correspondant à celles notifiées dans leur intérêt devant la cour d'appel de Poitiers le 14 novembre 2016.
Sur l'audience de plaidoirie du 7 juin 2022, l'affaire a été renvoyée à la mise en état du 19 octobre 2022 pour régularisation de la procédure à l'égard des héritiers de Mme [S] veuve [F] décédée le 12 décembre 2021 et observations des parties sur la portée de l'arrêt de cassation sur les demandes reconventionnelles.
M. [F], assigné en intervention forcée en qualité d'héritier de sa mère par acte d'huissier en date du 12 septembre 2022, a constitué avocat le 7 novembre 2022 et conclu le 22 novembre 2022.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 juin 2023.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives en date du 16 mars 2023, M. [H] demande à la cour, au visa des articles 693, 694, 696, 700 et 701 du code civil, de :
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il l'a débouté de ses demandes et l'a condamné à payer aux consorts [F] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens,
- déclarer recevables et bien fondées ses demandes,
- dire et juger que la parcelle cadastrée commune de [Localité 1] section G n°[Cadastre 20] lui appartenant bénéficie d'une servitude de passage sur la parcelle cadastrée commune de [Localité 1] section G n°[Cadastre 17] afin de permettre l'accès à la parcelle n°[Cadastre 13] et que cette servitude de passage s'exerce à partir de la porte se trouvant entre la limite est de la parcelle [Cadastre 19] et la limite ouest de la parcelle [Cadastre 7],
- condamner M. [F] à procéder à la démolition de la dalle de ciment à l'état brut se trouvant entre la limite est de la parcelle [Cadastre 19] et la limite ouest de la parcelle [Cadastre 7] et au remblaiement du terrain à hauteur de sa porte et ce, sous astreinte de 150 euros par jour à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir,
- condamner M. [F] à lui verser une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- débouter M. [F] de ses demandes,
- condamner M. [F] à lui verser une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans leurs dernières conclusions récapitulatives I devant la cour d'appel de Poitiers en date du 14 novembre 2016, les consorts [F] demandaient à la cour de :
- déclarer irrecevable et en tous les cas mal fondée la demande de M. [H] et confirmer le jugement de première instance en ce qu'il l'a débouté de ses demandes,
- en tout état de cause, si la cour considérait qu'une servitude a existé, dire qu'elle s'est éteinte par prescription le 9 décembre 2008 et n'existe plus,
- infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes reconventionnelles et, statuant à nouveau, condamner M. [H] à réaliser tous les travaux de démolition nécessaires pour faire cesser l'empiétement sur leurs fonds des fondations de ses constructions, murs et faîtages et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir,
- condamner M. [H] à leur verser ensemble la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions d'intervenant forcé en date du 22 novembre 2022, M. [F] en qualité d'héritier de Mme [S] veuve [F] demande à la cour, au visa du code civil, notamment de ses articles 691, 692, 693, 694, 700 et 702, de :
- le dire recevable et bien fondé en ses demandes,
par conséquent,
- confirmer le jugement entrepris,
- débouter M. [H] de toutes ses demandes,
- condamner M. [H] à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Nossereau de la SELARL Lexcap, avocate au barreau d'Angers, ainsi qu'il est dit à l'article 699 du même code.
Il est le seul à avoir formulé des observations sur la portée de la cassation, ce le 23 janvier 2023 en indiquant que l'article 624 du code de procédure civile, tel que modifié par l'article 11 du décret n°2014-1338 du 6 novembre 2014, dispose que la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce et que, la Cour de cassation ayant, au dispositif de son arrêt, cassé et annulé, 'en toutes ses dispositions', l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers, c'est l'ensemble de cet arrêt d'appel qui est cassé, y compris en ce qu'il a confirmé le débouté des consorts [F] de leur demande reconventionnelle et de leur demande d'astreinte, ce quel que soit le moyen unique à l'appui du pourvoi.
Sur l'audience de plaidoirie du 12 septembre 2023, les parties ont été invitées à présenter leurs observations, par note en délibéré sous un mois, sur l'irrecevabilité des conclusions de l'intervenant forcé, susceptible d'être encourue pour non-respect du délai de l'article 1037-1 du code de procédure civile.
M. [F] en qualité d'héritier de Mme [S] veuve [F] a déposé le 2 octobre 2023 une note en délibéré soulevant :
- la caducité de la déclaration de saisine en application de l'article 1037-1 du code de procédure civile au motif qu'aucune déclaration de saisine n'a été signifiée à sa personne ou à sa mère dans les dix jours de l'avis de fixation, ni aucunes conclusions dans les deux mois de la déclaration de saisine,
- la compétence exclusive du président de chambre ou du magistrat désigné par le premier président en matière d'irrecevabilité pour tardiveté des conclusions de l'intervenant forcé au motif que l'article 1037-1 emporte, sur ce point, exception limitative à la compétence de principe de la formation collégiale de la cour d'appel, solution qui est justifiée à la fois par le principe selon lequel les règles spéciales dérogent aux règles générales et celui selon lequel les exceptions sont d'interprétation stricte, par le caractère écrit de la procédure d'appel selon l'article 775 du code de procédure civile et par le principe de la contradiction selon l'article 16 du même code car, dans la mesure où les parties irrecevables dans leurs conclusions sont réputées s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elles avaient soumis à la cour dont l'arrêt a été cassé, les autres parties doivent être en mesure d'y répondre par écrit dans le cadre de la mise en état,
- la recevabilité de ses conclusions d'intervenant forcé en application du principe de loyauté des débats et du droit à un procès équitable au sens de l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au motif que l'assignation qui lui a été délivrée mentionne par erreur un délai de trois mois pour remettre ses conclusions au greffe.
M. [H] a déposé le 12 octobre 2023 une note en délibéré indiquant, d'une part, que le moyen relatif à la caducité de la déclaration de saisine doit être écarté tant sur la forme que sur le fond dès lors que, conformément à l'article 445 du code de procédure civile, M. [F] n'est pas autorisé à invoquer en délibéré un tel moyen nouveau sans lien avec la problématique de l'irrecevabilité de ses conclusions d'intervenant forcé au sujet de laquelle la cour a demandé aux parties de s'expliquer en application de l'article 442 du même code et que la notification de la déclaration de saisine à l'avocat déjà constitué pour M. [F], effectuée dans les dix jours de la réception de l'avis de fixation daté du 7 octobre 2021, dispense de la signifier à partie, d'autre part, qu'il s'en remet à l'appréciation de la cour sur les arguments développés par M. [F] sur l'irrecevabilité de ses conclusions.
Sur ce,
Sur la procédure devant la cour d'appel de renvoi après cassation
L'article 1037-1 du code de procédure civile dispose :
« En cas de renvoi devant la cour d'appel, lorsque l'affaire relevait de la procédure ordinaire, celle-ci est fixée à bref délai dans les conditions de l'article 905. En ce cas, les dispositions de l'article 1036 ne sont pas applicables.
La déclaration de saisine est signifiée par son auteur aux autres parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation dans les dix jours de la notification par le greffe de l'avis de fixation. Ce délai est prescrit à peine de caducité de la déclaration, relevée d'office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président.
Les conclusions de l'auteur de la déclaration sont remises au greffe et notifiées dans un délai de deux mois suivant cette déclaration.
Les parties adverses remettent et notifient leurs conclusions dans un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'auteur de la déclaration.
La notification des conclusions entre parties est faite dans les conditions prévues par l'article 911 et les délais sont augmentés conformément à l'article 911-2.
Les parties qui ne respectent pas ces délais sont réputées s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elles avaient soumis à la cour d'appel dont l'arrêt a été cassé.
En cas d'intervention forcée, l'intervenant forcé remet et notifie ses conclusions dans un délai de deux mois à compter de la notification la demande d'intervention formée à son encontre. Ce délai est prescrit à peine d'irrecevabilité relevée d'office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président. L'intervenant volontaire dispose, sous la même sanction, du même délai à compter de son intervention volontaire.
Les ordonnances du président de la chambre ou du magistrat désigné par le premier président statuant sur la caducité de la déclaration de saisine de la cour de renvoi ou sur l'irrecevabilité des conclusions de l'intervenant forcé ou volontaire ont autorité de la chose jugée. Elles peuvent être déférées dans les conditions des alinéas 2 et 4 de l'article 916. »
En application de l'article 445 du code de procédure civile selon lequel, après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444, M. [F] en qualité d'héritier de sa mère n'est pas recevable à invoquer en délibéré un nouveau moyen tiré de la caducité de la déclaration de saisine, étranger à la question de la recevabilité de ses conclusions d'intervenant forcé sur laquelle les parties ont exclusivement été autorisées à s'expliquer par note en délibéré.
En outre, la cour n'entend pas soulever d'office un tel moyen dès lors que M. [H] a procédé à la notification de sa déclaration de saisine dans les dix jours de l'avis de clôture et de fixation reçu du greffe en application des articles 905 et 1037-1 du code de procédure civile au conseil déjà constitué pour les consorts [F].
Par ailleurs, la compétence exclusive dont dispose, jusqu'à son dessaisissement, le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président pour connaître du moyen tiré de l'irrecevabilité des conclusions déposées par un intervenant forcé plus de deux mois après son assignation devant la cour d'appel de renvoi ne prive pas cette dernière de son pouvoir de relever d'office cette irrecevabilité.
M. [F], qui était partie à l'instance devant le tribunal de grande instance de Saintes puis devant la cour d'appel de Poitiers en qualité de nu-propriétaire pour moitié des parcelles G [Cadastre 19], [Cadastre 7] et [Cadastre 17] dont sa mère était pleine propriétaire pour moitié et usufruitière pour autre moitié ainsi qu'il ressort de l'attestation immobilière après décès de son père établie en la forme notariée le 18 août 1998, a été assigné en intervention forcée devant la cour d'appel de renvoi en qualité d'héritier de sa mère décédée le 12 décembre 2021, ce par un acte d'huissier en date du 12 septembre 2022 contenant dénonce de la déclaration de saisine et des conclusions de M. [H] et 'rappelant qu'aux termes de l'article 910 alinéa 2 du Code de procédure civile, l'intervenant forcé à l'instance d'appel dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la demande d'intervention forcée à son encontre lui a été notifiée pour remettre ses conclusions au greffe'.
La référence, dans cette assignation, au délai de trois mois de l'article 910 alinéa 2 du code de procédure civile plutôt qu'au délai de deux mois de l'article 1037-1 alinéa 7 pour le dépôt des conclusions de l'intervenant forcé ne saurait être considérée comme erronée dès lors que l'affaire, initialement fixée pour être plaidée le 7 juin 2022, avait été renvoyée au conseiller de la mise en état pour régularisation de la procédure à l'égard des héritiers de la défunte et observations des parties sur la portée de l'arrêt de cassation comme le permettent les articles 1037-1, 905 et 779 dernier alinéa du même code pour les affaires relevant de la procédure à bref délai, y compris sur renvoi de cassation, lorsqu'elles n'apparaissent pas en état d'être jugées.
M. [F] en qualité d'héritier de sa mère ayant déposé ses conclusions d'intervenant forcé le 22 novembre 2022, soit moins de trois mois après avoir reçu signification de la demande d'intervention forcée, celles-ci ne sauraient être déclarées irrecevables.
Enfin, il convient de rappeler que M. [F] à titre personnel n'a pas conclu dans le délai de deux mois après notification à son conseil le 7 octobre 2021 des conclusions de M. [H] et qu'il est donc réputé, en vertu de l'article 1037-1 alinéa 6, s'en tenir aux moyens et prétentions qu'il avait soumis à la cour d'appel de Poitiers dont l'arrêt a été cassé, à savoir ceux contenus dans ses conclusions du 14 novembre 2016 que son conseil a d'ailleurs transmises le 28 décembre 2021 à la cour d'appel de renvoi.
Sur la portée de la cassation
Selon l'article 624 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n°2014-1338 du 6 novembre 2014, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce et elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
Il s'en déduit que, quel que soit le moyen ayant déterminé la cassation, si celle-ci est totale, elle investit la cour d'appel de renvoi de la connaissance de la totalité du litige.
C'est donc à bon droit que M. [F] en qualité d'héritier de sa mère observe que, dans la mesure où la Cour de cassation a, au dispositif de son arrêt du 23 janvier 2020, 'cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juillet 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers', la cassation est totale et investit la cour d'appel de renvoi de la connaissance de l'entier litige qui avait été soumis à la cour d'appel de Poitiers, en ce compris la demande reconventionnelle des consorts [F] tendant à la démolition sous astreinte des ouvrages débordant sur leur propriété, quand bien même le rejet de cette demande, confirmé en appel, est dépourvu de tout lien avec le moyen unique du pourvoi de M. [H] qui s'attaquait exclusivement au rejet de sa demande de reconnaissance d'une servitude de passage.
Il doit simplement être relevé qu'ès-qualités, il conclut à la confirmation du jugement, tandis qu'à titre personnel, il avait relevé appel incident avec sa mère du rejet de leur demande reconventionnelle, sans qu'il puisse en être déduit qu'il a renoncé à cet appel incident formé en une autre qualité.
Sur la servitude de passage
Moyens des parties
Fondant à titre principal sa demande sur l'article 700 du code civil prévoyant que, si l'héritage pour lequel la servitude a été établie vient à être divisé, la servitude reste due pour chaque portion, sans néanmoins que la condition du fonds assujetti soit aggravée, M. [H] maintient que :
- la servitude de passage conventionnelle s'exerçant sur la parcelle n°[Cadastre 13] 'pour accéder au terrain en contre-bas de l'[Adresse 22]', comme cela est mentionné dans l'acte de vente du 19 juin 1969 qui constitue le titre émanant de son auteur M. [I], fixant définitivement le principe, l'étendue et les modalités de cette servitude et régulièrement publié, donc opposable aux tiers en ce compris les consorts [F], et est également rappelé dans l'acte de vente du 8 décembre 1978 au profit de ces derniers, est ainsi prévue au profit des parcelles n°[Cadastre 4], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 10] et [Cadastre 11] et doit donc bénéficier à sa parcelle n°[Cadastre 16] issue de la division de la parcelle n°[Cadastre 11], ce en passant par la parcelle n°[Cadastre 17] des consorts [F] issue de la même division pour rejoindre le chemin n°[Cadastre 13] via l'accès qu'il empruntait fréquemment et qui est situé entre la limite est de la parcelle n°[Cadastre 19] et la limite ouest de la parcelle n°[Cadastre 7], quand bien même l'acte d'acquisition de ceux-ci ne porte pas mention d'une servitude sur la parcelle n°[Cadastre 17] au profit de la parcelle n°[Cadastre 16],
- la division de la parcelle n°[Cadastre 11] n'entraîne pas la disparition de cette servitude dont la réalité peut d'autant moins être contestée qu'elle figure déjà dans un acte de 1931 faisant état d'un passage pour accéder à l'écurie, c'est-à-dire à sa cour actuelle,
- il n'est aucunement établi que M. [I] n'a pas souhaité maintenir cette servitude au profit des parcelles qu'il lui a vendues dès lors qu'il n'est fait aucune mention de sa suppression dans l'acte de vente, que M. [I] n'avait pas à «instaurer» une servitude déjà existante lors de la division de la parcelle n°[Cadastre 11], que rien n'indique qu'il a souhaité déroger à la servitude conventionnelle mise en oeuvre par son propre auteur et que le silence de l'acte de division constitué par le document d'arpentage du 26 septembre 1978 ne suffit pas pour démontrer l'absence de servitude, étant rappelé que l'existence d'un acte de division dispense d'établir le caractère continu de la servitude,
- le principe de l'indivisibilité instauré par l'article 700 du code civil est d'autant plus applicable que, de longue date, il n'existe aucun autre passage pour aller de l'ancienne parcelle n°[Cadastre 4] à la voie publique, ainsi qu'en a attesté le maçon qui a réalisé des travaux en 1984,
- aucune cause d'extinction de la servitude n'est caractérisée car il ne pouvait qu'emprunter le passage revendiqué pour desservir sa parcelle n°[Cadastre 16], l'accès par la [Adresse 22] n'étant pas adapté, et, à supposer qu'il ait cessé de l'utiliser en 1984, ce qu'il conteste, la servitude ne s'est pas éteinte par l'effet du délai de trente ans qui, selon l'article 707 du code civil, commence à courir pour les servitudes discontinues du jour où l'on a cessé d'en jouir puisque les consorts [F] indiquent eux-mêmes qu'il a utilisé le passage en 2009.
Il ajoute que :
- alors que l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers a été cassé sur ce point, M. [F] ne caractérise pas de renonciation sans équivoque à la servitude conventionnelle, laquelle ne saurait résulter du seul silence de l'acte de vente [I]-[H],
- il est inopérant de soutenir qu'aucun titre ne stipulerait que la parcelle n°[Cadastre 17] est un fonds servant car le seul rappel de l'origine de cette parcelle issue de la division de la parcelle n°[Cadastre 11], fonds servant, démontre l'existence d'un titre et son caractère servant résulte de l'application de l'article 700 du code civil,
- M. [F] ne démontre pas en quoi la condition de la parcelle n°[Cadastre 17] serait aggravée, les modalités de la servitude s'exerçant sur cette parcelle étant identiques à celles d'origine prévues sur la parcelle mère n°[Cadastre 11].
M. [F] en qualité d'héritier de sa mère réplique qu'en aucun cas la servitude de passage dont se prévaut M. [H] sur ce fondement au bénéfice de son fonds n°[Cadastre 20] ne saurait s'exercer sur un autre fonds, soit la parcelle n°[Cadastre 17] lui appartenant, que celui servant la servitude en cause, soit la parcelle n°[Cadastre 13], car, si, par application de l'article 700 du code civil, chacune des parcelles n°[Cadastre 16] et [Cadastre 17] issues de la division du fonds n°[Cadastre 11], lequel bénéficiait d'une servitude de passage conventionnelle sur le fonds n°[Cadastre 13] comme mentionné dans l'acte de vente [K]-[I] du 19 juin 1969 et rappelé dans l'acte de vente [I]-[F] du 8 décembre 1978, bénéficie a priori de cette servitude, ce qu'ont d'ailleurs admis le tribunal et la cour d'appel de Poitiers, la question n'est pas de savoir si cette servitude est, ou non, au regard de sa finalité et de son absence dans l'acte de vente [I]-[H] du 8 décembre 1978, transmise au bénéfice du fonds de M. [H] en vertu de ce texte, mais seulement de savoir en quoi elle pourrait s'exercer sur un fonds dont aucun titre ne stipule qu'il est servant, alors qu'il est impossible que la division du fonds dominant aggrave la condition du fonds servant, conformément à l'article 702 du code civil, et a fortiori entraîne par elle-même la création d'une servitude sur un autre fonds que le fonds servant, qui plus est issu de la division du fonds dominant.
Il souligne que l'attestation de M. [R], entrepreneur, est contestable du fait de son irrégularité en l'absence de pièce d'identité de l'attestant et car elle ne fait état que d'une utilisation ponctuelle du passage le 20 août 1984, sans autorisation ni information des consorts [F], ni fondement du 'droit de passage existant' allégué.
M. [F] à titre personnel considère également que M. [H] fait fausse route en invoquant l'article 700 du code civil puisque la question qui se pose n'est pas d'un droit de passage sur la parcelle n°[Cadastre 13] mais d'un droit de passage sur la parcelle n°[Cadastre 17] au profit de la parcelle n°[Cadastre 16].
Il fait valoir qu'en tout état de cause, à supposer que le fonds de M. [H] ait pu bénéficier d'une servitude à l'occasion de son acquisition en 1978, cette servitude serait aujourd'hui éteinte par le non-usage pendant 30 ans en application de l'article 706 du code civil dans la mesure où il n'a jamais usé d'une servitude de passage sur le fonds [F] depuis le 8 décembre 1978 et jusqu'en 2009 a minima, tout simplement parce qu'il avait un accès direct à la [Adresse 22] par son terrain légèrement en pente avant d'engager des travaux titanesques pour le décaisser et réaliser une muraille de soutènement de la voie publique, où il ne rapporte pas la preuve contraire qui lui incombe et où une servitude non exercée depuis plus de 30 ans demeure éteinte par la prescription quoique l'exercice en ait été repris après ce délai, sans opposition du propriétaire du fonds assujetti, à moins que cet acte d'exercice ultérieur ne puisse s'interpréter comme valant renonciation de la part de ce dernier au bénéfice de la prescription, alors que M. [H] n'a pu éventuellement faire usage du passage qu'occasionnellement, en l'absence et à l'insu des consorts [F].
Réponse de la cour
L'article 700 du code civil dispose, en son alinéa 1er, que, si l'héritage pour lequel la servitude a été établie vient à être divisé, la servitude reste due pour chaque portion, sans néanmoins que la condition du fonds assujetti soit aggravée et, en son alinéa 2, qu'ainsi, par exemple, s'il s'agit d'un droit de passage, tous les copropriétaires seront obligés de l'exercer par le même endroit.
Il est constant que l'ensemble immobilier vendu le 19 juin 1969 à M. [I] bénéficiait d'une servitude conventionnelle de passage consistant, comme mentionné dans l'acte de vente y afférent, en un 'droit de passage' s'exerçant sur l'actuelle parcelle G [Cadastre 13] 'pour accéder au terrain en contre-bas de l'[Adresse 22]'.
Le terrain situé en contre-bas de l'[Adresse 22] et desservi par ce passage correspondait, au vu des plans cadastraux versés aux débats, à la parcelle G [Cadastre 11] en nature de 'terrain' et en forme de L inversé dont une branche jouxte l'[Adresse 22] située à l'est et l'autre le passage G [Cadastre 13] situé au sud, au terrain situé à l'arrière du bâtiment à usage de 'chai et écurie' édifié sur toute la longueur nord-sud de la parcelle G [Cadastre 4] et à la parcelle G [Cadastre 7] alors en nature de 'sol' et entourée par les parcelles G [Cadastre 11] et [Cadastre 4].
Il est tout aussi constant que la partie sud de cet ensemble immobilier qui a été revendue le 12 octobre 1978 par les époux [I] aux époux [F], à savoir les parcelles G [Cadastre 7] et [Cadastre 17] formant alors un seul 'terrain', la seconde correspondant à la branche sud de l'ancienne parcelle G [Cadastre 11] qui a été divisée à cette occasion, bénéficie de la même servitude conventionnelle de passage, comme rappelé dans l'acte de vente y afférent.
Dans la mesure où la partie nord du même ensemble immobilier qui a été revendue le même jour par les époux [I] à M. [H], alors décrite comme 'un bâtiment en très mauvais état', inclut la parcelle G [Cadastre 4] et la parcelle G [Cadastre 16] issue de la division de l'ancien parcelle G [Cadastre 11] dont elle constituait la branche nord, il ne peut qu'en être déduit qu'elle avait vocation, en application de l'article 700 du code civil, à bénéficier de la même servitude, ce qui implique nécessairement de traverser la parcelle G [Cadastre 17] qui la sépare de la parcelle G [Cadastre 13], sans que cela aggrave la situation de cette dernière, fonds assujetti.
Il importe peu que, lors de la division de l'ensemble immobilier de M. [I] par l'effet de ces deux ventes du 12 octobre 1978, une servitude n'ait pas été constituée par titre sur la parcelle G [Cadastre 17] des époux [F] au profit des parcelles G [Cadastre 4] et [Cadastre 16] de M. [H], désormais intégrées à la parcelle G [Cadastre 20].
Il n'est pas soutenu que M. [H] et/ou son auteur aurai(en)t renoncé au bénéfice de la servitude de passage sur la parcelle G [Cadastre 13] pour la partie nord de l'ensemble immobilier, renonciation qui ne saurait résulter du seul fait que l'acte de vente au profit de M. [H] ne fait pas mention de cette servitude.
Le procès-verbal de bornage et de délimitation des parcelles G [Cadastre 7], [Cadastre 17] et [Cadastre 19] des consorts [F] en date du 5 mars 2009 montre, d'ailleurs, clairement l'existence d'une ouverture, entre les points E et F, en limite des parcelles G [Cadastre 20] et [Cadastre 17], le mur présent sur la parcelle G [Cadastre 20] le long de cette limite ne se prolongeant pas jusqu'au bâtiment édifié sur la même parcelle, ce que n'ont pas démenti les consorts [F] qui, commentant ce procès-verbal de bornage et de délimitation, expliquaient dans leurs conclusions du 14 novembre 2016 :
'll y est fait mention d'une porte dont il s'avère qu'elle existait de très longue date lorsque l'ensemble était une propriété unique à savoir la parcelle n°[Cadastre 11], laquelle parcelle n°[Cadastre 11] était elle-même scindée de fait en deux parties par un mur de soutènement des terres compte tenu des différences de niveaux qui existaient sur cette parcelle.
C'est du fait de ce mur de soutènement et de cette différence de niveaux que l'ancien propriétaire, Monsieur [W], avait à l'époque maintenu une ouverture dans ce mur de soutènement pour longer sa propriété.'
Si M. [H] a depuis surélevé ce mur pour servir d'appui à l'abri construit en vertu d'une déclaration préalable déposée en mairie le 14 octobre 2010 et a réaménagé le passage désormais doté d'un encadrement intégré au nouveau mur de clôture, il n'a pas créé l'ouverture qui existait par le passé, ce que confirme le constat d'huissier dressé le 20 juillet 2011 à sa demande, qui indique que 'Le seuil de ce passage est fait de fondations anciennes (une chape ciment et des pierres)' et que 'Sur les pierres d'angle blanches du mur droit, nous notons la présence de deux anciens gonds anciens scellés dans le mur (photos 1 à 6)', le gond supérieur étant visible également sur les photographies annexées au constat d'huissier dressé le 8 juillet 2011 à la demande de Mme [F] et sur celles prises par les consorts [F] eux-mêmes (pièce n°11) au cours des travaux réalisés par M. [H].
La seule cause alléguée d'extinction de la servitude au profit de la parcelle G [Cadastre 20] est tirée de l'article 706 du code civil qui dispose que la servitude est éteinte par le non-usage pendant trente ans.
M. [H] n'ayant plus la possession actuelle de la servitude de passage, ce dès avant les constats d'huissier susvisés des 8 et 20 juillet 2011 montrant la présence sur la parcelle G [Cadastre 17] d'un tas de bois de chauffage obstruant l'ouverture sur la cour arrière de sa propriété et l'installation entre ces deux dates de claustras en bois fermant cette ouverture, ainsi que d'un vieux cabanon adossé au mur arrière de l'immeuble des consorts [F] et situé à côté du tas de bois, donc dans l'axe du passage revendiqué, il lui incombe de démontrer qu'elle a été exercée depuis moins de trente ans.
Conformément à l'article 707 du code civil, le délai de prescription extinctive d'une servitude discontinue telle qu'une servitude de passage commence à courir à compter du jour du dernier acte d'exercice de cette servitude.
Dans la mesure où Mme [F] a fait savoir à M. [H] dès le 18 juillet 2011, par l'intermédiaire de l'huissier ayant constaté à sa demande le 8 du même mois que celui-ci avait 'ouvert dans [s]on mur de clôture un passage libre semblable à l'encadrement d'une porte', qu'il n'avait 'jamais exercé' la servitude revendiquée et qu'elle 'refus[ait] tout passage sur sa propriété' et où, sans se départir de cette version des faits, les consorts [F] indiquaient dans leurs conclusions du 14 novembre 2016 que 'depuis le 8 décembre 1978, jour où Monsieur [H] a acheté son fonds et où les époux [F] ont acquis le leur, Monsieur [H] n'a jamais usé d'une servitude de passage sur le fonds des époux [F] et cela jusqu'à l'année 2009 a minima', il ne saurait être considéré qu'ils ont reconnu un quelconque acte d'exercice de la servitude par M. [H], y compris en 2009.
Or, pour preuve de cet exercice, M. [H], qui demeurait encore à [Localité 23] lors du procès-verbal de bornage et de délimitation du 5 mars 2009 comme lors du dépôt de sa déclaration préalable de travaux du 14 octobre 2010, produit une unique attestation de M. [R], responsable d'une entreprise de maçonnerie, en date du 30 avril 2015 qui 'certifie qu'en date du 20 Août 1984, [il a] effectué des travaux de maçonnerie sur la parcelle cadastrée n°[Cadastre 4] appartenant à Monsieur [A] [H] domicilié : [Adresse 2], à [Localité 1] ; à l'arrière de la maison, en utilisant le droit de passage existant, afin d'amener (à l'aide d'une brouette) [s]es matériaux nécessaires à la réalisation de l'ouvrage. Il n'existait d'ailleurs aucun autre passage hormis celui-ci. Ci-joint, photocopie de ma facture/devis du 20/08/1984'.
Ne sont jointes à cette attestation ni la pièce d'identité du témoin, ni sa facture/devis et, comme le relevaient les consorts [F] dans leurs conclusions du 14 novembre 2016, elle est rédigée d'une main tout-à-fait différente de celle du signataire.
En outre, elle n'est pas précise sur l'emplacement du passage emprunté, alors que les photographies annexées au constat d'huissier du 20 juillet 2011 montrent que le seuil bétonné de l'ouverture au droit du bâtiment était surmonté, du côté de la parcelle G [Cadastre 17], de deux rangées de pierres anciennes d'une hauteur dépassant le niveau du gond inférieur, ce qui fait douter de la possibilité d'emprunter ce passage avant son réaménagement, et que la seule photographie versée aux débats qui soit antérieure aux travaux de décaissement du talus à l'arrière de la parcelle G [Cadastre 20] et de création d'un imposant mur de soutènement le long de l'[Adresse 22] (pièce n°19 de M. [H]) ne permet pas d'apprécier la pente du talus à son extrémité nord, là où le dénivelé d'avec l'[Adresse 22] est le moins important, ce qui n'exclut pas la possibilité d'un passage à pied à cet endroit, y compris avec une brouette.
Dans ces conditions, l'attestation supposée émaner de M. [R] n'apparaît pas probante.
M. [H] ne rapportant pas la preuve, qui lui incombe, d'un exercice de la servitude depuis moins de trente ans à la date de l'assignation introductive d'instance du 28 janvier 2015, celle-ci s'est trouvée éteinte par prescription.
Il n'est, par ailleurs, justifié d'aucun élément susceptible de s'interpréter comme une renonciation des consorts [F] à la prescription acquise.
Cette prescription fait obstacle à la reconnaissance d'une servitude au profit du fonds de M. [H], que ce soit sur le fondement de l'article 700 du code civil ou sur les fondements, invoqués subsidiairement, de la destination du père de famille au sens des articles 693 et 694 du code civil et de l'accessoire nécessaire d'une servitude conventionnelle au sens de l'article 696 du même code.
Le jugement entrepris sera, dès lors, confirmé par substitution de motifs en ce qu'il a débouté M. [H] de ses demandes au titre de la servitude de passage.
Sur les empiétements
Moyens des parties
M. [F] à titre personnel soutient que, comme constaté par huissier le 27 novembre 2014, la fondation du mur édifié par M. [H] à l'arrière de sa propriété après décaissement du talus présente, au niveau de la banquette béton, des excroissances qui débordent de 3 à 8 cm sur le fonds [F] et la rive du bâtiment construit par M. [H] déborde de la largeur de la tuile, ce que celui-ci n'a pas contesté mais sans y remédier, que, comme constaté par huissier le 10 février 2015, le faîtage du 'garage' de M. [H] déborde sur la propriété [F] de l'ordre de 10 à 12 cm et sa façade présente un faux-aplomb de 3 cm, que M. [H] est donc obligé de démolir ces empiétements en application des articles 545 et suivants du code civil quand bien même ils seraient minimes et que c'est à tort que le tribunal s'en est remis à l'affirmation de ce dernier qui prétendait avoir scié les tuiles et produisait à l'appui trois photographies, alors que les débords de fondation n'ont jamais été supprimés ni le faîtage démonté.
M. [H], qui ne conclut pas sur ce point, est réputé s'approprier les motifs du jugement dont appel.
Réponse de la cour
S'agissant des empiétements sur le fonds [F], d'une part, de la banquette béton en fondation du nouveau mur de clôture de M. [H], d'autre part, de la tuile de rive de son abri construit en appui sur ce mur, ils n'ont pas été contestés par ce dernier devant l'huissier instrumentaire même s'il a refusé que son maçon M. [R], présent lors du constat du 27 novembre 2014, procède aux travaux qu'il préconisait consistant à casser les excroissances de la banquette béton et à démonter la rive.
M. [H] a, toutefois, produit trois photographies montrant clairement que les tuiles de rive de l'abri ont été sciées et ne débordent plus, ce que confirme le constat d'huissier dressé à sa demande le 3 novembre 2016, de sorte que le tribunal a exactement considéré qu'aucun empiétement n'était constitué à cet égard au jour de sa décision.
S'il ne justifie pas, ni même n'allègue, avoir cassé ou fait casser les excroissances de la banquette béton de fondation qui, comme expliqué par Mme [F] à l'huissier, a été découverte à l'occasion des travaux de nivellement du terrain situé à l'arrière de l'habitation de celle-ci pour y construire un garage, force est de constater que la construction de ce garage adossé au mur de clôture a depuis été poursuivie (voir les photographies annexées au constat d'huissier du 27 novembre 2014) et achevée (voir celles annexées au constat d'huissier du 3 novembre 2016), de sorte que les fondations de ce mur, à supposer qu'elles n'aient pas été rectifiées, ne sont plus désormais accessibles du fait même des travaux entrepris par les consorts [F].
M. [H] ne saurait donc être condamné à supprimer le débord éventuel de fondation, ce que M. [F] en qualité d'héritier de sa mère ne demande, d'ailleurs, plus.
S'agissant du faux-aplomb du mur de clôture de '3 cm sous la règle de 2 mètres' tel que constaté par l'huissier le 10 février 2015, il est insuffisant à caractériser un empiétement sur le fonds [F] en l'absence de toute référence utile à la limite de propriété, de sorte que la demande sur ce point ne peut prospérer.
S'agissant du débord du faîtage de l'abri sur le fonds [F], l'huissier mandaté par Mme [F] l'a estimé être 'de l'ordre de 10 à 12 cm environ' au moyen d'un cordeau 'tendu entre les deux limites théoriques' constituées par 'le poteau de clôture côté [Adresse 22] et les pierres d'angle à l'aplomb de la face du pignon' de l'immeuble [H].
Cependant, l'huissier mandaté par M. [H] a constaté le 3 novembre 2016, au moyen d'un fil tendu 'depuis l'angle arrière de la propriété de Monsieur [H] matérialisé par un poteau carré (photo 1), jusqu'au bord extérieur des pierres d'angle', que 'le mur de Monsieur [H] se trouve dans l'alignement de ces deux points', sans aucun débord du faîtage visible sur les photographies annexées à ce constat.
Or la mesure correcte doit être réalisée à partir de l'extrémité des pierres d'angle de l'immeuble de M. [H], qui correspond au point F du plan de bornage et de délimitation du 5 mars 2009, et non à partir du pignon de cet immeuble, qui se trouve en net retrait de ces pierres d'angle, donc de la limite séparative, retrait que M. [H] a expliqué en déclarant à l'huissier qu'il devait habiller son pignon d'un bardage.
Dès lors, aucun empiétement n'est caractérisé à cet égard.
Le jugement entrepris ne pourra donc qu'être confirmé par substitution partielle de motifs en ce qu'il a débouté les consorts [F], aux droits desquels vient M. [F], de leur demande reconventionnelle et de leur demande d'astreinte au titre des empiétements.
Sur les demandes annexes
Partie principalement perdante, M. [H] supportera les entiers dépens exposés devant la cour d'appel de Poitiers comme devant la cour d'appel de renvoi et, en considération de l'équité et de la situation respective des parties, sera tenu de verser à M. [F] en sa double qualité la somme de 3 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens d'appel sur le fondement de l'article 700 1° du code de procédure civile sans pouvoir bénéficier du même texte, le jugement étant, par ailleurs, confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 en première instance.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Déclare la note en délibéré déposée le 3 octobre 2023 par M. [F] en qualité d'héritier de Mme [S] veuve [F] irrecevable en ce qu'elle soulève la caducité de la déclaration de saisine de M. [H] ;
Dit n'y avoir lieu de déclarer irrecevables ses conclusions d'intervenant forcé en date du 22 novembre 2022 ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne M. [H] à verser à M. [F] la somme de 3 000 (trois mille) euros sur le fondement de l'article 700 1° du code de procédure civile en appel et le déboute de sa demande au même titre ;
Le condamne aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du même code.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
T. DA CUNHA C. MULLER