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16/04/2024 | FRANCE | N°20/00795

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre a - civile, 16 avril 2024, 20/00795


COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - CIVILE







LE/CG

ARRET N°:



AFFAIRE N° RG 20/00795 - N° Portalis DBVP-V-B7E-EVQP

jugement du 05 Février 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 18/00517





ARRET DU 16 AVRIL 2024



APPELANTE :



Madame [R] [I] exerçant sous l'enseigne LES ECURIES

DE [K]

[Adresse 8]

[Localité 4]



Représentée par Me Inès RUBINEL de la SELARL LX RENNES-

ANGERS, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 204051 et par Me Véronique CLAVEL, avocat plaidant au barreau de PARIS



INTIMES :



Monsieur [N] [F]

né le 29 Mai 1990 à [Localité 10] (7...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - CIVILE

LE/CG

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 20/00795 - N° Portalis DBVP-V-B7E-EVQP

jugement du 05 Février 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 18/00517

ARRET DU 16 AVRIL 2024

APPELANTE :

Madame [R] [I] exerçant sous l'enseigne LES ECURIES

DE [K]

[Adresse 8]

[Localité 4]

Représentée par Me Inès RUBINEL de la SELARL LX RENNES-ANGERS, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 204051 et par Me Véronique CLAVEL, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMES :

Monsieur [N] [F]

né le 29 Mai 1990 à [Localité 10] (75)

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représenté par Me Pascale FOURMOND de la SCP PLAISANT-FOURMOND-VERDIER, avocat postulant au barreau du MANS et par Me Philippe LEVY, avocat plaidant à LIEGE (BELGIQUE)

Madame [U] [Z] veuve [F]

[Adresse 3]

[Localité 1]

N'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 18 Septembre 2023 à 14H00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente

Mme GANDAIS, conseillère

Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée

Greffière lors des débats : Mme LEVEUF

Greffière lors du prononcé : Mme GNAKALE

ARRET : rendu par défaut

Prononcé publiquement le 16 avril 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Leila ELYAHYIOUI, vice-présidente placée, pour la présidente empêchée et par Flora GNAKALE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [R] [I], exerçant sous l'enseigne Les Ecuries de [K], a reçu en dépôt deux juments poulinières : Garden Party III et Tyrana Van't Plutoniahof dont sont issues quatre poulains : Unit de Sualem, Top de Sualem, Bibi de Sualem et Boeing de Sualem.

M. [Y] [F], avec lequel la dépositaire était en relation s'agissant de ces équidés, est décédé le 11 avril 2012.

Mme [I] est restée dépositaire de cinq des chevaux.

Par exploits des 12 avril et 15 novembre 2017, Mme [I] exerçant sous l'enseigne Les Ecuries de [K], a fait assigner M. [N] [F] et Mme [U] [Z] veuve [F] devant le tribunal de grande instance du Mans aux fins notamment de :

- condamnation des défendeurs solidairement ou à défaut in solidum au paiement d'une somme de 115.597,12 euros, arrêtée au 30 novembre 2018,

- prononcé de la résolution des contrats de pension portant sur les cinq chevaux de la famille [F],

- injonction à M. et Mme [F] d'avoir à récupérer chacun des cinq chevaux dans le mois suivant le jugement, puis sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard.

Suivant jugement réputé contradictoire du 5 février 2020, le tribunal judiciaire du Mans a :

- débouté Mme [I] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné Mme [I] à payer à M. [F] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné Mme [I] aux dépens,

- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire.

Par déclaration déposée au greffe de la cour le 1er juillet 2020, Mme [I] a interjeté appel de ce jugement aux fins d'obtenir son annulation et en tout cas sa réformation en son entier dispositif exclusion faite de l'exécution provisoire, intimant dans ce cadre M. [F] et Mme [Z] veuve [F].

L'huissier mandaté aux fins de signification à Mme [Z] veuve [F], d'une assignation devant la présente juridiction, de la déclaration d'appel ainsi que des premières écritures et pièces communiquées par l'appelante, a, le 2 octobre 2020, dressé procès-verbal conformément aux dispositions de l'article 659 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 5 juillet 2023 et l'audience de plaidoiries fixée au 18 septembre de la même année conformément aux prévisions d'un avis du 25 mai 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures déposées le 9 mars 2023, Mme [I] demande à la présente juridiction de :

- la recevoir en son appel et en ses demandes, l'y déclarer fondée et y faisant droit,

- infirmer la décision entreprise en ce qu'elle :

- l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes,

- l'a condamnée à payer à M. [N] [F] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- l'a condamnée aux dépens,

- condamner M. [N] [F] et Mme [U] [F] solidairement ou à défaut in solidum au paiement d'une somme qui sera fixée à 115.597,12 euros à son profit, tel qu'arrêtée au 30/11/2018,

- dire et juger que cette somme portera intérêt au taux légal courant à compter de l'assignation et jusqu'à parfait règlement,

- prononcer la résolution des contrats de pension portant sur les 5 chevaux de la famille [F],

- par voie de conséquence, enjoindre à M. [N] [F] et à Mme [U] [F] d'avoir à récupérer chacun des 5 chevaux dans les 7 jours suivant la signification du présent arrêt, puis sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard,

- débouter M. [N] [F] et Mme [R] [F] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [N] [F] et Mme [R] [F] in solidum au paiement d'une somme de 3.500 euros à son profit au titre de l'article 700 du Code de procédure civile de première instance,

- condamner M. [N] [F] et Mme [R] [F] in solidum au paiement d'une somme de 6.500 euros à son profit au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

- condamner M. [N] [F] et Mme [U] [F] in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit.

Les dernières écritures signifiées par l'appelante à l'intimée non constituée, l'ont été le 6 avril 2021, sous la forme d'un procès-verbal conforme aux dispositions de l'article 659 du Code de procédure civile, et correspondent aux demandes mentionnées ci-dessus, à l'exclusion des prétentions fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile qui ont chacune été majorées de 500 euros.

Aux termes de ses uniques écritures déposées le 29 décembre 2020 et signifiées à la partie non constituée le 6 janvier 2021, M. [F] demande à la présente juridiction de :

- dire l'appel principal recevable mais non fondé,

- dire l'appel incident recevable et fondé,

- confirmer le jugement dont appel, sous la seule émendation qu'il soit dit pour droit qu'il n'est propriétaire d'aucun des chevaux actuellement en pension dans les établissements de l'appelante,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a considéré qu'il est propriétaire de la jument Garden Party III et de ses poulains Unit de Sualem et Top de Sualem,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il ne lui a alloué que 3.000 euros d'indemnité sur le fondement de l'article 700 et ainsi porter à 5.000 euros la somme due sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouter l'appelante de l'intégralité de ses prétentions,

- condamner Mme [I] à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner l'appelante aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me Fourmond conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

A titre subsidiaire :

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf à voir porter à 5.000 euros l'indemnité de procédure allouée en première instance,

- débouter l'appelante de l'intégralité de ses prétentions,

- condamner Mme [I] à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner l'appelante aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Me Fourmond conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile, aux dernières écritures, ci-dessus mentionnées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la propriété des chevaux :

Le premier juge a observé que les parties ne contestaient pas le fait que le défunt avait déposé les deux juments poulinières auprès des Ecuries de [K] et a également constaté que la qualité de propriétaire de M. [N] [F] était mentionnée dans un document rédigé par ce dernier le 28 septembre 2009 et concernant Garden Party III ainsi qu'au sein d'un document manuscrit émanant de Mme [Z] veuve [F]. Il a par ailleurs été constaté que la qualité de propriétaire de M. [N] [F] résultait également du certificat d'origine et des cartes d'immatriculation des poulains Unit de Sualem et Top de Sualem. A ce titre, il a été souligné que si le défendeur contestait le caractère probatoire de ces éléments dès lors qu'ils ont été rédigés sur la base des déclarations de la demanderesse, il renversait d'autant moins la présomption de propriété qui en résultait que ses allégations contredisaient son écrit du mois de septembre 2009. Il en a donc été déduit que la demanderesse établissait la qualité de propriétaire de M. [N] [F] s'agissant de la jument Garden Party III et partant des poulains en étant issus et pour lesquels il a été présenté comme naisseur. Cependant s'agissant des plus amples animaux, il a été considéré que les éléments produits en demande étaient insuffisants à caractériser la propriété de M. [N] [F].

Aux termes de ses dernières écritures, l'appelante indique que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu la qualité de propriétaire de l'intimé s'agissant de la jument Garden party III et partant des poulains qui en sont issus, cette situation étant établie par les pièces qu'elle communique (mandat, courriers, facture d'acquisition de semence, carte d'immatriculation, certificats d'origine etc...). De plus, elle rappelle que l'article 4 du décret n°76-352 du 15 avril 1976 prévoit que le naisseur est le propriétaire de la poulinière ayant mis bas. Dans ces conditions, la propriété de la jument Garden Party III ayant été établie, celle des poulains en étant issus l'est également. A ce titre, l'appelante précise que cette poulinière a donné naissance à trois poulains : Unit, Top et Bibi de Sualem, dans ces conditions, elle sollicite la confirmation de la décision de première instance s'agissant de la propriété des deux premiers foals et son infirmation s'agissant du 3ème. Concernant la seconde jument, l'appelante observe que les éléments retenus comme probants s'agissant du premier animal par le premier juge ne l'ont pas été pour la seconde poulinière. Elle précise que le courrier du défunt évoqué par la juridiction du premier degré, ne doit être retenu que comme la manifestation par M. [Y] [F] de sa qualité de mandataire de son fils. Ainsi elle affirme que 'le terme de propriétaire a été employé à son égard en sa seule qualité de mandataire de M. [N] [F]', qui au demeurant était également destinataire des missives. Elle souligne que l'intimé recevait ses courriers en son domicile de [Localité 11] de sorte que l'envoi des factures au défunt en cette même adresse n'est pas probant, a reconnu être propriétaire de Garden Patry III et est mentionné comme naisseur au sein du certificat de saillie/déclaration de naissance du poulain Boeing de Sualem. S'agissant du caractère déclaratif de ce document, elle rappelle qu'il a été dressé antérieurement au décès de M. [Y] [F], de sorte qu'elle n'avait aucun intérêt à mentionner le fils de ce dernier en qualité de naisseur. En outre, elle observe que le protocole de semence présente l'intimé comme donneur d'ordre outre qu'il est le destinataire de la facture de semence. De plus, elle souligne que ce dernier poulain a été inscrit à l'institut du cheval et de l'équitation avec présentation de l'intimé en qualité de naisseur. Enfin, elle précise que l'intimé a participé à de nombreux concours avec la jument Tyrana. Dans ces conditions il est conclu à l'infirmation de la décision de première instance s'agissant de cette poulinière et de son poulain.

Aux termes de ses uniques écritures, l'intimé soutient que les juments confiées à l'appelante étaient la propriété de son père, ainsi il sollicite la confirmation de la motivation du premier juge s'agissant de la jument Tyrana Van't Plutoniahof et de ses poulains. Cependant, il conclut à l'infirmation de cette même décision s'agissant de la jument Garden Party III et de ses poulains. A ce titre, il souligne que le premier juge a, à tort, fondé sa motivation sur des écrits émanant de l'appelante ainsi que de sa propre mère. De plus, il souligne que les documents de propriété évoqués par la juridiction de première instance ont été établis sur la base des seules déclarations de l'appelante sans qu'il soit avisé de ces démarches. Il en déduit que les cartes d'immatriculation des deux poulains ne peuvent démontrer sa propriété. Concernant le certificat de saillie du 27 décembre 2011, il précise ne pas en être le signataire, soulignant au demeurant qu'il présente la mention 'p.o' et comporte uniquement l'écriture de Mme [I]. Concernant les documents émanant de l'EURL [Localité 6] Haras, il indique qu'ils ont été adressés à [Localité 11], commune au sein de laquelle il n'a jamais résidé, qu'il ne lui a commandé aucune prestation et que ses demandes de précisions auprès de cet établissement n'ont pas permis à ce dernier de lui transmettre quelque commande que ce soit. En tout état de cause, il souligne que s'agissant des saillies liées aux poulains Unit et Top de Sualem, les documents produits datent d'une période au cours de laquelle il était mineur et ne pouvait commander de telles opérations voire même être propriétaire de cheval. En tout état de cause, il souligne que suivant courrier du 2 avril 2013, l'appelante avait reconnu la qualité de propriétaire de son père, à l'égard des deux juments. Il précise que suite au décès de son père, il a renoncé à la succession de ce dernier de sorte qu'il ne peut être tenu au passif de ce dernier.

Sur ce :

Il résulte de l'article 4 du décret n° 2001-913 du 5 octobre 2001 relatif à l'identification et à l'amélioration génétique des équidés et modifiant le décret n°76-352 du 15 avril 1976 fixant les modalités d'application aux équidés de la loi n°66-1005 du 28 décembre 1966 sur l'élevage, qu'est qualifié de naisseur le propriétaire de la poulinière qui met bas, et que sauf convention contraire déposée au fichier central, le naisseur est enregistré comme propriétaire du poulain à la naissance (1re Civ., 24 mars 2021, pourvoi n° 19-20.962, [P]).

L'appelante communique aux débats copie d'une note rédigée par l'intimé le 28 septembre 2009 et alors qu'il était âgé de 19 ans pour être né le 29 mai 1990, qui précise : 'je soussigné M. [F] [N], propriétaire de la jument 'Garden Party III' autorise le docteur [identité laissée vide dans l'original] à opérer la jument si besoin'.

Il en résulte que l'intimé majeur, se reconnaissait propriétaire de cette jument.

Par ailleurs, cette qualité apparaît également :

- sur la carte d'immatriculation au fichier central des équidés du foal Top de Sualem, qui présente l'intimé comme étant le propriétaire de ce dernier animal issu de la jument Garden Party III, or ainsi que mentionné ci-avant est qualifié de naisseur et partant enregistré comme propriétaire du poulain, le propriétaire de la jument ayant mis bas,

- au sein du certificat d'origine du foal Unit de Sualem, qui présente l'intimé comme étant le naisseur de ce dernier animal issu de la jument Garden Party III et de la carte d'immatriculation au fichier central des équidés de ce même poulain, présentant M. [N] [F] comme son propriétaire.

Si l'intimé conteste la valeur de ces dernières pièces précisant qu'elles ont été dressées sur les seules affirmations de l'appelante, il n'en demeure pas moins qu'il ne justifie d'aucune diligence auprès des administrations en charge de l'enregistrement des équidés aux fins de correction de ces documents qui constituent des présomptions simples de propriété se trouvant au surplus confirmées par ses propres écrits relativement à la propriété de la jument poulinière.

Il résulte de ce qui précède que l'appelante démontre que l'intimé est propriétaire de la jument Garden Party III et, au regard du principe de l'accession posé par l'article 547 du Code civil, est également le propriétaire des foals issus de cette poulinière :

- Top de Sualem,

- Unit de Sualem,

- Bibi de Sualem.

La décision de première instance sera donc confirmée quant à la propriété de la jument Garden Party III et de ses deux premiers foals et infirmée s'agissant de la propriété de Bibi de Sualem.

Concernant la jument Tyrana Van't Plutoniahof et son foal, l'appelante communique aux débats :

- une note non datée de l'intimée l'autorisant 'à vendre les chevaux de [son] époux M. [F] [Y] ainsi que ceux de [son] fils [F] [N] afin de (...') payer des pensions dûes (sic) à ce jour', mais qui n'est aucunement de nature à établir la propriété contestée notamment au regard de son caractère particulièrement peu précis quant aux animaux concernés et/ou visés,

- une déclaration de saillie qu'elle a remplie le 27 décembre 2011, mentionnant l'identité de l'intimé comme naisseur de Boeing de Sualem,

- un protocole pour la semence réfrigérée aux fins d'insémination de la jument mentionnant l'intimé comme acheteur et l'appelante comme vétérinaire,

- une extraction d'un site internet établissant que l'intimé a participé à plusieurs épreuves équestres en qualité de cavalier de la jument Tyrana Van't Plutoniahof.

Par ailleurs, l'appelante communique diverses facturations et correspondances liées à l'entretien et aux divers suivis des animaux. S'agissant de ces dernières pièces outre qu'elles émanent directement de l'appelante ou présentent des mentions de propriété résultant de ses uniques déclarations auprès des prestataires, il ne peut qu'être constaté que leur caractère particulièrement erratique (adressées à l'intimé, à son père voire même au couple que ce dernier composait avec l'intimée), ne permet aucunement de justifier de quelque propriété que ce soit.

En outre le fait que l'intimé ait pu concourir en tant que cavalier de cette jument n'est aucunement de nature à établir quelque propriété que ce soit.

Enfin, s'agissant de la déclaration de saillie, le fait que Mme [I] ait pu présenter M. [N] [F] en tant que naisseur du foal de Tyrana Van't Plutoniahof démontre au mieux, qu'à la date de cet acte, elle ait pu croire l'intimé propriétaire de la jument mais en tout état de cause cette seule pièce n'établit aucunement la réalité du droit en l'existence duquel il a légitimement pu être cru.

Dans ces conditions, la décision de première instance doit être confirmée en ce qu'elle a considéré que l'appelante ne démontrait pas le fait que l'intimé soit le propriétaire de la jument Tyrana Van't Plutoniahof et partant du poulain qui en est issu.

Sur l'existence de relations contractuelles :

Le premier juge constatant que le dépôt par M. [Y] [F] de la jument Garden Party III n'était pas contesté ; que le caractère onéreux des relations était notamment établi par un courriel du défunt, s'engageant au paiement des frais de l'année 2010 mais observant parallèlement que ce dernier avait contracté s'agissant de ce cheval sans avoir la qualité de propriétaire et sans que la demanderesse puisse utilement invoquer la théorie de l'apparence, a retenu que M. [N] [F] avait la qualité de tiers à ces conventions dont les obligations qui en résultaient ne pouvaient lui être opposées. Les demandes en paiement ont donc été rejetées.

Aux termes de ses dernières écritures l'appelante indique qu'en milieu hippique l'écrit en matière contractuelle est rare, mais qu'il est cependant fréquent d'avoir recours à un mandataire aux fins de gestion des animaux. Ainsi, elle souligne que les équidés ont été placés en pension auprès d'elle, par l'intermédiaire du père de l'intimé et rappelle que le mandat se prouve par tout moyen. A ce titre, elle indique qu'il n'est pas possible que son contradicteur ait ignoré le lieu de poulinage de ses animaux qu'il a commandité, n'a jamais contesté sa qualité de propriétaire, de sorte que l'existence d'un contrat de pension conclu entre eux n'est pas contestable. Elle précise exercer cette activité à titre professionnel de sorte que le caractère onéreux de la convention est présumé.

Subsidiairement et si les conventions n'étaient pas considérées comme opposables à l'intimé, l'appelante sollicite la condamnation de Mme [Z] veuve [F] au paiement des sommes réclamées. Elle précise à ce titre que cette dernière 'sauf preuve du contraire, était mariée avec M. [Y] [F] sous le régime de la communauté lorsque ces contrats ont été conclus'. Or elle souligne que l'existence des contrats et leur caractère onéreux n'est pas discutable au regard du courriel qui lui a été adressé par le défunt. Dans ces conditions et par application des dispositions de l'article 1409 du Code civil relatif au passif de communauté, l'intimée est tenue aux dettes que son conjoint a contractées au temps du mariage. De plus, elle observe que sa contradictrice a autorisé la cession des animaux, se comportant ainsi comme propriétaire. L'appelante indique donc solliciter la condamnation in solidum de ses contradicteurs au paiement des sommes dues au titre des divers soins aux animaux.

A ce titre, elle précise n'avoir reçu aucun règlement depuis le mois d'avril 2011, dans ces conditions elle conclut également à la résolution des conventions la liant aux intimés, ces derniers ne respectant pas leurs obligations à son égard outre leur condamnation à la récupération des cinq chevaux restés en son écurie sous astreinte.

Aux termes de ses dernières écritures l'intimé indique qu''il n'a pas à payer pour des chevaux qui ne lui appartiennent pas' et qu'en tout état de cause, il 'est un tiers par rapport au contrat conclut (sic) par feu [Y] [F], dont il ne peut avoir hérité vu sa renonciation à succession'. De plus, il conteste la pratique invoquée par sa contradictrice tenant à une absence de relations contractuelles écrites dans le domaine hippique et observe que le paiement semestriel évoqué par l'appelante relève des pures affirmations unilatérales de cette dernière. Il souligne de plus que courant 2009, il était âgé de 19 ans et ne disposait aucunement de ressources lui permettant d'assumer la charge de chevaux. S'agissant du poulain qui a été repris (Top de Sualem), l'intimé souligne ne pas être à l'origine de cette situation, l'équidé ayant été pris en charge par son père.

Sur ce :

En l'espèce, l'existence d'un dépôt n'est aucunement contesté par l'intimé constitué par ailleurs, ce dernier ne conteste pas plus le caractère onéreux d'une telle convention.

S'agissant du fait qu'il ne soit pas lié par ces conventions, il doit être rappelé que le 28 septembre 2009, soit à une date où il est constant que l'animal Garden Party III se trouvait en pension chez l'appelante, l'intimé avait adressé une note autorisant 'en blanc' un vétérinaire à intervenir chirurgicalement sur cette jument. Or cette note ne peut que s'analyser comme l'autorisation accordée par le propriétaire à la personne auprès de laquelle se trouve l'animal, de procéder à des actes relevant des seuls pouvoirs du propriétaire. Il est donc établi que l'intimé était avisé de la situation de sa jument initialement mise en pension par son père.

Dans ces conditions il ne peut qu'être considéré que le dépôt a été réalisé par M. [F] alors que son fils était encore mineur et que ce dernier une fois majeur n'a aucunement remis en cause cette situation, mettant même le dépositaire en position de faire réaliser des actes relevant de ses pouvoirs de propriétaire.

Il en résulte qu'en application de l'article 1947 du Code civil, l'intimé est redevable, s'agissant de la jument Garden Party III et de ses trois poulains des sommes exposées par le dépositaire et nécessaires à la conservation de ces animaux. A ce titre, l'appelante communique aux débats diverses factures de vétérinaire et de maréchal-ferrant établissant (pour celles dont il est possible de déterminer l'animal objet des soins) qu'elle a exposé, pour ces quatre chevaux, une somme de 3.142,27 euros.

Cependant et concernant le coût de la pension, il ne peut qu'être constaté que l'appelante ne produit que ses propres factures, sans même éventuellement communiquer les éventuels tarifs qu'elle a pu appliquer depuis que la jument Garden Party III lui a été déposée.

De plus, il résulte des pièces également produites que le compte de l'intimé et/ou de son père dans les livres de l'écurie, est négatif depuis, à tout le moins 2009. Ainsi si des paiements ont été effectués, ils n'ont pour autant jamais 'couvert' les montants sollicités par l'appelante. Il en résulte que si le caractère onéreux du dépôt est établi tant par l'absence de contestation à ce titre de l'intimé que par un courriel du père de ce dernier du 10 mai 2011 ('je vous écris pour communiquer que l'année 2010 sera payée avant la fin du mois'), le montant de la pension ne l'est pour sa part aucunement.

La production de factures ne peut, à elle-seule, constituer une preuve suffisante du montant de la créance invoquée, dès lors que nul ne peut se constituer de titre à soi-même étant souligné que cette facturation n'est aucunement confirmée par les paiements effectués. En effet, il ne peut résulter des quelques paiements admis par l'appelante, un accord sur le montant périodique de la pension dès lors que les sommes réclamées n'ont jamais été intégralement versées.

De l'ensemble, il résulte que si le principe d'un dépôt onéreux est établi, l'appelante est défaillante à démontrer que les sommes dont elle réclame le paiement au titre de la pension correspondent à un accord conventionnel. Dans ces conditions, il appartient à la présente juridiction de déterminer le coût de la pension des animaux qui correspond au demeurant à des frais permettant la survie et donc la conservation de ces mêmes animaux. Ce montant sera valablement fixé à la somme de 1.000 euros par an et par animal.

Au surplus, il doit être souligné d'une part que les décomptes produits par l'appelante couvrent une période allant du mois de décembre 2009 au mois de novembre 2018, sans pour autant que l'intimé constitué ne présente d'observation quant à une éventuelle prescription de la créance et d'autre part que si le poulain Unit de Sualem a été présent sur toute cette période, le foal Top de Sualem a quitté l'écurie au début du mois de décembre 2010 et Bibi de Sualem est mentionnée au décompte comme étant née en avril 2011. Dans ces conditions, la présence :

- de la jument et du poulain Unit de Sualem couvre une période de 9 années chacun,

- du poulain Top de Sualem correspond à une année,

- du foal Bibi de Sualem correspond à une période de 7 ans et 8 mois,

soit un total de : (26 ans x 1.000€) + (1000€/12 mois) x 8 mois = 26.666,67 euros.

De plus, s'agissant de la poulinière Tyrana (...), faute d'établissement de la propriété de l'intimé, l'appelante n'établit aucunement que ce dernier ait la qualité de déposant de cet animal et partant de son foal.

De l'ensemble, il résulte que si l'appelante justifie de l'existence de sommes qui lui sont dues en exécution du contrat de dépôt, le décompte de créance qu'elle produit précise, qu'elle a reçu, s'agissant de ces quatre équidés une somme totale de 9.515,14 euros (1.476,94 + 2.095,86 + 1.982 + 1.200,92 + 1.098 + 815,97 + 845,45). Dans ces conditions, l'intimé doit être condamné au paiement à l'appelante de la somme de (26.666,67 + 3.142,27) - 9.515,14 = 20.293,80 euros.

Enfin, il ne peut qu'être constaté qu'en s'abstenant de payer le coût du dépôt onéreux de ses animaux auprès de l'appelante, l'intimé a manqué à ses obligations dans des conditions justifiant du prononcé, à ses torts, de la résiliation du contrat le liant à Mme [I]. Il sera également condamné à la reprise de ses trois animaux (Garden Party III, Unit et Bibi de Sualem) dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision et, passé ce délai sous astreinte de 1.000 euros par mois et par animal pendant une durée de huit mois.

La décision de première instance sera donc infirmée en ce sens.

Concernant les demandes en paiement formées à l'encontre de l'intimée, elles sont fondées d'une part sur une note rédigée par cette dernière et d'autre part sur le régime matrimonial qui avait existé entre elle et M. [F].

S'agissant de la note non datée de Mme [Z] veuve [F], si elle y accepte la vente d'équidés, elle y précise cependant que ces animaux sont la propriété de son conjoint et/ou de son fils. Il n'en résulte donc pas qu'elle se considère comme la propriétaire de ces animaux quand bien même la vente d'un bien relève des attributs de la propriété.

Par ailleurs, concernant le régime matrimonial invoqué comme étant de communauté, sans plus amples précisions (meubles et acquêts, limitée aux acquêts, universelle...'), il ne peut qu'être souligné que l'appelante procède à ce titre par pures affirmations. En effet, ses allégations reposent sur le présupposé que l'intimée aurait été soumise aux prescriptions d'un régime matrimonial français. Or cette supposition en dehors d'une adresse en France, n'est corroborée par aucune pièce étant souligné que M. [F] est décédé à [Localité 9] et que l'une des pièces produites par l'appelante mentionne qu'en 2002, le propriétaire de Top de Sualem (intimé âgé de 12 ans) était domicilié à [Localité 7] et disposait de la nationalité italienne. Il en résulte que la soumission du couple [Z]-[F] à un régime matrimonial français et au surplus de communauté n'est aucunement démontrée.

Dans ces conditions, il n'est aucunement justifié par l'appelante que l'intimée dispose de quelque droit que ce soit sur les animaux objet de la présente procédure et qu'elle soit à ce titre redevable des obligations du déposant les concernant.

La décision de première instance doit donc être confirmée en ce qu'elle a rejeté les demandes formées à l'encontre de Mme [Z] veuve [F].

Enfin, s'agissant des demandes en résiliation/résolution du contrat de pension relatif à la jument Tyrana et son foal (...), elles ne peuvent qu'être rejetées, dès lors qu'elles sont uniquement fondées sur l'existence d'un arriéré qui n'est aucunement démontré en l'espèce, de sorte que la décision de première instance doit également confirmée à ce titre.

Sur les demandes accessoires :

Les parties constituées succombant toutes partiellement en leurs prétentions, elles conserveront chacune les dépens qu'elles ont exposés tant en première instance qu'en appel.

Enfin, l'équité commande de rejeter l'ensemble des demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

La décision de première instance sera donc infirmée à ces deux titres.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement du tribunal judiciaire du Mans du 5 février 2020 sauf en ses dispositions relatives tant à Mme [Z] veuve [F] qu'à la jument Tyrana Van't Plutoniahof et son foal Boeing de Sualem ;

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

CONSTATE que M. [N] [F] est propriétaire de la jument Garden Party III ainsi que des trois poulains qui en sont issus : Unit de Sualem, Top de Sualem et Bibi de Sualem ;

CONDAMNE M. [N] [F] au paiement à Mme [R] [I] d'une somme de 20.293,80 euros (vingt mille deux cent quatre vingt treize euros et quatre vingt cents) au titre du dépôt de ces quatre équidés, somme arrêtée au 30 novembre 2018 ;

PRONONCE la résiliation aux torts de M. [N] [F] du contrat de dépôt le liant à Mme [R] [I] et portant sur la jument Garden Party III ainsi que les poulains Unit de Sualem et Bibi de Sualem ;

ENJOINT à M. [N] [F] de reprendre la jument Garden Party III ainsi que les poulains Unit de Sualem et Bibi de Sualem dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision ;

CONDAMNE, passé ce délai de deux mois, M. [N] [F] au paiement d'une astreinte de 1.000 euros (mille euros) par mois et par animal, et cela pendant huit mois période au-delà de laquelle il sera de nouveau statué ;

REJETTE l'ensemble des demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

LAISSE à chaque partie la charge de ses propres dépens.

LA GREFFIERE P/LA PRESIDENTE, empêchée

F. GNAKALE L. ELYAHYIOUI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre a - civile
Numéro d'arrêt : 20/00795
Date de la décision : 16/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-16;20.00795 ?
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