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02/07/2024 | FRANCE | N°19/02412

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre a - commerciale, 02 juillet 2024, 19/02412


COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE







JC/ILAF

ARRET N°:



AFFAIRE N° RG 19/02412 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ETJT



jugement du 25 Novembre 2019

Juge de l'exécution du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 19/02005



ARRET DU 02 JUILLET 2024



APPELANT :



Monsieur [K] [L]

né le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 5]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/006055 du

08/11/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)



Représenté par Me Cécile DROUET, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 22052





INTIMEE :



S.A. LA BANQUE POSTALE

ag...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE

JC/ILAF

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 19/02412 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ETJT

jugement du 25 Novembre 2019

Juge de l'exécution du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 19/02005

ARRET DU 02 JUILLET 2024

APPELANT :

Monsieur [K] [L]

né le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 5]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/006055 du 08/11/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)

Représenté par Me Cécile DROUET, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 22052

INTIMEE :

S.A. LA BANQUE POSTALE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Virginie CONTE de la SCP PIGEAU - CONTE - MURILLO - VIGIN, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 07 Mai 2024 à 14'H'00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, présidente de chambre et devant M. CHAPPERT, conseiller qui a été préalablement entendu en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme CORBEL, présidente de chambre

M. CHAPPERT, conseiller

Mme GANDAIS, conseillère

Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 02 juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Julien CHAPPERT, conseiller pour la présidente de chambre empêchée et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE :

Par un acte authentique reçu le 23 août 2012, la SA La Banque Postale a consenti à M. [K] [L] :

- un prêt 'Pactys Liberté' d'un montant de 44 000 euros, remboursable au taux nominal de 3,45 % en 180 mensualités de 313,47 euros (hors assurance),

- un prêt 'Pactys Sérénité Plus' d'un montant de 110 000 euros, remboursable au taux nominal de 4 % en 180 échéances de 488,46 euros, puis en 119 échéances de 811,10 euros et enfin une échéance de 684,81 euros (hors assurance),

dans le but de financer l'acquisition de lots dans un ensemble immobilier du [Adresse 3] à [Localité 5] (Sarthe).

Les deux prêts ont chacun été garantis par l'inscription d'un privilège de prêteur de premier rang sur l'immeuble.

Par un acte authentique reçu le 14 décembre 2012, la SA La Banque Postale a par ailleurs consenti à M. [L] un prêt 'Pactys Sérénité' d'un montant de 14 950 euros, remboursable au taux nominal de 4,50 % en 180 échéances de 114,37 euros (hors assurance), pour l'acquision d'un autre lot de copropriété dans le même ensemble immobilier.

Ce prêt a également été garanti par l'inscription d'un privilège de prêteur de deniers de premier rang sur le bien financé.

Par une lettre du 10 mars 2016, M. [L] a proposé à la SA La Banque Postale de réduire le taux des intérêts des prêts immobiliers et, après recalcul, d'apurer les sommes dues. Il explique que la SA La Banque Postale n'a pas accédé à cette demande mais lui a proposé de souscrire, le 5 juillet 2017, un crédit à la consommation auprès de la SA La Banque Postale Financement portant sur un capital de 5 000 euros.

M. [L] a perdu son emploi d'ingénieur en aéronautique et espace et n'a pas été en mesure d'honorer le remboursement de ses prêts.

A compter du 19 juillet 2018, la SA La Banque Postale a mis M. [L] en demeure de lui régler des sommes impayées au titre des prêts immobiliers du 230août 2012 et du 14 décembre 2012. Elle a prononcé la déchéance du terme de ces trois prêts immobiliers par des lettres du 9 novembre 2018 puis a adressé une nouvelle mise en demeure, par une lettre du 16 novembre 2018, d'avoir à lui régler la somme totale de 149'335,30 euros.

Le 30 août 2018, il a perçu une provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel, consécutive à un grave accident de la circulation survenu le 10 décembre 2007.

Des échanges ont ensuite eu lieu entre M. [L] et la SA La Banque Postale, entre le 14 décembre 2018 et le 28 janvier 2019, pour tenter de définir les modalités d'un remboursement amiable des dettes.

C'est dans ces circonstances que la SA La Banque Postale :

- a fait pratiquer une saisie-attribution du 2 mai 2019 sur les comptes détenus par M. [L] auprès d'ING Bank NV, dénoncée le 9 mai 2012, pour une somme totale de 164'359,93 euros,

- a fait signifier un commandement de payer valant saisie immobilière du 6 mai 2019,

- a fait délivrer un commandement de payer aux fins de saisie-vente du 9 mai 2019, pour une somme de 163'944,72 euros,

en exécution des deux prêts authentique du 23 août 2012 et du 14 décembre 2012.

M. [L] a alors fait assigner la SA La Banque Postale devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance du Mans par un acte d'huissier du 28'mai 2019, aux fins notamment de faire constater l'irrégularité de la saisie-attribution du 2 mai 2019, d'ordonner le déblocage de son compte personnel sous astreinte, d'ordonner la mainlevée de la saisie-vente du 9 mai 2019, d'obtenir l'indemnisation de son préjudice ainsi que des délais de paiement.

Par un jugement du 25 novembre 2019, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance du Mans a :

- déclaré recevable la contestation de M. [L],

- déclaré nul le procès-verbal de saisie-attribution du 2 mai 2019 ainsi que l'acte de dénonciation du 9 mai 2019,

- ordonné, en conséquence la mainlevée de la saisie-attribution du 2 mai 2019, sans astreinte,

- déclaré valable le commandement de saisie-vente,

- dit que ce commandement de saisie-vente est un acte inutile,

- dit que la délivrance du commandement de payer valant saisie immobilière était prématurée,

- constaté que ces deux actes délivrés concomitamment au procès-verbal de saisie-attribution ont généré un préjudice moral,

- condamné en conséquence la SA La Banque Postale à payer à M. [L] une somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral,

- dit que la SA La Banque Postale supportera la charge des frais du commandement de payer aux fins de saisie-vente et des frais de mainlevée de la saisie-attribution du 2 mai 2019,

- autorisé M. [L] à se libérer de sa dette en quatre échéances, la première d'un montant de 100 000 euros et les trois autres d'un montant de 21 084,24 euros, incluant le principal et les frais et la dernière du solde restant dû, sauf meilleur accord des parties, les mensualités ne pouvant pas être supérieures à celles fixées judiciairement,

- dit que la première mensualité devra être réglée un mois après la notification de la présente et au plus tard le 10 janvier 2020, et les suivantes au plus tard le 10 de chaque trimestre soit le 10 avril 2020, le 10 juillet 2020 et le 10 octobre 2020,

- dit que les paiements ainsi effectués s'imputeront d'abord sur le capital,

- dit qu'à défaut d'un seul versement à l'échéance prévue, suivie d'une mise en demeure restée infructueuse durant quinze jours, l'intégralité des sommes restant dues redeviendra immédiatement exigible,

- rappelé que conformément aux prévisions de l'article 1343-5 du code civil, la décision suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues pendant le délai fixé par la décision,

- condamné la Banque Postale aux dépens,

- rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que les décisions du juge de l'exécution bénéficient de l'exécution provisoire de droit.

Par une déclaration du 10 décembre 2019, M. [L] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a condamné la SA La Banque Postale à lui payer une somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral, en ce qu'il a défini les délais de paiement et en ce qu'il a rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile, intimant la SA La Banque Postale.

M. [L] et la SA La Banque Postale ont conclu, cette dernière ayant formé appel incident.

Une ordonnance du 15 avril 2024 a clôturé l'instruction de l'affaire.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 12 avril 2024, auxquelles il est renvoyé pour un exposé des moyens, M. [L] demande à la cour :

- de le recevoir en son appel ainsi qu'en ses demandes, fins et conclusions déclarées fondées,

y faisant droit,

- d'infirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution près le tribunal de grande instance du Mans en date du 25 novembre 2019 en ce qu'il :

* a condamné la SA La Banque Postale à lui payer une somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral,

* l'a autorisé à se libérer de sa dette en quatre échéances, la première d'un montant de 100 000 euros et les trois autres d'un montant de 21 084,24 euros, incluant le principal et les frais et la dernière du solde restant dû, sauf meilleur accord des parties, les mensualités ne pouvant pas être supérieures à celles fixées judiciairement,

* a dit que la première mensualité devra être réglée, un mois après la notification de la présente et au plus tard le 10 janvier 2020, et les suivantes au plus tard le 10 de chaque trimestre soit les 10 avril 2020, 10 juillet 2020 et 10 octobre 2020,

* a rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et ainsi statuant à nouveau,

- de condamner la SA La Banque Postale à lui payer la somme de 50 000 euros de dommages-intérêts au titre de réparation de son préjudice moral,

- de lui accorder des délais de paiement les plus larges au titre du remboursement des crédits litigieux, à savoir :

* un règlement au prononcé de la décision de 12 573,41 euros qui solde l'emprunt de la cave,

* un second versement de 35 666,18 euros le 10 février 2025,

* un troisième versement de 50 000 euros le 10 septembre 2025,

* le solde de 53 419,64 euros le 10 février 2026,

en tout état de cause,

- de dire et juger mal fondée la SA La Banque Postale en son appel incident,

- de confirmer en conséquence le jugement du 25 novembre 2019, en ce qu'il a :

* déclaré recevable sa contestation,

* déclaré nul le procès-verbal de saisie-attribution pratiquée le 2 mai 2019 ainsi que l'acte de dénonciation du 9 mai 2019,

* ordonné la mainlevée de la saisie-attribution du 2 mai 2019, sans astreinte,

* déclaré valable le commandement de saisie-vente,

* dit que la délivrance du commandement aux fins de saisie-immobilière était prématurée,

* constaté que ces deux actes délivrés concomitamment au procès-verbal de saisie-attribution ont généré un préjudice moral,

* dit qu'elle supportera la charge des frais du commandement de payer aux fins de saisie-vente et des frais de mainlevée de la saisie-attribution du 2 mai 2019,

* dit que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital,

* dit qu'à défaut d'un seul versement à l'échéance prévue, suivie d'une mise en demeure restée infructueuse durant quinze jours, l'intégralité des sommes restant dues redeviendra immédiatement exigible,

* rappelé que conformément aux prévisions de l'article 1343-5 du code civil, la décision suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues pendant le délai fixé par la décision,

* condamné la SA La Banque Postale aux dépens,

* rappelé que les décisions du juge de l'exécution bénéficient de l'exécution provisoire de droit ;

au surplus,

- de condamner la SA La Banque Postale à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et celle de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi que les entiers dépens de première instance et d'appel recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 22 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour un exposé des motifs, la SA'La'Banque Postale demande à la cour :

sur l'appel principal exercé par M. [L],

- de dire et jugé mal fondé M. [L] en son appel principal,

- de le débouter de toutes ses demandes contenues dans son appel,

sur son appel incident,

- d'infirmer dans sa totalité le jugement du 25 novembre 2019,

statuant à nouveau,

- de dire et juger autant irrecevable que mal fondé M. [L] en toutes ses demandes contenues dans son exploit introductif d'instance,

- de l'en débouter,

- de dire et juger que les procédures de saisie-attribution, de saisie-vente et de saisie immobilière diligentées par elle sont régulières tant en leur fond qu'en leur forme,

- de condamner M. [L] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et celle de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, outre les dépens de première instance et d'appel.

MOTIFS DE LA DECISION :

Il convient d'examiner, en premier lieu, l'appel incident qui porte notamment sur la validité des mesures d'exécution avant d'examiner l'appel principal, que M. [L] limite au montant des dommages-intérêts et des modalités de remboursement qui lui ont été accordés.

- sur la saisie-attribution du 2 mai 2019 :

Le premier juge a considéré que le procès-verbal de saisie-attribution était affecté de vices de forme en application des articles 648 du code de procédure civile, L. 211-3, R. 211-1 et R. 211-4 du code des procédures civiles d'exécution, en ce qu'il ne comportait pas la réponse immédiate du tiers saisi sur la nature des comptes détenus par le débiteur et les soldes de ces comptes, cette réponse n'étant intervenue que tardivement, le 3 mai 2019 à 14h22, et de façon incomplète puisqu'elle ne précisait pas le numéro du compte, sa nature, ni le montant de son solde. Il a également relevé que le procès-verbal de saisie-attribution mentionnait bien le montant de la somme à caractère alimentaire laissée à la disposition du débiteur mais que le numéro du compte sur lequel elle avait été laissée n'était pas renseigné. Il en a conclu que ces différents vices avaient nécessairement causé grief à M. [L] en ne lui offrant pas les moyens d'assurer correctement sa défense et en ne permettant pas non plus à la juridiction de statuer au vu de renseignements bancaires exacts.

La SA La Banque Postale reproche au premier juge d'avoir statué ultra petita et sans respecter le principe du contradictoire, puisque M. [L] n'avait soulevé la nullité du procès-verbal de saisie-attribution qu'en raison du cumul des voies d'exécution et de la proposition d'accord amiable qu'il avait formulée, sans aucunement invoquer aucun vice de forme. Sur le fond, elle rappelle que les articles L. 211-3 et R. 211-4 du code des procédures civiles d'exécution ne mettent l'obligation de renseignement qu'à la charge du tiers saisi et son non-respect n'est sanctionné à l'article R. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution que par la possibilité pour le créancier de demander la condamnation du tiers saisi aux causes de la saisie. Elle ajoute que toute contestation quant à la régularité de la saisie-atribution ne peut être formulée par le débiteur que dans le mois de la signification de l'acte de dénonciation.

M. [L] approuve au contraire le premier juge d'avoir annulé l'acte de saisie-attribution en raison des irrégularités affectant le procès-verbal, en ajoutant les irrégularités tenant à l'absence d'informations et de renseignements à celles qu'il avait lui-même soulevées. Il l'approuve également d'avoir considéré qu'il en résultait pour lui un grief consistant à ne pas être en mesure d'assurer correctement sa défense. Enfin, il oppose à la SA La Banque Postale que celle-ci ne peut pas se réfugier derrière la faute du tiers saisi, puisqu'il appartenait à l'huissier de justice qu'elle avait mandaté de recueillir les informations suffisantes.

Sur ce,

Il est indifférent de savoir si le premier juge a statué ultra petita et sans respecter le principe du contradictoire. La cour est en effet désormais saisie de l'entièreté du litige et donc des moyens repris par M. [L] à partir de la motivation du premier juge.

De même, il est exact que l'article R. 211-11 du code des procédures civiles d'exécution impose, à peine d'irrecevabilité, que toute contestation soit formée par le débiteur dans le mois de la dénonciation du procès-verbal de saisie-attribution. Pour autant, il n'est pas prétendu que M. [L] aurait saisi tardivement le juge de l'exécution par son assignation du 28 mai 2019 et celui-ci pouvait donc modifier ou compléter les moyens développés au soutien de sa contestation. Du reste, la SA La Banque Postale ne demande pas, dans le dispositif de ses conclusions, que la contestation de M. [L] soit déclarée irrecevable.

Il n'est allégué aucune méconnaissance des mentions prévues par l'article 648 du code de procédure civile, bien que ce texte ait été cité par le premier juge et soit repris par les parties devant la cour. Les seules irrégularités débattues découlent, d'une part, de l'article L. 211-3 du code des procédures civiles d'exécution, qui prévoit que le tiers saisi est tenu de déclarer aux créanciers l'étendue de ses obligations à l'égard du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et, s'il y a lieu les cessions de créances, délégations, nantissements ou saisies antérieures et, d'autre part, de l'article R. 211-4 du même code, qui dispose que le tiers saisi est tenu de fournir sur-le-champ à l'huissier de justice les renseignements prévus à l'article L. 211-3 et de lui communiquer les pièces justificatives, qui organisent l'obligation de déclaration à la charge du tiers saisi. S'agissant toutefois plus spécifiquement de la saisie-attribution d'un compte bancaire, l'obligation déclarative du tiers saisi est précisée à l'article L. 162-1 du code des procédures civiles d'exécution, qui prévoit que lorsque la saisie est pratiquée entre les mains d'un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôt, celui-ci est tenu de déclarer le solde du ou des comptes du débiteur au jour de la saisie, ainsi qu'à l'article R. 211-20 du même code, duquel ressort que la déclaration du tiers saisi indique la nature du ou des comptes du débiteur ainsi que leur solde au jour de la saisie.

L'obligation déclarative du tiers saisi est ainsi conçue pour que le commissaire de justice reçoive une réponse immédiate et précise des sommes détenues par l'établissement bancaire pour le compte du débiteur, qui lui permettra d'apprécier l'opportunité de poursuivre cette mesure d'exécution.

En l'espèce, le procès-verbal de saisie-attribution a été signifié par la voie non dématérialisée le 2 mai 2019 et le tiers saisi a déclaré qu'il apporterait une 'réponse par fax sous 48 h'. Les parties produisent, de façon inexpliquée, la même réponse qui a été faite par ING Bank NV mais pour l'une par un fax daté du 3 mai 2019 et reçu le 3 mai 2019 à 14h22 (pièce M. [L] n°9) et, pour l'autre, par un fax daté du 6 mai 2019 et reçu le 6 mai 2019 à 9h20 (pièce SA La Banque Postale n°13). Les termes des deux fax sont toutefois essentiellement les mêmes, ING Bank NV informant l'huissier de justice que 'comme suite à la saisie-attribution pratiquée entre nos mains le 3 mai 2019 [6 mai 2019], d'un montant de 164'359,93 euros à la demande de : SA La Banque Postale et à l'encontre de : Monsieur [K] [L]. Nous vous informons que le compte de notre cliente présente un solde saisissable de 164'359,93 euros. Par conséquent, nous bloquons cette somme'. Ce faisant, il apparaît certes que l'information n'a pas été donnée sur-le-champs et qu'elle l'a été de façon non parfaitement complète puisqu'il n'est fait état que du montant du solde du compte mais sans en préciser sa nature, les dispositions précitées n'exigeant toutefois pas que soit indiqué le numéro du compte.

Néanmoins, la réponse a été apportée dans les deux jours de la signification du procès-verbal de saisie-attribution, qu'il faille retenir la réponse produite par M.'[L] (du 3 mai 2019 à 14h22) ou même celle produite par la SA La Banque Postale puisque deux jours ouvrés sépare le vendredi 3 mai 2019 du lundi 6 mai 2019 (9h20). Du reste, il est communément admis en pratique que le tiers-saisi, confronté à l'impossibilité de disposer immédiatement des informations sur les comptes de son client, se ménage un délai de réponse de quelques jours afin de pouvoir recueillir les informations nécessaires. Mais surtout, la seule sanction au manquement par le tiers saisi à son obligation déclarative est prévue par l'article R. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution et ne bénéficie qu'au seul créancier, qu'il s'agisse de la condamnation du tiers saisi aux causes de la saisie en cas de tardiveté de la réponse ou à des dommages-intérêts en cas de déclaration incomplète, inexacte ou incomplète, dès lors que, pour les raisons précédemment rappelées, c'est au profit exclusif du créancier saisissant qu'une telle obligation est organisée. C'est aussi cette raison qui explique que M. [L] ne peut pas utilement tirer argument à son profit de ce qu'il appartenait à l'huissier de justice mandaté par la SA La Banque Postale de faire en sorte de recueillir du tiers saisi les informations nécessaires.

En tout état de cause, aucun texte ne prévoit une quelconque nullité et les parties ne prétendent pas non plus qu'il en résulte une inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public au sens de l'article 114 du code de procédure civile. Le premier juge ne pouvait donc pas sanctionner le retard dans la réponse du tiers saisi ni l'absence de mention de la nature du compte par la nullité de l'acte de saisie-attribution.

Par ailleurs, l'article R. 211-3 (4°) du code des procédures civiles d'exécution prévoit qu'à peine de nullité, l'acte de dénonciation indique, en cas de saisie de compte, le montant de la somme à caractère alimentaire laissée à la disposition du débiteur ainsi que le ou les comptes sur lesquels cette mise à disposition est opérée.

Il est exact qu'en l'espèce, l'acte de dénonciation du 9 mai 2019, s'il mentionne bien le montant de la somme à caractère alimentaire, est incomplet quant à l'identification du compte sur lequel celle-ci a été laissée, le numéro du compte n'étant pas renseigné. Mais la nullité sanctionne un vice de forme qui rend nécessaire la preuve par M. [L] d'un grief au sens de l'article 114 du code de procédure civile et qui soit en lien avec l'irrégularité caractérisée. Or, l'appelant se contente d'invoquer, sans plus de développement, une impossibilité d'assurer correctement sa défense qui n'est pas concrètement démontrée ni même n'apparaît être en lien avec l'irrégularité tenant au défaut d'indication du compte sur lequel la somme alimentaire lui a été laissée. Il en résulte qu'aucune nullité de l'acte de dénonciation ne peut être accueillie.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a déclaré nul le procès-verbal de saisie-attribution du 2 mai 2019 et l'acte de dénonciation du 9 mai 2019, ainsi qu'en ce qu'il a ordonné la mainlevée de cette saisie-attribution. Au contraire, les exceptions de nullité soulevées par M. [L] seront rejetées et il sera débouté de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution du 2 mai 2019.

Par voie de conséquence, le jugement sera également infirmé en ce qu'il a dit que la SA La Banque Postale devra supporter les frais de mainlevée de cette saisie-attribution.

- sur la responsabilité de la SA La Banque Postale :

Le premier juge, qui a relevé que le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 9 mai 2019 n'était affecté d'aucune irrégularité, a néanmoins dit que cet acte était inutile au sens de l'article L. 111-7 du code des procédures civiles d'exécution, tout comme il a déclaré prématuré le commandement de payer valant saisie immobilière du 6 mai 2019, après avoir relevé que la SA La Banque Postale avait eu connaissance dès le 3 mai 2019 de l'existence d'un solde bancaire saisissable du montant de sa créance. Il a par ailleurs retenu que la délivrance des trois actes en sept jours a induit un état de stress chez M. [L], alors que celui-ci se trouvait dans un état psychique fragile en raison des séquelles laissées par l'accident dont il a été victime le 10 décembre 2007 et que la SA La Banque Postale connaissait nécessairement.

La SA La Banque Postale reproche au premier juge ce défaut de motivation pour déclarer le commandement de payer aux fins de saisie-vente inutile et elle affirme qu'au contraire, elle avait la faculté d'exercer les mesures nécessaires qui lui permettaient d'assurer la conservation et le recouvrement de sa créance. Elle'conteste tout autant le caractère prématuré du commandement de payer valant saisie immobilière, qu'elle a fait délivrer le même jour que la réponse qui lui a été faite par le tiers saisi quant au montant des sommes saisissables (6'mai 2019) et par un autre huissier de justice que celui qui a instrumenté la saisie-attribution. Elle se défend d'avoir commis une quelconque faute. Elle rappelle en effet qu'elle disposait de la liberté du choix des mesures d'exécution, dans la seule limite d'un principe de proportionnalité qui a été respecté en l'espèce compte tenu du montant de sa créance et du fait que son débiteur ne percevait que le revenu de solidarité active. Elle ajoute que M. [L] ne démontre pas en quoi les sommes saisies auraient été insaisissables et elle réfute avoir eu une connaissance précise de la fragilité de son état de santé avant d'avoir pris connaissance du rapport d'expertise judiciaire communiqué dans la présente instance. Enfin, elle met en avant la rigueur de la jurisprudence en lien avec la sanction des irrégularités qui peuvent affecter les actes de la procédure de saisie immobilière pour justifier avoir fait délivrer plusieurs actes d'exécution différents afin de se prémunir de toute prescription.

M. [L] recherche la responsabilité de la SA La Banque Postale pour un abus des poursuites, sur le fondement de l'article 1240 du code civil et de l'article L. 111-7 du code des procédures civiles d'exécution, pour lui avoir fait signifier trois actes en sept jours. Il reproche à la SA La Banque Postale d'avoir fait bloquer ses comptes alors qu'elle détenait des prêts notariés, qu'elle disposait d'une garantie sur son bien immobilier et qu'elle avait initié une procédure de saisie immobilière. Il ajoute que le cumul des actes d'exécution, par la SA La Banque Postale et par la SA La Banque Postale Financement, est injustifié et excessif au regard des propositions de règlement qu'il a formulées et qui ont toutes été rejetées par la SA La Banque Postale. Il soutient que les sommes saisies, qui correspondent aux provisions qu'il a perçues à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel, sont par nature insaisissables et constituent sa seule source de revenus. Il affirme que le comportement de la SA'La Banque Postale à son encontre relève de la persécution et du harcèlement, en pleine connaissance de son état de santé précaire puisqu'il avait souscrit les prêts sans assurance pour perte d'emploi. C'est pourquoi il demande l'indemnisation des frais engagés et du stress subi à hauteur d'une somme de 50'000 euros.

Sur ce,

Il ressort de l'article L. 111-7 du code des procédures civiles d'exécution que le créancier a le choix des mesures propres à assurer l'exécution ou la conservation de sa créance mais que l'exécution de ces mesures ne peut pas excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l'obligation. Il'appartient au débiteur qui se plaint du caractère disproportionné de la mesure d'exécution d'en rapporter la preuve. La sanction d'une telle disproportion est prévue plus particulièrement à l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, lequel donne au juge de l'exécution le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d'abus de saisie.

Il est relevé que, pour autant qu'il demande la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré inutile le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 9 mai 2019 et prématuré le commandement de payer valant saisie immobilière du 6 mai 2019, M. [L] ne sollicite pas la mainlevée de ces actes dans le dispositif de ses dernières conclusions, qui saisit seul la cour de ses prétentions. Il poursuit néanmoins la confirmation du jugement en ce qu'il a laissé la charge des frais du commandement de payer aux fins de saisie-vente à la charge de la SA La Banque Postale et il demande des dommages-intérêts en réparation des dommages qu'il estime être résultés du caractère abusif et excessif des mesures d'exécution, dans le cadre de son appel incident pour un montant supérieur à celui qui lui a été accordé en première instance.

Seuls les actes d'exécution diligentés par la SA La Banque Postale doivent être pris en considération, à l'exclusion de ceux entrepris par la SA La Banque Postale Financement, qui est une personne morale distincte auprès de laquelle M. [L] a souscrit un prêt non concerné par la présence procédure.

Les mesures d'exécution critiquées recouvrent donc uniquement la saisie-attribution du 2 mai 2019, le commandement de payer valant saisie immobilière du 6 mai 2019 et le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 9 mai 2019. Le simple fait que plusieurs mesures aient ainsi été mises en oeuvre pour l'exécution des mêmes titres et en l'espace de sept jours n'est pas en soi de nature à caractériser l'abus ou la disproportion, ce d'autant plus sûrement que la créance dont le recouvrement était poursuivi était d'un montant élevé de 163 252, 72 euros en principal.

De même, le fait que la SA La Banque Postale disposait de sûretés réelles constituées des privilèges de prêteur de deniers de premier rang pris sur chacun des lots dont les prêts du 23 août 2012 et du 14 décembre 2012 ont permis l'acquisition ne l'empêchait pas, compte tenu précisément du principe de libre choix des mesures d'exécution précédemment rappelé, de décider de faire pratiquer une saisie-attribution, en premier lieu et avant d'envisager une saisie immobilière, quand bien même il en est résulté un blocage de la provision de son compte.

M. [L] démontre par ailleurs que les sommes de 69 998,18 euros et de 105'600 euros ont été versés sur son compte ouvert auprès d'ING Bank NV, respectivement le 21 février 2018 et le 6 mai 2018, à titre de provisions à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel suite à l'accident de la voie publique dont il a été victime le 10 décembre 2007. Il n'est pas démontré que ces sommes correspondent avec certitude à celles qui ont été appréhendées à l'occasion de la saisie-attribution du 2 mai 2019. Même à supposer cette correspondance, M.'[L] ne démontre pas plus que ces sommes étaient insaisissables, comme il le soutient. Les dommages-intérêts qui réparent un préjudice corporel sont en effet saisissables par les créanciers de la victime, sauf à ce que celui-ci démontre qu'elles présentent pour lui, en tout ou partie, un caractère alimentaire au sens de l'article L. 112-2 (3°) du code des procédures civiles d'exécution. Or, M. [L] ne propose pas de rapporter une telle preuve et la cour relève en sens inverse, d'une part, qu'il bénéficiait par ailleurs au moment de la saisie-attribution d'un revenu de subsistance grâce au versement du revenu de solidarité active et, d'autre part, qu'un procès-verbal de transaction signé par M. [L] le 21 mars 2018 fait état de provisions déjà servies pour un montant total de 338 540 euros sans qu'aucun élément ne permette de déterminer le sort des sommes excédant celles appréhendées par la SA La Banque Postale.

Il est également justifié des correspondances échangées entre M. [L] et la SA La Banque Postale à compter d'une première lettre du 10 mars 2016, pour tenter de trouver un accord quant au remboursement des dettes. Mais M. [L] ne peut pas reprocher à la SA La Banque Postale de ne pas avoir accepté ses propositions de remboursement qu'il avait subordonnées à l'acceptation par la banque créancière d'une réduction des taux d'intérêts à moins de 2 %. C'est donc sans abus ni même sans faute que la SA La Banque Postale a pu ne pas renoncer à son droit aux intérêts au taux conventionnel, tout en faisant néanmoins connaître son refus au débiteur à l'occasion d'au moins trois lettres en réponse et en lui soumettant d'autres propositions de paiement, puis d'avoir décidé de procéder au recouvrement forcé de ses créances devant le constat de l'impossibilité d'un accord malgré des échanges de plusieurs mois.

La SA La Banque Postale ne prétend pas qu'elle a ignoré l'état de santé de M. [L], victime d'un grave accident de la voie publique plusieurs années avant la souscription des prêts authentiques, mais plus exactement qu'elle n'a pas eu une connaissance précise des séquelles laissées par cet accident jusqu'à la lecture du rapport d'expertise judiciaire médical du 20 janvier 2018 après que cette pièce a été versée aux débats dans la présente instance. De fait, une telle connaissance ne peut pas se déduire du simple fait que M. [L] n'a pas pu bénéficier de l'assurance perte d'emploi proposée par la SA La Banque Postale lors des prêts du 23 août 2012 et du 14 décembre 2012, à une époque où il travailait encore à temps complet puisqu'il n'a été licencié que le 25 juillet 2014, étant observé que l'appelant n'a jamais fait état de sa situation ou de difficultés économiques dans aucune de ses lettres.

Ces éléments amènent à conclure à l'utilité et à l'absence de caractère disproportionné de la saisie-attribution pratiquée le 2 mai 2019.

Par ailleurs, le montant de la créance justifie que la SA La Banque Postale ait pu mettre en oeuvre une mesure de saisie-attribution sur les comptes bancaires de son débiteur et initier parallèlement une procédure de saisie immobilière à son encontre, sans avoir à attendre la réponse du tiers saisi. A cet égard et comme précédemment relevé, chacune des parties produit une réponse d'ING Bank NV portant une date différente, sans qu'aucune explication ne puisse être trouvée à cette différence. C'est ainsi que la réponse produite par M. [L] est datée du 3'mai 2019, avec la trace d'un envoi par fax du 3 mai 2019 à 14h22 (pièce n° 9) et que celle produite par la SA La Banque Postale est datée du 6 mai 2019, avec la trace d'un envoi par fax du 6 mai 2019 à 9h20 (pièce n° 13). Dans l'un comme l'autre des cas toutefois, aucune faute ne se trouve caractérisée. En effet, à s'en tenir à la pièce produite par M. [L], le commandement de payer valant saisie immobilière a été délivré (6 mai 2019) alors que le tiers saisi n'avait pas encore apporté sa réponse. Et à s'en tenir à la pièce produite par la SA La Banque Postale, un délai de moins d'un jour ouvré a séparé la réponse du tiers saisi à l'huissier de justice parisien mandaté par l'intimée pour pratiquer la saisie-attribution (vendredi 3 mai 2019 à 14h22) de la délivrance de l'acte de saisie immobilière par l'huissier de justice du Mans mandaté par l'intimée (lundi 6 mai 2019), soit un délai manifestement trop court pour que l'information puisse être portée à la connaissance de la SA La Banque Postale et relayée par celle-ci à son huissier de justice du Mans afin d'éviter la délivrance de l'acte.

Il n'est donc pas démontré que le commandement de payer valant saisie immobilière a été délivré de façon prématurée et le jugement sera infirmé en ce qu'il a décidé le contraire.

Un tel raisonnement ne peut en revanche pas être tenu s'agissant de la signification du commandement de payer aux fins de saisie-vente, qui est certes intervenue (9 mai 2019) moins de trois jours ouvrés, voire moins de deux jours ouvrés, après la réponse faite par le tiers saisi, compte tenu du jour férié du mercredi 8 mai 2019, mais alors que cette réponse était connue de la SA La Banque Postale puisqu'une copie en a été remise au débiteur à l'occasion de la dénonciation de la saisie-attribution du 9 mai 2019. L'utilité supplémentaire de ce commandement de payer aux fins de saisie-vente à la préservation des droits de l'intimée ou au recouvrement de ses créances n'est au demeurant pas établie en considération de la signification du commandement de payer valant saisie immobilière trois jours auparavant, à la personne même de M. [L] et par la même étude d'huissiers de justice du Mans. Il n'est d'ailleurs pas prétendu que la procédure de saisie-vente a été poursuivie, contrairement à la procédure de saisie immobilière dont l'appelant précise qu'elle est actuellement suspendue dans l'attente de la présente décision. Ni la nécessité pour la banque créancière d'attendre l'écoulement du délai de contestation d'un mois suivant la dénonciation de la saisie-attribution pour être assurée du règlement effectif des fonds à son profit, ni même les risques liés à la prescription, dont le cours avait déjà été interrompu tant par la signification du procès-verbal de saisie-attribution que par celle du commandement de payer valant saisie immobilière, ne justifient en tout état de cause la délivrance de ce commandement de payer aux fins de saisie-vente, qui apparaît donc inutile.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que ce commandement de payer aux fins saisie-vente est valable, dès lors que M. [L] ne développe aucun moyen pour en contester sa régularité, mais qu'il est un acte inutile et que les frais de l'acte doivent être laissés à la charge de la SA La Banque Postale.

La responsabilité de la SA La Banque Postale ne se trouve engagée qu'à l'égard de la délivrance du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 9 mai 2019 et il appartient à M. [L] de rapporter la preuve de la réalité et de l'importance du préjudice qu'il a subi en lien avec la signification de cet acte.

M. [L] invoque, d'une part, les frais qu'il a été contraint d'engager mais un tel poste, dont il n'est au demeurant pas précisément justifié, ne peut relever que des frais irrépétibles et des dépens sur lesquels il sera statué ci-dessous.

D'autre part, il invoque le stress important provoqué par le crainte du comportement que la SA La Banque Postale pourrait adopter à son égard, et qui est renforcé par la fragilité de son état de santé. Les deux expertises, médicale du 20 janvier 2018 et en ergothérapie du 25 juin 2018, confirment que M. [L] conserve d'importantes séquelles de son grave accident de la voie publique du 20 décembre 2007, notamment au niveau psychique et cognitif. Dans ce contexte, la délivrance d'un commandement de payer aux fins de saisie-vente qui, pour n'être qu'un acte préparatoire, n'en laisse pas moins craindre au débiteur la saisie de ses biens mobiliers, a donc incontestablement causé un préjudice moral à M. [L], d'autant plus certain dans son principe qu'elle est intervenue très peu de temps après la signification d'un commandement de payer valant saisie immobilière et en même temps que la dénonciation de la saisie-attribution. Néanmoins, M. [L] ne démontre pas concrètement quelle a été l'ampleur et les incidences du stress qu'il explique avoir ressenti et, de ce fait, l'indemnisation arrêtée par le premier juge à la somme de 1 000 euros apparaît résulter d'une juste appréciation du préjudice moral.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la SA La Banque Postale à verser à M. [L] une somme de 1 000 euros de dommages-intérêts.

- sur les délais de paiement :

Le premier juge a autorisé M. [L] à régler sa dette de façon échelonnée mais en quatre mensualités seulement, dont une première de 100'000 euros et les trois suivantes de 21 084,24 euros.

M. [L] réitère sa demande de délais de paiement mais sur une plus longue durée de 24 mois. Il propose ainsi un premier règlement de 12'573,41 euros dès le prononcé de la décision, un deuxième versement de 35'666,18 euros le 10'février 2025, un troisième versement de 50'000 euros le 10 septembre 2025 et le solde (53 419,64 euros) le 10 février 2026.

La SA La Banque Postale oppose que M. [L] n'a pas exécuté l'échéancier décidé par le juge de l'exécution en dépit d'une lettre qui lui a été adressée à cette fin le 28 janvier 2020. Elle ajoute que la saisie-attribution pratiquée permet de régler la totalité de la dette et que M. [L] ne justifie pas de sa situation financière sur les dernières années.

Sur ce,

L'article L. 211-2 du code des procédures civiles d'exécution dispose que la saisie-attribution produit un effet attributif immédiat à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée. Cet effet attributif immédiat fait obstacle à l'octroi de délais de paiement pour les sommes détenues par le tiers saisi et ne laisse la possibilité de tels délais de paiement que pour le surplus éventuel de la dette.

Or en l'espèce, la saisie-attribution du 2 mai 2019, dont la mainlevée a été écartée, a été pratiquée pour une somme non contestée de 164 359,93 euros et le tiers saisi a informé la SA La Banque Postale que le compte de M. [L] disposait d'un solde suffisant pour couvrir cette dette. L'effet attributif de la saisie-attribution sur la somme de 164 359,93 euros empêche donc désormais d'envisager la possibilité de délais de paiement à M. [L] pour le remboursement de sa dette.

Pour cette raison, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions relatives au remboursement échelonné de la dette et à l'imputation prioritaire des paiements sur le capital, M. [L] devant être débouté de sa demande de délais de paiement.

- sur les demandes accessoires :

Le jugement est confirmé en ses dispositions ayant statué sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance.

En appel toutefois, M. [L] doit être considéré comme la partie perdante et il sera débouté de sa demande formée au titre des frais irrépétibles, tandis qu'il sera condamné aux dépens d'appel ainsi qu'à verser à la SA La Banque Postale une somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés par celle-ci en appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré valable le commandement de payer aux fins de saisie-vente, en ce qu'il a dit que ce commandement de payer aux fins de saisie-vente est un acte inutile, en ce qu'il a dit que les frais du commandement de payer aux fins de saisie-vente seront supportés par la SA La Banque Postale, en ce qu'il a condamné la SA La Banque Postale à verser à M. [L] une somme de 1 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral causé par la délivrance du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 9 mai 2019 et en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance ;

statuant à nouveau sur les autres chefs,

Rejette les exceptions de nullité soulevées par M. [L] à l'encontre du procès-verbal de saisie-attribution du 2 mai 2019 et de l'acte de dénonciation du 9 mai 2019 ;

Déboute M. [L] de ses demandes de mainlevée de la saisie-attribution pratiquée par la SA La Banque Postale le 2 mai 2019 entre les mains d'ING Bank NV et de faire supporter les frais de cette mainlevée par la SA La Banque Postale ;

Dit que la délivrance du commandement de payer valant saisie immobilière du 6 mai 2019 n'était pas prématurée ;

Déboute M. [L] de sa demande de délais de paiement et d'imputation des paiements en priorité sur le capital ;

y ajoutant,

Déboute M. [L] de ses demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [L] à verser à la SA La Banque Postale une somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel ;

Condamne M. [L] aux dépens d'appel ;

LA GREFFIERE, P/LA PRESIDENTE empêchée,

S. TAILLEBOIS J. CHAPPERT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre a - commerciale
Numéro d'arrêt : 19/02412
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;19.02412 ?
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