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04/07/2024 | FRANCE | N°21/00582

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre prud'homale, 04 juillet 2024, 21/00582


COUR D'APPEL

d'ANGERS

Chambre Sociale











ARRÊT N°



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00582 - N° Portalis DBVP-V-B7F-E45H.



Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 06 Octobre 2021, enregistrée sous le n° F20/00567





ARRÊT DU 04 Juillet 2024







APPELANTE :



Société UNION MUTUALISTE VYV3 PAYS DE LA LOIRE

[Adresse 3]

[Localité 4]>


représentée par Maître Inès RUBINEL de la SELARL LX RENNES-ANGERS, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Maître Olivier HAINAUT avocat plaidant au barreau du MANS







INTIMEE :



Madame [C] ...

COUR D'APPEL

d'ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N°

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00582 - N° Portalis DBVP-V-B7F-E45H.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 06 Octobre 2021, enregistrée sous le n° F20/00567

ARRÊT DU 04 Juillet 2024

APPELANTE :

Société UNION MUTUALISTE VYV3 PAYS DE LA LOIRE

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Maître Inès RUBINEL de la SELARL LX RENNES-ANGERS, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Maître Olivier HAINAUT avocat plaidant au barreau du MANS

INTIMEE :

Madame [C] [B] épouse [A]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Maître Gilles PEDRON de la SELARL AD LITEM AVOCATS, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 200204

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mai 2024 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Clarisse PORTMANN

Conseiller : Madame Rose CHAMBEAUD

Conseiller : Mme Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS

Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN

ARRÊT :

prononcé le 04 Juillet 2024, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Clarisse PORTMANN, président, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE

Par contrat de travail à durée indéterminée du 15 février 2012 à effet au 20 février 2012, Mme [C] [B] épouse [A] a été engagée par l'association Les Tourelles en qualité de chef de service. La convention collective applicable est celle des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.

En juin 2018, l'association Les Tourelles a été placée en liquidation.

Dans le cadre d'une reprise de gestion de deux pouponnières et du transfert du contrat de travail de Mme [B]-[A] au sein de l'Union Mutualiste Enfance Famille Handicap Soins Pays de la Loire, deux avenants au contrat de travail ont été régularisés le 1er septembre 2019 aux termes desquels Mme [B]-[A] a été affectée sur deux sites en qualité de chef de service éducatif : la pouponnière de [Localité 5] où elle était initialement affectée à plein temps, et la pouponnière de [6] située à [Localité 4].

Le 13 mai 2020, un signalement a été fait par un collectif de salariés de l'établissement de [Localité 5] pour des agissements de maltraitance à l'encontre des enfants, lequel a donné lieu à une enquête interne.

Par courrier remis en main propre le 19 mai 2020, Mme [B]-[A] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 2 juin 2020. Cette convocation était assortie d'une mise à pied à titre conservatoire.

La commission d'enquête a rendu son rapport le 20 mai 2020 concluant à l'existence d'une situation de maltraitance sur les jeunes enfants de la pouponnière de [Localité 5] et imputant ces comportements à plusieurs salariés.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 juin 2020, l'Union Mutualiste Enfance Famille Handicap Soins Pays de la Loire a notifié à Mme [B]-[A] son licenciement pour faute grave lui reprochant son inefficacité à mettre fin aux agissements et propos révélant des actes de maltraitance sur les jeunes enfants commis par certains salariés sous sa subordination malgré des signalements émis par d'autres salariés de la structure, sa défaillance managériale et son absence de coordination avec la hiérarchie pour résoudre en urgence les graves dysfonctionnements signalés, ainsi que l'absence de mesures prises pour permettre d'offrir aux enfants un accueil sécurisé au sein de la pouponnière (lits cassés non remplacés).

Contestant le bien fondé de son licenciement, Mme [B]-[A] a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers par requête du 21 août 2020 afin d'obtenir la condamnation de l'Union Mutualiste Enfance Famille Handicap Soins Pays de la Loire au paiement, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, d'un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, de l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages et intérêts pour licenciement abusif et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Union Mutualiste Enfance Famille Handicap Soins Pays de la Loire s'est opposée aux prétentions de Mme [B]-[A] et a sollicité sa condamnation au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 6 octobre 2021, le conseil de prud'hommes a :

- dit que le licenciement de Mme [B]-[A] est sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire à verser à Mme [B]-[A] les sommes suivantes :

- 2 782,52 euros au titre de la mise à pied conservatoire, incidence congés payés incluse ;

-16 035,92 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 603,59 euros relatifs aux congés payés afférents ;

- 34 744,49 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 32 064,95 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 12 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct ;

- dit que ces sommes produiront intérêt au taux légal à compter de la date du jugement et les intérêts se capitaliseront en application de l'article 1154 du code civil ;

- ordonné à l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire de remettre à Mme [B]-[A] un certificat de travail et une attestation Pôle emploi conformes au jugement, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, suivant les quinze jours après la notification du jugement, se réservant le droit de liquider l'astreinte ;

- condamné l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire à rembourser 3 mois d'indemnités chômage à l'organisme de prise en charge de l'assurance chômage, sur le fondement de l'article L.1235-4 du code du travail ;

- condamné l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire à verser la somme de 1 500 euros à Mme [B]-[A] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que le jugement bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit, seule à retenir, dans les conditions de l'article R.1454-28 du code du travail, et, à cet effet, fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 4 008,98 euros ;

- condamné l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire aux dépens.

L'Union Mutualiste Enfance Famille Handicap Soins Pays de la Loire désormais dénommée Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire a interjeté appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique au greffe de la cour d'appel le 22 octobre 2021, son appel portant sur tous les chefs lui faisant grief ainsi que ceux qui en dépendent et qu'elle énonce dans sa déclaration.

Mme [B]-[A] a constitué avocat en qualité d'intimée le 3 novembre 2021.

Par conclusions d'incident reçues au greffe le 25 mars 2022, Mme [B]-[A] a demandé au conseiller de la mise en état d'enjoindre à l'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire de lui communiquer, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à dater du 15ème jour suivant la notification de la décision à intervenir : l'intégralité des comptes-rendus d'audition des personnes entendues dans le cadre de l'enquête interne, le questionnaire d'audition qui a servi de support, le rapport de Mme [O] du 19 mai 2020, et l'ensemble des mails adressés à sa hiérarchie entre le 1er septembre 2019 et le 19 mai 2020.

Par ordonnance du 12 juillet 2022, le conseiller de la mise en état a :

- fait droit intégralement à la demande de communication de pièces présentée par Mme [B]-[A] ;

- dit que cette communication de pièces interviendra de la part de la société VYV3 Pays de la Loire - Pôle Accompagnement et Soins dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision, sans astreinte ;

- rejeté les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que chaque partie conservera à sa charge les dépens de l'incident.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 avril 2024 et le dossier a été fixé à l'audience du conseiller rapporteur de la chambre sociale de la cour d'appel d'Angers du 7 mai 2024.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

L'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 janvier 2022, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour :

- de la recevoir en son appel, le dire bien fondé, y faire droit ;

- d'infirmer et au besoin réformer en toutes ses dispositions critiquées le jugement du conseil de prud'hommes d'Angers du 6 octobre 2021 et particulièrement en ce qu'il :

- a dit que le licenciement de Mme [B]-[A] est sans cause réelle et sérieuse ;

- l'a condamnée à verser à Mme [B]-[A] les sommes suivantes :

- 2 782,52 euros au titre de la mise à pied conservatoire, incidence congés payés incluse ;

-16 035,92 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 603,59 euros relatifs aux congés payés afférents ;

- 34 744,49 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement;

- 32 064,95 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 12 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct ;

- a dit que ces sommes produiront intérêt au taux légal à compter de la date du jugement et les intérêts se capitaliseront en application de l'article 1154 du code civil ;

- lui a ordonné de remettre à Mme [B]-[A] un certificat de travail et une attestation Pôle emploi conformes au jugement, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, suivant les quinze jours après la notification du jugement ;

- s'est réservé le droit de liquider l'astreinte ;

- l'a condamnée à rembourser 3 mois d'indemnités chômage à l'organisme de prise en charge de l'assurance chômage sur le fondement de l'article L.1235-4 du code du travail ;

- l'a condamnée à verser la somme de 1 500 euros à Mme [B]-[A] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- l'a déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- a rappelé que le jugement bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit, seule à retenir, dans les conditions de l'article R.1454-28 du code du travail, et, à cet effet, fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 4 008,98 euros ;

- l'a condamnée aux dépens ;

Et statuant à nouveau de :

- dire et juger que le licenciement pour faute grave de Mme [B]-[A] est parfaitement justifié ;

En conséquence :

- débouter Mme [B]-[A] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner Mme [B]-[A] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [B]-[A] aux entiers dépens avec distraction au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit.

L'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire soutient que des maltraitances graves ont été commises au sein de la pouponnière de [Localité 5] par des salariés sous la subordination de Mme [B]-[A], que celle-ci en était informée et qu'elle n'a rien fait pour les faire cesser, ni pour remonter ces informations à sa hiérarchie. Elle ajoute que Mme [B]-[A] n'a pris aucune mesure pour remplacer les lits cassés des enfants, mettant ainsi en danger leur sécurité. Elle considère dès lors que le licenciement pour faute grave est fondé.

*

Mme [B]-[A], dans ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 10 avril 2024, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- dit que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire à lui verser les sommes suivantes :

- 2 782,52 euros au titre de la mise à pied conservatoire, incidence congés payés incluse ;

-16 035,92 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 603,59 euros relatifs aux congés payés afférents ;

- 34 744,49 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement;

- 32 064,95 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 12 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct ;

- dit que ces sommes produiront intérêt au taux légal à compter de la date du jugement et les intérêts se capitaliseront en application de l'article 1154 du code civil ;

- ordonné à l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire de lui remettre un certificat de travail et une attestation Pôle emploi conformes au jugement, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, suivant les quinze jours après la notification du jugement ;

- condamné l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire à rembourser 3 mois d'indemnités chômage à l'organisme de prise en charge de l'assurance chômage, sur le fondement de l'article L.1235-4 du code du travail ;

- condamné l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamné l'Union Mutualiste Famille Handicap Soins Pays de la Loire aux dépens ;

Et statuant à nouveau :

- condamner la société mutualiste VYV3 Pays de la Loire - Pôle Accompagnement et Soins à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés en cause d'appel ;

- condamner la société mutualiste VYV3 Pays de la Loire - Pôle Accompagnement et Soins aux entiers dépens.

Mme [B]-[A] conteste chacun des griefs qui lui sont opposés et estime dès lors que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Elle ajoute avoir subi un préjudice distinct du fait de l'ampleur médiatique donnée à cette affaire.

MOTIVATION

Sur le licenciement

La lettre de licenciement du 11 juin 2020 rédigée sur trois pages est motivée par trois griefs :

- l'inefficacité de Mme [B]-[A] à mettre fin aux agissements et propos révélant des actes de maltraitance sur les jeunes enfants commis par des salariés sous sa subordination, malgré des signalements émis par des salariés de la structure ;

- une défaillance managériale et une absence de coordination avec la hiérarchie pour résoudre/traiter en urgence les graves dysfonctionnements signalés ;

- l'absence de mesures prises pour permettre d'offrir aux enfants un accueil sécurisé au sein de la pouponnière (lits cassés et non remplacés).

Mme [B]-[A] conteste l'intégralité de ces faits et souligne qu'elle n'a jamais fait l'objet de sanction disciplinaire. Elle se prévaut d'un mail adressé le 16 avril 2020 à Mme [L], directrice de la pouponnière, dans lequel elle a rendu compte des actes de maltraitance qui venaient d'être portées à sa connaissance et sollicité des instructions sur les suites à donner à ces comportements fautifs. Elle note que la directrice n'a jamais donné suite à ce mail alors qu'en l'absence de délégation du pouvoir disciplinaire, elle ne pouvait sanctionner directement les salariés impliqués mais simplement l'informer des faits ce qu'elle a justement fait.

Elle estime ensuite que le grief relatif au défaut de management ne peut justifier un licenciement disciplinaire, quand bien même il serait établi, mais procéderait tout au plus, en l'absence de mauvaise volonté délibérée, d'une insuffisance professionnelle.

Enfin, elle observe que l'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire est défaillante dans la démonstration du grief relatif au remplacement des lits cassés lequel n'a pas même été évoqué lors de l'entretien préalable à son licenciement.

L'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire fait d'abord valoir que Mme [B]-[A], en sa qualité de chef de service de la pouponnière de [Localité 5], était responsable des enfants accueillis dans la structure et des salariés se trouvant sous sa subordination juridique, et que des actes de maltraitance grave sur les enfants ont été commis par plusieurs de ces derniers. Elle soutient que Mme [B]-[A] en était informée et n'a pas sanctionné les auteurs, ce qu'elle a reconnu lors de l'entretien préalable à son licenciement, laissant ainsi la situation perdurer.

Elle ajoute qu'elle n'a pas alerté sa hiérarchie et s'est contentée de transmettre à la directrice un mail du 16 avril 2020 qui lui était destiné alors que les dysfonctionnements et actes de maltraitance duraient depuis des mois. Elle souligne que Mme [B]-[A] ne donne aucune indication quant aux suites qu'elle-même a donné à ce mail, démontrant ainsi sa défaillance managériale.

Enfin, elle affirme que Mme [B]-[A] n'a pris aucune mesure pour remplacer les lits dont les barrières étaient cassées, se contentant d'indiquer qu'il fallait les retourner du côté du mur, mettant ainsi en cause la sécurité des enfants.

L'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire considère que Mme [B]-[A] ne peut s'exonérer de ses responsabilités en arguant qu'elle était affectée sur deux sites dans la mesure où la lecture des cahiers de transmission en place au sein de la pouponnière lui aurait permis de prendre les mesures appropriées.

La faute grave privative du droit aux indemnités de rupture est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise.

La charge de la preuve de la faute grave pèse sur l'employeur. S'il subsiste un doute, celui-ci doit profiter au salarié.

1. Sur l'inaction et la défaillance managériale malgré des signalements et sur l'absence d'alerte auprès de la hiérarchie

L'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire communique :

- un mail du 12 mai 2020 de Mme [V], auxiliaire de puériculture et secrétaire du CSE, à Mme [L], directrice de la pouponnière, et M. [G], DRH, confirmant sa présence et celle de deux autres salariées lors du rendez-vous fixé le lendemain qu'elles ont sollicité (pièce 4) ;

- un courrier du 14 mai 2020 de Mme [O], directrice générale de l'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire, à Mme [V] lui faisant part de sa décision de diligenter une enquête suite à l'information 'par un collectif de collaborateurs d'agissements répétés susceptibles d'être qualifiés de maltraitant à l'égard de jeunes enfants sur (la) structure de la pouponnière de [Localité 5]' (pièce 5) ;

- le rapport de synthèse de la commission d'enquête du 20 mai 2020 duquel il ressort que les comportements décrits dans les auditions sont susceptibles de caractériser une situation de maltraitance sur des jeunes enfants, que ces comportements peuvent entraîner une situation de souffrance pour les salariés qui y assistent, et que ces comportements ou situations sont imputables à Mme [X] [T], Mme [F] [M], Mme [R] [J], Mme [C] [B], Mme [D] [I] (pièce 7) ;

- le compte-rendu d'entretien préalable de Mme [B]-[A] dont il ressort que les faits de maltraitance envers les jeunes enfants (cris , propos dénigrants et agressifs, gestes brusques, manque de soins, privations de nourriture) durent depuis septembre 2018, que le cahier de transmission des trois derniers mois est 'un défouloir' et mentionne 'des jugements qui n'ont pas leur place au travail' ('X est excité, agressif', 'il teste de plus en plus, ça promet', 'c'est usant'), et qu'elle n'en a pas pris connaissance.

Mme [B]-[A] indique que fin mars-début avril 2020, elle a reçu les trois personnes liées à ces faits qui lui ont été remontés uniquement par mail de la puéricultrice, Mme [E], mail qu'elle a transmis à Mme [L]. Elle précise avoir précédemment reçu Mme [T] à plusieurs reprises car elle 'criait', avoir reposé le cadre, et à chaque fois, celle-ci s'est 'réajustée', précisant n'avoir jamais reçu d'autre directive de la part de la directrice. Elle indique avoir retravaillé les règles de vie et l'interdiction de privation de nourriture avec l'équipe en novembre 2018. Elle affirme que le cahier mis en place en 2001 est destiné aux aides de puériculture, et qu'en accord avec la directrice, elle délègue à la puéricultrice en charge du projet des enfants qui lui remonte les informations si besoin en réunion d'équipe, soulignant le manque de matériel et de moyens humains outre le fait qu'elle n'est qu'à mi-temps sur la structure.

Elle assure enfin avoir fait remonter les informations dont elle disposait et avoir été totalement transparente, sans avoir eu aucune 'descendante' vers elle (pièce 9) ;

- quatre témoignages émanant de Mme [V], Mme [Z], Mme [S] et Mme [W], aides de puériculture et éducatrices de jeunes enfants, décrivant les cris et comportements inacceptables commis notamment par [X] ([T]) et [F] ([M]), et faisant part de ce qu'elles sont choquées et perturbées. Mme [V] indique que '[U] ([Y]) (lui) a dit être allée rencontrer Mme [B] il y a quelques mois sans dénoncer les collègues. Cela n'a rien changé', et Mme [W] que '[U] a demandé un rendez-vous avec Mme [B] et lui a expliqué pendant une heure ce qui se passait et a dénoncé les faits' et que 'rien n'est fait' (pièces 11 à 14).

Mme [B] [A] communique pour sa part :

- le PV de réunion extraordinaire du CSE du 27 mai 2020 lors de laquelle une élue souligne l'existence d'une omerta sur les agissements, et interroge la direction sur la présence réelle de la directrice de la pouponnière et sur le temps partagé de la cheffe de service. La directrice générale répond qu'un audit organisationnel va être mené. Elle précise que les pouponnières étaient sous la responsabilité de Mme [L], que celle-ci a pris un mandat d'élue auprès de la municipalité d'[Localité 4], que la réduction de son temps de travail a fait l'objet d'un échange, et qu'elle a été déchargée des deux pouponnières (pièce 19) ;

- son emploi du temps à partir de septembre 2019 dont il résulte qu'elle travaille à mi-temps dans chaque pouponnière (pièce 20) ;

- un mail du 16 avril 2020 qui lui a été adressé à 8h00 par Mme [E], puéricultrice, dont il ressort que celle-ci a attendu que ses idées soient claires pour lui parler, puis dénonce de manière circonstanciée les agissements de [X] ([T]) et [R] ([J]) ; elle souligne que ces faits sont constatés par toute personne présente au quotidien 'et non ponctuellement sur les unités', et déplore que des réunions de plusieurs heures soient organisées sur un projet bienveillant qui n'est 'appliqué que par certaines' (pièce 21) ;

- la transmission par ses soins de ce mail à Mme [L] le même jour à 8h47 indiquant qu'elle souhaite reprendre les faits avec les professionnelles concernées et lui demandant conseil sur la manière de procéder. Elle précise avoir reproché récemment à Mme [E] de ne pas lui avoir fait part d'un incident avec une autre aide de puériculture ([U] [Y]) et avoir insisté pour que cela soit fait à l'avenir 'pour qu'elle puisse compter sur elle notamment quand (elle) est absente hors du site' (pièce 21) ;

- la décision du 12 juillet 2022 rendue par le conseiller de la mise en état ordonnant notamment la production de l'ensemble de ses mails adressés à sa hiérarchie entre le 1er septembre 2019 et le 19 mai 2020, ainsi que les relances de son conseil auprès de celui de l'employeur (pièces 26 à 29) ;

- le compte-rendu d'entretien préalable à une sanction disciplinaire de Mme [Y] le 4 mai 2020 relatif à des faits du 18 mars 2020 (enfant de 4 ans laissé sans surveillance avec des ciseaux et ayant coupé les cheveux d'un enfant de 20 mois) ; Mme [Y] indique que la puéricultrice (Mme [E]) lui avait demandé de l'en informer et elle reconnaît ne pas l'avoir fait, soulignant que ses collègues ne disent rien non plus. Mme [B]-[A] observe alors 'vous savez très bien venir me voir pour me faire part comme dernièrement que vous avez le sentiment que vos collègues sont toujours derrière vous'; Mme [Y] réplique 'si on doit tout vous dire, j'en aurais des choses à dire. C'est comme les doudous, tout le monde en réunion dit oui devant vous mais par derrière ce n'est pas toujours donné aux enfants', puis 'c'est comme la communication car il n'y a pas que moi qui ne dit pas les choses' (pièce 33) ;

- les auditions de 20 salariés dans le cadre de l'enquête (pièces 34 à 53) relatant les faits de maltraitance dont ils ont été témoins visant [X] ([T]), [R] ([J]) et [F] ([M]) ; tous à l'exception de trois d'entre eux déclarent bien connaître les instructions et les consignes de travail notamment les règles de bienveillance, et les 20 salariés déclarent respecter ces règles de prise en charge ; beaucoup se déclarent choqués, mal à l'aise et en souffrance face à cette situation ;

[U] ([Y]) indique avoir évoqué ces sujets auprès de Mme [B], laquelle a fait des réunions 'mais ça ne porte pas', et ajoute que 'quand elle a vu les personnes cela s'apaise quelques temps mais pas de travail de fond' ;

Mme [E] indique en avoir informé sa responsable hiérarchique, et les autres salariés soit n'en ont pas parlé, soit en ont parlé entre eux, soit ont échangé directement avec les intéressées ;

Mme [L] indique quant à elle, en avoir été informée par la cheffe de service s'agissant de [X] ([T]) et [R] ([J]) et par un autre biais indéchiffrable par la cour dans la mesure où les réponses aux questions sont manuscrites et l'écriture illisible. Elle en a ressenti de la stupéfaction et de la sidération. Elle estime de la même manière que les règles sont bien connues des professionnels et se réfère aux comptes-rendus de réunion ;

- l'autorisation de l'inspection du travail et la lettre de licenciement pour faute grave de Mme [T], et les lettres de notification à Mme [J] et à Mme [M] d'une mise à pied de 5 jours (pièces 14 à 18).

A titre liminaire, il ne fait pas débat que les actes de maltraitance sont avérés, que leurs auteurs ont été sanctionnés ou n'ont pas vu renouveler leur CDD qui venait à expiration, et que l'équipe de la pouponnière de [Localité 5] était en souffrance.

Il convient en outre de relever qu'il n'est pas fait grief à Mme [B]-[A] d'avoir commis des agissements répréhensibles, et aucun élément ne vient démontrer le contraire. En revanche, il lui est reproché d'en avoir eu connaissance et de n'avoir rien fait pour les faire cesser, outre le fait de ne pas avoir alerté sa hiérarchie de sorte que ceux-ci ont perduré pendant de longs mois jusqu'à ce que les salariés eux-mêmes alertent directement la directrice et la DRH le 13 mai 2020.

S'agissant de la connaissance des faits, l'analyse des éléments précités démontre que Mme [B]-[A] a reçu Mme [Y] en entretien. Pour autant, ni Mme [V], ni Mme [W] qui en attestent ne donnent de précision sur la date de cet entretien, ni sur la teneur des propos de Mme [Y], l'une d'elles précisant toutefois que celle-ci n'a pas dénoncé ses collègues. En tout état de cause, elles n'ont pas assisté à cet entretien.

Mme [Y] indique dans son audition qu'elle 'a évoqué ces sujets' avec Mme [B]-[A] qui les a qualifiés de maltraitance. Elle ne donne pas davantage la date de cet entretien. Pour autant, le 4 mai 2020, lors de l'entretien préalable à une sanction disciplinaire la concernant, Mme [Y] ne la contredit pas lorsque Mme [B]-[A] évoque un entretien antérieur où elle s'est plainte de l'attitude de ses collègues à son égard. Il n'est absolument pas question d'un entretien pour évoquer leur attitude à l'égard des enfants. Bien plus, Mme [Y] ajoute : 'si on doit tout vous dire, j'en aurais des choses à dire' et 'il n'y a pas que moi qui ne dit pas les choses'. Il s'en déduit qu'un doute persiste sur le fait qu'elle ait dénoncé les actes de maltraitance de ses collègues lors d'un entretien avec Mme [B]-[A] alors qu'elle avait 'des choses' à dire, mais ne les a pas dites.

Il n'est donc pas établi que Mme [B]-[A] ait été informée des faits de maltraitance par Mme [Y], étant rappelé que lors de la réunion du CSE du 27 mai 2020, une élue a évoqué une 'omerta' sur ces agissements.

Il convient par ailleurs de relever que Mme [B]-[A] n'intervenait qu'à mi-temps à la pouponnière de [Localité 5] ce que déplore Mme [J] dans son audition et a été évoqué lors du CSE du 27 mai 2020 alors qu'elle y travaillait à plein temps jusqu'en septembre 2019. Mme [E] précise dans son mail du 16 avril 2020 que ces agissements étaient perceptibles par les personnes qui intervenaient quotidiennement mais non ponctuellement. Il n'est donc pas établi que Mme [B]-[A] aurait pu se rendre compte par elle-même de l'ampleur et de la gravité de ces agissements.

Il sera souligné à cet égard, que si Mme [B]-[A] a pu reprendre Mme [T] à plusieurs reprises car elle 'criait', rien ne permet de dire qu'elle avait connaissance de ce que cette dernière privait les enfants de nourriture ou qu'elle avait 'tiré un enfant par le col' ou forcé un autre à ouvrir la bouche en lui pinçant la joue, ou encore qu'elle tenait à leur égard des propos insultants et dégradants ('t'es moche', 'tu pues', 'ta gueule', 'arrête sinon je te noie'), faits qui ont motivé son licenciement pour faute grave. Il est par ailleurs établi que Mme [B]-[A] organisait des réunions aux fins de rappeler les bonnes pratiques et qu'aucun salarié ne s'est manifesté à cette occasion pour l'informer de ce qu'elles n'étaient pas respectées.

Enfin, le cahier de transmission qui n'est au demeurant pas communiqué, est destiné à faire la liaison entre les différents intervenants auprès des enfants aux fins d'une meilleure prise en charge au quotidien. Il est légitime que Mme [B]-[A] qui n'intervenait pas directement auprès d'eux et qui travaillait à mi-temps sur le site, n'en ait pas pris connaissance et ait délégué cette tâche à la puéricultrice Mme [E], à charge pour elle de lui signaler toute anomalie, étant précisé qu'elle n'est pas valablement contredite lorsqu'elle indique que cela a été fait avec l'accord de la directrice. La cour note à cet égard que l'employeur n'a pas exécuté l'ordonnance du 12 juillet 2022 du conseiller de la mise en état lui enjoignant de communiquer l'ensemble des mails de Mme [B]-[A] à sa hiérarchie depuis le 1er septembre 2019.

Il s'avère dès lors que ce n'est que le 16 avril 2020, que Mme [B]-[A] a été informée de manière précise de l'existence de comportements graves par Mme [E]. Elle a transmis dans l'heure cette information à la directrice de la pouponnière en lui demandant conseil sur la manière de procéder, annonçant d'ores et déjà qu'elle avait l'intention de recevoir les intéressées. Elle a donc réagi immédiatement en proposant des mesures, en avertissant sa hiérarchie et en demandant la marche à suivre.

Pour autant, ce mail alarmant qui exigeait une réponse immédiate est resté sans réponse de la part de Mme [L], laquelle n'a au demeurant pas été inquiétée, et il a fallu attendre près d'un mois, qu'un collectif de salariés demande à être reçu pour qu'elle prenne la situation en considération.

Entre temps, il ressort du compte-rendu d'entretien préalable que Mme [B]-[A] a reçu les trois personnes citées dans ce mail et mis fin au CDD de l'une d'elles. Elle n'est donc pas restée inactive malgré l'absence de réponse de sa hiérarchie.

Par conséquent, les deux premiers griefs ne sont pas établis.

2. Sur l'absence de mesures prises pour permettre d'offrir aux enfants un accueil sécurisé au sein de la pouponnière (lits cassés et non remplacés)

Ce grief n'a pas été évoqué lors de l'entretien préalable. Pour autant, la circonstance que le grief énoncé dans la lettre de licenciement n'a pas été indiqué au salarié lors de l'entretien préalable caractérise une irrégularité de forme qui n'empêche pas le juge de décider que ce grief peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement (Soc 17 décembre 2014, n°13-20217).

L'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire se prévaut :

- du témoignage de Mme [Z] précité qui atteste de ce que la barrière du lit d'un enfant est cassée, qu'elle en a parlé à sa collègue puis à [P] ([E]) qui lui a conseillé de retourner le lit le long du mur ;

- du témoignage de Mme [S] précité qui atteste des mêmes faits, qu'elle en a averti [F] et qu' 'on (lui) a demandé de retourner le lit contre le mur'.

Aucun de ces deux témoignages n'évoque Mme [B]-[A]. Il n'est pas établi qu'elle avait connaissance de ce que les lits étaient cassés ni qu'elle ait formulé la demande de les retourner contre le mur, celle-ci étant attribuée par Mme [Z] à la puéricultrice, laquelle ne lui a pas remonté l'information. Il sera rappelé que Mme [B]-[A] travaillait à mi-temps sur le site de [Localité 5] au lieu d'un plein temps auparavant de sorte qu'il lui était nécessaire de s'appuyer sur Mme [E] pour être informée.

Par conséquent, ce grief n'est pas matériellement établi.

Aucun des griefs n'ayant été retenu, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement est confirmé de ce chef ainsi qu'en ses dispositions ayant condamné l'employeur à payer à Mme [B]-[A] les sommes de 2 782,52 euros au titre de la mise à pied conservatoire incidence congés payés incluse, 16 035,92 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 1 603,59 euros au titre des congés payés afférents, 34 744,49 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, et 32 064,95 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le montant de cette dernière somme n'étant pas contesté à titre subsidiaire par l'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire.

Sur le préjudice distinct

L'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire fait valoir que la demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct présentée par Mme [B]-[A] est infondée dans la mesure où son licenciement est justifié. Elle ajoute qu'elle ne peut être tenue pour responsable du traitement médiatique de la situation rencontrée au sein de la pouponnière. En tout état de cause, elle fait observer que Mme [B]-[A] a rapidement retrouvé un emploi et que son image n'a manifestement pas été altérée.

Mme [B]-[A] soutient que son licenciement a été mis en oeuvre dans des conditions vexatoires dans la mesure où il lui a été demandé de restituer le matériel professionnel (clefs de la pouponnière, téléphone professionnel, véhicule de fonction) dès la remise de la convocation à l'entretien préalable . Elle ajoute que l'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire affirme encore aujourd'hui qu'elle serait l'auteur des actes de maltraitance ce qu'elle conteste fermement.

Indépendamment du bien-fondé du licenciement, un salarié peut solliciter des dommages et intérêts pour circonstances vexatoires lorsqu'il apparaît que son employeur a entouré le licenciement d'un comportement brutal, injurieux ou propre à porter atteinte à sa dignité.

Il ressort du compte rendu d'entretien préalable que Mme [B]-[A] a remis dès l'issue de cet entretien le badge d'accès au bâtiment du siège, les clés et les papiers de la voiture de fonction, et la carte Total. La nécessité pour l'employeur de récupérer l'usage immédiat de ce véhicule n'était cependant pas avérée.

Il apparaît ensuite que le journal Ouest France a publié un article sous le titre 'des bébés placés victimes de mauvais traitements' et dans le corps duquel on peut lire 'en réaction le groupe VYV3 a licencié l'auxiliaire de puériculture ainsi que sa cheffe de service'. Cet amalgame est de nature à jeter l'opprobre sur Mme [B]-[A] dont il a été vu qu'elle n'était impliquée ni de près ni de loin dans ces actes répréhensibles.

Ces circonstances humiliantes ont causé à Mme [B]-[A] un préjudice que les premiers juges ont évalué à bon droit à la somme de 12 000 euros.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Mme [B]-[A] en cause d'appel. Il lui est alloué la somme de 2 000 euros pour ses frais irrépétibles d'appel.

L'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire qui succombe à l'instance est condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile présentée en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, publiquement par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement rendu le 6 octobre 2021 par le conseil de prud'hommes d'Angers en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

CONDAMNE l'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire à payer à Mme [C] [B]-[A] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles d'appel ;

DEBOUTE l'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile présentée en appel ;

CONDAMNE l'Union Mutualiste VYV3 Pays de la Loire aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Viviane BODIN Clarisse PORTMANN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/00582
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;21.00582 ?
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