COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - COMMERCIALE
CC/ILAF
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 22/01696 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FB7O
jugement du 22 Septembre 2022
Juge de l'exécution d'ANGERS
n° d'inscription au RG de première instance 11 22-199
ARRET DU 25 JUILLET 2024
APPELANT :
Monsieur [L] [C]
né le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représenté par Me Véronique PINEAU de la SELARL ATLANTIQUE AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Me Bertrand SALQUAIN, avocat plaidant au barreau de NANTES
INTIMEE :
S.A.S. CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED
représentée par M. [B] [S], venant aux droits de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL PYRENEES GASCOGNE et représentée par la société CABOT FINANCIAL FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Thierry BOISNARD de la SELARL LEXCAP, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier E00006RE et par Me Messaline LESOBRE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 13 Mai 2024 à 14'H'00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, présidente de chambre qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, présidente de chambre
Madame PORTMANN, présidente de la chambre sociale
Mme GANDAIS, conseillère
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 25 juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine CORBEL, présidente de chambre et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
Suivant acte reçu le 25 avril 2006 par M. [Y] [U], notaire à [Localité 6] (92), la Caisse régionale du crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne (le Crédit agricole) a consenti un prêt d'un montant de 175 000 euros à la SCI Imanoo, représentée par son gérant, M. [L] [C], remboursable au taux de 4,40'% sur 180 mois, pour financer l'acquisition d'un bien immobiler.
Par le même acte, M. [C] s'est porté caution solidaire de la SCI Imanoo dans la limite de la somme de 227 500 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts ets le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard, pour une durée de dix-sept ans. Le remboursement du prêt était également garanti par un privilège du prêteur de deniers inscrit sur l'immeuble acquis.
La société Imanoo ayant cessé de rembourser les échéances du prêt, le Crédit agricole, par lettre recommandée avec avis de réception du 1er juillet 2010, a mis en demeure M. [C], en sa qualité de caution solidaire, de régler les échéances impayées du prêt, soit la somme de 8169,86 euros.
Le Crédit agricole a prononcé la déchéance du terme du prêt, le 9 août 2010.
Le 6 octobre 2011, l'immeuble acquis par la société Imanoo a été vendu aux enchères au prix de 100 000 euros dans le cadre d'une procédure de saisie immobilière à l'issue de laquelle la somme de 59 874,77 euros a été distribuée au Crédit agricole, le 24 octobre 2012.
Par lettre du 26 février 2013, le Crédit agricole a mis en demeure M. [C] de lui payer la somme de 135 530,54 euros en exécution de son engagement de caution..
Suivant commandement aux fins de saisie-vente signifié le 15 novembre 2013, la banque a enjoint M. [C] de lui payer la somme de 144 736,19 euros.
Le 3 mars 2014, le Crédit agricole a inscrit une hypothèque judiciaire provisoire sur l'immeuble d'habitation appartenant à M. [C] situé aux [Localité 8] pour la somme de 139 350 euros, dénoncée aux époux [C] le 7 mars 2004.
Par jugement du 2 juillet 2015, confirmé par arrêt rendu le 21 février 2017 par la cour d'appel de céans, le juge de l'exécution d'Angers a rejeté les demandes de M. et Mme [C] tendant à voir ordonner la mainlevée partielle de cette hypothèque. Cet arrêt a été partiellement cassé arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 10 janvier 2019.
Par requête du 4 juillet 2017, le Crédit agricole a saisi le tribunal d'instance d'Angers d'une demande de saisie des rémunérations de M.[C], toujours en exécution de l'acte authentique du 25 avril 2006. Par un jugement du 17 mai 2018, le tribunal d'instance d'Angers a ordonné cette saisie des rémunérations pour une somme totale de 182 722,37 euros. Ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour de céans du 31 janvier 2023.
Entre-temps, le 6 janvier 2022, le Crédit agricole a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes détenus par M. [C] auprès du Crédit Agricole Charente Maritime - Deux Sèvres, toujours en exécution de l'acte authentique du 25 avril 2006, pour paiement d'une somme totale de 253 203,27 euros, comprenant un principal d'un montant de 182 722,37 euros. Le 11 janvier 2022, le procès-verbal de saisie-attribution a été dénoncé à M. [C] par acte d'huissier.
Le 9 février 2022 M. [C] a fait assigner le Crédit agricole devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Angers en vue d'obtenir un sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt devant intervenir sur l'appel du précédent jugement du 17 mai 2018 ou la mainlevée de la saisie-attribution.
Par jugement rendu le 22 septembre 2022, le juge de l'exécution a :
- rejeté la demande de sursis à statuer ;
- débouté M. [C] de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 6 janvier 2022 ;
- débouté M. [C] de sa demande de mainlevée partielle de la saisie-attribution pratiquée le 6 janvier 2022 quant aux intérêts ;
- débouté M. [C] de sa demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [C] à verser au Crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [C] aux dépens ;
Par déclaration reçue au greffe le 7 octobre 2022, M. [C] a interjeté appel de ce jugement en attaquant chacune de ses dispositions.
Le Crédit Agricole a été intimé.
Suivant acte d'huissier du 12 décembre 2022, la société Cabot sécuritisation Europe Limited a fait signifier à M. [C] un acte du 15 septembre 2022 par lequel le Crédit agricole lui a cédé la créance en principal d'un montant de 181'022,23 euros outre tous ses accessoires, détenue à son encontre.
La société Cabot securitisation Europe Limited est intervenue volontairement à l'instance en déclarant venir aux droits du Crédit agricole.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 mai 2024.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
M. [C] demande à la cour de :
À titre principal :
- déclarer irrecevables toutes conclusions que pourrait prendre la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Pyrénées Gascogne dans le cadre de la présente procédure,
- déclarer irrecevable l'intervention de la société Cabot sécuritisation Europe limited,
- débouter en conséquence la société Cabot sécuritisation Europe limited de l'intégralité de ses demandes ;
À titre subsidiaire :
- enjoindre à la société Cabot sécuritisation Europe limited et à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Pyrénées Gascogne de produire l'intégralité de l'acte de cession de créance du 15 septembre 2022, portant la mention du prix de cession, dans un délai de sept jours à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
- surseoir jusqu'à la communication de l'acte de cession de créance du 15'septembre 2022,
- infirmer le jugement rendu le 22 septembre 2022 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Angers en toutes ses dispositions ;
A titre subsidiaire :
- considérer que la créance invoquée par le Crédit Agricole et la société Cabot securitisation Europe limited à l'appui de la saisie-attribution contestée ne résulte pas de l'acte notarié du 25 avril 2006 mais d'un décompte arrêté au 19 juin 2017;
- considérer que l'acte authentique du 25 avril 2006 ne constitue pas un titre exécutoire valable au sens de la jurisprudence de la Cour de cassation du 22'mars 2018, en ce qu'il n'a pas pour objet le paiement d'une somme déterminée, et non pas seulement déterminable ;
- déclarer irrecevable la mesure de saisie-attribution pratiquée en l'absence de titre exécutoire ;
En conséquence, ordonner la mainlevée de la saisie-attribution du 6 janvier 2022';
A titre encore subsidiaire,
- déclarer prescrite l'action en paiement du Crédit Agricole et de la société Cabot securitisation Europe limited contre M. [C], en qualité de caution d'un prêt professionnel du 25 avril 2006 ;
En conséquence, ordonner la mainlevée de la saisie-attribution du 6 janvier 2022';
A titre très subsidiaire,
- considérer que le Crédit Agricole et la société Cabot securitisation Europe limited ne peuvent se prévaloir de l'acte de cautionnement à l'égard de M.'[C] en raison du caractère manifestement disproportionné de cet engagement de caution ;
- ordonner la mainlevée de la saisie-attribution du 6 janvier 2022 ;
A titre infiniment subsidiaire,
- considérer que les intérêts sollicités par le Crédit Agricole et la société Cabot sécuritisation Europe limited sont soumis à la prescription quinquennale''; que le Crédit Agricole ne produit pas un décompte des intérêts tenant compte de cette prescription ;
- rectifier les causes de la saisie-attribution du 6 janvier 2022 en ôtant l'ensemble des intérêts ;
- ordonner la mainlevée partielle de la saisie à due proportion ;
En toute hypothèse,
- condamner in solidum le Crédit agricole et la société Cabot securitisation Europe limited à régler à M. [C] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la même aux entiers dépens, en ce compris les frais de saisie-attribution;
La société Cabot securitisation Europe Limited demande à la cour de :
- recevoir l'intervention volontaire de la société Cabot securitisation Europe Limited venant aux droits de la Caisse régionale de crédit agricole Mutuel Pyrénées Gascogne,
- confirmer le jugement rendu le 22 septembre 2022 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Angers,
- rejeter l'ensemble des demandes, moyens et prétentions de M. [C],
- le condamner à régler à la société Cabot securitisation Europe Limited ayant pour mandataire la société Cabot financial France la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :
- le 26 janvier 2024 pour M. [C],
- le 2 mai 2024 pour la société Cabot securitisation Europe Limited.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'intervention de la société Cabot securitisation europe limited
M. [C] conteste à la société Cabot securitisation Europe Limited le droit d'agir contre lui en considérant qu'elle ne justifie pas détenir la créance en cause dans la mesure où le premier acte de cession de créance qui lui a été communiqué n'indique que le nom du débiteur (Imanoo), sans référence plus précise, et que le second acte communiqué, sur lequel il est mentionné au titre des créances cédées 'ensemble des créances (et leurs accessoires) cédées listées en annexe de l'acte de cession ('le portefeuille')' est occulté en partie, que rien ne permet de vérifier que la page 2 correspond bien à l'annexe à laquelle renvoie l'acte et qu'il n'est pas possible de savoir à quoi correspondent les colonnes qui y figurent, de sorte que ces pièces ne permettent pas de s'assurer que la cession porte sur la créance objet du litige. Il ajoute que, le 2 mars 2023, il s'est vu signifier un commandement de payer aux fins de saisie vente par le Crédit agricole alors que l'acte de cession de créances produit porte la date du 15'septembre 2022. A titre subsidiaire, il demande à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de la communication de l'acte de cession du 15 septembre 2022.
La société Cabot securitisation Europe Limited, qui fait observer que ses droits ont déjà été reconnus par l'arrêt du 31 janvier 2023 rendu à son profit, affirme que la créance du Crédit agricole contre M. [C] lui a été cédée dans sa totalité, soit à hauteur de 181 022,23 euros en principal outre intérêts et frais, selon un acte de cession du 15 septembre 2022.
En effet, la société Cabot securitisation Europe Limited produit deux actes dont un par lequel le Crédit agricole lui cède la créance contre la société Imanoo sous la référence 33031, d'un montant en principal de 181 022,23 euros, signé des deux parties le 15 septembre 2022.
Cet acte suffit à opérer substitution pure et simple du cessionnaire au cédant dans ses droits. La société Cabot securitisation Europe Limited a seule intérêt et qualité pour agir.
De ce fait, le moyen tenant à l'irrecevabilité des conclusions du Crédit agricole pour ne pas avoir remis ses conclusions dans le délai imparti à l'article 905-2, alinéa 2 du code de procédure civile, outre qu'il est irrecevable pour ne pas avoir été soulevé devant le président de la chambre, exclusivement compétent pour en connaître jusqu'à son dessaisissement, est inopérant.
Sur le retrait litigieux
Partant de ce que la cession en bloc d'un grand nombre de droits et créances ne fait pas obstacle à l'exercice du droit de retrait litigieux à l'égard d'une créance qui y est incluse, dès lors que la détermination de son prix est possible, et déclarant vouloir exercer le droit au retrait litigieux, M. [C] demande d'enjoindre à la cessionnaire de produire l'intégralité de l'acte de cession aux fins de pouvoir déterminer le prix de cession de la créance dès lors que la copie de l'acte qui est produite occulte ce prix, que le montant du portefeuille cédé n'apparaît pas et qu'il n'est pas possible de considérer que la prix de cession correspondrait au montant qui figure dans l'une des colonnes de la page 2.
La cession de la créance principale comprenant aussi, par application de l'article 1321, alinéa 3, du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, ses accessoires, elle emporte au profit du cédant la cession de la créance sur la caution, de sorte que cette dernière peut, lorsqu'elle conteste le droit invoqué contre elle, exercer le droit au retrait litigieux. La caution est autorisée à le faire même en l'absence d'une contestation de la créance principale si elle conteste le droit invoqué contre elle, lequel devient alors litigieux.
Aux termes de l'article 1700 du code civil, la chose est censée litigieuse dès qu'il y a procès et contestation sur le fond du droit. Ainsi, pour être admis, le retrait litigieux suppose que la créance soit contestée sur le fond, avant que la cession n'ait lieu.
Tel est le cas en l'espèce où M. [C], caution personne physique, a bien élevé une contestation sur le fond de la créance invoquée contre lui, avant sa cession puisque, en première instance, il s'est opposé aux demandes du Crédit agricole en soulevant la prescription de l'action en paiement et en arguant du caractère disproportionné de l'engagement de caution justifiant le rejet de la demande de la banque ainsi que la prescription d'une partie des intérêts.
Il résulte de ce même article'1700 que le retrait litigieux impose l'existence d'un procès au cours duquel le droit cédé a été l'objet d'une contestation au fond lors duquel le retrayant détient la qualité de défendeur. Si le retrayant doit avoir la qualité de défendeur à l'instance en contestation de la créance, il peut exercer son droit au retrait litigieux sans forme particulière.
Dans le cas présent, ayant fait appel du jugement qui rejette sa demande de mainlevée de la saisie-attribution, M. [C] a bien la qualité de défendeur, quand bien même la cession est intervenue en cause d'appel, et que l'appel a été interjeté par lui.
Pour soutenir que la condition tenant à ce que la créance censée être litigieuse doit faire l'objet d'une contestation, n'est pas remplie, la société Cabot securitisation Europe Limited invoque qu'à plusieurs reprises, il a été jugé que la créance était certaine et liquide et soutient, en conséquence, que l'autorité de chose jugée des nombreuses décisions rendues contre M. [C] sur l'exécution de son engagement de caution, en particulier celle attachée à l'arrêt du 31 janvier 2023, fait obstacle à la notion de créance litigieuse. Par ailleurs, elle prétend que la créance lui a été cédée pour son montant tel que précisé sur l'acte, soit 181 022,23 euros en principal outre intérêts et frais.
Il est certain que le caractère litigieux de la créance doit encore exister lors du retrait. Il convient de rappeler que le retrait litigieux, de caractère exceptionnel, conduit à une interprétation stricte des textes qui l'autorisent. Ainsi, pour être considéré comme litigieux, il ne suffit pas que la partie qui demande à exercer le retrait prévu à l'article 1699 du code civil invoque des contestations, encore faut-il que nul ne puisse avec certitude prédire l'issue du procès, et qu'il existe donc encore un véritable aléa sur les droits cédés. Tel n'est pas le cas lorsqu'est intervenue une décision définitive et passée en force de chose jugée vidant les contestations en cause.
En l'espèce, par arrêt du 31 janvier 2023 dont le caractère irrévocable n'est pas contesté, la cour a confirmé un jugement du tribunal d'instance d'Angers rendu le 17 mai 2018 ayant autorisé la saisie des rémunérations de M. [C] au profit du Crédit agricole en exécution de son engagement de caution et, pour ce faire, a rejeté toutes les contestations qu'opposaient M. [C] et qui sont celles que ce dernier reprend à l'identique dans la présente instance, à savoir, non seulement, l'absence de la valeur de titre exécutoire de l'acte authentique du 25'avril 2006 en vertu duquel les mesures d'exécution ont été mises en oeuvre, mais aussi la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement contre la caution, la disproportion alléguée du cautionnement et la prescription des intérêts dus antérieurement au 19 juin 2012.
Si l'arrêt du 31 janvier 2023 n'a formellement d'autorité de la chose jugée que relativement à la saisie des rémunérations qu'il autorise parce que l'instance porte sur des mesures d'exécutions distinctes, il n'en reste pas moins, qu'ayant vidé les contestations qu'opposait M. [C] au Crédit agricole sur le droit cédé à la société Cabot securitisation Europe Limited en constatant que celle-ci détient une créance liquide et exigible, le droit cédé ne présente plus de caractère litigieux, de sorte que M. [C] n'est pas fondé à exercer le droit au retrait litigieux et, partant, est sans intérêt à demander l'intégralité de l'acte de cession de créance du 15 septembre 2022. Cette demande sera donc rejetée.
Sur l'existence d'un titre exécutoire
Pour solliciter la mainlevée de la saisie-attribution, M. [C], s'appuyant sur les dispositions de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution, soutient que l'acte authentique reçu le 25 avril 2006 sur lequel se fonde la demande du créancier ne constitue pas un titre exécutoire faute d'avoir pour objet le paiement d'une somme déterminée.
La société Cabot securitisation Europe limited répond que l'acte notarié constitue un titre exécutoire au sens de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution dès lors que la dette est déterminable par les éléments contenus dans l'acte.
Il résulte des articles L.111-2 et L.111-3 du code des procédures civiles d'exécution que le créancier muni d'un titre exécutoire, tel qu'un acte notarié revêtu de la formule exécutoire, constatant une créance liquide et exigible, peut en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d'exécution.
Il en découle que pour constituer un titre exécutoire, l'acte notarié doit seulement être revêtu de la formule exécutoire et contenir tous les éléments permettant l'évaluation de la créance. Il est donc suffisant que la dette soit déterminable, ce que ne conteste d'ailleurs pas M. [C]. En l'epèce, l'acte authentique litigieux prévoit que l'acquisition de l'ensemble immobilier situé à [Localité 7] par la société Imanoo est financée par un prêt consenti par le Crédit agricole d'un montant de 175 000 euros, remboursable en 180 échéances au taux d'intérêt hors assurance de 4,40%. Il précise que ce prêt est garanti, outre un privilège du prêteur de deniers sur le bien financé, par un cautionnement solidaire de M. [C] dans la limite de la somme de 227 500 euros (130% du capital cautionné couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités de retard).
Il en résulte que l'acte authentique du 25 avril 2006 constitue un titre exécutoire contenant une somme au moins déterminable.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement
Les parties ne discutent pas le caractère professionnel du prêt accordé à la SCI Imanoo ni de l'engagement de caution consenti par M. [C], gérant de la SCI, de sorte qu'elles conviennent que le délai de prescription quinquennal s'applique au présent litige en vertu de l'article 2224 du code civil.
M. [C] conteste toutefois que le délai de prescription qui, selon lui, a commencé à courir à compter 29 juillet 2010, date du prononcé de la déchéance du terme, ait été interrompu. A cet égard, il estime que le créancier ne peut se prévaloir d'un effet interruptif attaché à l'hypothèque provisoire inscrite le 3 mars 2014 dès lors que la procédure en mainlevée est toujours en cours.
L'intimée soutient au contraire que ce délai de prescription a été interrompu par la déclaration de créance effectuée le 3 février 2010 dans le cadre de la saisie immobilière engagée à l'encontre de la SCI Imanoo laquelle s'est achevée le 24 octobre 2012 par le dernier paiement intervenu dans le cadre de la distribution du produit de la vente de l'immeuble. Elle en déduit qu'un nouveau délai de cinq ans a commencé à courir à cette date de sorte que la requête aux fins de saisie des rémunérations déposée au greffe le 30 juin 2017 est intervenue dans ce nouveau délai. Elle ajoute que la cour d'appel de céans rendu le 21 février 2017 a nécessairement suspendu le cours de la prescription.
Il est établi qu'en matière de prêt, l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, tandis que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 1er juillet 2010, le Crédit agricole a mis en demeure M. [C] de lui régler la somme de 8 169,86 euros au titre des échéances impayées du prêt. Le créancier a ensuite notifié la déchéance du terme par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 29 juillet 2010.
Il en découle que le délai de prescription quinquennal a commencé à courir à compter de cette date pour la créance due au titre du capital restant dû. S'agissant des échéances impayées, force est de constater que M. [C], qui oppose la fin de non-recevoir tirée de la prescription, ne verse aux débats aucun élément de nature à rapporter la preuve ni de la date des échéances échues impayées, ni du montant du capital restant dû au moment de la déchéance du terme. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le Crédit agricole a déclaré sa créance à la procédure de saisie immobilière dirigée contre de la SCI Imanoo le 23 février 2010, soit antérieurement à la déchéance du terme, puis l'a actualisée le 2 mars 2012, soit postérieurement à la déchéance du terme. Ces actes, assimiables à des demandes en justice en application des dispositions de l'article 2241 du code civil, ont interrompu la prescription, y compris à l'égard de M. [C], en sa qualité de caution solidaire conformément à l'article 2245 du code civil, étant précisé que le prêt ayant été conclu le 25 avril 2006, les échéances impayées ne pouvaient pas être prescrites à la date du 23 février 2010 à laquelle est intervenu le premier acte interruptif.
L'effet interruptif de prescription attaché à la saisine du juge de l'exécution n'ayant pris fin que par l'ordonnance d'homologation du projet de répartition de prix de vente de l'immeuble rendue le 6 septembre 2012, un nouveau délai quinquennal a couru à compter de cette date. Or, le dépôt de la requête à fin de convocation d'une partie à une tentative de conciliation préalable à une saisie des rémunérations, qui constitue une demande en justice, a de nouveau interrompu le délai de prescription à compter du 4 juillet 2017 jusqu'au jugement du 17 mai 2018 dont appel a été interjeté le 16 juillet 2018 et qui a été rejeté par arrêt du 31'janvier 2023.
En outre, il doit être relevé que M. [C] ne conteste pas avoir été destinataire d'un commandement de payer aux fins de saisie-vente en date du 15 novembre 2013, lequel a également interrompu le délai de prescription en vertu de l'article 2244 du code civil.
Partant, indépendamment de la discussion développée sur l'effet interruptif de l'inscription de l'hypothèque provisoire contestée, il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'action en paiement de la banque n'était pas prescrite lorsqu'elle a fait pratiquer la saisi-attribution, le 6 janvier 2022 et l'a dénoncée, le 11 janvier suivant au débiteur.
Par suite, la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement ne peut qu'être rejetée.
Sur la disproportion alléguée du cautionnement
Pour demander la mainlevée de la saisie-attribution, M. [C] soutient encore que le cautionnement litigieux consenti pour un montant de 227 500 euros, représentant une somme annualisée de 13 382,35 euros, était manifestement disproportionné aux revenus qu'il percevait à la date de la conclusion de cet engagement.
Le créancier réplique que les éléments de patrimoine déclarés par M. [C] à l'époque de la conclusion du cautionnement contesté permettaient à ce dernier de faire face à son engagement de caution.
Aux termes de l'article L. 341-4 du code de la consommation dans sa version applicable en l'espèce, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de la conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Il en découle que le caractère manifestement disproportionné du cautionnement, qu'il incombe à la caution de rapporter, s'apprécie au jour où ce dernier est souscrit en tenant compte non seulement des revenus de la caution, mais aussi, contrairement à ce que soutient M. [C], de tous autres biens formant son patrimoine, notamment ses immeubles et les parts sociales détenues dans le capital d'une société. De même, il doit être tenu compte de l'ensemble des obligations ou engagements incombant au débiteur au jour du cautionnement contesté.
La disproportion suppose d'établir que la caution était dans l'impossibilité manifeste de faire face à son engagement avec ses biens et revenus au moment de la conclusion de celui-ci.
Lorsque la banque exige une fiche de renseignement patrimoniale, cette dernière est en droit de se fier aux informations que la caution lui fournit en l'absence d'anomalie apparente et n'a pas à vérifier l'exactitude de ces déclarations. Dans ce cas, la caution n'est pas admise à établir devant le juge que sa situation financière était en réalité moins favorable que celle qu'elle avait déclaré à la banque.
En l'occurrence, M. [C] ne démontre ni même ne soutient que la fiche de renseignements qu'il a remplie serait erronée.
Il ressort de cette fiche renseignée et signée le 6 avril 2006 par M. [C], qui a déclaré sur l'honneur l'exactitude des renseignements, qu'il était mariée sous le régime légal, percevait un revenu mensuel de 5 000 euros, était propriétaire de deux biens immobiliers pour une valeur totale de 490 000 euros et détenait un portefeuille d'actions d'une valeur de 21 658 euros. S'agissant de son passif, il a déclaré avoir contracté un prêt de 35 000 euros, remboursable sur cinq ans par des échéances mensuelles de 717,36 euros, dont le capital restant dû s'élevait alors à la somme de 21 000 euros, ainsi qu'un prêt immobilier d'un montant de 144 826 euros, remboursable sur 15 ans par des échéances mensuelles de 1'164,97 euros, dont le capital restant dû s'élevait alors à la somme de 87 505 euros. M. [C] a, enfin, déclaré que ses deux immeubles étaient grevés d'un privilège ou d'une hypothèque pour un montant total de 206 000 euros, sans pour autant démontrer ni même soutenir que la somme de 145 000 euros déclarée au titre du premier immeuble relevait d'un autre engagement que le prêt immobilier contracté pour ce même montant.
En l'état de ces éléments, et sans même prendre en compte la valeur des parts sociales qu'il détenait dans le patrimoine de la SCI Imanoo, M. [C] ne démontre pas qu'il se trouvait, eu égard à la valeur nette de son patrimoine immobilier et de ses revenus, dans l'impossibilité manifeste de faire face, à cette date, à son engagement de caution consenti dans la limite de la somme de 227 500 euros.
Partant, le créancier est fondé à exiger le paiement des sommes dues en vertu du cautionnement.
Sur la prescription des intérêts
M. [C] soutient qu'une partie des intérêts réclamés don't le montant s'élève à une somme de 81 467,75 euros est nécessairement prescrite, sans préciser à compter de quelle date.
Toutefois, il ressort des motifs qui précèdent que plusieurs actes interruptifs du délai de prescription quinquennal sont intervenus entre le 23 février 2010 et le 11'janvier 2022, de sorte que la prescription des intérêts, dont le paiement est réclamé à compter du 9 août 2010, a été valablement interrompue à l'égard de la caution.
Sur les frais et dépens
M. [C], partie perdante, sera condamné aux dépens de l'appel, les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles étant confirmées.
Il sera condamné à payer à la société Cabot securitisation Europe limited la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et débouté de sa demande au même titre.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Déclare recevable l'intervention de la société Cabot sécurisation Europe limited.
Rejette la demande de M. [C] tendant à enjoindre à la société Cabot sécuritisation Europe limited de produire l'intégralité de l'acte de cession de créance du 15 septembre 2022, portant la mention du prix de cession.
Confirme le jugement entrepris.
Y ajoutant,
Condamne M. [C] à payer à la société Cabot securitisation Europe limited la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne M. [C] aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,
S.TAILLEBOIS C. CORBEL