COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - CIVILE
CM/CG
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 20/00490 - N° Portalis DBVP-V-B7E-EUYQ
jugement du 11 Février 2020
TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ANGERS
n° d'inscription au RG de premièreinstance 14/04691
ARRET DU 03 SEPTEMBRE 2024
APPELANTS :
Monsieur [K] [D]
né le [Date naissance 5] 1983 à [Localité 12] (49)
[Adresse 4]
[Localité 14]
Madame [C] [D]
née le [Date naissance 2] 1989 à [Localité 12] (49)
[Adresse 11]
[Localité 12]
Madame [Z] [O] épouse [D]
née le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 12] (49)
[Adresse 6]
[Localité 13]
Représentés par Me Sylvia CRUBLEAU COCHARD de la SELAS AVOCONSEIL, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 140408
INTIMEES :
Madame [E] [O] épouse [F]
née le [Date naissance 8] 1954 à [Localité 12] (49)
[Adresse 17]
[Localité 9]
Représentée par Me Céline BARBEREAU, substituant Me Philippe RANGE de la SELARL LEXCAP, avocats au barreau d'ANGERS - N° du dossier 13700176
LA BANQUE POSTALE
[Adresse 1]
[Localité 15]
S.A. CNP ASSURANCES agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 10]
[Localité 16]
Représentée par Me Audrey PAPIN, substituant Me Etienne DE MASCUREAU de la SCP ACR AVOCATS, avocats au barreau d'ANGERS - N° du dossier 70150005
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 10 octobre 2023 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente qui a été préalablement entendue en son rapport et devant Monsieur WOLFF, conseiller.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame CORBEL, présidente de chambre
Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente de chambre
Monsieur WOLFF, conseiller
Greffière lors des débats : Madame LEVEUF
Greffier lors du prononcé : Monsieur DA CUNHA
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 03 septembre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, conseillère faisant fonction de présidente et par Tony DA CUNHA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Exposé du litige
Selon proposition d'adhésion n°625 383 049 08 en date du 9 novembre 2006, Mme [X] [I] veuve [O] (ci-après l'assurée), née en 1932, a adhéré par l'intermédiaire de M. [W], conseiller clientèle à l'agence [Adresse 19] de la SA La Banque Postale (ci-après la banque), au contrat d'assurance de groupe sur la vie Vivaccio, formule Vitalité, souscrit par la banque auprès de la SA CNP Assurances (ci-après l'assureur), avec la clause bénéficiaire suivante :
'80 % au profit de mme [E] [F] nee [O] le 28/03/1954 et mme [Z] [D] nee [O] le 15/07/1958 par part egales , a defaut d'[E] pour sa part mme [Z] [D], a defaut de [Z], ses heritiers, 20 % au profit de mr [U] [Y] ne le 07/02/1930, a defaut mme [E] [F] et mme [Z] [D] par parts égales, a defaut mes heritiers',
Mmes [O] épouse [F] et [O] épouse [D] étant ses deux filles et M. [Y] son compagnon qui est décédé le [Date décès 7] 2008.
Suite au décès de l'assurée survenu le [Date décès 7] 2013, les enfants de Mme [O] épouse [D], M. [K] [D] et Mme [C] [D], ont demandé le versement du capital décès en se prévalant d'une modification de la clause bénéficiaire à leur profit opérée par lettre dactylographiée datée du 3 novembre 2008 qu'aurait signé leur grand-mère, établie sur papier à en-tête du bureau d'[Adresse 19] et ainsi rédigée :
'Objet : Changement clause bénéficiaire
Réf: 625 383 049
En cas de décès, je désigne comme bénéficiaires :
Mr [K] [D] né le 19/02/1983 et Mle [C] [D] née le 15/02/1989 par parts égales, à défaut de l'un le survivant, à défaut mes héritiers.'
L'assureur a répondu ne pouvoir prendre en compte leur demande au motif que cet avenant n'avait été porté à sa connaissance qu'après le décès de l'assurée et sous forme d'une simple copie et a maintenu cette position malgré la transmission d'un document manuscrit daté du 6 février 2014 qu'aurait rédigé M. [W], indiquant :
'Objet : Demande d'explications
Monsieur,
Suite à votre demande, et pour autant que je m'en souvienne, j'ai reçu Me [O] le 3 novembre 2008 (seule ou accompagnée, je n'en ai pas souvenir) afin de modifier la clause bénéficiaire de son contrat Vivaccio n°625 383 049 sur sa demande au bureau d'[Adresse 19]. La copie de cet avenant a été fort heureusement gardée dans le dossier ainsi qu'une copie remise à la cliente.
L'applicatif avenant dans le logiciel Partage n'existant pas à l'époque, j'ai envoyé le document par voie postale.
Hormi à soupçonner la non-réception ou la perte de ce courrier, je n'ai pas eu connaissance de la prise en compte ou non de cet avenant.' (sic)
Après avoir vainement mis en demeure l'assureur, par lettre recommandée de leur conseil en date du 17 juillet 2014, de régulariser le dossier et leur remettre les fonds au regard de l'avenant du 3 novembre 2008, et demandé à la banque, simultanément et sous la même forme, de justifier de la remise de l'original de cet avenant à l'assureur et de sa réception, les petits-enfants de l'assurée ont fait assigner l'assureur et la banque les 15 et 16 décembre 2014 devant le tribunal de grande instance d'Angers en exécution du contrat d'assurance-vie Vivaccio et paiement de dommages et intérêts.
Le 31 mai 2016 l'assureur a fait assigner en intervention forcée les filles de l'assurée en qualité de bénéficiaires initiales du contrat.
Les procédures ont été jointes par le juge de la mise en état le 30 juin 2016 et Mme [O] épouse [D] et ses enfants (ci-après ensemble les consorts [D]) ont fait choix du même conseil et conclu de concert.
Par jugement en date du 11 février 2020, le tribunal judiciaire d'Angers, qui a remplacé le tribunal de grande instance en application de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019, a :
- débouté les consorts [D] de leurs demandes,
- condamné la société CNP Assurances d'avoir à verser à Mme [O] épouse [F] la somme correspondant à 50 % du capital décès de l'assurance vie Vivaccio n°625 38304908, souscrite par feu Mme [X] [O] le 9 novembre 2006, outre intérêts au taux légal à compter du jugement,
- condamné in solidum les consorts [D] à verser à la Banque Postale la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné in solidum les consorts [D] aux dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Pour statuer ainsi, il a considéré que :
- il résulte de l'article L. 132-8 du code des assurances que l'assuré peut modifier jusqu'à son décès le nom du bénéficiaire du contrat d'assurance sur la vie, dès lors que sa volonté est exprimée de manière certaine et non équivoque et que l'assureur en a eu connaissance, et que cette désignation ou substitution peut être réalisée par voie d'avenant au contrat ou en remplissant les formalités édictées par l'article 1690 du code civil ou par voie testamentaire,
- seule la CNP Assurances, qui est désignée clairement par le contrat en qualité d'assureur et qui n'est pas sous-traitante de la Banque Postale, laquelle est habilitée en qualité d'intermédiaire à faire souscrire tous contrats d'assurance-vie de groupe garantis par la CNP Assurances sans pouvoir être assimilée à un assureur, doit être retenue comme co-contractante de l'assurée et de ses ayants droits pour l'exécution des garanties d'assurance du contrat et le paiement du capital décès,
- l'assurée a expressément manifesté sa volonté de gratifier son ex-conjoint (sic) et ses deux filles et héritières lors de la souscription du contrat d'assurance-vie Vivaccio,
- l'écrit constitué d'une simple lettre qu'elle aurait établie le 3 novembre 2008 sur papier entête (sic) de la Poste a été adressé en photocopie à l'assureur en 2014, soit postérieurement à son décès, de sorte que celui-ci n'en a pas eu connaissance de son vivant,
- il ne peut être qualifié de testament olographe, ce qui n'est d'ailleurs pas allégué
- les demandeurs ne justifient pas de leurs affirmations relatives à l'état de santé de l'assurée au moment de la signature de cet avenant,
- M. [W] n'ayant jamais attesté que l'assurée avait régularisé l'avenant allégué en compagnie de Mme [O] épouse [D] afin de désigner comme bénéficiaires ses petits-enfants, de même que le directeur d'agence qui a seulement attesté avoir réceptionné la réclamation des consorts [D], il sera constaté que, contrairement à ce que soutiennent les demandeurs, le préposé de la banque n'a pas reconnu dans sa lettre intitulée «Attestation» en date du 6 février 2014 avoir expressément reçu un avenant remis en original par l'assurée et que la présence de Mme [O] épouse [D] lors de la signature de cet avenant n'est pas établie,
- dans ces conditions, les éléments versés par les consorts [D] ne peuvent être retenus, étant précisé qu'ils ne présentent pas les conditions d'impartialité requises compte tenu de l'absence de tout élément extérieur venant les corroborer, et la preuve de la remise d'un original à la banque n'est pas rapportée
- malgré les longues digressions des consorts [D] sur les intentions qui auraient présidé à la volonté de la défunte, toutes déduites par le (sic) mauvais comportement de sa fille, rien ne justifie en quoi elle pouvait se dispenser de se conformer aux dispositions légales relatives au changement de bénéficiaires du contrat d'assurance-vie,
- l'écrit remis en photocopie illisible, revêtue d'une signature prêtée à l'assurée mais approximative, notamment compte tenu de la mauvaise qualité de la copie et de son tracé, et différente de sa signature habituelle telle qu'elle figure sur le contrat initial, n'est pas de nature à exprimer d'une manière certaine et non équivoque la volonté du stipulant,
- il n'est donc pas possible de retenir le caractère fidèle de la copie de l'avenant et de considérer ses petits-enfants comme bénéficiaires de l'assurance-vie Vivaccio, les modifications dont ils se prétendent bénéficiaires ne pouvant être tenues pour contractuellement effectives du vivant du stipulant à défaut de justifier des conditions exigées par l'article L. 132-8 du code des assurances,
- aucune faute n'est établie contre la banque en ce qu'il n'a pas été fait la preuve de la remise d'un original et contre l'assureur qui est bien fondé en son refus de verser les droits de bénéficiaires aux demandeurs en l'absence de respect des formalités,
- compte tenu de la régularité de sa qualité de bénéficiaire à hauteur de 50 % du capital décès de l'assurance-vie Vivaccio, soit à parts égales avec sa soeur après le décès du compagnon de sa mère, Mme [O] épouse [F] est fondée à solliciter reconventionnellement le versement du capital lui revenant.
Suivant déclaration en date du 16 mars 2020, les consorts [D] ont relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions, listées dans l'acte d'appel, intimant Mme [O] épouse [F], la banque et l'assureur.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 septembre 2023, conformément à l'avis de clôture et de fixation adressé par le greffe aux parties le 17 mai 2023.
Dans leurs dernières conclusions récapitulatives et modificatives n°2 en date du 15 février 2021, les consorts [D] demandent à la cour, les recevant en leur appel ainsi qu'en leurs demandes, y faisant droit, d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, au visa des articles 31, 43, 515 et suivants du code de procédure civile, 1348 alinéa 2, 1147, 1134, 1135, 1142, 1146 et 1153 anciens du code civil, L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, de :
- constater le caractère fidèle et durable à l'original de la copie de l'avenant signé par Mme [X] [O] le 3 novembre 2008 et désignant comme uniques bénéficiaires du contrat Vivaccio n°625 383 049 M. [K] [D] et Mme [C] [D],
- condamner solidairement la Banque Postale et la CNP Assurances à exécuter le contrat d'assurance-vie Vivaccio n°625 383 049 à l'égard de M. [K] [D] et de Mme [C] [D] conformément à l'avenant régularisé le 3 novembre 2008, ce avec intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2014 et sous astreinte de 500 euros chacun par jour de retard à compter du jugement (sic) à intervenir,
- constater que la Banque Postale et la CNP Assurances ont commis une faute à leur égard pour avoir perdu l'original de l'avenant signé le 3 novembre 2008 par Mme [X] [O] au contrat Vivaccio n°625 383 049 et ne pas l'avoir enregistré dans son dossier,
en conséquence,
- condamner solidairement la Banque Postale et la CNP Assurances au paiement à chacun de la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi par eux,
- à titre subsidiaire, s'il n'était pas fait droit à la demande d'exécution de l'avenant du 3 novembre 2008, condamner solidairement la Banque Postale et la CNP Assurances au paiement de la somme globale de 118 955,29 euros correspondant à la somme qui aurait dû être partagée entre M. [K] [D] et Mme [C] [D] si l'avenant avait été dûment enregistré par les services concernés, ce à titre de préjudice financier,
- condamner solidairement la Banque Postale et la CNP Assurances au paiement de la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
y ajoutant,
- débouter Mme [F] de l'intégralité de ses demandes,
- condamner solidairement la Banque Postale et la CNP Assurances à la somme de 7 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,
- condamner Mme [F] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejetant toutes prétentions contraires, condamner la Banque Postale et la CNP Assurances aux entiers dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions d'intimée n°1 avec appel incident en date du 16 novembre 2020, Mme [O] épouse [F] demande à la cour, au visa des articles 1134, 1135, 1331 et 1348 alinéa 2 du code civil, dans leur rédaction applicable à l'espèce, de :
- dire et juger que Mme [Z] [D], M. [K] [D] et Mme [C] [D] ne rapportent pas la preuve que la photocopie litigieuse du prétendu avenant du 3 novembre 2008 constituerait une reproduction fidèle et durable de l'original allégué ni la preuve d'éléments extrinsèques venant le confirmer,
- dire et juger qu'ils ne rapportent pas la preuve qu'ils auraient subi un quelconque préjudice moral,
en conséquence,
- débouter Mme [Z] [D], M. [K] [D] et Mme [C] [D] de leur appel,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés de leur demande tendant à condamner solidairement la Banque Postale et la société CNP Assurances à exécuter le contrat d'assurance-vie Vivaccio n°625 383 049 08 à leur égard, conformément à l'avenant du 3 novembre 2008, ce avec intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2014 et ce sous astreinte de 500 euros chacun par jour de retard à compter du jugement à intervenir, et de toutes autres demandes,
reconventionnellement et faisant droit à l'appel incident,
- condamner la société CNP Assurance à lui verser la somme correspondant à 50 % du capital décès de l'assurance-vie Vivaccio n°625 383 049 08, souscrite par feu Mme [X] [O] le 9 novembre 2006, outre intérêts au taux légal à compter de la notification des premières conclusions en faisant la demande, soit le 24 avril 2017,
- condamner in solidum Mme [Z] [D], M. [K] [D] et Mme [C] [D] à lui payer la somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de la SELARL Lexcap (Me Rangé), avocats associés, en application de l'article 699 du même code.
Dans ses dernières conclusions n°3 en date du 10 août 2023, la SA CNP Assurances demande à la cour de :
- lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte sur l'appel des consorts [D]
en toute hypothèse,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [C] [D], M. [K] [D] et Mme [Z] [D] de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre elle, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et financier, de la demande d'astreinte et au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- en cas de confirmation du jugement, dire et juger qu'elle devra verser à Mme [O] épouse [F] la somme correspondant à 50 % du capital décès et à Mme [O] épouse [D] la somme correspondant aux 50 % qui restent au titre du capital décès de l'assurance-vie Vivaccio n°625 383 049 08 souscrite par feu Mme [X] [O] le 9 novembre 2006,
- rejeter toutes prétentions contraires,
- débouter Mme [O] épouse [F] des fins de son appel incident et de ses demandes dirigées contre elle,
- condamner les consorts [D] appelants à lui verser la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- statuer ce que de droit sur les dépens, dont aucune part ne saurait être laissée à sa charge.
Dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 23 novembre 2020, la SA La Banque Postale demande à la cour, au visa des articles 1134, 1135 et 1348 alinéa 2 anciens du code civil, de :
- déclarer les appelants mal fondés en leur appel,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les consorts [D] de toutes leurs demandes dirigées à son encontre et en ce qu'il lui a alloué la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter les consorts [D] de toutes leurs demandes dirigées à son encontre,
- condamner solidairement Mme [C] [D], M. [K] [D] et Mme [Z] [D] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens, lesquels pourront être recouvrés par Me de Mascureau du barreau d'Angers dans les formes prévues à l'article 699 du même code.
Sur l'audience de plaidoirie du 10 octobre 2023, les parties ont été invitées à apporter en délibéré sous un mois toutes précisions de fait sur la provenance des copies de l'avenant litigieux versées aux débats, les appelants affirmant en pages 10 et 11 de leurs conclusions que celle qu'ils communiquent en pièce n°1 est identique à celles détenues et produites par la banque en pièce n°6 et par l'assureur en pièce n°5, alors que la banque ne produit aucune pièce en appel et ne s'explique pas sur la provenance des copies versées aux débats et que l'assureur ne précise pas expressément si la copie qu'il produit en pièce n°6 correspond à celle que lui a adressée M. [W] par un courrier en date du 14 janvier 2014 qu'il produit en pièce n°5.
Y ont seuls répondu :
- la banque qui indique, dans une note transmise le 7 novembre 2023, que, n'ayant communiqué aucune pièce dans l'instance, elle ne peut que s'en remettre aux pièces adverses, dont la correspondance de M. [W] qui confirme avoir reçu l'assurée le 3 novembre 2008 (sans affirmer que l'avenant a été rédigé en sa présence), avoir adressé l'avenant par voie postale et n'en avoir conservé que la copie et que ce n'est d'ailleurs que la copie de cet avenant qui a été adressée à nouveau à l'assureur en 2014,
- les appelants qui indiquent, dans une note transmise le 9 novembre 2023, que leur pièce n°1 correspond à l'avenant régularisé par l'assurée au sein du bureau d'[Adresse 19], signé par elle et M. [W] qui l'a rédigé sur les instructions de sa cliente en présence de Mme [D], qu'il s'agit de la copie que M. [W] a remise à l'assurée à l'issue de ce rendez-vous ainsi qu'il en a attesté et que le confirme la banque dans sa note en délibéré, que la pièce n°6 de l'assureur est une copie du double de l'avenant qui lui a été transmis par la banque le 3 novembre 2008 et/ou en 2014, que si la banque n'a pas communiqué de pièces en appel comme en première instance, elle s'est appropriée celles de l'assureur qui a, pour sa part, communiqué 21 pièces, et non 16 comme indiqué par erreur dans son bordereau, et que l'existence de l'avenant n'a jamais été contestée ni par M. [W] qui a affirmé avoir conservé une copie, envoyé l'original à l'assureur et donné une copie à l'assurée, ni par le directeur de l'agence d'[Adresse 19].
Sur ce,
Sur les demandes d'exécution du contrat d'assurance-vie
En matière d'assurance sur la vie, l'article L. 132-8 du code des assurances dispose, en ses alinéas 1 et 6 :
'Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l'assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.
En l'absence de désignation d'un bénéficiaire dans la police ou à défaut d'acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu'avec l'accord de l'assuré, lorsque celui-ci n'est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d'avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l'article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.'
Il résulte de ce texte que l'assuré peut modifier jusqu'à son décès le nom du ou des bénéficiaire(s) tant que ceux-ci n'ont pas accepté, qu'il suffit que la volonté du stipulant se soit exprimée de manière certaine et non équivoque en ce sens et ait été portée de son vivant (sauf si la modification est réalisée par voie testamentaire) à la connaissance de l'assureur et qu'une telle modification n'est subordonnée à aucune règle de forme ni au respect d'un parallélisme des formes d'avec la désignation initiale, la désignation de bénéficiaire(s) étant un acte unilatéral n'exigeant pas le consentement de l'assureur.
En l'espèce, il n'est fait état d'aucune modification de la désignation des bénéficiaires du contrat d'assurance-vie Vivaccio par voie testamentaire.
En outre, rien ne démontre que la volonté de l'assurée, à la supposer établie, de modifier la clause bénéficiaire d'origine pour désigner comme bénéficiaires ses petits-enfants a été portée de son vivant à la connaissance de l'assureur.
En effet, l'assureur a répondu le 11 février 2014 à M. [W], conseiller financier préposé de la banque, qui lui avait adressé par courrier en date du 14 janvier 2014 'la copie de l'avenant de clause bénéficiaire non enregistré pour le contrat Vivaccio n°625 383 09 en date du 3/11/2008' en lui demandant de 'faire le nécessaire et reprendre contact avec les bénéficiaires [...] afin de constituer leur dossier', que 'ce document n'a pas été réceptionné en 2008 par CNP Assurances', puis a confirmé le 21 mars 2014 à Mme [O] épouse [D], suite à la réclamation de celle-ci en date du 1er février 2014 retransmise par M. [P], directeur d'établissement du bureau de poste d'[Adresse 18] où M. [W] exerçait alors ses fonctions et de celui d'[Adresse 19] où il exerçait antérieurement, que 'malgré les recherches entreprises aucune trace n'en a été trouvée à CNP Assurances'.
Si, dans la lettre d'explications du 6 février 2014 dont ni la banque, qui estime seulement que son contenu est dépourvu de tout caractère probant, ni l'assureur, qui la produit également en dernière page de sa pièce n°4 correspondant aux courriers qu'il a échangés avec les consorts [D], ne contestent qu'elle a été établie par M. [W] et dont le caractère manuscrit et l'absence de document d'identité joint ne suffisent pas à la rendre suspecte contrairement à ce que soutient Mme [O] épouse [F] dès lors qu'elle porte clairement le cachet de M. [W] au sein de l'agence d'[Adresse 18] et une signature parfaitement compatible avec celles apposées par celui-ci sur la proposition d'adhésion du 9 novembre 2006 et sur chaque «demande d'opération financière - versement ultérieur» des 27 janvier 2009, 9 avril 2010 et 7 juin 2010 produites par l'assureur, M. [W] a affirmé, avoir 'envoyé le document par voie postale' à l'assureur à l'issue de son rendez-vous du 3 novembre 2008 avec l'assurée et après en avoir remis une copie à celle-ci et en avoir gardé une copie au dossier, il y a également admis n'avoir 'pas eu connaissance de la prise en compte ou non de cet avenant'.
De son côté, la banque, à qui le conseil des consorts [D] a demandé le 17 juillet 2014 de justifier avoir 'remis à la CNP l'original de l'avenant régularisé le 3 novembre 2008' et de fournir 'l'accusé de réception de ladite CNP de cette modification de clause bénéficiaire', n'a jamais été en mesure d'y pourvoir.
Enfin, il n'est pas soutenu que la banque avait le pouvoir de recevoir l'avenant de modification pour le compte de l'assureur auquel, comme l'a exactement considéré le premier juge sans être utilement contredit par les appelants, elle ne saurait être assimilée.
Il n'est donc pas établi que le document du 3 novembre 2008 est effectivement parvenu à l'assureur avant le décès de l'assurée.
Dès lors, pour ce seul motif et sans qu'il soit besoin de rechercher si la (ou les) copies de ce document exprime(nt), ou non, de manière certaine et non équivoque la volonté de l'assurée de modifier le nom des bénéficiaires du contrat d'assurance-vie Vivaccio, il ne peut qu'être considéré que la clause bénéficiaire de ce contrat n'a pas été modifiée valablement au profit des petits-enfants de l'assurée dans les conditions de l'article L. 132-8 du code des assurances et que seule reste applicable la clause d'origine désignant comme bénéficiaires ses deux filles à parts égales en l'état du du pré-décès de son compagnon.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a, d'une part, débouté les consorts [D] de leur demande de condamnation solidaire de la banque et de l'assureur à exécuter sous astreinte le contrat d'assurance-vie Vivaccio à l'égard de M. [D] et de Mme [D] conformément à l'avenant du 3 novembre 2008, d'autre part, condamné l'assureur à verser à Mme [O] épouse [F] la somme correspondant à 50 % du capital décès de ce contrat.
Comme le demande l'assureur, il sera précisé qu'il devra verser les 50 % restant du capital décès à Mme [O] épouse [D].
Faisant droit à l'appel incident de Mme [O] épouse [F], il sera dit que, conformément à l'article 1153 ancien devenu 1231-6 du code civil, la condamnation de l'assureur sera assortie des intérêts de droit au taux légal à compter, non pas du jugement, mais de la première demande en justice de l'intéressée par voie de conclusions, soit le 24 avril 2017, sans que ces intérêts s'imputent sur le montant des sommes détenues par l'assureur, la demande en ce sens de ce dernier n'étant d'ailleurs pas reprise au dispositif de ses conclusions.
À cet égard, il importe peu que l'assureur s'en soit remis à la décision du juge sur la valeur probante de la copie du document du 3 novembre 2008 produite après le décès de l'assurée dès lors qu'il a conservé par devers lui les fonds issus du contrat sans les reverser à quelque bénéficiaire que ce soit.
Sur les demandes indemnitaires
S'agissant de l'assureur, en l'absence de toute preuve qu'il a eu connaissance de la modification de la clause bénéficiaire avant le décès de l'assurée, il ne saurait lui être reproché à faute ni d'avoir refusé d'exécuter son obligation contractuelle au profit des nouveaux bénéficiaires désignés ni d'avoir perdu l'original du document du 3 novembre 2008 ou omis de l'enregistrer en tant qu'avenant.
Le jugement doit, dès lors, être confirmé en ce qu'il a débouté les consorts [D] de leurs demandes indemnitaires contre l'assureur.
S'agissant de la banque, elle s'en remet à la sagesse de la cour sur le point de savoir si la photocopie du document du 3 novembre 2008 est un document sincère et ne conteste pas que M. [W] a, comme il l'explique dans sa lettre du 6 février 2014, reçu le 3 novembre 2008 au bureau d'[Adresse 19] l'assurée qui désirait modifier la clause bénéficiaire de son contrat d'assurance-vie et envoyé l'avenant à l'assureur par voie postale pour enregistrement après en avoir gardé une copie et remis une autre à la cliente.
Il sera, néanmoins, relevé que, M. [W] n'étant pas partie à l'instance, elle n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions du 3ème alinéa de l'article 1383-2 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 (1356 ancien), selon lequel l'aveu judiciaire ne peut être divisé contre son auteur.
Même si M. [W] ne le précise pas expressément, le document qu'il affirme avoir envoyé à l'assureur ne peut être que l'original de l'avenant.
Il importe peu que, faute d'en avoir gardé le souvenir, il n'ait pu confirmer que Mme [O] épouse [D] a, comme elle le prétend, accompagné sa mère dans sa démarche de changement de bénéficiaires du 3 novembre 2008, ce qui est d'ailleurs rendu vraisemblable par le fait qu'il a reçu et contresigné le même jour une demande de transformation du compte CCP de l'assurée en compte «Adispo Privilège» avec comme deuxième titulaire Mme [O] épouse [D], demande dont les appelants communiquent en pièce n°21 une photocopie d'exemplaire carbone de mauvaise qualité mais malgré tout déchiffrable.
La banque reconnaît également dans sa note en délibéré que la copie du document du 3 novembre 2008 que M. [W] a, postérieurement au décès de l'assurée, adressée à nouveau le 14 janvier 2014 à l'assureur qui la produit en pièce n°6 correspond à celle qu'il avait conservée au dossier.
Cette copie est en tous points identique, quoique de moins bonne qualité, à celle nettement lisible produite en pièce n°1 par les appelants qui déclarent l'avoir retrouvée dans les affaires de l'assurée à son domicile après son décès, ce qui suffit à écarter l'hypothèse émise par Mme [O] épouse [F] d'une altération 'par des procédés de technologie moderne, voire par la simple superposition de plusieurs photocopies'.
Ces deux photocopies conformes apparaissent donc comme la reproduction fidèle de l'original du document du 3 novembre 2008.
Ce document dactylographié a été établi sur papier à en-tête du bureau d'[Adresse 19] à destination d'Assurposte, selon une composition générale semblable et une taille et une police de caractères identiques à celui du courrier adressé le 14 janvier 2014 par M. [W] à l'assureur sur papier à en-tête du bureau d'[Adresse 18].
Il comporte une signature identifiable, même si le tracé de la première lettre et des deux lignes soulignant le nom '[O]' est en partie effacé, signature que les consorts [D] reconnaissent comme étant celle de l'assurée et qui, contrairement à ce que soutient Mme [O] épouse [F], laquelle 's'interroge[...] sur le caractère réel et probant de ce prétendu avenant' sans aller jusqu'à l'arguer de faux, et à ce qu'a retenu le tribunal, ne présente pas de différence significative d'avec la signature habituelle de l'assurée telle qu'elle figure sur la proposition d'adhésion du 9 novembre 2006, mais aussi sur ses demandes d'opération financière - versement ultérieur des 27 janvier 2009, 9 avril 2010 et 7 juin 2010 ainsi que sur la procuration qu'elle a consentie le 4 décembre 2008 à Mme [O] épouse [D] sur un autre compte ouvert à la Banque Populaire Atlantique.
Les appelants ont, d'ailleurs, postérieurement au jugement, sollicité l'avis d'un expert en écriture qui, après comparaison avec les quatres signatures originales de l'assurée figurant sur une reconnaissance de dette du 14 avril 1998 et sur ses avis d'impôt sur le revenu des années 2008 (signé le 5 août 2009), 2009 (signé le 16 août 2010) et 2011 (signé le 9 août 2012) et avec ses quatre signatures figurant sur ses testaments des 1er décembre 1987, 20 octobre 2011 et 27 avril 2012 annexés à la copie authentique de l'acte de dépôt de testament olographe du 30 avril 2015, tous documents versés aux débats par les appelants, a conclu le 17 novembre 2020, sous les réserves qu'impose l'impossibilité d'observer le trait graphique sur l'original, que 'la comparaison de la signature litigieuse Q avec les signatures de comparaison G (Madame [O]), a permis de retrouver sur cette signature Q les modalités graphiques des signatures G, en l'absence d'éléments suspects justifiant une mesure de contrefaçon' et que 'la signature apposée au bas du document 'Changement clause bénéficiaire' établi en date du 3 novembre 2008 est de la main de Mme [X] [O]'.
Le document comporte également, en pied de page, un tampon circulaire sur lequel on peut lire, bien qu'il soit en partie effacé, '49 - [Adresse 19]' et '3-11 2008', avec la griffe de M. [W], certes assez différente de sa signature complète figurant sur les documents contractuels et sa lettre d'explications, mais parfaitement compatible avec la griffe apposée sur son courrier du 14 janvier 2014.
Il n'est, par ailleurs, fait état d'aucune altération des facultés de l'assurée à la date de signature du document dont le contenu est clair et précis.
Si Mme [O] épouse [F] indique, au sujet du changement de bénéficiaires, qu'il est 'difficile d'imaginer que feu Madame [X] [O] ait pensé effectuer un tel changement seulement quelques jours après le décès de son compagnon qui l'avait profondément affectée', il s'agit d'une simple supputation qui ne repose sur aucun élément concret, d'autant que, comme elle l'expose, les problèmes de santé qu'elle et son époux, qui venait au surplus de perdre son père, rencontraient à l'époque l'ont empêchée d'être présente aux côtés de sa mère pour la soutenir lors du décès de son compagnon le [Date décès 7] 2008.
Il apparaît ainsi qu'en signant le document du 3 novembre 2008 et en le remettant à son conseiller et interlocuteur habituel M. [W], l'assurée a exprimé de manière certaine et non équivoque sa volonté de désigner ses deux petits-enfants comme nouveaux bénéficiaires du contrat d'assurance-vie Vivaccio en remplacement de ses deux filles et que cette volonté n'a été privée d'effet que par la perte de ce document à l'occasion de sa transmission pour enregistrement à l'assureur qui ne l'a pas reçu du vivant de l'assurée.
Or, que cette perte soit survenue avant l'envoi du document par son préposé, ce qui ne peut être exclu, ou au cours de son acheminement, la banque s'est abstenue de s'assurer, comme elle en avait l'obligation en sa qualité d'intermédiaire, de la réception effective du document par l'assureur et de la régularisation de l'avenant correspondant, alors même que l'assurée a effectué, toujours par son intermédiaire en la personne de M. [W], des versements complémentaires sur son contrat d'assurance-vie les 27 janvier 2009, 9 avril 2010 et 7 juin 2010.
Elle a ainsi commis une faute qui est directement à l'origine de l'impossibilité pour les petits enfants de se prévaloir de la qualité de bénéficiaires, et non pas d'une simple perte de chance, l'assurée n'ayant jamais manifesté ultérieurement la volonté de modifier à nouveau la clause bénéficiaire.
Elle engage donc sa responsabilité, sans pouvoir reprocher à l'assurée et/ou à Mme [O] épouse [D], quand bien même celle-ci aurait pris une part active dans la gestion des affaires de sa mère, de ne pas s'être étonnée(s) de la non-réception de l'avenant émis par l'assureur qui concrétise systématiquement un changement de bénéficiaires dès lors que celles-ci n'avaient aucune raison de douter de la transmission du document du 3 novembre 2008 et qu'il n'est pas allégué ni démontré qu'elles étaient rompues à de telles opérations, ni à M. [D] et Mme [D] de n'avoir pas procédé à l'acceptation de la clause bénéficiaire pour la rendre irrévocable dès lors qu'il s'agit d'une simple faculté et qu'il n'est aucunement prouvé qu'ils étaient informés de la démarche de leur grand-mère, ce qu'ils contestent.
Dans la mesure où Mme [O] épouse [D], prenant fait et cause pour ses enfants, entend faire respecter et respecter elle-même la volonté exprimée par sa mère dans le document du 3 novembre 2008 et va donc remettre à ceux-ci, en vertu d'une obligation morale, la part de 50 % du capital décès que doit lui verser l'assureur en sa qualité de bénéficiaire initiale mais dont elle ne demande le paiement à son profit ni à titre principal ni à titre subsidiaire, M. [D] et Mme [D] ne peuvent prétendre, à concurrence de moitié chacun, qu'à l'octroi d'une indemnité compensant la seule part de 50 % revenant à leur tante Mme [O] épouse [F] dont ils seront effectivement privés par la faute de la banque.
Le capital décès s'élevant à la somme de 118 955,29 euros ainsi qu'il ressort d'un échange de mails entre le service juridique et fiscal de l'assureur et son service relations clients, produit en pièce 8 par l'assureur, la banque sera condamnée à verser à M. [D] et à Mme [D], chacun, la somme de 29 738,82 euros à titre de dommages et intérêts.
S'y ajoute le préjudice moral subi par les consorts [D] qui, affligés de constater que la volonté de la défunte n'était pas honorée malgré leurs diligences avant l'introduction de l'instance, ont dû subir les tracas d'une longue procédure judiciaire pour obtenir gain de cause sur leur demande subsidiaire.
En dehors de toute prise en compte de la 'méchanceté', de la 'cupidité' et des 'propos dégradants' envers sa soeur qu'ils prêtent à Mme [O] épouse [F] et auxquels la banque est étrangère, ce préjudice moral sera estimé pour chacun d'eux à la somme de 1 000 euros due par la banque à titre de dommages et intérêts.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a débouté les consorts [D] de leurs demandes indemnitaires contre la banque.
Sur les demandes annexes
Partie principalement perdante, la banque supportera seule les entiers dépens de première instance et d'appel, le jugement étant infirmé à cet égard.
En outre, en considération de l'équité et de la situation respective des parties, elle sera tenue de verser aux consorts [D] ensemble la somme globale de 7 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés en première instance et en appel sur le fondement de l'article 700 1° du code de procédure civile sans pouvoir prétendre au bénéfice du même texte dont il n'y a pas lieu de faire application, par ailleurs, au profit de Mme [O] épouse [F] ni de l'assureur, le jugement étant également infirmé sur ce point.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Infirme le jugement entrepris excepté en ce qu'il a débouté les consorts [D] de leur demande d'exécution sous astreinte du contrat d'assurance-vie Vivaccio n°625 383 049 08 à l'égard de M. [K] [D] et de Mme [C] [D] conformément à l'avenant du 3 novembre 2008, condamné la société CNP Assurances à verser à Mme [E] [O] épouse [F] la somme correspondant à 50 % du capital décès de cette assurance-vie souscrite par feu [X] [O] le 9 novembre 2006 et débouté les consorts [D] de leurs demandes indemnitaires contre la société CNP Assurances.
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Assortit la condamnation de la société CNP Assurances au profit de Mme [E] [O] épouse [F] des intérêts au taux légal à compter du 24 avril 2017.
Dit que la société CNP Assurances devra verser les 50 % restant du capital décès à Mme [Z] [O] épouse [D].
Condamne la société La Banque Postale à payer à M. [K] [D] et à Mme [C] [D], chacun, la somme de 29 738,82 euros (vingt neuf mille sept cent trente huit euros et quatre vingt deux cents) à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice financier.
La condamne à payer à M. [K] [D], à Mme [C] [D] et à Mme [Z] [O] épouse [D], chacun, la somme de 1 000 (mille) euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral.
La condamne à payer à M. [K] [D], à Mme [C] [D] et à Mme [Z] [O] épouse [D], ensemble, la somme de 7 000 (sept mille) euros en application de l'article 700 1° du code de procédure civile et rejette toute autre demande au même titre.
Condamne la société La Banque Postale aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du même code.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE SUPPLÉANTE
T. DA CUNHA C. MULLER