COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - COMMERCIALE
JC/ILAF
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 19/02336 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ETEU
jugement du 15 Octobre 2019
Tribunal d'Instance de LAVAL
n° d'inscription au RG de première instance 18-000406
ARRET DU 02 JUILLET 2024
APPELANTE :
LE FONDS COMMUN DE TITRISATION DENOMME 'HUGO CREANCES I' ayant pour société de gestion la société EQUITIS GESTION SAS, représenté par son recouvreur la société MCS ET ASSOCIES, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, venant aux droits de LA BANQUE POPULAIRE DE L'OUEST
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Jean-Yves BENOIST de la SCP HAUTEMAINE AVOCATS, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 20180715
INTIMEE :
Madame [G] [D] épouse [N]
née le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Romain BOULIOU de la SCP DESBOIS-BOULIOU ET ASSOCIES, avocat au barreau de LAVAL - N° du dossier 190072
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 07 Mai 2024 à 14'H'00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, présidente de chambre et devant M. CHAPPERT, conseiller qui a été préalablement entendu en son rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, présidente de chambre
M. CHAPPERT, conseiller
Mme GANDAIS, conseillère
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 02 juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Julien CHAPPERT, conseiller pour la présidente de chambre empêchée et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE :
Par un acte sous seings privés du 9 mai 2001, la SA Banque Populaire de l'Ouest (SA BPO) a consenti à M. [V] [P] un prêt personnel n°'1078615 portant sur un capital de 25 920 euros, remboursable au taux de 8,5'% en 84 mensualités de 419,55 euros, frais d'assurance compris.
Par un acte du 10 mai 2001, Mme [G] [D] épouse [N] s'est portée caution solidaire et indivisible du remboursement de ce prêt, à concurrence de la somme de 25 920 euros, couvrant le principal, les intérêts, les agios, les commissions, les frais et les accessoires.
Le 10 octobre 2001, la SA BPO a prononcé la déchéance du terme puis, le'19'juin 2022, elle a fait assigner M. [P] et Mme [D], en sa qualité de caution, en paiement devant le tribunal de grande instance de Laval.
Par un jugement du 3 juin 2003, le tribunal de grande instance de Laval a "condamné M. [P] et Mme [D] in solidum au paiement des sommes suivantes, liées à la même dette : - pour Monsieur [P], une somme principale de vingt sept mille huit cent quatre vingt treize euros et cinq centimes (27 893,05 €) avec intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2002 ; - pour Madame [D], la somme en principal de vingt cinq mille neuf cent vingt euros (25 920 €) avec intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2002", outre une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Mme [D] a effectué des remboursements puis M. [P] a lui-même repris les remboursements.
M. [P] est décédé le [Date décès 2] 2019.
Par un bordereau remis le 1er octobre 2010, la SA BPO a cédé au Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, représenté par la SA Gestion et titrisation Internationales, un portefeuille de créances.
La SA MCS et Associés a informé Mme [D] de cette cession par des lettres du 6 octobre 2011 puis du 7 mai 2012. Le 29 mai 2012, elle lui a transmis un décompte actualisé de la créance en vue d'un règlement amiable de la dette. Elle l'a finalement mise en demeure de régler le solde de la dette par des lettres du 26 septembre 2012, du 22 juin 2015 puis du 24 septembre 2015.
C'est dans ce contexte que, le 9 janvier 2018, le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SA GTI Asset Management, a fait signifier le jugement du 3 juin 2003 à Mme [D] puis qu'il a déposé une requête devant le tribunal d'instance de Laval le 29 janvier 2018, en vue de la saisie de ses rémunérations pour une somme totale de 40 809,68 euros.
A la suite d'une contestation soulevée par Mme [D], le tribunal d'instance de Laval a, par un jugement du 15 octobre 2019 :
- rejeté la requête en saisie des rémunérations présentée par le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, représenté par la SA GTI Asset Management, contre Mme [D],
- débouté Mme [D] de sa demande de dommages-intérêts,
- condamné le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, représenté par la SA GTI Asset Management, aux dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Par une déclaration du 29 novembre 2019, le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SA GTI Asset Management, a interjeté appel de ce jugement, l'attaquant en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande de dommages-intérêts, et intimant Mme [D].
A compter du 1er juillet 2020, la SAS Equitis Gestion est devenue la société de gestion du Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, ce dont Mme [D] a été informée par une lettre du 24 juillet 2020.
Le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, et Mme [D] ont conclu, cette dernière ayant formé appel incident.
Une ordonnance du 15 avril 2024 a clôturé l'instruction de l'affaire.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 8 décembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour un exposé des moyens, le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, demande à la cour :
- de le juger recevable et bien fondé en son appel et y faisant droit,
en conséquence,
- d'infirmer le jugement du tribunal d'instance de Laval du 15 octobre 2019 en ce qu'il :
* a rejeté sa requête en saisie des rémunérations,
* l'a condamné aux dépens et à verser une somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande de dommages-intérêts,
statuant à nouveau,
- d'ordonner la saisie-arrêt des rémunérations de Mme [D] pour un montant de 40 809,68 euros arrêté au 29 janvier 2018 conformément à la requête en saisie-arrêt des rémunérations déposée au greffe,
- de condamner Mme [D] aux entiers dépens, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les besoins de la première instance,
en tout cas,
- de débouter Mme [D] de l'ensemble de ses demandes,
- de la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 8 décembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour un exposé des motifs, Mme'[D] demande à la cour de :
sur la demande principale,
à titre principal,
- de confirmer le jugement du 15 octobre 2019 en ce qu'il a jugé que faute de justifier d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, la demande du Fonds commun de titrisation Hugo Créances I en saisie des rémunérations devait être rejetée,
- de débouter, en conséquence, le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I de sa demande en saisie rémunération de la somme totale de 40'809,68 euros,
à titre subsidiaire,
- de dire et juger que le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I a manqué à son obligation d'information vis-à-vis d'elle en sa qualité de caution,
- de débouter, en conséquence, le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I de sa demande en saisie rémunération de la somme totale de 40'809,68 euros,
à titre très subsidiaire,
- de dire et juger que le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I a manqué à son obligation d'information vis-à-vis d'elle en sa qualité de caution,
- de dire et juger applicable la prescription biennale des intérêts, le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I ne pouvant exiger d'elle le règlement des intérêts échus plus de deux ans auparavant,
- par conséquent, de dire et juger qu'elle ne sera pas tenue de la somme en principal, soit 23 537,14 euros, à laquelle seront déduites les sommes déjà versées par le débiteur, soit 5 881,21 euros,
- de lui octroyer des délais de paiement,
sur la demande reconventionnelle,
- d'infirmer le jugement du 15 octobre 2019,
- de la dire et juger recevable et bien fondée en sa demande reconventionnelle,
- de dire et juger que le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I a fait preuve d'une attitude manifestement déloyale et abusive à son égard, en sa qualité de caution,
- de condamner le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I à lui régler la somme de 5 000 euros au titre du préjudice subi,
en tout état de cause,
- de débouter le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I de ses demandes, fins et prétentions contraires,
- de le condamner à lui payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,
MOTIFS DE LA DECISION :
Il est rappelé que les 'dire et juger', bien qu'ils figurent dans le dispositif des conclusions des parties, ne constituent pas des prétentions sur lesquelles la cour est appelée à statuer mais de simples rappels des moyens au soutien de ces prétentions.
Le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, fonde sa demande de saisie des rémunérations sur le jugement du tribunal de grande instance de Laval du 3 juin 2003, dont il est justifié qu'il a été signifié le 9 janvier 2018, qui a condamné Mme [D] en sa qualité de caution du prêt qui avait été consenti par la SA BPO à M. [P].
- sur la qualité à agir :
Pour rejeter la requête en saisie des rémunérations, le premier juge a considéré qu'il n'était pas possible d'établir un lien incontestable entre cette créance et l'une des quatre créances mentionnées dans la liste annexée au bordereau de titrisation.
Le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, affirme que la créance est parfaitement identifiée à partir des références du dossier (n° 3201165) et du prêt (n° K00000001078615), qui figurent également dans l'offre de prêt (article 3), dans la lettre du 7 novembre 2001 adressée à Mme'[D] et dans l'ensemble des correspondances adressées par la SA BPO à M. [P] et à Mme [D]. Il rappelle que le cautionnement a été transmis comme un accessoire à la créance principale et que la cession a été opposable aux tiers, dont Mme [D], par la simple remise du bordereau, conformément aux dispositions de l'article L. 214-169 du code monétaire et financier.
Au contraire, Mme [D] soutient que rien ne permet de rattacher le prêt qu'elle a cautionné aux créances qui ont été cédées au Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, puisque le bordereau de cession et les courriers qui ont été adressés comportent une référence à un dossier n° 3201165 alors que le prêt cautionné est référencé n° 0248399.
Sur ce,
Il n'est pas contesté que le jugement du 3 juin 2003 se rapporte bien au prêt sous seing privé qui avait été consenti par la SA BPO à M. [P] le 9 mai 2001 et pour l'exécution duquel Mme [D] s'était portée caution par un acte sous seing privé du 10 mai 2001. Seule est discutée la transmission par la SA'BPO au Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant alors par la SA Gestion et Titrisations Internationales, de cette créance issue du prêt, dont le
cautionnement de Mme [D] et le jugement de condamnation du 3 juin 2003 constituent des accessoires.
Le premier juge a parfaitement rappelé qu'il résulte des articles L. 214-43, alinéa 8, et D. 214-102 du code monétaire et financier, dans leur rédaction applicable à la date de la signature du bordereau litigieux, que l'opération de titrisation produit ses effets entre les parties et devient opposable aux tiers, dont les débiteurs cédés, dès la date apposée sur le bordereau mais que ce formalisme allégé a pour contrepartie la nécessité de pouvoir identifier la créance cédée avec évidence et certitude. Mais si le bordereau doit comporter la désignation ou l'individualisation des créances cédées ou les éléments susceptibles d'y pourvoir, les procédés d'identification proposés par l'article D. 214-102 (4°) du code monétaire et financier ne sont ni impératifs ni exhaustifs. C'est ainsi que la créance cédée peut être identifiée notamment par la référence chiffrée du contrat.
Le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SA Equitis Gestion, produit en l'espèce le bordereau signé le 1er octobre 2010 avec son annexe. Cette annexe mentionne quatre créances au nom de [V] [P] avec, certes, une référence de dossier identique (n° 3201165) mais également, pour chacune, une 'référence créance' différente. Or, l'une de ces références (n°'K00000001078615) se retrouve à l'article 3 du contrat de prêt du 9 mai 2001':
'article 3 - Caractéristiques du prêt de la Banque Populaire
Pret inv Divers Particuliers numéro : 1078615"
et dans l'acte de cautionnement signé par Mme [D].
La mention du nom du débiteur principal et de cette référence chiffrée du contrat permettent d'identifier suffisamment la créance issue du prêt du 9 mai 2001, dont il convient dès lors de considérer qu'elle a bien été transmise à l'occasion de la signature du bordereau du 1er octobre 2010, entraînant la transmission par accessoires du cautionnement consenti par Mme [D] et du titre exécutoire constitué du jugement du 3 juin 2003. Le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SA Equitis Gestion rapporte ainsi la preuve qu'il a qualité à agir en exécution de ce jugement du 3 juin 2003 et le jugement sera infirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de saisie des rémunérations pour cette raison.
- sur le montant de la saisie des rémunérations :
Le jugement du 3 juin 2003 a condamné Mme [D], en sa qualité de caution, au paiement de la somme de 25 920 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2002, ainsi qu'au paiement avec M. [P] d'une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles. Le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SA Equitis Gestion poursuit la saisie des rémunérations pour la somme de 23 537,14 euros en principal, de 15 475,85 euros en intérêts, de 296,72 euros en frais et de 1 500 euros en accessoires, soit une somme totale de 40 809,71 euros.
Mme [D] oppose le défaut d'information annuelle de l'article L. 333-2 du code de la consommation et le défaut d'information sur la défaillance du débiteur principal de l'article L. 341-1 de ce même code depuis le 1er janvier 2006 pour conclure, dans un premier temps, au rejet pur et simple de la demande de saisie des rémunérations. Dans un second temps, elle invoque la prescription biennale des intérêts ainsi que la déchéance du droit aux intérêts et pénalités de retard de l'article L. 343-6 du code de la consommation pour conclure qu'elle ne peut être tenue qu'au paiement du principal, sauf à déduire la somme de 5 881,21 euros représentant les paiements effectués par M. [P] entre le 1er janvier 2006 et la date son décès ([Date décès 2] 2019).
Le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SA Equitis Gestion, répond qu'il produit un nouveau décompte établi sur la base des condamnations prononcées par le tribunal de grande instance de Laval dans son jugement du 3 juin 2003, faisant apparaître les règlements que Mme [D] dit avoir effectués, les règlements réalisés par M. [P] pour un montant total de 5 881,21 euros et expurgé des intérêts prescrits sur la période du 17 juillet 2009 au 29 janvier 2013, soit cinq ans avant la requête en saisie des rémunérations. Il ajoute que le manquement à l'obligation d'information annuelle ne peut, tout au plus, qu'entraîner la déchéance du droit aux intérêts. Il relève à cet égard que Mme [D] a été tenue informée de ce que la dette restait impayée et du montant des sommes restant dues à l'occasion de plusieurs lettres qui lui ont été adressées, dont un décompte envoyé le 29 mai 2009.
Sur ce,
14. L'argumentation du Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SA Equitis Gestion, amène à prendre en considération, non pas le décompte détaillé constituant sa pièce n° 19 (40 809,71 euros), mais le décompte détaillé actualisé constituant sa pièce n° 20 (38 510,72 euros), auquel il se réfère en dernier lieu.
Ce décompte est établi sur la base de la condamnation de 25 920 euros en principal prononcée par le tribunal de grande instance de Laval dans son jugement du 3 juin 2003, de la somme de 1 500 euros correspondant aux frais irrépétibles et aux intérêts de retard au taux légal à compter du 19 juin 2002 comme prévu par le titre exécutoire.
La somme ainsi réclamée dépasse certes le montant de 25 920 euros que Mme [D] avait accepté de garantir '(...) couvrant le principal, les intérêts, les agios, les commissions, les frais et les accessoires au titre de l'obligation (...)'. Mais pour autant, cette limite conventionnelle du montant de la garantie ne fait pas obstacle au recouvrement des intérêts moratoires au taux légal et des frais de justice qui ont été mis à sa charge par la décision de justice.
Il est par ailleurs tenu compte dans le décompte constituant la pièce n° 20 de tous les paiements que Mme [D] justifie avoir effectués à partir des extraits de son relevé de compte entre le 5 janvier 2004 et le 5 janvier 2006 pour un montant total de (80 x 24) 1 920 euros, ainsi que de tous les paiements effectués par M.'[P] entre le 14 août 2003 et le 16 juillet 2009 pour au montant total de 5 881,21 euros.
Mme [D] oppose deux manquements par le créancier à ses obligations légales d'information. Compte tenu de la date de la conclusion du cautionnement (10 mai 2001) et de ce que les intérêts sont réclamés jusqu'à un arrêté du 24'janvier 2018, la rédaction des textes applicables est celle antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021.
Le premier concerne l'obligation pour le créancier d'informer la caution de la défaillance du débiteur principal. L'article L. 341-1 du code de la consommation, alors applicable, prévoit en effet que toute personne physique qui s'est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement et que, si le créancier ne se conforme pas à cette obligation, la caution n'est pas tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retards échus entre la date du premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.
Cette disposition, qui a pour objet d'informer la caution dès le premier incident de remboursement rencontré par le débiteur principal, n'est toutefois pas applicable en l'espèce puisque le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, poursuit l'exécution du jugement du 3 juin 2003 et que la cour, saisie des pouvoirs du juge de l'exécution, ne peut que statuer sur le respect par les parties de leurs obligations fondées sur ce titre exécutoire ainsi que sur les sanctions résultant de leur violation éventuelle. La'sanction du manquement par la SA BPO à son obligation d'informer Mme'[D] de la défaillance de M. [P] dans le mois du premier incident de paiement non régularisé, nécessairement antérieur au jugement du 3 juin 2003, excède donc les pouvoirs de la cour. Il n'est pas non plus envisageable d'appliquer cette disposition aux remboursements postérieurs au jugement du 3'juin 2003, Mme [D] n'étant alors plus tenue au paiement en qualité de caution mais en tant que codébitrice condamnée in solidum au paiement.
La seconde concerne l'information annuelle de la caution quant au montant de la dette garantie. Le cautionnement consenti par Mme [D] garantit un prêt souscrit par M. [P], personne physique, pour des besoins autres que professionnels. Il n'est pas limité dans sa durée mais il l'est dans son montant, à la somme de 25 920 euros. L'article L. 341-6 du code de la consommation, entré en vigueur six mois après la publication de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 et ultérieurement devenu l'article L. 333-2 du même code, prévoit en effet que le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, le terme de l'engagement et, si celui-ci est à durée indéterminée, la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. Faute d'une telle information, la caution n'est pas tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information.
Cette obligation d'information annuelle s'impose au créancier jusqu'à l'extinction de la dette et même après une condamnation définitive de la caution. Par ailleurs, c'est au créancier qu'il revient de rapporter la preuve qu'il a satisfait son obligation en démontrant qu'il a, chaque année, envoyé la lettre d'information à la caution.
Mme [D] invoque un manquement à compter du 1er janvier 2006. Le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, ne rapporte pas la preuve qu'il a été satisfait à l'obligation annuelle d'information à compter de cette date, les différentes lettres produites ne comportant aucun détail de la créance (6 octobre 2011, 7 mai 2012, 29 juin 2012, 26 septembre 2012, 22 juin 2015, 10 août 2015, 24 septembre 2015) ou étant postérieures à la date du 31 mars (29 mai 2012, 17 mai 2018). Seule la requête en saisie des rémunérations datée du 29 janvier 2018 contient en définitive, et la première, les informations requises par l'article L. 341-6 précité.
Le manquement à l'obligation annuelle d'information est caractérisé. Il n'y a en revanche pas lieu de rejeter la requête en saisie des rémunérations pour ce motif mais simplement d'envisager la sanction applicable.
Or sur ce point, la déchéance prévue par l'article L. 341-6 précité ne concerne que les seules pénalités et que les seuls intérêts de retard au taux conventionnel, sans s'étendre aux intérêts au taux légal qui courent depuis la mise en demeure. Il n'est pas non plus légalement prévu d'imputation des paiements en priorité sur le capital plutôt que sur les intérêts au taux légal. Si bien qu'en définitive, bien que le manquement à l'obligation d'information soit caractérisé, il n'en résulte aucune incidence sur le décompte proposé par l'appelante et établi sur la base du taux légal.
En dernier lieu, Mme [D] invoque la prescription biennale des intérêts. Le'Fonds commun de titrisation, agissant par la SAS Equitis Gestion, convient que cette prescription est acquise et le décompte qu'elle présente est expurgé de tout intérêt entre le 17 juillet 2009, correspondant au lendemain du dernier paiement enregistré, et le 29 janvier 2013, soit cinq ans avant la date de la requête en saisie des rémunérations.
Les parties s'opposent quant au délai de la prescription, Mme [D] invoquant le délai biennal de l'article L. 218-2 du code de la consommation, alors que le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, renvoie à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil.
L'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution autorise le créancier à poursuivre l'exécution de la décision de justice condamnant le débiteur au paiement d'une somme pendant dix ans. Mais ce délai n'est pas applicable aux créances périodiques nées de la créance en principal fixée par la décision de justice constituant le titre exécutoire. Pour ces créances périodiques, le délai de prescription applicable est celui de la nature de la créance.
Mme [D] a été condamnée en sa qualité de caution du prêt qui avait été consenti à M. [P], en qualité de consommateur, le dispositif du jugement du 3 juin 2003 indiquant expressément que cette condamnation est prononcée in solidum mais pour la même dette. Or, la caution ne peut certes pas se prévaloir des dispositions de l'article L. 218-2 du code de la consommation, en l'absence de service qui lui est fourni par le professionnel, mais elle peut opposer au créancier la prescription biennale née de la qualité de consommateur du débiteur principal, qui est une exception inhérente à la dette. Il en résulte en l'espèce que la prescription des intérêts échus de la condamnation est celle de deux années de l'article L. 218-2 du code de la consommation, en raison de la nature de la créance, et que Mme [D] est fondée à s'en prévaloir à l'encontre du Fonds commun de titrisation Hugo créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion.
La prescription des intérêts a été interrompue par les paiements réalisés par M. [P] et Mme [D] jusqu'au 16 juillet 2009, puisqu'ils valent reconnaissance de la dette au sens de l'article 2240 du code civil, puis aucun acte interruptif de la prescription n'est intervenu jusqu'au dépôt de la requête en raison des rémunérations, dont le jugement entrepris révèle qu'elle a été enregistrée le 1er février 2018. Aussi, les intérêts de retard sont en réalité prescrits jusqu'au 1er février 2016, soit deux ans avant le dépôt de la requête en saisie des rémunérations.
Les autres montants n'étant pas contestés, la créance s'établit comme suit après sa rectification pour tenir compte de la prescription des intérêts entre le 17'juillet 2009 et le 1er février 2016 :
* principal................................................................. 23 537,14 euros
* intérêts (taux légal, au 29 janvier 2018).................. 9 371,70 euros
* frais irrépétibles........................................................1 500,00 euros
* frais d'exécution..........................................................296,72 euros
soit une somme totale de 34 705,56 euros. La saisie des rémunérations de Mme'[D] sera donc autorisée pour ces sommes.
- sur les délais de paiement :
Mme [D] sollicite des délais de paiement en application de l'article 1343-5 du code civil, en faisant valoir qu'elle ne perçoit qu'une retraite de 1 460 euros et qu'elle doit suivre un lourd traitement médical depuis juillet 2018.
Néanmoins, Mme [D] ne produit aucun justificatif de sa situation financière ni même des difficultés de santé qu'elle invoque.
Elle sera donc déboutée de sa demande de délais de paiement.
- sur la demande de dommages-intérêts :
Le premier juge a débouté Mme [D] de sa demande, faute pour elle de justifier d'un préjudice distinct de la seule nécessité de se faire représenter en justice.
Mme [D] reproche au Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, une attitude déloyale et abusive pour avoir attendu le 29 janvier 2018, soit cinq mois avant la prescription du titre, pour décider de recouvrer la créance qu'elle avait acquise depuis le 1er octobre 2010. Elle insiste sur le fait que plus de quinze années ont séparé le jugement de la requête en saisie des rémunérations, au cours desquelles elle s'est conformée à ses obligations en assurant le remboursement en lieu et place de M. [P] jusqu'à ce que celui-ci reprenne lui-même les paiements à compter du 1er janvier 2006. Elle n'a alors plus été sollicitée jusqu'à apprendre la cession de la créance (2012) puis être mise en demeure de régler une somme de 41 745,49 euros sans plus de précision (2015). Elle ajoute enfin que le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, ne l'a jamais informée de l'évolution du montant de la dette et que le retard pris dans l'exécution a entrainé un accroissement considérable de la dette.
Le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, répond que Mme [D] a été avisée dès le 6 octobre 2011 de la cession et invitée à prendre contact avec lui en vue du règlement amiable du dossier, ce qu'il estime ne pas pouvoir lui être reproché. Il ajoute que le détail de la dette a été envoyé à Mme [D] dès le 29 mai 2012 et que l'absence d'information annuelle est déjà légalement sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts.
Sur ce,
Mme [D] fonde expressément sa demande de dommages-intérêts, en réparation du dommage qu'elle estime résulter de l'attitude déloyale et abusive du créancier, sur les articles 1231-1 et 1231-6 du code civil.
Le premier, qui prévoit que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure, est sans application en l'espèce, puisque le recouvrement d'une créance par le créancier est un droit et non pas une obligation dont il serait contractuellement tenu à l'égard de son débiteur.
Le second prévoit que les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure, et que le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire. Cette disposition est également sans application en l'espèce, Mme [D] reprochant au Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, d'avoir tardé à recouvrer sa créance et non pas un quelconque retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent.
C'est en définitive au regard de l'article 1240 du code civil, qui prévoit que tout fait de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, au regard de l'article 1241 du code civil, qui rend chacun responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait mais encore par sa négligence ou par son imprudence, et au regard de l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, qui prévoit que le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d'abus de saisie, que la responsabilité doit être examinée. Il est donc nécessaire que Mme [D] rapporte la preuve d'une faute, d'une négligence voire d'un abus de la part du Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par sa société de gestion, outre celle d'un dommage qui en serait résulté.
Mme [D] a été condamnée par un jugement du 3 juin 2003 au paiement des sommes qu'elle devait en exécution de son engagement de caution et ce, in solidum avec M. [P]. Elle a certes mis en oeuvre un remboursement échelonné de sa dette à compter du 5 janvier 2004 et pendant deux années mais elle a ensuite cessé tout règlement. Elle a été informée de la cession de la dette au Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, alors représenté par la SAS Gestion et Titrisations Internationales, dès une lettre du le 6 octobre 2011 qui l'invitait à faire parvenir ses paiements à cet organisme ou à prendre contact avec la société de recouvrement. Cette information a été réitérée par une lettre du 7'mai 2012. Un contact téléphonique a eu lieu le 23 mai 2012, qui a justifié l'envoi à Mme [D] d'un décompte détaillé actualisé le 29 mai 2012 en vue d'un règlement amiable du dossier mais celui-ci n'est pas intervenu, malgré une relance du 29 juin 2012. Par la suite, la société de recouvrement mandatée par le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par sa société de gestion, a relancé Mme [D] à plusieurs reprises pour l'inciter à procéder au règlement de sa dette (26 septembre 2012, le 22 juin 2015, le 10 août 2015, le 24 septembre 2015), certaines des lettres valant mise en demeure et indiquant le montant total actualisé de la dette (26 septembre 2012,10 août 2015).
Il ressort de ces éléments qu'après l'acquisition de la créance, le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par sa société de gestion, s'est régulièrement rapproché de Mme [D] pour tenter d'obtenir le paiement volontaire de la dette mais que ses démarches sont demeurées vaines, aucun règlement n'ayant été effectué depuis le 16 juillet 2009 et, de la part de l'intimée, depuis le 5 janvier 2006. La saisie des rémunérations a été diligentée, certes près de quinze années après l'obtention du titre exécutoire mais dans le délai de la prescription de l'exécution. Dans ce contexte, Mme [D] ne démontre aucun abus, aucune faute, ni aucune négligence de la part de l'appelante.
Certes, l'obligation légale d'information de la caution a été méconnue. Mais'ce manquement se résout uniquement par la déchéance du droit aux intérêts, à l'exclusion de tout dommages-intérêts en l'absence d'une faute lourde ou d'un dol que Mme [D] n'invoque pas.
Elle ne rapporte pas plus la preuve d'un préjudice puisque, même si le créancier n'a pas respecté l'obligation légale d'information annuelle, elle a été avisée de l'évolution de la dette à l'occasion de deux lettres au moins et que la prescription biennale des intérêts sanctionne déjà le délai pris par le Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, pour mettre en oeuvre le recouvrement forcé de sa créance.
En conséquence de quoi, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande de dommages-intérêts.
- sur les demandes accessoires :
Le jugement est infirmé dans ses dispositions ayant statué sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance. Mme [D], partie perdante en appel, sera déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure et elle sera condamnée aux dépens, de première instance comme d'appel, ainsi qu'au paiement au Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, d'une somme totale de 3 000 euros recouvrant les frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande de dommages-intérêts ;
statuant à nouveau,
Ordonne la saisie des rémunérations de Mme [D] au profit du Fonds commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Laval du 3 juin 2003 et pour les sommes suivantes :
* principal.................................................................. 23 537,14 euros
* intérêts (taux légal, au 29 janvier 2018)................... 9 371,70 euros
* frais irrépétibles........................................................ 1 500,00 euros
* frais d'exécution......................................................... 296,72 euros
soit une somme totale de 34 705,56 euros ;
Déboute Mme [D] de sa demande de délais de paiement ;
Déboute Mme [D] de sa demande formée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [D] à verser au Fond commun de titrisation Hugo Créances I, agissant par la SAS Equitis Gestion, une somme totale de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel';
Condamne Mme [D] aux dépens de première instance et d'appel ;
LA GREFFIERE, P/LA PRESIDENTE empêchée,
S. TAILLEBOIS J. CHAPPERT