COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - CIVILE
CM/ILAF
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 19/01670 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ERXD
jugement du 16 Juillet 2019
Tribunal de Grande Instance d'ANGERS
n° d'inscription au RG de première instance 15/01303
ARRET DU 18 JUIN 2024
APPELANTE :
Madame [R] [H]
née le 24 Octobre 1968 à [Localité 20]
[Adresse 1]
[Localité 29]
Représentée par Me Jean charles LOISEAU de la SELARL GAYA, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier F040018
INTIMES :
Monsieur [M] [K]
né le 24 Septembre 1983 à [Localité 25]
'[Adresse 28]'
[Localité 29]
Monsieur [L] [K]
né le 03 Février 1956 à [Localité 25]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Madame [G] [X]
née le 03 Février 1984 à [Localité 22]
'[Adresse 28]'
[Localité 29]
Représentés par Me Stéphanie SIMON de la SELARL ADEO - JURIS, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 130075
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 13 Juin 2023 à 14'H'00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente qui a été préalablement entendue en son rapport et devant Madame ELYAHYIOUI, vice-présidente placée.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
Mme GANDAIS, conseillère
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
Greffier : M. DA CUNHA
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 18 juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, conseillère faisant fonction de présidente et par Tony DA CUNHA, auqeul la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Exposé du litige
Mme [H], qui pratique l'élevage de chevaux, est titulaire d'un bail rural consenti le 22 mars 1999 par Mme [W] [K] sur les parcelles de terres cadastrées section [Cadastre 19], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 6] et [Cadastre 18] lieudit «[Adresse 28]» à [Localité 29] pour une contenance totale de 4 ha 80 a 38 a et propriétaire au même endroit des parcelles de terres [Cadastre 13] et [Cadastre 17] ayant appartenu à Mme [C] [K], toutes ces parcelles étant issues de la division d'un ensemble rural opérée le 28 avril 1953 en vertu d'un acte de donation-partage des biens de M.'[C] [K] et son épouse Mme [N] entre leurs trois enfants M.'Auguste [K], Mme [W] [K] et Mme [C] [K].
Selon acte authentique en date du 27 juillet 2000, Mme [W] [K] a donné la nue-propriété des parcelles [Cadastre 19], [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 6] à son fils M. [L] [K] et de la parcelle [Cadastre 18] à son autre fils M. [P] [K], en s'en réservant l'usufruit.
Selon acte authentique en date du 7 février 2012, M. [L] [K] et Mme [W] [K] ont vendu à leur fils et petit-fils M. [M] [K] et à sa compagne Mme [G] [X] (ci-après les consorts [K] - [X]) une fermette à rénover avec ancienne étable et terrain attenant correspondant à la parcelle bâtie [Cadastre 5] et à la parcelle [Cadastre 4] sur laquelle Mme [H] a renoncé à ses droits de preneur.
Il est précisé dans cet acte :
'Monsieur [K], es-qualité, déclare que la parcelle [Cadastre 4] présentement vendue est bordée dans sa limite Nord par un ancien passage de trois mètres de largeur en partant de la ligne séparative d'avec l'immeuble cadastré section [Cadastre 6].
Le VENDEUR déclare que ce passage n'est plus à ce jour utilisé sans aucune garantie à ce sujet.
L'acquéreur déclare avoir une parfaite connaissance de cette situation et vouloir en faire son affaire personnelle.'
Les acquéreurs ont installé un système d'assainissement individuel sur la parcelle [Cadastre 6] et se sont opposés à l'utilisation par Mme [H] du passage longeant leur habitation au nord au niveau de la limite séparative entre les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5] et [Cadastre 6], dans le prolongement d'un passage traversant la parcelle [Cadastre 3].
Par ordonnance de référé du président du tribunal paritaire des baux ruraux d'Angers en date du 26 septembre 2013, confirmée en appel le 3 mars 2015, Mme [W] [K], les consorts [K] - [X] et M. [L] [K] ont été condamnés sous astreinte à procéder à l'enlèvement des clôtures avec fil de fer barbelé et poteaux en bois entravant la jouissance et l'accès à la parcelle louée [Cadastre 6] et Mme [H] a été déboutée de ses autres demandes (tendant à supprimer toute entrave au droit de passage sur la parcelle [Cadastre 4], à lui restituer la jouissance de l'intégralité de la parcelle [Cadastre 6] en déplaçant la clôture grillagée en limite d'avec la parcelle [Cadastre 5] et à déplacer l'assainissement installé sur la parcelle [Cadastre 6]).
Par acte d'huissier en date du 14 avril 2015, Mme [W] [K], les consorts [K] - [X] et M. [L] [K] ont fait assigner Mme [H] devant le tribunal de grande instance d'Angers en dénégation du droit de passage de celle-ci en qualité de propriétaire des parcelles [Cadastre 17] et [Cadastre 13].
Mme [W] [K] est décédée le 22 février 2017.
Dans leurs dernières conclusions de première instance, les consorts [K] - [X] et M. [L] [K] ont demandé de :
- dire et juger qu'il n'existe aucune servitude légale de passage faute d'enclave, ni aucune servitude conventionnelle de passage, ni aucune prescription acquisitive
- faire interdiction à Mme [H] d'utiliser le passage instauré par elle unilatéralement, ce d'autant qu'elle a accès de plusieurs autres manières aux parcelles qu'elle exploite tant en fermage qu'en pleine propriété
- la condamner à leur payer la somme de 6 000 euros, soit 1 500 euros à chacun, à titre de dommages et intérêts pour usage abusif et troubles de jouissance et celle de 4 000 euros, soit 1 000 euros à chacun, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SELARL Adeo Juris conformément à l'article 699 du même code
en toute hypothèse,
- dire et juger que la parcelle [Cadastre 5] n'a jamais été incluse dans le bail rural conféré à Mme [H] et qu'elle constitue l'entrée de la maison des consorts [K] - [X] matérialisée par leur portail
- constater dès lors que Mme [H] commet une erreur en demandant à bénéficier d'une servitude de passage s'exerçant sur les parcelles [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] et ne peut que demander à bénéficier d'une servitude de passage s'exerçant sur la parcelle [Cadastre 6], objet du bail, non en façade de la propriété des consorts [K] - [X], mais à droite tel que décrit par M. [B].
Mme [H] a demandé de :
- rejeter l'intégralité des demandes adverses
- dire qu'elle bénéficie bien d'une servitude de passage s'exerçant sur les parcelles [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] telle qu'elle figure à l'acte de 1953 et aux plans cadastraux, et ce par destination de père de famille
- dire qu'à défaut cette servitude résulte de la situation d'enclave et doit s'exercer dans les mêmes conditions que précédemment décrites
- constater que les demandeurs n'apportent la preuve d'aucun préjudice ni d'un usage abusif et les débouter de leurs demandes à ce titre
- prendre acte de ce qu'elle accepte, sous réserve du maintien du chemin tel qu'il a toujours existé pour le surplus, que le passage soit décalé au droit du système d'assainissement, et dans cette assiette uniquement, sur la parcelle [Cadastre 6] louée et qu'elle sollicite en contrepartie qu'une surface équivalente lui soit attribuée sur la parcelle [Cadastre 4] et que les frais de bornage en résultant et toute autre conséquence en termes de transfert de propriété soient mis intégralement à la charge des demandeurs
- prendre acte de ce qu'elle sollicite également que le bornage définisse précisément la nouvelle assiette du passage et qu'il soit admis que cette assiette bénéficie et bénéficiera de tout temps aux parcelles [Cadastre 17] et [Cadastre 13] lui appartenant
- condamner solidairement les demandeurs à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par jugement en date du 16 juillet 2019, le tribunal a :
- débouté Mme [H] de ses demandes
- dit qu'il est fait interdiction à Mme [H] d'utiliser le passage instauré sur la parcelle [Cadastre 3] débutant entre les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 6]
- débouté M. [M] [K], M. [L] [K] et Mme [X] de leurs demandes de dommages et intérêts
- condamné Mme [H] à payer à M. [M] [K], M. [L] [K] et Mme [X] la somme globale de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens conformément à l'article 699 du même code.
Suivant déclaration en date du 12 août 2019, Mme [H] a relevé appel de ce jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes, lui a fait interdiction d'utiliser le passage instauré sur la parcelle [Cadastre 3] débutant entre les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 6] et l'a condamnée au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, intimant les consorts [K] - [X] et M. [L] [K].
Les intimés ont formé appel incident du rejet de leurs demandes de dommages et intérêts.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 mai 2023.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives n°2 d'appelantes en date du 15'mai 2023 antérieures à la clôture, Mme [H] demande à la cour, au visa des articles 682 et suivants, 691 et suivants du code civil, d'infirmer le jugement en ses dispositions visées à l'acte d'appel et, statuant à nouveau, de :
- dire qu'elle bénéficie bien d'une servitude de passage s'exerçant sur les parcelles [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] telle qu'elle figure à l'acte de 1953 et aux plans cadastraux, et ce par destination du père de famille
- dire qu'à défaut, cette servitude résulte de la situation d'enclave et doit s'exercer dans les mêmes conditions que précédemment décrites
- s'il ne devait être fait droit à cette demande, fixer les conditions de désenclavement des parcelles [Cadastre 17] et [Cadastre 13] pour le long terme, la situation locative n'ayant pas nécessairement vocation à durer et ne devant pas être prise en compte
- dire à défaut que pendant la vie du bail, elle est en droit d'utiliser tout accès existant et de faire un usage libre des parcelles qui lui sont louées, soit les parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 6], de sorte qu'elle est en droit de sortir des terrains loués où elle l'entend
- condamner les consorts [K] - [X], sous astreinte de 100 euros par jour, à déplacer leur système d'assainissement sous un délai de 6 mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir afin de ne plus porter atteinte à la jouissance paisible de la parcelle [Cadastre 6] entièrement louée et sur laquelle ils sont sans droit ni titre, puisqu'ils disposent d'une surface suffisante sur la parcelle [Cadastre 4] et qu'il ne ressort nullement de l'étude de filière produite aux débats sous la pièce 12 une impossibilité d'installer l'assainissement sur la parcelle [Cadastre 4]
- condamner solidairement les demandeurs à lui verser une somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens
- débouter les intimés de l'intégralité de leurs demandes.
Elle a notifié le 6 juin 2023 des conclusions récapitulatives n°3 d'appelante par lesquelles elle demande, au visa des articles 131-1 et suivants et 803 du code de procédure civile, après avoir révoqué l'ordonnance de clôture et ordonné son report à la date de l'audience de plaidoirie à 12h, d'ordonner une médiation judiciaire pouvant être confiée au Centre [Localité 21] Maine Médiation et Arbitrage d'[Localité 20], complète l'énoncé de sa demande subsidiaire tendant à fixer les conditions de désenclavement des parcelles [Cadastre 17] et [Cadastre 13] pour le long terme 'selon le tracé en rouge ci-dessous' (plan ci-joint) et réitère pour le surplus ses prétentions antérieures.
Dans leurs dernières conclusions récapitulatives d'intimés n°2 en date du 30 mai 2023 antérieures à la clôture, M. [L] [K] et les consorts [K] - [X] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [H] de ses demandes, constatant qu'il n'existait ni servitude légale de passage, faute d'enclave, ni servitude conventionnelle de passage, notamment acquise par prescription acquisitive, et visant à faire déplacer leur assainissement sous astreinte, a fait interdiction à Mme [H] d'utiliser le passage instauré sur la parcelle [Cadastre 3] débutant entre les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 6] et l'a condamnée à une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens
- faire interdiction à Mme [H] d'utiliser ledit passage instauré par elle unilatéralement, et ce d'autant qu'elle a accès de plusieurs autres manières aux parcelles qu'elle exploite tant en fermage qu'en pleine propriété
infirmant le jugement entrepris,
- les déclarer recevables et bien fondés en leur appel incident
- condamner Mme [H] à leur payer la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour cet usage abusif et troubles de jouissance
- condamner Mme [H] à leur payer la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SELARL Adeo Juris conformément à l'article 699 du même code
en toute hypothèse,
- débouter Mme [H] de l'ensemble de ses demandes
- juger que la parcelle [Cadastre 5] n'a jamais été incluse dans le bail rural conféré à Mme [H] et constitue l'entrée de la maison des consorts [K] - [X] matérialisée par leur portail
- juger dès lors que Mme [H] commet une erreur en demandant dans son dispositif à bénéficier d'une servitude de passage s'exerçant sur les parcelles [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] et ne peut que demander à bénéficier d'une servitude de passage s'exerçant sur la parcelle [Cadastre 6], objet du bail, non en façade de la propriété des consorts [K] - [X] mais correspondant au droit de passage à droite sur cette parcelle tel que décrit par M. [B]
- débouter Mme [H] de ses demandes présentées pour la première fois en cause d'appel, tendant à fixer les conditions de désenclavement des parcelles [Cadastre 17] et [Cadastre 13] pour le long terme, la situation locative n'ayant pas nécessairement vocation à durer et ne devant pas être prise en compte, et à dire à défaut que pendant la vie du bail, elle est en droit d'utiliser tout accès existant et de faire un usage libre des parcelles qui lui sont louées, soit les parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 6], de sorte qu'elle est en droit de sortir des terrains loués où elle l'entend
- juger que, par suite de la vente intervenue à leur profit, ayant dû installer un système d'assainissement, les consorts [K] - [X] ont été contraints de l'envisager sur la parcelle [Cadastre 6], qu'à cette occasion, ils ont en compensation octroyé à Mme [H] une superficie identique sur la parcelle [Cadastre 4] dont ils sont propriétaires et qui est louée à cette dernière et que préalablement Mme [H] a renoncé à son droit de préemption sur cette dernière parcelle et a accepté la résiliation partielle du bail portant sur la parcelle [Cadastre 4] et que, de ce fait, cet usage lui a été donné depuis l'installation en cause soit depuis plusieurs années et avec son accord
- débouter Mme [H] de sa demande tendant à voir condamner les consorts [K] - [X] à déplacer, et ce sous astreinte, leur système d'assainissement, ainsi que de celle visant à se voir octroyer, pendant la vie du bail, le droit d'utiliser tout accès existant et de faire un usage libre des parcelles qui lui sont louées, soit les parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 6], de sorte qu'elle est en droit de sortir des terrains loués où elle l'entend, ces demandes relevant de la compétence exclusive du tribunal paritaire des baux ruraux
- juger qu'il sera fait interdiction à Mme [H] d'utiliser le passage instauré sur la parcelle [Cadastre 3] débutant entre les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 6], la décision entreprise étant confirmée de ce chef, et que Mme [H] ne peut que demander à bénéficier d'une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 6], objet du bail, et non en façade de la propriété des consorts [K] - [X] mais correspondant au droit de passage à droite sur cette parcelle tel que décrit par M. [B]
- à titre subsidiaire, fixer l'indemnité de désenclavement due aux intimés (sic) et à la charge de Mme [H] à la somme de 85 000 euros et la condamner à leur payer cette somme
- débouter Mme [H] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
- la condamner à leur payer la somme de 4 500 euros sur le même fondement, ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SELARL Adeo Juris conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Ils ont notifié le 12 juin 2023 des conclusions récapitulatives d'intimés n°3 par lesquelles ils développent leur argumentation sur la situation d'enclave alléguée au vu du constat de commissaire de justice du 7 juin 2023 produit par l'appelante en pièce n°29, demandent d'ordonner le report de l'ordonnance de clôture à la date de l'audience de plaidoiries et de leur décerner acte de ce qu'ils s'en rapportent à la décision de la juridiction sur la demande de médiation judiciaire formée par Mme [H] aux termes de ses dernières écritures et réitèrent pour le surplus leurs prétentions antérieures.
Ils ont simultanément communiqué deux pièces complémentaires n°35 et 36 (plans).
Avant l'ouverture des débats sur l'audience, toutes les parties se sont déclarées favorables au report de la clôture au jour de l'audience de plaidoiries de manière à rendre recevables l'ensemble des conclusions et pièces échangées, sans renvoi à la mise en état ou à une autre audience.
Sur ce,
Sur la révocation de l'ordonnance de clôture
Selon l'article 802 alinéa 1er du code de procédure civile, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.
L'article 803 du même code précise, en son alinéa 1er, que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue et, en son alinéa 3, que l'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats, par décision du tribunal.
Ces dispositions, auxquelles renvoie l'article 907 du même code, sont applicables devant la cour d'appel.
En l'espèce, les nouvelles pièces n°31 à 34 (photographies, réglementation sur les points d'abreuvement et franchissement d'un cours d'eau, image satellite) communiquées par les intimés dans la semaine qui a précédé l'ordonnance de clôture du 31 mai 2023 et leurs nouvelles conclusions notifiées la veille de cette ordonnance à l'appui de leur contestation de l'état d'enclave allégué par l'appelante et de l'assiette de la servitude de passage revendiquée sur ce fondement justifient la révocation de la clôture pour cause grave au sens de l'article 803 du code de procédure civile et son report au jour de l'audience de plaidoiries du 13 juin 2023 à la demande conjointe des parties de manière à rendre recevables l'ensemble des conclusions et pièces qu'elles ont pu échanger entre la date de la clôture et la date de l'audience et qui, ainsi qu'elles en conviennent, leur ont permis de parfaire leur argumentation et n'appellent plus de réponse complémentaire de part ni d'autre.
Sur la demande de médiation
L'article 131-1 du code de procédure civile, tel que modifié par le décret n°2022-245 du 25 février 2022 applicable aux instances en cours à la date de son entrée en vigueur le lendemain de sa publication, dispose que le juge saisi d'un litige peut, après avoir recueilli l'accord des parties, ordonner une médiation, que le médiateur désigné par le juge a pour mission d'entendre les parties et de confronter leurs points de vue pour leur permettre de trouver une solution au conflit qui les oppose et que la médiation peut également être ordonnée en cours d'instance par le juge des référés.
En l'espèce, la mesure de médiation judiciaire sollicitée par l'appelante ne peut être instituée dès lors que les intimés déclarent s'en rapporter à justice, ce qui n'équivaut pas à un accord de leur part.
Sur le litige dévolu à la cour et la recevabilité des demandes nouvelles en appel
Il n'est pas contesté que Mme [H] a été assignée devant le tribunal en sa seule qualité de propriétaire des parcelles [Cadastre 17] et [Cadastre 13], et non de locataire des terres de M. [L] [K], et que le litige était circonscrit en première instance à la servitude de passage, revendiquée par la défenderesse mais contestée par les demandeurs, au profit de ces deux parcelles sur, d'une part, la parcelle [Cadastre 3], d'autre part, les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5] ou, à défaut, la parcelle [Cadastre 6].
En appel, Mme [H] réitère sa demande de reconnaissance d'une servitude de passage par destination du père de famille ou, à défaut, pour cause d'enclave s'exerçant sur les parcelles [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] et, modifiant sa prétention subsidiaire relative à l'assiette de cette servitude, demande à la cour de fixer les conditions de désenclavement des parcelles [Cadastre 17] et [Cadastre 13] pour le long terme.
Cette prétention, qui est l'accessoire de sa prétention soumise au premier juge relative à l'existence de cette servitude, apparaît recevable au regard de l'article 566 du code de procédure civile, ce qui n'est d'ailleurs pas discuté par les intimés dont la demande subsidiaire en fixation de l'indemnité de désenclavement, formulée aussi pour la première fois en appel, est recevable pour les mêmes raisons.
Mme [H] demande également à la cour de dire, 'à défaut', donc pour le cas où il ne serait pas fait droit à sa demande de désenclavement, que pendant la vie du bail, elle est en droit d'utiliser tout accès existant et de faire un usage libre des parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 6] qui lui sont louées, donc de sortir des terrains loués où elle l'entend.
Cette nouvelle prétention n'est pas l'accessoire ni la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises au premier juge et, bien qu'il s'agisse d'une demande reconventionnelle émanant de la partie qui était défenderesse en première instance, elle ne se rattache pas aux prétentions originaires par un lien suffisant tel qu'exigé par l'article 70 du code de procédure civile car elle trouve sa cause dans le bail rural relatif aux parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 6], liant désormais Mme [H] à M. [L] [K] et relève comme telle, ainsi que l'observent justement les intimés, de la compétence exclusive du tribunal paritaire des baux ruraux qui n'en a jamais été saisi au fond.
Elle ne peut donc qu'être déclarée irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile, le débouté sollicité par les intimés n'étant pas la conséquence juridique adéquate.
Mme [H] demande aussi à la cour, sans préciser clairement dans quelle hypothèse, de condamner sous astreinte les consorts [K] - [X] à déplacer leur système d'assainissement.
Cette demande reconventionnelle ne se rattache pas non plus aux prétentions originaires par un lien suffisant dans la mesure où la seule prétention soumise au premier juge, mais abandonnée en appel, ayant trait au système d'assainissement installé sur la parcelle [Cadastre 6] était celle présentée subsidiairement par la défenderesse et tendant uniquement à décaler le passage au droit de ce système sur la parcelle [Cadastre 6], donc sans déplacer ce dernier, avec attribution corrélative d'une surface de compensation sur la parcelle [Cadastre 4], et où le seul moyen invoqué par l'appelante au soutien de sa demande nouvelle de déplacement du système d'assainissement réside en l'atteinte portée à sa jouissance paisible de la parcelle [Cadastre 6] entièrement louée sur laquelle les consorts [K] - [X] sont sans droit ni titre alors qu'ils disposent d'une surface suffisante pour installer leur assainissement sur la parcelle [Cadastre 4], sans qu'il soit aucunement allégué que l'implantation actuelle du système d'assainissement gênerait le passage revendiqué.
Dès lors, elle ne peut qu'être déclarée irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile, quand bien même les intimés ne démontrent pas qu'elle ressort de la compétence exclusive du tribunal paritaire des baux ruraux puisqu'elle est formée exclusivement à l'encontre des consorts [K] - [X] qui ne sont liés à Mme [H] par aucun bail, en particulier sur la parcelle [Cadastre 6].
De leur côté, les intimés demandent pour la première fois en appel de juger qu'ayant dû installer un système d'assainissement, les consorts [K] - [X] ont été contraints de l'envisager sur la parcelle [Cadastre 6], qu'ils ont en compensation octroyé à Mme [H] une superficie identique sur la parcelle [Cadastre 4] pour laquelle celle-ci avait préalablement renoncé à son droit de préemption et accepté la résiliation du bail et que cet usage lui a été donné depuis l'installation en cause, soit depuis plusieurs années et avec son accord.
Il ne s'agit pas de véritables prétentions mais de simples moyens de défense opposés à la demande de déplacement du système d'assainissement, de sorte qu'ils n'ont pas à être examinés par la cour.
Sur l'existence d'une servitude de passage par destination du père de famille
Aux termes de l'article 693 du code civil, il n'y a destination du père famille que lorsqu'il est prouvé que les deux fonds divisés ont appartenu au même propriétaire et que c'est par lui que les choses ont été mises dans l'état duquel résulte la servitude.
Selon l'article 694 du même code, si le propriétaire de deux héritages entre lesquels il existe un signe apparent de servitude, dispose de l'un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d'exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné.
Ainsi, la destination du père de famille vaut titre à l'égard des servitudes discontinues telles que les servitudes de passage lorsqu'existent, lors de la division d'un fonds, des signes apparents de la servitude et que l'acte de division ne contient aucune stipulation contraire à son maintien.
La constitution d'une telle servitude suppose la réunion de conditions cumulatives :
- l'appartenance initiale des fonds actuellement séparés au même propriétaire
- un aménagement du fait du propriétaire originel, ou conservé par lui, présentant un caractère apparent et maintenu lors de la division des fonds
- l'absence de volonté contraire des parties à l'acte de division.
Il n'est pas exigé que le fonds issu de la division, au profit duquel il est demandé de reconnaître une servitude de passage par destination du père de famille, soit enclavé.
En l'espèce, il n'est pas contesté, même si le titre de propriété de Mme [H] n'est pas versé aux débats et si seul un extrait de l'acte de donation-partage du 28 avril 1953, incomplet sur la désignation des biens donnés composant les différents lots, est communiqué de part et d'autre, que les parcelles [Cadastre 13] et [Cadastre 17] de Mme [H], [Cadastre 3] et [Cadastre 6] de M. [L] [K] et A [Cadastre 4] et [Cadastre 5] des consorts [K] - [X] proviennent de la division d'un ensemble rural ayant appartenu à M. [C] [K] et son épouse Mme [N].
Aux termes de l'acte du 28 avril 1953, ces derniers ont donné :
- à Mme [C] [K] le deuxième lot dit «Closerie de [Localité 26]» comprenant une pièce de terre nommée «Le Frou de la Pièce...» (suite de la désignation, contenance et référence cadastrale absentes) et une partie d'une contenance de 70 a 12 ca à prendre du côté nord-ouest de la pièce de terre nommée «[Localité 26]» cadastrée section [Cadastre 10], étant précisé que 'l'attributaire du présent deuxième lot aura un droit d'usage au pressoir existant dans les bâtiments compris au troisième lot, à charge par celui-ci de contribuer à son entretien'
- à Mme [W] [K] le troisième lot dit «[Localité 23]» comprenant les bâtiments d'habitation et d'exploitation avec 'pressoir et pile-pommes dans le cellier', issues, cour, jardin et terre labourable cadastrés section [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6], la parcelle nommée «[Localité 27]» cadastrée section [Cadastre 19], le surplus d'une contenance de 1 ha 22 a 13 ca à prendre dans la partie sud-est de la pièce de terre nommée «[Localité 26]» et une autre pièce de terre nommée «[Localité 24]», 'à la charge pour l'attributaire de ce lot de supporter le droit d'habitation éventuel que se sont réservés les donateurs (...) et la servitude stipulée au profit du second lot en ce qui concerne le pressoir'.
Hormis le nécessaire droit d'accès de l'attributaire du lot n°2 au cellier des bâtiments du lot n°3 pour pouvoir exercer son droit d'usage du pressoir qui y est situé, cet acte ne mentionne aucun droit de passage, notamment pour accéder depuis les terres du lot n°2 à la voie publique.
Mme [H] ne prétend, d'ailleurs, pas bénéficier d'une servitude conventionnelle de passage établie par titre, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, mais seulement d'une servitude de passage par destination du père de famille, même si elle emploie parfois le terme de servitude 'conventionnelle' lorsqu'elle traite de la destination du père de famille dans ses conclusions, de sorte que les développements des intimés sur l'absence de servitude conventionnelle sont inopérants.
Elle soutient que le signe apparent de cette servitude résulte du plan annexé à cet acte, sur lequel figure le passage déjà existant au droit de la partie de la parcelle [Cadastre 10] attribuée à Mme [C] [K] et devant être utilisé pour accéder au pressoir situé dans le cellier de la maison attribuée à Mme [W] [K] et édifiée sur la parcelle [Cadastre 5], que ce passage traversant en son milieu la parcelle [Cadastre 3] figure également sur tous les plans cadastraux depuis cet acte et sur les photographies aériennes, en particulier celle datant des années 1950, et que 'la servitude de pressoir est nécessairement liée à une servitude de passage dont l'assiette avait été rappelée et matérialisée à l'acte de 1953' et qui 's'explique par l'enclavement du lot n°2' devenu depuis sa propriété.
Le plan auquel elle fait référence correspond au 'plan visuel' intégré à la fin de la composition du lot n°2 dans l'acte de donation-partage, qui a été 'dressé (...) pour plus de clarté des divisions' de la parcelle [Cadastre 10] nommée «[Localité 26]» et qui se présente ainsi :
Il s'agit donc d'un plan sommaire de division de la parcelle [Cadastre 10] qui a été scindée depuis en la parcelle [Cadastre 17] au nord-ouest dépendant du lot n°2 attribué à Mme [C] [K] et devenue la propriété de Mme [H] et la parcelle [Cadastre 18] au sud-est dépendant du lot n°3 attribué à Mme [W] [K] qui en a ensuite donné la nue-propriété à M. [P] [K] le 27 juillet 2000.
Il ne peut qu'être constaté que sont figurées sur ce plan, d'une part, en pointillés à l'angle nord de la future parcelle [Cadastre 17], l'extrémité d'un passage empruntant la parcelle contiguë [Cadastre 3], d'autre part, en ligne continue à l'angle est de la future parcelle [Cadastre 18], une portion d'un chemin qui n'est autre que la 'ruelle d'exploitation' longeant 'au midi' les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 3] selon l'acte de donation-partage.
Toutefois, un simple dessin ne saurait, à lui seul, caractériser un signe apparent de servitude indépendamment de tout indice objectif et matériel relevé sur les lieux.
Or Mme [H] ne produit aucun élément de nature à démontrer l'existence d'un aménagement apparent lors de la division du fonds le 28 avril 1953.
Les attestations de M. [E], né en 1958 et aide familial lorsque ses parents exploitaient les parcelles de terres [Cadastre 8] et 266 de M. [A] (en vertu d'un bail conclu en septembre 1971 avant qu'elles soient louées en 1983 à M. [B] qui en est devenu propriétaire en 1999), qui 'attesse passé parcelle [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5] (mot illisible) cadartral join' (sic), et de M. [O], habitant la commune de [Localité 29] depuis décembre 1980, qui précise qu'il a 'toujours vue les exploitants agricoles de Madame [T] née [K] [C], et de Madame [W] [K] passer avec leurs matériels le long de la maison du Tison, et que la déserte agricole est bien indiqué sur le plan cadastral, feuille 000 A02 parcelle [Cadastre 3] [Cadastre 4].et [Cadastre 5]' (sic), ne fournissent aucun renseignement à ce sujet.
Quant aux trois photographies aériennes éditées le 24 octobre 2018 depuis le site Géofoncier, les dates de ces prises de vues restent ignorées comme l'observent les intimés et la date '1950 - 1965' inscrite à la main sur celle en noir et blanc présentée par l'appelante comme étant la plus ancienne ne permet aucunement de s'assurer qu'elle montre l'état des lieux existant au jour de la division du fonds.
Dès lors, Mme [H], qui échoue à établir que les fonds actuellement divisés étaient, lors de leur division, en l'état duquel résulte la servitude de passage qu'elle revendique, ne peut qu'être déboutée de sa demande sur le fondement de la destination du père de famille, le jugement étant confirmé sur ce point par substitution de motifs, sans qu'il soit besoin de rechercher la volonté des parties à l'acte de division ni de se prononcer sur l'état d'enclave allégué qui n'est pas une condition de l'action engagée sur ce fondement.
Sur l'existence d'une servitude de passage pour cause d'enclave
L'article 682 du code civil dispose que le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.
La charge de la preuve de l'état d'enclave pèse sur celui qui revendique cet état.
N'est pas enclavé le fonds qui bénéficie d'une tolérance de passage permettant un libre accès à la voie publique, et ce tant que cette tolérance est maintenue.
En l'espèce, il n'est pas contesté que la partie nord-ouest détachée de la parcelle [Cadastre 10] et devenue la parcelle [Cadastre 17], qui est décrite dans l'acte du 28 avril 1953 comme joignant au nord-ouest M. [F] (parcelle [Cadastre 11] appartenant actuellement à M. [B]), au sud-ouest M. [D] (actuelle parcelle [Cadastre 9]), au nord-est le troisième lot (parcelle [Cadastre 3]) et au sud-est le surplus de la parcelle [Cadastre 10] compris au troisième lot (actuelle parcelle [Cadastre 18]), n'a aucun accès direct à la voie publique et qu'il en va de même de la parcelle [Cadastre 13] qui est entourée par les parcelles [Cadastre 12] au nord, [Cadastre 11] au nord-est, [Cadastre 17] et [Cadastre 9] au sud-est, [Cadastre 15] au sud-ouest et [Cadastre 14] au nord-ouest.
Ainsi, aucun des chemins figurés sur les plans cadastraux produits de part et d'autre n'aboutit directement aux parcelles [Cadastre 17] et [Cadastre 13] de Mme [H], qu'il s'agisse de celui situé à l'est qui, depuis le chemin communal desservant la maison d'habitation des consorts [K] - [X], longe la limite sud de la parcelle [Cadastre 4] puis de la parcelle [Cadastre 3] jusqu'à sa limite d'avec la parcelle [Cadastre 18] où il s'interrompt et qui correspond à la 'ruelle d'exploitation' mentionnée dans l'acte de donation-partage du 28 avril 1953, du chemin situé au sud-est qui débouche dans l'angle sud-est de la parcelle [Cadastre 9] en amont de sa limite d'avec la parcelle [Cadastre 18] et qui n'apparaît pas sur certains plans ou est représenté sur d'autres avec une ligne médiane en pointillés et des flèches dirigées vers les parcelles riveraines, laissant penser qu'il pourrait appartenir en indivision aux propriétaires de ces parcelles, ou encore du 'chemin rural' situé plus au sud qui débouche dans l'angle sud-ouest de la parcelle [Cadastre 9] en amont de sa limite séparative d'avec la parcelle [Cadastre 13].
Pour autant que permette d'en juger l'extrait incomplet de l'acte de donation-partage du 28 avril 1953, le fonds de M. [C] [K] et son épouse Mme [N] était, dès avant sa division par l'effet de cet acte, dépourvu d'accès direct aux deux chemins situés au sud et cette division a seulement privé la partie nord-ouest détachée de la parcelle [Cadastre 10] et devenue la parcelle [Cadastre 17] d'accès direct à la ruelle d'exploitation à l'est.
S'agissant de rechercher si le fonds de Mme [H] bénéficie d'une tolérance de passage lui permettant d'accéder librement à la voie publique, il doit être relevé que M. [L] [K], actuel propriétaire des parcelles [Cadastre 19], [Cadastre 3] et [Cadastre 6] données à bail à celle-ci, n'entend manifestement pas tolérer le passage de Mme [H] sur les parcelles louées pour accéder à ses propres parcelles puisqu'il conclut au rejet des demandes de celle-ci et prétend qu'elle ne peut réclamer un droit de passage que sur la parcelle [Cadastre 6], ce qui est insuffisant pour rejoindre la parcelle [Cadastre 17], sa proposition subsidiaire, si l'enclave est retenue, d'un droit passage sur la parcelle [Cadastre 3] le long de sa limite d'avec les parcelles [Cadastre 8] et [Cadastre 11] de M. [B] n'étant pas reprise au dispositif de ses conclusions, et à condition qu'elle emprunte le même chemin que M. [B] le long de la limite nord de la parcelle [Cadastre 6], à l'opposé de l'habitation des consorts [K] - [X].
En outre, s'il apparaît que les parents de Mme [H] sont propriétaires de la parcelle [Cadastre 12] jouxtant la partie nord de la parcelle [Cadastre 13], il ressort suffisamment du procès-verbal de constat établi par un commissaire de justice à la demande de l'appelante le 7 juin 2023 et corroborant les plans et photographies versés aux débats de part et d'autre que la tolérance de passage dont elle dispose de ce côté est insuffisante pour répondre aux besoins normaux de son exploitation car la parcelle [Cadastre 12] ne peut être traversée qu'en empruntant un 'sentier au milieu du bois' qui aboutit au ruisseau du Pouillet qui la borde sur toute sa limite nord, ruisseau dont les abords sont humides et qui ne peut lui-même être traversé qu'en empruntant une 'passerelle de fortune' pour rejoindre le siège de l'exploitation de Mme [H] situé de l'autre côté du ruisseau au lieudit «La Haute Hermitaie».
De même, il ressort sans équivoque de ce procès-verbal de constat que la ruelle d'exploitation à l'est n'est plus praticable, l'accès au chemin 'délimité par des arbres de haute futaie' étant 'largement obstrué par la végétation' des deux côtés, ce qui n'est pas contesté par les intimés qui se contentent d'opposer à l'appelante qu'elle est libre de solliciter auprès de la commune l'entretien du chemin rural, au demeurant sans justifier que cette ruelle d'exploitation est un chemin communal.
En revanche, aucune constatation n'a été faite sur l'état des chemins situés au sud alors que le commissaire de justice décrit la parcelle [Cadastre 17] comme 'complètement ouverte sur la parcelle [Cadastre 18]" et la parcelle [Cadastre 13] comme 'bordée de haies, à l'exception d'une petite barrière à passage d'homme vers la parcelle [Cadastre 12] et d'un passage ouvert sur la parcelle [Cadastre 17]' et il ne peut qu'être constaté avec les intimés qu'aucun des tiers propriétaires de parcelles contiguës, en particulier celles situées au sud et à l'ouest, n'a été appelé en cause, tels les héritiers de M. [P] [K], propriétaire de la parcelle [Cadastre 18], décédé le 26 décembre 2011, à savoir sa veuve et ses deux enfants qui étaient intervenus volontairement à l'instance ayant abouti à l'arrêt de la cour d'appel du 10 mai 2017 confirmant le rejet de la demande de résiliation du bail rural consenti à Mme [H] pour sous-location prohibée et que celle-ci estime, à tort, n'être pas concernés par le présent litige, ou encore les propriétaires des parcelles [Cadastre 9] et [Cadastre 15].
Mme [H], qui, comme cela est rapporté dans le procès-verbal de constat, a accès aux parcelles [Cadastre 16] et [Cadastre 7] (situées de l'autre côté du ruisseau du Pouillet) 'en vertu d'un bail', ne justifie pas davantage des baux dont elle peut être titulaire par ailleurs.
Du tout, il résulte qu'elle ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l'état d'enclave qu'elle allègue.
Elle ne peut, dès lors, qu'être déboutée de sa demande de servitude de passage sur le fondement de l'enclave, le jugement étant confirmé par substitution de motifs, sans qu'il appartienne à la cour de préciser plus avant les accès actuels dont elle dispose pour ses parcelles [Cadastre 13] et 332 ni qu'il y ait lieu de statuer sur ses demandes, devenues sans objet, relatives à l'assiette de la servitude de passage et à son éventuelle acquisition par prescription trentenaire comme sur la demande subsidiaire des intimés en paiement d'une indemnité de désenclavement.
Par conséquent, c'est à bon droit que le tribunal lui a fait interdiction d'utiliser le passage instauré au milieu de la parcelle [Cadastre 3] débutant entre les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 6], sauf à préciser que cette interdiction ne vaut que pour l'accès à ses parcelles [Cadastre 13] et [Cadastre 17], et non pour l'accès aux parcelles reçues à bail initialement de Mme [W] [K], lesquelles ne font pas l'objet du litige aux dires des intimés eux-mêmes.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point en apportant cette précision.
Sur les demandes annexes
A l'appui de leur appel incident du jugement qui les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour usage abusif et trouble de jouissance, les intimés font valoir que Mme [H] ne cesse de menacer et insulter les consorts [K] - [X], que le passage d'engins agricoles et d'un quad matin et soir et les aboiements de ses chiens leur causent un préjudice moral et sonore, que Mme [H] qui a annulé au dernier moment un rendez-vous prévu sur place le 2 octobre 2018 pour tenter de solutionner amiablement le litige n'a pas la volonté de trouver une solution pour son exploitation, mais seulement d'empêcher la famille [K] - [X] de vivre paisiblement chez eux et qu'elle a installé une clôture électrique autour des parcelles louées donnant sur leur jardin à hauteur de leurs enfants dont le plus jeune s'est déjà pris du courant électrique en touchant malencontreusement les fils de cette clôture.
Aucun des faits dénoncés ne concerne M. [L] [K].
Concernant les faits de menaces et d'insultes, les intimés produisent uniquement un procès-verbal d'audition de victime du 20 décembre 2014 dans lequel Mme [X] a déposé plainte pour injure non publique en relatant que, dans la matinée, son chien s'étant mis à aboyer en voyant arriver Mme [H] et son conjoint sur leur terrain pour y mettre leurs chevaux, ce dernier l'a interpellée de manière peu sympathique en lui disant « tu vas rentrer ton putain de chien ! », qu'elle lui a répondu que son chien était dans son jardin et que Mme [H] lui a alors répondu « ta gueule morue, viens sur la route que j't'explique... ».
Ce seul dépôt de plainte dont la suite pénale est ignorée est insuffisant à établir la matérialité des faits.
Le passage d'engins agricoles et d'un quad sur des parcelles dont Mme [H] est, faut-il le rappeler, locataire dans le cadre de son activité d'élevage de chevaux n'est pas de nature à caractériser un abus.
Les autres faits allégués ne reposent sur aucun élément de preuve.
Le jugement sera, dès lors, confirmé en ce qu'il a débouté M. [L] [K] et les consorts [K] - [X] de leurs demandes de dommages et intérêts.
Partie principalement, mais non exclusivement, perdante, l'appelante supportera les entiers dépens d'appel sans qu'il y ait lieu, en considération de l'équité et de la situation respective des parties, de faire application supplémentaire à son encontre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés en appel par les intimés ni qu'elle puisse bénéficier du même texte pour ses propres frais, le jugement étant simplement confirmé sur le sort des dépens et frais non compris dans les dépens de première instance.
Par ces motifs,
La cour,
Révoque l'ordonnance de clôture et la reporte au jour de l'audience de plaidoiries du 13 juin 2023.
Dit n'y avoir lieu d'ordonner une mesure de médiation judiciaire.
Déclare Mme [H] irrecevable en ses demandes nouvelles tendant à dire que pendant la vie du bail, elle est en droit d'utiliser tout accès existant et de faire un usage libre des parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 6] qui lui sont louées, donc de sortir des terrains loués où elle l'entend et à condamner sous astreinte les consorts [K] - [X] à déplacer leur système d'assainissement afin de ne plus porter atteinte à sa jouissance paisible de la parcelle louée [Cadastre 6].
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf à préciser que l'interdiction d'utiliser le passage instauré au milieu de la parcelle [Cadastre 3] débutant entre les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 6] ne vaut que pour l'accès de Mme [H] à ses parcelles [Cadastre 13] et [Cadastre 17].
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en appel.
Condamne Mme [H] aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du même code.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
T. DA CUNHA C. MULLER