COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N°
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00461 - N° Portalis DBVP-V-B7E-EXZU.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 08 Décembre 2020, enregistrée sous le n° F19/00679
ARRÊT DU 14 Mars 2024
APPELANT :
Maître [K] [S], pris en sa qualité de mandataire liquidateur la Sté LABORATOIRE MAINE ANJOU
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Samuel DE LOGIVIERE de la SELARL SULTAN - LUCAS - DE LOGIVIERE - PINIER - POIRIER, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 190590
INTIMEES :
Association AGS -CGEA
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me BRULAY, avocat substituant Maître Bertrand CREN de la SELARL LEXCAP, avocat au barreau d'ANGERS
Madame [V] [F]
[Adresse 6]
[Localité 5]
représentée par Maître Stéphanie CHOUQUET-MAISONNEUVE, avocat au barreau D'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Septembre 2023 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame CHAMBEAUD, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Madame Clarisse PORTMANN
Conseiller : Mme Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS
Conseiller : Madame Rose CHAMBEAUD
Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN
ARRÊT :
prononcé le 14 Mars 2024, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Clarisse PORTMANN, président, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
La société par actions simplifiée (SAS) Laboratoire Maine Anjou, dénommée Laboratoire [D] jusqu'en mai 2018, était spécialisée dans le secteur d'activité de la fabrication de matériel médico-chirugical dentaire, et plus particulièrement dans la réalisation de prothèses dentaires.
Le 30 juin 2015, le Laboratoire [D] a été repris par M. [H] [N]. La société Laboratoire Maine Anjou appliquait à ses salariés la convention collective nationale des prothésistes dentaires et des personnels des laboratoires de prothèse dentaire et employait plus de onze salariés.
Mme [V] [F] a été engagée par la société Laboratoire Maine Anjou à compter du 1er octobre 1992 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée verbal en qualité de femme de ménage. À partir de juin 1993, elle occupait les fonctions de coursière.
Par courrier du 21 février 2018, Mme [V] [F] a dénoncé auprès de la DIRECCTE une altercation intervenue le 16 février 2018 avec M. [N] et a déposé une main courante auprès de la gendarmerie de [Localité 5].
À compter du 22 février 2018 et jusqu'à la rupture du contrat de travail, Mme [V] [F] a été placée en arrêt de travail.
Par courrier reçu le 14 mars 2018, la société Laboratoire Maine Anjou a notifié un avertissement à Mme [V] [F] lui reprochant notamment un comportement inadapté survenu en février 2018. Puis, par courrier reçu le 17 mars 2018, elle lui a notifié une modification de ses horaires de travail.
Par courrier du 3 mai 2018, Mme [V] [F] a contesté l'avertissement reçu le 14 mars 2018 et rappelé à son employeur quelles étaient ses missions exercées.
Le 18 mai 2018, Mme [V] [F] a déposé une demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de la caisse primaire d'assurance maladie de Maine-et-Loire (la caisse) pour 'syndrome anxio-dépressif réactionnel suite à chantage, harcèlement au travail' laquelle a été transmise le 29 suivant à la société Laboratoire Maine Anjou accompagnée d'une demande de renseignements.
Le 11 juin 2018, le Laboratoire Maine Anjou a communiqué à la CPAM de Maine et Loire les informations sollicitées.
Par courrier recommandé du 18 juin 2018, Mme [V] [F] a mis en demeure son employeur de lui payer ses indemnités prévoyance qu'elle ne percevait plus depuis le 23 mars 2018.
Par courrier du 24 juillet 2018, la société Laboratoire Maine Anjou lui a notifié une nouvelle modification de ses horaires de travail
Lors de la visite médicale de reprise du 28 août 2018, Mme [V] [F] a été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail sans possibilité de reclassement.
Par courrier du 13 février 2019, la société Laboratoire Maine Anjou a informé Mme [V] [F] de la mise en 'uvre d'une procédure de licenciement pour inaptitude compte tenu de l'impossibilité de la reclasser. Par courrier du 15 février 2019, elle l'a convoquée à un entretien préalable à un licenciement fixé le 27 février 2019.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 2 mars 2019, la société Laboratoire Maine Anjou a notifié à Mme [V] [F] son licenciement pour inaptitude médicalement constatée avec dispense de reclassement.
Par jugement du 20 février 2019 du tribunal de commerce d'Angers, la société Le Laboratoire Maine Anjou a été placée en redressement judiciaire, Me [K] [S] ayant été désigné mandataire judiciaire.
Après avis favorable du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles des Pays de la Loire, la caisse primaire d'assurance maladie a pris en charge le syndrome anxio-dépressif de Mme [V] [F] au titre de la législation sur les risques professionnels.
Par courrier du 17 juin 2019, Mme [V] [F] a sollicité le paiement des indemnités spéciales de licenciement auprès de son employeur, lequel l'a informée le 10 juillet suivant de son refus d'y procéder au motif qu'il n'avait pas reçu de la caisse primaire d'assurance maladie la décision de reconnaissance de maladie professionnelle.
Par décision du 26 septembre 2019, la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie a rejeté le recours de la société Laboratoire Maine Anjou par lequel elle contestait la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle de Mme [V] [F] déclarée le 18 mai 2018.
Par jugement du 11 avril 2022, le pôle social du tribunal judiciaire d'Angers a déclaré inopposable à la société Laboratoire Maine Anjou la décision de prise en charge de Mme [F] au titre de la maladie professionnelle.
Considérant que l'inaptitude à l'origine de son licenciement est la conséquence du harcèlement moral dont elle s'estime victime, Mme [V] [F] a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers le 25 novembre 2019 afin principalement de voir reconnaître la nullité de son licenciement et subsidiairement, de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse considérant que son inaptitude est la conséquence des manquements de son employeur à son obligation de sécurité. En tout état de cause, elle demandait la condamnation solidaire de la société Laboratoire Maine Anjou et des organes de la procédure collective, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, au paiement de dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité compensatrice de préavis, d'une indemnité spéciale de licenciement, d'un solde d'indemnité compensatrice de congés payés, des dommages et intérêts pour préjudice physique et moral au titre de la détérioration de son état de santé, des dommages et intérêts pour préjudice moral pour refus abusif de mettre en place la procédure de licenciement pour inaptitude médicale, des dommages et intérêts pour licenciement vexatoire en réparation du préjudice moral et de l'atteinte à l'image et à la réputation professionnelle, des dommages et intérêts pour défaut de document unique des risques et pour défaut d'organisation des élections des représentants du personnel ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Laboratoire Maine Anjou s'est opposée aux prétentions de Mme [V] [F] et a sollicité sa condamnation au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'AGS-CGEA de [Localité 3] est intervenue volontairement en la cause en demandant que les demandes présentées par Mme [F] soient déclarées irrecevables et subsidiairement mal fondées.
Par jugement en date du 8 décembre 2020, le conseil de prud'hommes a :
- dit et jugé que l'origine de l'inaptitude de Mme [V] [F] est de nature professionnelle ;
- dit et jugé que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
En conséquence :
- fixé au passif du redressement judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou les sommes suivantes :
* Indemnité de préavis : 4 000,66 euros ;
* Indemnité spéciale de licenciement : 16 391,58 euros ;
* Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 27'000 euros';
* Cotisation prévoyance : 29,21 euros ;
* 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile ;
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit s'agissant de salaires en application des articles R1454-28 et R1454-14 du code du travail dans la limite de 9 mois de salaire, calculée sur la moyenne des trois derniers mois que le conseil évalue à 2 000,33 euros (salaire brut mensuel moyen de référence) :
- ordonné à Me [S] ès qualités de mandataire judiciaire de remettre à Mme [F] les documents de fin de contrat rectifiés, et ce sans astreinte ;
- ordonné à Me [S] ès qualités de mandataire judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômages versées à Mme [F] dans la limite d'un mois d'indemnités de chômage sur le fondement de l'article L.1235-4 du code du travail ;
- rappelé que les créances fixées au passif du redressement judiciaire ne sont garanties par l'AGS que dans les limites prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code ;
- rejeté les autres prétentions des parties ;
- condamné la société Laboratoire Maine Anjou, partie perdante, aux dépens de l'instance.
La société Laboratoire Maine Anjou et Me [S] ès qualités ont interjeté appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique au greffe de la cour d'appel le 21 décembre 2020, leur appel portant sur tous les chefs leur faisant grief ainsi que ceux qui en dépendent et qu'ils énoncent dans leur déclaration. Cette procédure a été enrôlée sous le numéro du Répertoire Général (RG) 20/00461.
Par jugement du 3 janvier 2021 du tribunal de commerce d'Angers, la société Le Laboratoire Maine Anjou a été placée en liquidation judiciaire, Me [S] ayant été désigné en qualité de mandataire liquidateur.
Mme [V] [F] a également interjeté appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique au greffe de la cour d'appel le 8 janvier 2021, son appel portant sur tous les chefs lui faisant grief ainsi que ceux qui en dépendent et qu'elle énonce dans sa déclaration. Cette procédure a été enrôlée sous le numéro du Répertoire Général (RG) 21/00027.
Le CGEA de [Localité 3], unité déconcentrée de l'Unedic, association agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS a constitué avocat en qualité de partie intimée le 20 janvier 2021 et a adressé par RPVA ses conclusions le 25 juin 2021 dans le dossier RG 21/00027.
Par une ordonnance du 15 juillet 2021, le conseiller de la mise en état de la présente cour a ordonné la jonction des dossiers RG 21/00027 et RG 20/00461 sous ce dernier numéro.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 septembre 2022.
Le dossier a été fixé à l'audience du conseiller rapporteur du 10 octobre 2022.
Par arrêt du 22 décembre 2022, la cour a :
- constaté l'existence d'une cause grave et prononcé en conséquence la révocation de l'ordonnance de clôture du 14 septembre 2022 ;
- ordonné la réouverture des débats pour régulariser la procédure aux droits du CGEA-AGS de [Localité 3] et inviter celui-ci, le cas échéant, à conclure dans la présente affaire à la suite de l'ordonnance de jonction des dossiers RG 21/00027 et RG 20/00461 sous ce dernier numéro rendue le 15 juillet 2021 ;
- renvoyé l'affaire à la mise en état ;
- réservé le surplus et les dépens.
L'affaire a de nouveau été fixée à l'audience du conseiller rapporteur du 12 septembre 2023.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 août 2023.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Me [S], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou, dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 18 mai 2022, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :
- le déclarer recevable et bien fondé ;
Y faisant droit :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
* a dit et jugé que l'origine de l'inaptitude de Mme [F] est de nature professionnelle';
* a dit et jugé que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
* a fixé au passif du redressement judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou les sommes suivantes :
. Indemnité de préavis : 4 000,66 euros ;
. Indemnité spéciale de licenciement : 16 391,58 euros ;
. Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 27 000 euros ;
. Cotisation prévoyance : 29,21 euros ;
. 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
* lui a ordonné, ès qualités de mandataire judiciaire, de remettre à Mme [V] [F] les documents de fin de contrat rectifiés et ce sans astreinte ;
* lui a ordonné, ès qualités de mandataire judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à Mme [V] [F] dans la limite d'un mois d'indemnités de chômage sur le fondement de l'article L1235-4 du code du travail ;
* a condamné la société Laboratoire Maine Anjou aux dépens de l'instance.
Statuant à nouveau :
- dire et juger que l'origine de l'inaptitude de Mme [V] [F] n'a pas de caractère professionnel ;
- dire et juger que le licenciement pour inaptitude sans possibilité de reclassement prononcé le 2 mars 2019 est justifié par une cause réelle et sérieuse ;
- rejeter l'ensemble des demandes de Mme [V] [F] comme non fondées.
En tout état de cause :
- débouter Mme [V] [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner Mme [V] [F] à lui régler, ès qualités de liquidateur, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- à tire infiniment subsidiaire, et dans l'hypothèse où des créances seraient fixées au passif de la liquidation, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que lesdites créances ne seront garanties par l'AGS que dans les limites prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code.
Le CGEA de [Localité 3], unité déconcentrée de l'Unedic, association agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS, dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 9 janvier 2023, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dire et juger que l'origine de l'inaptitude de Mme [V] [F] était de nature professionnelle,
- dire et juger que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En conséquence :
- fixer au passif du redressement judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou les sommes suivantes :
* 4000,66 euros au titre de l'indemnité de préavis,
* 16.391,58 euros au titre de l'indemnité spéciale de licenciement,
* 27 000,00 euros a titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 29,21 euros au titre des cotisations prévoyance,
* 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner à Maître [S] és-qualités de mandataire judiciaire de remettre à Mme [V] [F] les documents de fin de contrat rectifiés, et ce, sans astreinte,
- ordonner à Maître [S] és-qualités de mandataire judiciaire de la société Laboratoire Anjou, de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Mme [V] [F] dans la limite d'un mois sur le fondement de l'article L. 123 5-4 du code du travail,
- condamner la société Laboratoire Maine Anjou, partie perdante aux dépens d'instance.
Statuant de nouveau :
- lui donner acte de son intervention ;
- débouter Mme [V] [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Subsidiairement, si la cour jugeait les demandes de Mme [V] [F] partiellement fondées, constater le caractère excessif des demandes de dommages et intérêts et les réduire à de justes proportions,
- juger que les créances éventuellement fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou ne seront garanties par l'AGS que dans les limites prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail et les plafonds prévus par les articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code,
- condamner Mme [V] [F] aux entiers dépens.
Mme [F], dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 7 septembre 2022, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :
- déclarer Me [S], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou, irrecevable et en tout cas non fondé en son appel, l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, l'en débouter ;
- la recevoir en son appel incident et ses demandes, les dire bien fondées et y faisant droit ;
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
* l'a déboutée des demandes suivantes :
- 900,15 euros brut au titre du solde d'indemnité compensatrice de congés payés';
- dire et juger que son licenciement pour inaptitude est nul ;
- condamner la société Laboratoire Maine Anjou et les organes de la procédure à lui verser les sommes suivantes :
. 10 000 euros net de dommages et intérêts au titre de la détérioration de son état de santé ;
. 10 000 euros net au titre du préjudice moral et psychologique résultant du refus abusif de mettre en place la procédure de licenciement pour inaptitude médicale ;
. 15 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, en réparation du préjudice moral et de l'atteinte à l'image et à la réputation professionnelle;
. 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de document unique d'évaluation des risques jusqu'en 2018 ;
. 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de mise en place des élections des représentants du personnel ;
* a rejeté l'astreinte sur la remise des documents de fin de contrat rectifiés;
* a limité à la somme de 27 000 euros l'inscription au passif de la société Laboratoire Maine Anjou au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';
* a limité à la somme de 29,21 euros l'inscription au passif de la société Laboratoire Maine Anjou au titre des cotisations prévoyance ;
* a limité à un mois le remboursement à Pôle emploi des indemnités chômages sur le fondement de l'article L1235-4 du code du travail ;
- confirmer le jugement entrepris pour le surplus.
Y ajoutant :
- condamner la liquidation judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou et fixer au passif de la société Laboratoire Maine Anjou les sommes suivantes :
* 663. 44 euros brut au titre du solde d'indemnité compensatrice de congés payés ;
* 52 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou à défaut dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
* 10 000 euros net au titre du préjudice physique et moral au titre de la détérioration de son état de santé ;
* 10 000 euros net au titre du préjudice moral et psychologique résultant du refus abusif de mettre en place la procédure de licenciement pour inaptitude médicale ;
* 15 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, en réparation du préjudice moral et de l'atteinte à l'image et à la réputation professionnelle ;
* 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de document unique d'évaluation des risques jusqu'en 2018 ;
* 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de mise en place des élections des représentants du personnel ;
* 58. 42 euros à titre de remboursement des cotisations indûment prélevées sur les mois de février et mars 2019 ;
* 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;
- dire et juger que les condamnations seront garanties par l'AGS ;
- ordonner à Me [S], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage sur le fondement de l'article L 1235-4 du code du travail;
- ordonner la délivrance des bulletins de salaires correspondant au préavis et des documents de fin de contrat rectifiés (attestation Pôle emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte) sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 8ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir, la cour se réservant la possibilité de liquider cette astreinte ;
- condamner Me [S], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou aux entiers dépens ainsi que tous les frais éventuels d'exécution forcée par voie d'huissier y compris ceux visés par l'article A444-32 du code de commerce ;
- débouter la liquidation judiciaire de la société Laboratoire Maine Anjou de ses demandes, fins et conclusions.
MOTIVATION
Sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, «'aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel».
En vertu de l'article L.1154-1 du même code, il appartient au salarié qui s'estime victime de harcèlement moral d'établir la matérialité de faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments de faits invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du code civil. Dans l'affirmative, il lui revient d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Il est de principe que le harcèlement est constitué indépendamment de l'intention de son auteur et de l'existence d'une intention malveillante. Les méthodes de gestion mise en 'uvre par un supérieur hiérarchique peuvent caractériser un harcèlement moral dès lors qu'elles se manifestent par un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Mme [F] prétend que M. [N] a unilatéralement modifié son contrat de travail en lui retirant les missions administratives et comptables que M. [D], son ancien employeur, lui avait confiées en plus de ses fonctions de coursière. Elle précise que ces missions représentaient quatre heures par semaine environ pouvant aller jusqu'à 10 heures de travail la dernière semaine du mois. Elle estime que cette modification unilatérale l'a conduit à travailler moins de 151.67 heures et à ne plus pouvoir bénéficier des majorations légales prévues en cas d'heures supplémentaires en raison du système de récupération nouvellement mis en place.
Elle soutient également que son employeur a adopté le 5 février 2018 une attitude agressive et menaçante suite à son refus d'établir une attestation en sa faveur dans le cadre du procès l'opposant à son cédant, M. [D].
Elle indique en outre que son employeur lui a adressé durant son arrêt de travail un avertissement suite à un incident survenu le 16 février 2018 dont elle conteste l'imputabilité.
Se décrivant comme traumatisée par ledit incident, Mme [F] indique ne pas être parvenue à poursuivre normalement son travail et avoir été placée en arrêt de travail à compter du 22 février 2018 par son médecin traitant. Elle soutient que son employeur a adopté à son égard un comportement harcelant et ce, même après l'avis d'inaptitude rendu par la CPAM de Maine et Loire. Elle expose que celui-ci n'a eu de cesse de lui envoyer des courriers au contenu très agressif et dans tous les cas, nullement nécessaires à la poursuite de l'activité du laboratoire, maintenant ainsi une pression sur elle qui a contribué à l'aggravation de la dégradation de son état de santé.
Enfin, elle affirme que son employeur a procédé avec retard au paiement de son salaire et de ses indemnités de prévoyance et lui a délivré irrégulièrement ses bulletins de salaire et justificatifs de prévoyance.
Elle considère que l'ensemble de ces faits caractérisent le harcèlement moral dont elle a été victime lequel est à l'origine de son inaptitude et conclut en conséquence principalement à la nullité du licenciement.
Il convient d'examiner successivement les divers faits invoqués au titre du harcèlement moral par Mme [F] étant au préalable spécifié que l'intéressée verse aux débats les éléments médicaux suivants': les justificatifs médicaux attestant de ses arrêts de travail jusqu'à la rupture de son contrat de travail'; l'avis d'inaptitude établi le 28 août 2018 par le médecin du travail au terme duquel elle indique que «tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi»'; la décision de la CPAM de Maine et Loire prenant en charge le syndrome anxio-dépressif au titre de la législation sur les maladies professionnelles, les ordonnances par lesquelles lui ont été prescrits des anti-dépresseurs et des anxiolytiques, et les comptes rendus de la consultation du service Pathologies Professionnelles du CHU d'[Localité 4].
1 'S'agissant du retrait d'une partie de ses attributions
Pour justifier de l'exercice des missions administratives et comptables qu'elle revendique, Mme [F] produit':
* l'attestation de Madame [R] [U], assistante dentaire, laquelle indique que Mme [F] gérait «la partie administrative, facturation etc.' de manière très professionnelle avec attention, disponibilité et écoute»,
* l'attestation du Docteur [P] [G], chirurgien-dentiste et client du Laboratoire Maine Anjou, lequel certifie que «Mme [F] s'occupait des livraisons et de la facturation avec efficacité et amabilité»,
* l'attestation du Docteur [K] [T], chirurgien-dentiste et client du laboratoire Maine Anjou, lequel atteste que «Mme [F] a été son interlocutrice unique au sein du laboratoire [D] pour toutes les questions liées à la facturation et comptabilité. Elle assure aussi la plupart des livraisons exceptionnelles au cabinet de Feneu»,
* l'attestation de M. [W] [HX], ancien salarié du cabinet d'expertise comptable SOREGOR entre 1998 et 2019, cabinet dont le Laboratoire Maine Anjou était client, lequel déclare': «La mission du cabinet allait du suivi de la comptabilité à l'établissement du bilan. Pour mener à bien la mission, l'interlocuteur privilégié au sein de la société était Madame [V] [F], responsable administratif de la société (organisation, comptabilité, trésorerie, facturation, relance, social'). Tous les mois, elle déposait les documents au cabinet comptable et un point d'étape était réalisé avec elle et M. [D] mensuellement. Il n'y a jamais eu de problème particulier sur son travail. C'était bien organisé. Elle suivait très bien le dossier, les documents étaient toujours donnés en temps et en heure. Elle nous apportait tous les justificatifs nécessaires au bon déroulement de notre mission. Elle connaissait parfaitement le fonctionnement de l'entreprise du fait de son poste. C'était une personne de confiance, exécutant très bien son travail et qui avait conscience de la responsabilité que lui confiait M. [D]»,
* l'attestation de M. [M] [D], ancien Président du laboratoire [D] devenu le Laboratoire Maine Anjou, lequel «certifie avoir confié à partir de 1997 à Madame [F] [V] des responsabilités détachées de secrétariat comptable qui consistaient à':
- saisir des bons de livraison de prothèses dentaires,
- établir toutes les facturations des clients en fin de mois,
- acheminer et encaisser toutes les factures,
- suivre et effectuer la comptabilité de la société sur le cahier comptable,
- effectuer les virements et règlements par Internet,
- inscrire les annotations sur les relevés de banque pour les transmettre à SOREGOR,
- réceptionner les factures des fournisseurs et les régler,
- établir des correspondances et des mails pour le laboratoire,
- préparer la navette pour l'élaboration des salaires des employés et les transmettre au service social,
- télédéclarer l'URSSAF et les taxes sur les salaires,
- assurer la liaison avec la banque et le responsable du compte,
- aller aux convocations de M. [HX] (comptable de SOREGOR) responsable des comptes de la société pour valider la comptabilité des mois précédents,
- lors du rachat du laboratoire [D], répondre et échanger par mails à toutes les questions de l'acquéreur M. [N] au sujet de documents comptables manquants ou à toutes autres questions,
toutes les tâches précédemment énumérées ont toujours été effectuées avec beaucoup de professionnalisme et de sérieux. C'est pourquoi j'avais entièrement confiance en Madame [F] qui a toujours accompli un travail exemplaire.»,
* l'audit réalisé le 15 et 16 mai 2014 par M [H] [N], repreneur avant le rachat du laboratoire.
Dans le rapport d'audit que M. [H] [N] a rédigé le 25 mai 2014, il mentionne :
* en page 3 dans la rubrique « Comptabilité clients » : « le laboratoire utilise un logiciel professionnel Prothésis (IPDL) pour gérer l'ensemble de la facturation (du bon de commande au bon de livraison). La facturation se fait principalement au mois. Chaque atelier rédige ses bons de livraison, sauf le département céramique (rédaction par Madame [F]). [']».
* en page 3 dans la rubrique « Procédures»': «Mme [F]'regroupe les différents documents comptables (factures clients, factures fournisseurs, extraits de compte bancaire et dépose le dossier chaque mois chez Soregor pour saisie (avec le logiciel Adventi compta)»,
* en page 4 dans la rubrique « Facilités bancaires, trésorerie'»': «Le laboratoire [D] avait besoin d'un prêt de trésorerie de 70'000 € en permanence. Après consultation des relevés bancaires sur deux ans, un constat s'impose : les dépenses et les achats s'équilibrent toujours, tout en faisant apparaître de façon récurrente un découvert de 70'000 €. Mme [F] qui gère la trésorerie au quotidien confirme cette façon de faire»,
* en page 8 dans la rubrique «Gestion de la production» : «le circuit d'une commande à la livraison : empreinte (dentiste) - assistante dentaire (réalisation d'une fiche avec double)- communication téléphonique avec le laboratoire pour informer du travail récupérer (réception appel au standard téléphonique (Madame [RL] [Y] ou directement sur le téléphone portable des coursiers) - récupération des empreintes par coursier - stockage dans des boîtes - tampon « arrivée » sur bon - répartition du travail - travail - bon de livraison - saisie informatique par Mme [F] avec le logiciel Prothésis (facturation et traçabilité)'- livraison chez le dentiste via coursier»,
* en page 14 dans la rubrique «CONCLUSION»': «le travail d'audit s'est déroulé de façon optimale grâce à la préparation des entretiens en amont (réalisation des photocopies des principaux documents par Mme [F]) et surtout grâce à la sincérité du discours de Mme [F] et de M. [D]. Chaque sujet prévu dans le plan d'enquête a été traité en fonction des connaissances des hommes et des autres, sans aucun tabou, sans langue de bois'».
Ainsi, il apparaît que les éléments produits par Mme [F] établissent qu'elle exerçait, en plus de ses fonctions de coursière pour lesquelles elle a été recrutée le 1er octobre 1992 dans le cadre d'un contrat de travail verbal, des missions administratives et comptables lesquelles lui été retirées par M. [N].
Partant, le premier grief tenant au retrait d'une partie de ses attributions est matériellement établi étant précisé que Mme [F] ne justifie cependant pas avoir subi une réduction de son temps de travail ayant généré une diminution de sa rémunération.
2 ' S'agissant de l'incident du 5 février 2018
Pour en justifier, Mme [F] produit la main courante qu'elle a déposée le mercredi 21 février 2018 auprès de la brigade territoriale de Beaupréau en Mauge, une copie du courrier qu'elle a adressé le 21 février 2018 à la DIRECCTE et une copie de la lettre en date du 3 mai 2018 qu'elle a envoyée à M. [N] en réponse à la notification d'un avertissement, lettre elle-même adressée en copie à la DIRECCTE.
Dans chacun de ces trois documents, elle déclare que le 5 février 2018, M. [N] l'a convoquée verbalement sans qu'elle en connaisse la raison. Lors de cet entretien, il lui a expliqué que l'ancien Président, M. [D], était à l'origine des difficultés financières rencontrées par la société depuis septembre 2017 et qu'il avait «'besoin d'entre 10'000 et 15 000 € pour payer ses factures fournisseurs». Il lui a demandé de réfléchir «'à une façon de faire payer son ancien employeur». Ne partageant pas son point de vue, elle a refusé de faire droit à sa demande. M. [N] l'a alors menacée en lui disant que s'il ne parvenait pas à récupérer cette somme, il devrait procéder à des licenciements voire déposer le bilan sur un ton agressif. Elle affirme avoir pris cette menace de licenciement pour elle et déclare qu'à compter de cette entrevue, M. [N] est devenu agressif à son égard tant dans ses paroles que dans son attitude.
La cour considère que ses seules déclarations en l'absence d'autres éléments probants résultant notamment de témoignages circonstanciés et concordants de collègues, sont insuffisantes à établir la matérialité de ce fait.
3 ' S'agissant de l'incident du 16 février 2018 ayant donné lieu à avertissement
Pour en justifier, Mme [F] se fonde sur la copie du courrier qu'elle a adressé le 21 février 2018 à la DIRECCTE, sur l'avertissement qu'elle a reçu de son employeur le 17 mars 2018 dont elle a contesté le bien-fondé par correspondance du 3 mai 2018 adressée en copie à la DIRECCTE ainsi que sur la pièce adverse n° 11 par laquelle M. [H] [N] a avisé les dentistes du changement de transporteur à compter du 15 février 2018.
Au motif qu'elle aurait eu un comportement inadapté au sein de l'entreprise le 15 février 2018, M. [H] [N] lui a adressé un avertissement rédigé en ces termes reproduits ci-après in extenso :
«Madame,
Le jeudi 15 février 2018, vous avez eu un comportement tout à fait inadapté au sein de l'entreprise, et pour lequel, je souhaite vous faire part de mon plus vif mécontentement.
En effet, alors que se tenait dans nos locaux une formation réunissant une grande partie du personnel et des prestataires externes, vous avez de manière injustifiée, provoquer un esclandre pendant une dizaine de minutes, venant ainsi perturber le programme d'enseignement et nuire à l'image de notre entreprise tant en interne que vis-à-vis des intervenants extérieurs.
Ainsi par des cris et des pleurs (souligné par l'employeur lui-même) vous avez souhaité mettre en exergue l'inconfort et la pression que vous prétendez subir depuis le matin et qui semblait lié à ma décision de changer de prestataire de services pour les livraisons des travaux réalisés par notre laboratoire vers nos clients, chirurgiens-dentistes.
Votre réaction a été tout à fait disproportionnée puisque cette modification n'impacte pas directement votre mission de coursière en charge de nos clients installés sur l'agglomération angevine (souligné par l'employeur lui-même), et que le prestataire, quant à lui, intervient justement chez tous les autres clients du secteur rural éloigné.
Alors que deux clients se plaignaient de retard de livraison lié au rodage de la procédure, vous avez réagi de façon agressive, en augmentant et en partageant auprès de l'équipe un stress et des tensions sur lesquels personne ne pouvait agir.
Je souhaite vous faire comprendre que je n'accepterai pas une seconde fois ce type de réaction, et que cet incident m'incite d'ailleurs à réfléchir sur la qualité du contact et du relationnel que vous pourriez entretenir au contact direct des dentistes ou de leurs assistantes, lors de vos tournées journalières. Je serai à partir d'aujourd'hui très vigilant à cet égard, car tous les efforts et les investissements que notre entreprise développe pour se maintenir ne doivent pas être mis en péril par des comportements individuels inopportuns et nous devons répondre avec égard et courtoisie aux besoins et demandes de nos clients.
Je profite de cette mise au point pour vous demander d'accepter également l'idée que vous n'êtes pas décisionnaire dans l'entreprise, et que vous ne devez pas adopter une attitude renfrognée à la moindre contrariété. L'entreprise compte une équipe de 14 personnes qui doivent se respecter et 'uvrer ensemble sans privilégier constamment l'intérêt et le confort personnel comme à l'époque où l'entreprise était gérée par M. [M] [D].
Nota bene : pouvez-vous me faire parvenir SDP, dans les meilleurs délais, la clé de la boîte aux lettres du laboratoire ainsi que la clé de l'armoire à fournitures afin de les transmettre à la personne qui occupe votre poste pendant votre arrêt maladie.
Signature de M. [H] [N], président de la SAS Laboratoire Maine Anjou».
Contestant le bien-fondé de l'avertissement reçu le 14 mars 2018, Mme [F] y a répondu par une correspondance du 3 mai 2018 rédigée en ces termes : «Monsieur,
[']
Le vendredi 16 février 2018 (et non le jeudi 15 février 2018 comme vous l'écrivez dans votre courrier d'avertissement), voilà ce qui s'est effectivement passé :
Quand j'ai pris mon poste à 9h30, c'était la panique au laboratoire car le changement de société de course extérieure (TCS) s'était mal passé dans la nuit.
Vous deviez donc gérer les appels des clients mécontents et rappeler la société TCS pour avoir des explications.
Contrairement à ce que vous avez indiqué dans la lettre d'avertissement, les soucis de livraison liés à votre décision de changer de prestataire ne m'ont pas mis sous pression car ce jour-là, c'est VOUS (mentionnée ainsi par la salariée) qui avez assumé tous les appels de clients mécontents, sauf un appel : celui de l'assistante du Docteur [A] que j'ai pris.
Elle appelait pour demander des informations sur la nouvelle organisation et surtout savoir à quelle heure étaient livrés les travaux.
Ne connaissant pas cette information puisque c'est vous qui avez géré le contrat avec cette nouvelle société de course, je me suis tournée vers vous pour vous poser la question et là, vous vous êtes mis à me hurler dessus avec un ton agressif et menaçant.
Je vous ai répondu que je ne faisais que mon travail : répondre à un client et que vous ne pouviez pas me reprocher de faire mon travail consciencieusement.
Vous vous êtes alors remis à me crier dessus tout en vous approchant de moi.
J'ai cru, un moment, que vous alliez me frapper, j'ai eu la peur de ma vie. Vous m'avez crié à la figure : «vous savez très bien à quelle heure sont livrés les travaux puisque vous étiez avec moi pour gérer le contrat». 'Vous saviez très bien qu'ADN (ancienne société) aller me faire des crasses» (ou autre mot, je ne sais plus).
Ce qui est faux : vous avez géré le contrat tout seul.
J'étais paniquée par votre violence, complètement affolée. Je pleurais.
[']
Toujours dans une furie incommensurable vous m'avez dit : «rentrez chez vous je n'en resterai pas là».
Je ne suis pas partie, je suis professionnelle avant tout mais inutile de vous dire que je n'étais pas bien du tout, j'ai cru que mon c'ur allait lâcher (je suis soignée pour d'hypertension). J'ai continué ma journée entre larmes et peur avec la hantise que vous ne reveniez à la charge.
La pression que j'ai subie ce jour-là en particulier n'a rien à voir avec le changement de prestataire mais est bien due à votre attitude. [']».
La lettre d'avertissement, non datée et ne comportant de surcroît aucune formule de politesse, ainsi que la réponse apportée en retour par Mme [F], démontrent qu'une altercation a bien eu lieu entre les parties en lien avec le changement de prestataire de service assurant la livraison des empreintes et des prothèses dentaires, celle-ci ne pouvant être intervenue au regard de la date de la modification opérée que le 16 février et non le 15 février 2018 comme le soutient à tort l'employeur. Par ailleurs, il est établi par les divers éléments médicaux fournis aux débats que suite à cet incident, Mme [F] a été placée en arrêt de travail à compter du 22 février 2018 et n'a jamais repris ses fonctions.
Partant, la matérialité de cette altercation est suffisamment établie.
4 - S'agissant du comportement harcelant de l'employeur pendant la suspension du contrat de travail
Pour en justifier, Mme [F] verse aux débats':
* le courrier de son employeur reçu le 14 mars 2018 précédemment détaillé et par lequel il lui notifie un avertissement un mois après les faits incriminés tout en lui réclamant la clé de la boîte aux lettres et de l'armoire à fourniture';
* le courrier de son employeur reçu le 17 mars 2018 par lequel il lui notifie un changement de ses horaires de travail et lui demande de lui en faire retour. Il l'informe également avoir défini une nouvelle procédure à son poste de travail qui intègre des critères de qualité qu'elle devra mettre en 'uvre dès son retour étant observé que cette nouvelle procédure et ces nouveaux critères de qualité ne sont pas précisés.
Ainsi, ces nouveaux horaires sont les suivants :
- lundi : de 9 heures à 12 heures et de 13 heures à 20 heures,
- mardi : de 15 heures à 20 heures,
- mercredi : de 9 heures à 12 heures et de 13 heures à 20 heures,
- vendredi : de 9 heures à 12 heures et de 13 heures à 20 heures
* le courrier du 19 juillet 2018 par lequel M. [N] indique à Mme [F] que': «c'est avec stupéfaction que nous avons pris connaissance de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle qui nous a été adressée par la CPAM de Maine et Loire. ['] Nous comprenons mieux les raisons pour lesquelles vous nous avez adressé le 3 mai 2018 un courrier comportant des accusations totalement calomnieuses que nous tenons à réfuter. ['] Les griefs formulés de façon totalement artificielle dans le but manifeste de tenter de réclamer des sommes parfaitement injustifiées appellent [des observations de notre part]. ['] Vos déclarations laissent songeur puisque nous avons pris connaissance d'une attestation communiquée par le conseil de M. [D] pièce 37 vous avez établie le 3 mars 18 dans laquelle vous usez d'un vocable calomnieux, diffamatoire et insultant»';
* le courrier de son employeur en date du 24 juillet 2018 libellé comme suit': «Madame, Je vous prie de trouver en pièce jointe, une note de service individuelle relative à vos nouveaux horaires de travail.
En effet, d'importantes modifications ont été apportées dans l'organisation du travail eu égard à votre absence de plus de cinq mois, et il convient désormais de se plier aux procédures opérationnelles, qui impactent les missions des autres collaborateurs de l'entreprise.
En ce qui concerne les congés, et comme pour l'ensemble des salariés, je vous demande également de bien vouloir programmer trois semaines de congés avant fin septembre 2018 et de m'en communiquer les dates.
Je vous transmets, Madame, mes sincères salutations».
Ainsi, ses horaires de travail à compter du 27 août 2018 suivant les suivants :
- lundi : de 12 heures à 19h30, (7h30 de présence),
- mardi : de 12 heures à 19h30, (7h30 de présence),
- mercredi : de 12 heures à 19h30, (7h30 de présence),
- jeudi : de 12 heures à 19h30, (7h30 de présence),
- vendredi : de 12 heures à 19h30, (7h30 de présence),
* le courrier du 3 août 2018 par lequel M. [N] indique à Mme [F] que son «courrier du 24 juillet ne fait état d'aucun grief» à son encontre, celui-ci déclarant «avoir simplement pris la peine de lui expliquer les raisons qui l'obligent à revoir les horaires de travail» tout en lui demandant «qu'il convient d'admettre les réelles motivations du changement annoncé'» et se décrit comme «étonné de devoir justifier à ce point» pour la convaincre,
* le courrier du 12 octobre 2018 auquel était annexé le bulletin de salaire du mois de septembre 2018 et par lequel M. [H] [N] lui « demande de bien vouloir calmer son incessante impatience' nous ne sommes que le 12 octobre et votre virement de salaire a bien été fait sur votre compte en date du 9. Il n'y a aucun préjudice à la situation' En ce qui concerne votre bulletin du mois d'août, là encore je vous prierais de bien vouloir calmer votre précipitation ! En effet, je prends connaissance de la copie d'un mail du 13 septembre dernier et je constate que vous avez fait une erreur de saisie dans l'adresse du destinataire. Je n'ai donc jamais reçu cette correspondance électronique' Par contre, vous, vous avez dû être destinataire d'un message de non délivrance' Quoi qu'il en soit je viens de transmettre votre dossier auprès de mon comptable pour vérification et modification le cas échéant. J'espère que vous voudrez bien attendre son retour avant une future missive. Je profite de ce courrier pour vous interroger sur les revenus que vous avez tirés de la vente du matériel récupéré au moment du déménagement de l'entreprise fin décembre 2017. En effet, je dois pour répondre aux obligations fiscales, déclarer le montant des dons effectués l'année passée, par l'entreprise vers des tiers. ['] Je terminerai cette correspondance en vous faisant part également du regret que j'ai, à lire sans arrêt votre ton accusateur. Au sein de la société Laboratoire Maine Anjou, personne ne souhaite, ni n'a le temps de porter atteinte à votre intégrité. Vous avez mené toutes les actions et les recours possibles pour rompre notre collaboration, et je pense qu'il est temps désormais de stopper votre discours paranoïaque. Salutations distinguées».
* le courrier de son employeur du 19 novembre 2018 rédigé comme suit : «Madame, Votre dernière correspondance me montre une nouvelle fois votre état d'esprit provocateur et propice à l'avilissement de la situation. ['] Votre comportement et vos dires sont grotesques, à l'image de toutes les inventions que vous écrivez depuis huit mois, et qui vous ont permis de cesser de travailler sans démissionner, dans le seul but de quitter l'entreprise avec une prime de licenciement en adéquation avec vos 25 années d'ancienneté. Sur ce sujet, je vous précise que pour le moment, je ne peux souscrire à votre objectif tout simplement parce que la trésorerie de l'entreprise ne permet pas de couvrir en une seule fois, la forte dépense induite par votre licenciement. Je reste toutefois ouvert à la mise en place d'un échéancier. Je termine ce courrier en vous précisant que dorénavant, je ne répondrai plus à vos allégations. Vous inventez sans cesse de nouveaux arguments tout à fait déplacés et en dehors de toute réalité. Votre discours montre que vous ne respectez aucune limite dans le mensonge tant votre objectif de nuire à l'entreprise est démesuré lui aussi ! Salutations.»
S'il est normal que M. [N] apporte une réponse aux courriers de Mme [F], encore convient-il que sa réponse soit factuelle et donnée sur un ton neutre et respectueux. Or, les éléments précités démontrent que les courriers qui lui a adressés sont dépourvus de formule de politesse, contiennent des propos irrévérencieux et des qualificatifs outrageants voire dédaigneux.
Partant, la matérialité du grief invoqué est suffisamment établie.
5 ' S'agissant du retard dans le paiement de la rémunération (salaire, indemnités de prévoyance) et la délivrance des bulletins de salaire et justificatifs de prévoyance
Pour en justifier, Mme [F] verse aux débats':
* les lettres de relance qu'elle a adressées à son employeur respectivement'les 28 juin 2018, 19 juillet 2018, 10 septembre 2018 et 9 octobre 2018 afin de percevoir son salaire, ses indemnités de prévoyance, ses bulletins de salaire et les justificatifs de prévoyance,
* ses relevés bancaires et ses justificatifs prévoyance dont l'étude comparative révèle qu'elle a obtenu le 10 juillet 2018, le versement des indemnités de prévoyance pour la période du 26 mars au 8 juin 2018'; le 10 septembre 2018, les indemnités pour la période du 9 juin au 19 juillet 2018'; le 9 octobre 2018, les indemnités pour la période du 20 juillet au 27 août 2018,
* ses bulletins de salaire et ses relevés bancaires dont l'examen comparatif révèle que Mme [F] a perçu son salaire de façon très irrégulière et à des dates ne satisfaisant pas aux dispositions légales de l'article L3242-1 du code du travail, le paiement de la rémunération n'étant pas toujours effectué une fois par mois.
Partant, l'ensemble de ces éléments démontrent que le grief allégué est établi.
Ainsi, le retrait de ses missions administratives et comptables, l'altercation du 16 février 2018 avec M. [H] [N], les courriers de son employeur au ton agressif et irrévérencieux, les modifications d'horaires de travail décidées durant son arrêt de travail, le paiement irrégulier de ses salaires et de ses indemnités de prévoyance, la délivrance tardive des bulletins de salaire et des justificatifs prévoyance, matériellement établis, pris dans leur ensemble et au vu des pièces médicales dont il ressort que Mme [F] a souffert d'un syndrome anxio-dépressif et n'a pas repris son travail du 22 février 2018 jusqu'à l'avis d'inaptitude du médecin du travail du 28 août 2018, inaptitude reconnue par décision de la CPAM de Maine et Loire du 11 juillet 2019, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral.
Dès lors, il convient d'examiner si l'employeur démontre que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement moral et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.
Maître [S], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Laboratoire Maine Anjou, conteste tout fait de harcèlement moral à l'encontre de Mme [F]. Il prétend que l'intimée ne rapporte pas la preuve d'agissements de l'employeur susceptibles de pouvoir être apparentés à du harcèlement moral et susceptibles d'être en lien avec son inaptitude médicale.
Se fondant sur le cadre contractuel et la définition conventionnelle du poste revendiqué, il considère que Mme [F] n'a jamais occupé le poste de secrétaire administratif. ' aide comptable et encore moins celui de comptable. Il soutient que les tâches ponctuelles qui ont pu lui être confiées ont conduit à une succession d'erreurs graves ayant provoqué un redressement URSSAF.
Relativement à l'incident du 5 février 2018, il soutient que Mme [F] se plaît à travestir les faits qu'elle rapporte et se cantonne à verser aux débats des preuves faites à elle-même pour un fait unique ne pouvant caractériser du harcèlement moral.
Il estime que l'avertissement adressé le 13 mars 2018 à Mme [F], et dont elle ne sollicite pas l'annulation, est parfaitement justifié par le comportement inapproprié qu'elle a adopté.
Il dénie tout fait de harcèlement moral durant la suspension du contrat de travail de Mme [F] rappelant que durant cette période, l'employeur dispose de certaines latitudes dont celles de demander des renseignements purement professionnels au salarié en arrêt maladie nécessaires à la poursuite de l'activité de l'entreprise et d'obtenir la restitution des outils professionnels lui appartenant.
Enfin, il prétend que Mme [F] prête à l'employeur une réticence volontaire à lui délivrer avec retard ses salaires, ses indemnités de prévoyance ainsi que ses bulletins de salaire et justificatifs de prévoyance que la réalité dément. Il fait valoir que les courriers en réponse du Laboratoire Maine Anjou démontrent que l'employeur a été acculé à reprendre systématiquement la version déformée de la salariée pour retracer de façon neutre l'historique des faits.
Le CGEA de [Localité 3] fait siennes les observations de Maître [S].
Le grief tiré de l'incident du 5 février 2018 n'ayant pas été précédemment retenu, seuls seront abordés ceux considérés comme matériellement établis par la cour.
1 ' S'agissant du retrait d'une partie de ses attributions
Maître [S] communique':
* la page 6/9 du rapport de l'URSSAF (pièce n°12 composée de la page 6 et 8 dudit rapport) dont il ressort «qu'il a été relevé en comptabilité compte «606801 produits d'entretien» différentes écritures intitulées «[F] frais». Ces opérations correspondent à des remboursements forfaitaires alloués à Mme [F] pour des lessives. Aucun justificatif n'ayant été transmis, les sommes allouées ont été réintégrées dans l'assiette des cotisations et contributions, soit :
2014': 294 €
2015 : 156 €.
Ces pratiques ont cessé avec le nouveau dirigeant.
Soit les régularisations suivantes :» lesquelles, pour les seuls frais professionnels non justifiés de Mme [F], ne peuvent être appréhendées en raison du défaut de production du rapport de l'URSSAF dans son entièreté';
* la page 8/9 du même rapport (pièce n°12 composée de la page 6 et 8 dudit rapport) dont il ressort que «lors de l'examen de la comptabilité, il a été relevé de nombreuses écritures intitulées indemnités kilométriques. L'examen des pièces justificatives fournies ne permet de justifier de la réalité des déplacements effectués. Il en résulte que les indemnités allouées doivent être incluses dans l'assiette des cotisations et contributions. La régularisation est effectuée selon le tableau joint en annexe. Il est à noter que la pratique a cessé avec le nouveau dirigeant, M. [N]. Soit les régularisations suivantes : pour les cotisations et contributions recouvrées par les URSSAF d'un montant de 10'043 €.
La vérification entraîne un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance-chômage et d'AGS d'un montant total de 11'246 €».
* la copie du recours qu'il a exercé le 1er septembre 2019 auprès de la CPAM de Maine et Loire suite à la notification de l'avis CRRMP reconnaissant l'origine professionnelle du syndrome anxio-dépressif présenté par Mme [F] dans lequel il mentionne':
- en page 1, que «Mme [F] a été recrutée au sein de l'entreprise par [M] [D] (gérant), le 1er octobre 1992, en qualité de «femme de ménage». Pour les besoins de l'entreprise et eu égard au manque de disponibilité du gérant pour assurer les livraisons, elle a évolué sur un poste de coursière. Au fur et à mesure de sa collaboration avec M. [D], elle a pris en charge un certain nombre de tâches administratives. Telle était sa situation au moment du rachat de l'entreprise le 30 juin 2015»
- en page 2 que lorsqu'il «'a pris les dossiers en cours dès son arrivée, [il] a immédiatement pointé de graves irrégularités dans la gestion des dossiers du personnel, de la comptabilité et des relations fournisseurs. [Il a] interrogé Mme [F], qui, face à la situation, a reconnu participer à une organisation douteuse pendant de nombreuses années aux côtés de son prédécesseur. [Il a] décidé de ne pas lui adresser d'avertissement ni de faute professionnelle, mais [a] recadré la situation en lui demandant de se cantonner à son poste de coursière».
Au titre des fautes constatées qu'il lui impute, il invoque la production de faux justificatifs de frais de déplacement, des frais professionnels indus, du travail illégal, des primes indues, des avantages en nature indus, un assèchement de la trésorerie de l'entreprise et des erreurs diverses dans la gestion des dossiers (apprentissage, taxe sur les véhicules).
En l'occurrence, il est constant et non contesté que Mme [F] a été embauchée en octobre 1992 selon contrat verbal en qualité de femme de ménage et qu'elle a occupé, à partir de juin 1993, les fonctions de coursière comme le démontrent ses bulletins de salaire.
Ses fonctions de coursière correspondent à la définition conventionnelle suivante: «Personnel de service': Employé n'ayant pas de fonction directe de production dans le laboratoire, tel que coursiers, personnel d'entretien'».
Mme [F] revendique l'exercice de missions administratives et comptables lesquelles relèvent de la définition conventionnelle suivante : «Secrétaire administratif. - Aide comptable : Salarié employé à des tâches de réception, de facturation et à des travaux administratifs simples et/ou salarié qui exécute tous les travaux de comptabilité courant de laboratoire, à l'exception des centralisations des journaux et de l'établissement des bilans'» et non de la définition conventionnelle de comptable à savoir «Comptable': Salarié qui enregistre et traite des informations relatives aux mouvements financiers de l'entreprise. Rencontre en termes monétaires financiers de l'activité économique de l'entreprise vis-à-vis de la réglementation fiscale de la législation sociale du travail (tenue des livres de paix, journal, comptes d'exploitation)» comme le soutiennent à tort les appelants, s'agissant d'une fonction non invoquée par Mme [F].
Les éléments précédemment détaillés, produits tant par la salariée que par l'employeur, démontrent que Mme [F] assumait, en plus de sa fonction de coursière, des missions administratives et comptables telles que :
* la gestion de la trésorerie au quotidien,
* la gestion des documents comptables tels que les factures clients, factures fournisseurs, les extraits de compte bancaire ; elle servait d'interface avec le cabinet d'expertise comptable SOREGOR avec lequel M. [D], ancien gérant, avait conclu deux contrats: un contrat pour une mission comptable signé le 27 novembre 2007 et un contrat pour une mission sociale signé le 12 décembre 2013,
* la rédaction des bons de livraison du département céramique,
* la saisie informatique via le logiciel Prothésis (facturation et traçabilité) peu important que ses missions ne représentaient pas l'essentiel de son temps de travail.
En totale contradiction avec leur thèse selon laquelle Mme [F] n'aurait pas assumé lesdites missions, les appelants lui reprochent néanmoins d'avoir commis une succession d'erreurs graves ayant provoqué un redressement URSSAF pour légitimer leur retrait, M. [H] [N] reconnaissant avoir demandé à Mme [F] de se cantonner à ses fonctions de coursière dès sa reprise de la société.
Or, force est de constater que les appelants ne versent aux débats aucun document probant de nature à objectiver la réalité des agissements fautifs de Mme [F] à l'origine du redressement URSSAF du Laboratoire Maine Anjou étant observé que la page 6 et 8 du rapport de l'URSSAF fait référence seulement à une absence de production de justificatifs au titre des écritures en compte «606801» intitulées «[F] Frais» pour expliciter la réintégration dans l'assiette des cotisations et contributions des sommes de 294 et 156 euros au titre des années 2014 et 2015 et non à une interdiction de passer en comptabilité une telle écriture ainsi qu'à une absence de production de justificatifs au titre des indemnités kilométriques sans que l'URSSAF ne mette en cause Mme [F] et n'affirme qu'une passation d'écritures comptables au titre des frais kilométriques n'est pas autorisée. A cet égard, l'URSSAF, dans ses conclusions produites à l'audience du Pôle social du tribunal judiciaire d'Angers du 23 mars 2020 (pièce 13 de l'appelant), justifie le redressement opéré au titre des frais kilométriques par une absence de justificatifs probants, ledit redressement ne concernant pas exclusivement les frais kilométriques de Mme [F] mais également ceux de M [E], Mme [C], M. [J], M. [X] et M. [D]. Enfin, relativement aux fautes reprochées à Mme [F] par L. [N] dans son recours contre la décision de la CPAM de Maine et Loire pour justifier le retrait des missions administratives et comptables, la cour constate que les appelants ne fournissent aucun élément permettant d'imputer directement à Mme [F] les agissements allégués étant observé qu'ils s'abstiennent notamment de détailler les avantages en nature qu'elle aurait indûment perçus ainsi que les erreurs qu'elle aurait commises dans la gestion des dossiers.
Il s'ensuit que l'employeur échoue à justifier, par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, le retrait des missions administratives et comptables telles que définies conventionnellement exercées pendant 18 ans par Mme [F] qui en 23 ans d'exercice n'a jamais fait l'objet d'une sanction disciplinaire'; le fait que ces activités n'occupent pas l'essentiel de son temps de travail étant indifférent.
2 ' S'agissant de l'incident du 16 février 2018 ayant donné lieu à avertissement
Les appelants considèrent que la lettre d'avertissement envoyée le 13 mars 2018 dont les termes ont été précédemment reproduits, détaille avec précision le comportement inadapté adopté le 15 février 2018 par Mme [F] et justifiant une sanction.
Ils lui reprochent ainsi d'avoir lors d'une formation professionnelle se tenant dans les locaux du laboratoire, en présence de ses collègues et des intervenants extérieurs, «provoqué un esclandre pendant une dizaine de minutes»'«[perturbant] ainsi le programme d'enseignement en cours» ; d'avoir «par des cris et des pleurs» souhaité «mettre en exergue l'inconfort et la pression qu'elle prétendait subir depuis le matin et qui semblait liée à [sa] décision de changer de prestataire de services pour les livraisons des travaux réalisés par le laboratoire»'et «d'adopter une attitude renfrognée à la moindre contrariété».
Si les parties s'accordent sur l'existence d'un incident entre Mme [F] et M. [N] en lien avec les difficultés survenues lors du changement de la société de livraison des prothèses dentaires, elles divergent quant à sa date. M [N] soutient que l'incident a eu lieu le 15 février 2018 alors que Mme [F] prétend qu'il a eu lieu le 16 février 2028. Or, M. [N] ne verse aux débats aucuns éléments, pas même une facture acquittée, démontrant que la formation professionnelle alléguée s'est déroulée le 15 février 2018 dans les locaux du laboratoire. Aussi, l'incident n'a pu avoir lieu que le 26 février 2018 étant rappelé que le changement de prestataire a été effectué dans la nuit du 15 au 16 février de sorte que le retour d'expérience de cette modification ne pouvait avoir lieu que le matin du 16.
La cour constate, outre le fait que la réalité de la formation dispensée le 15 février 2018 n'est nullement établie, que les reproches formulés en termes très généraux ne sont pas confortés par la production de témoignages circonstanciés et concordants des autres salariés de l'entreprise et surtout par les témoignages des intervenants extérieurs.
Par ailleurs, la cour constate que M. [N] a attendu un mois, et donc le placement en arrêt maladie de Mme [F], pour lui adresser un avertissement visant à sanctionner son comportement ayant porté atteinte à l'image de son entreprise alors qu'au regard de la gravité alléguée, il aurait pu lui notifier dans la semaine suivant les faits invoqués, l'intimée ayant été placée en arrêt de travail seulement à compter du 22 février 2018, soit une semaine après les faits concernés.
La cour rappelle également que si M. [N] peut formuler des griefs à Mme [F] dans le cadre de son pouvoir disciplinaire, il ne saurait en toute hypothèse l'autoriser à utiliser un ton irrévérencieux à son égard quand bien même il serait censé s'inscrire en réciprocité de propos tenus par la salariée dont le caractère «'éminemment agressif'» n'est au demeurant pas avéré au cas présent, s'agissant simplement de propos traduisant sa souffrance psychologique. Il en effet particulièrement inutile pour M. [N], dans l'office de son pouvoir disciplinaire, de souligner dans la lettre d'avertissement à son employée le comportement qui a été le sien (en l'occurrence, «cris et pleurs»), la fonction exercée par elle (en l'occurrence, «votre mission de coursière en charge de nos clients installés dans l'agglomération angevine'») sauf à considérer que la finalité poursuivie est également autre.
Il résulte de ce qui précède que les appelants échouent à rapporter la preuve, par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, du bien-fondé de l'avertissement adressé à Mme [F] un mois plus tard après les faits invoqués, peu important le fait, au vu de la décision d'inaptitude au poste occupé au sein du Laboratoire Maine Anjou, qu'elle n'en a pas sollicité l'annulation.
3 - S'agissant du comportement harcelant de l'employeur pendant la suspension du contrat de travail
Les appelants contestent avoir envoyé à Mme [F] durant son arrêt de travail des courriers au contenu agressif soutenant qu'ils étaient nécessaires à la poursuite de l'activité du laboratoire. Ils soutiennent que le courrier du 14 mars 2018 constitue la notification de l'avertissement, que les courriers du 17 mars et 24 juillet ne concernent que des informations ayant trait au bon fonctionnement du service et que les courriers du 4 juillet, 3 août, 12 octobre et 19 novembre 2018 ne constituent que des réponses aux lettres que la salariée a adressées à son employeur durant son propre arrêt maladie en faisant usage à son encontre d'un ton éminemment agressif.
S'agissant de la lettre d'avertissement reçue le 14 mars 2018, la cour a précédemment considéré que le fait pour M. [N] de souligner certains termes ayant trait notamment à la fonction occupée par Mme [F] au sein du laboratoire ne s'inscrivait pas dans le cadre normal d'une relation de travail.
S'agissant du courrier du 17 mars 2018 précédemment détaillé, M. [N] notifie à Mme [F] un changement d'horaire. Si celui-ci indique dans sa correspondance «sur le même modèle que pour l'ensemble des salariés de l'entreprise qui ont dû adapter leurs horaires de travail, je vous communique en annexe une note de service individuelle relative au changement d'horaire vous concernant» force est de constater qu'il s'abstient de produire les notes de service individuelles des autres salariés lesquelles auraient permis de démontrer que Mme [F] n'était pas la seule personne concernée par ce nouveau dispositif horaire. Il s'abstient tout autant de présenter la «nouvelle procédure» qu'il a mis en 'uvre pour son «poste de travail» et de définir «les critères de qualités [qu'elle] devra mettre en 'uvre dès [son] retour'» ne permettant pas ainsi d'objectiver la nécessité d'une telle procédure. En réalité, ce courrier révèle à lui seul que les deux changements opérés par M. [N] ne sont pas nécessaires à la poursuite de l'activité du laboratoire, celle-ci se continuant en l'occurrence en l'absence de Mme [F] alors en arrêt de travail au moment de sa notification. Surtout, ce courrier, adressé une semaine avant le terme de l'arrêt de travail délivré le 22 février 2018 par le médecin traitant de Mme [F] démontre que la voie de la concertation et de l'explication préalable est exclue de l'approche managériale de M. [N] et qu'il n'envisage pas un accompagnement au changement. Il crée, en toute hypothèse, des conditions anxiogènes à la reprise du travail, Mme [F] ignorant tout des nouvelles procédures et critères de qualités qu'elle devra désormais mettre en place.
S'agissant du courrier du 24 juillet 2018, lui aussi reproduit dans un motif qui précède, M. [N] notifie à Mme [F] de nouveaux horaires de travail. Cette notification intervient 4 mois après le premier changement d'horaire et un mois après qu'il ait fait valoir ses observations à la CPAM de Maine et Loire sur la demande de Mme [F] de prise en charge au titre de la législation sur les maladies professionnelles du syndrome anxio-dépressif dont elle souffre. Il justifie ce nouveau changement d'horaires par «d'importantes modifications apportées dans l'organisation du travail eu égard à son absence de plus de cinq mois». Cependant, il s'abstient de fournir aux débats des éléments permettant d'objectiver ces importantes modifications apportées dans l'organisation du travail se contentant de les imputer à Mme [F] à qui il rappelle la durée de son absence, plus de cinq mois. Par ailleurs, il s'abstient également de définir les «procédures opérationnelles» auxquelles Mme [F] doit «désormais se plier» et pour lesquelles il n'invoque ni ne justifie d'une nécessité pour la poursuite de l'activité du laboratoire. Enfin, alors qu'au 24 juillet 2018, rien ne permettait d'envisager un retour de Mme [F] au sein du Laboratoire Maine Anjou, M. [N] exige d'elle qu'elle prenne trois semaines de congés avant fin septembre 2018 et de lui en communiquer les dates sans que cette exigence puisse être justifiée par la nécessité de lui rappeler qu'elle bénéficie de congés payés.
S'agissant des courriers du 4 juillet, 3 août,12 octobre et 19 novembre 2018 formulés en réponse aux demandes répétées de Mme [F] à son employeur aux fins de paiement des indemnités prévoyance, de reprise du paiement de son salaire suite à l'avis d'inaptitude et de délivrance de ses bulletins de salaire, leur ton général, fait de mises en accusation et de sous-entendus, ne correspond pas à celui habituellement utilisé dans un cadre normal de relations de travail tant ils sont teintés de violence et en toute hypothèse, irrespectueux. M. [N] ne peut ainsi valablement justifier les propos qu'il a tenus à Mme [F] notamment en ces termes': «je vous demande de bien vouloir calmer votre incessante impatience», «je vous prierais de bien vouloir calmer votre précipitation», «votre état d'esprit provocateur et propice à l'avilissement de la situation», «Votre comportement et vos dires sont grotesques, à l'image de toutes les inventions que vous écrivez depuis huit mois», «il est temps désormais de stopper votre discours paranoïaque», «Vous inventez sans cesse de nouveaux arguments tout à fait déplacés et en dehors de toute réalité. Votre discours montre que vous ne respectez aucune limite dans le mensonge tant votre objectif de nuire à l'entreprise est démesuré lui aussi !» par la teneur des courriers de Mme [F]. Il appartenait à M. [N] de répondre factuellement et respectueusement aux demandes formulées par Mme [F] au sujet du paiement de son salaire, de ses indemnités prévoyance et de ses bulletins de salaire.
Il résulte de ce qui précède que les appelants échouent à rapporter la preuve, par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, de la nécessité de l'envoi à Mme [F] de ces correspondances pour la poursuite de l'activité de l'entreprise.
4 ' S'agissant du retard dans le paiement de la rémunération (salaire, indemnités de prévoyance) et la délivrance des bulletins de salaire et justificatifs de prévoyance
Bien que les appelants, sur qui pèse la charge de la preuve, soutiennent que la réalité n'a rien à voir avec la situation que Mme [F] se plaît à déplorer et qui a été abordée dans les motifs qui précèdent, force est de constater qu'ils ne versent aux débats strictement aucun élément démontrant que son salaire a été payé à échéance régulière'; que le bulletin de salaire lui a été remis lors du paiement de son salaire conformément aux dispositions de l'article L. 3243-2 du code du travail'; que toutes les démarches ont été faites dans les temps auprès de l'organisme de prévoyance, AG2R La Mondiale, afin qu'elle puisse percevoir régulièrement les indemnités auxquelles elle avait droit.
Les appelants échouent donc à démontrer que le paiement tardif du salaire et des indemnités de prévoyance ainsi que la remise différée des bulletins de salaire et des justificatifs de prévoyance ne sont pas constitutifs de harcèlement moral et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.
En conséquence, la cour dira que le harcèlement moral de Mme [F] est caractérisé.
Sur l'origine professionnelle de l'inaptitude
Mme [F] considère que l'inaptitude à l'origine de son licenciement est la conséquence du harcèlement moral dont elle a été victime de la part de M. [N].
Sur le fondement des dispositions des articles L.1226-10 et suivants du code du travail, les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie. De plus, l'employeur doit avoir connaissance de cette origine professionnelle à la date de notification du licenciement.
Il est de principe que le droit de la sécurité sociale est autonome par rapport au droit du travail. L'application des dispositions protectrices des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance-maladie du lien de causalité entre l'accident du travail et l'inaptitude. Il appartient au juge du fond de procéder lui-même à la recherche de ce lien de causalité, la preuve de l'origine professionnelle de l'inaptitude incombant au salarié.
Le 22 février 2018, Mme [F] a été placée en arrêt maladie par son médecin traitant lequel lui a prescrit des antidépresseurs et des anxiolytiques. Son médecin traitant a régulièrement prolongé son arrêt de travail jusqu'à la décision d'inaptitude du médecin du travail en date du 28 août 2018, ce dernier considérant que «'tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé et que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi». Son médecin a poursuivi la prescription d'anti-dépresseurs et d'anxiolytiques jusqu'en août 2019 comme en témoignent les ordonnances médicales produites aux débats.
Sur préconisation de son médecin traitant, Mme [F] s'est rendue à la médecine du travail. Le 26 février 2018, le médecin du travail, le docteur [B] [I] décrit son état de santé comme suit : «[Mme [F] présente] actuellement une décompensation psychologique réactionnelle à une situation difficile au travail. Elle présente une anxiété, troubles du sommeil et ruminations anxieuses autour de son travail. Je souhaite la revoir (rendez-vous le 15 mars)».
Lors du rendez-vous du 15 mars 2018, le médecin du travail indique dans une correspondance à l'intention du médecin traitant : «[Mme [F] présente] une décompensation psychologique en lien avec le vécu traumatique d'une situation difficile au travail. Ce jour, elle présente une anxiété, angoisse et ruminations autour de son travail responsable de troubles du sommeil. Elle présente également une anhédonie et une perte de l'élan vital. Elle pleure et a des difficultés à s'exprimer. À ce jour, elle ne souhaite pas de traitement. Je souhaite adresser votre patiente à la consultation de souffrance du travail du CHU. J'ai également informé'Mme [F] de la mise en place d'une procédure d'inaptitude à la fin de son arrêt maladie et après la consultation de souffrance au travail ».
Sur préconisation du médecin du travail, Mme [F] a fait l'objet d'un suivi auprès du service pathologie professionnelle du CHU d'[Localité 4]. Dans une correspondance du 28 mai 2018 adressée au médecin du travail, le docteur [Z] [L] indique : «Mme [F] présente un syndrome anxiodépressif non stabilisé. J'ai tout lieu de penser qu'il y a des liens précis et concordants entre les conditions de travail et l'état de santé actuel de Mme [F] correspondant à un trouble de l'adaptation à un syndrome anxiodépressif caractérisé (F43-22) non stabilisé. Celui-ci, afin de prévenir l'aggravation des troubles, justifie la prolongation de l'arrêt travail. J'encourage Mme [F] à poursuivre le travail psychothérapique avec le docteur [O]. À la fin de l'arrêt de travail en cours (19 juillet 2018), il y a lieu d'envisager une inaptitude médicale définitive à tout poste dans l'entreprise. Il y aurait en effet un risque réel et sérieux pour la santé psychique de Mme [F] en cas de retour au travail dans les conditions ressenties et décrites. L'absence d'antécédents psychiatriques connus, le mode de survenue et l'évolution des troubles constatés, leur sévérité et leur durée, le retentissement sur la vie personnelle, familiale, sociale et professionnelle, leur lien apparaissant direct et essentiel avec cette situation de travail rendent légitime une demande de reconnaissance en maladie professionnelle si Mme [F] souhaite engager cette démarche».
Le 18 mai 2018, Mme [F] a présenté une demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de la caisse primaire d'assurance-maladie du Maine-et-Loire pour syndrome anxiodépressif réactionnel suite à chantage, harcèlement au travail.
Le 7 juin 2019, après avis favorable du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP), la CPAM de Maine et Loire notifie à Mme [F] sa décision de reconnaissance de maladie professionnelle. Le CRRMP motive sa décision comme suit': «compte tenu de la pathologie présentée par Mme [F], un syndrome dépressif ; de sa profession, coursière ; des éléments apportés au CRRMP qui montre que l'intéressé a été confrontée à des difficultés dans le cadre de son activité professionnelle; de l'absence, dans le dossier, d'éléments extra professionnels pouvant expliquer l'apparition du syndrome dépressif ; après avoir pris connaissance de l'avis du médecin du travail, le Comité établit une relation directe et essentielle entre la pathologie présentée par l'intéressé et son activité professionnelle» et fixe à au moins à 25 % le taux d'incapacité permanente prévisible.
Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que l'inaptitude de Mme [F] a un lien certain avec l'altération de son état de santé provoquées par les agissements fautifs de M. [H] [N], peu important en l'occurrence que la décision de la caisse primaire d'assurance-maladie de Maine-et-Loire reconnaissant le caractère professionnel de la maladie ait été déclarée inopposable à l'employeur par le Pôle social du tribunal judiciaire d'Angers le 11 avril 2022.
Aussi, la cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a dit que l'origine de l'inaptitude de Mme [F] est de nature professionnelle.
Sur la nullité du licenciement
Selon l'article L.1152-3 du code du travail, « toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L.1152-l et L.1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul'».
Il résulte de ces dispositions que le licenciement d'un salarié pour inaptitude médicalement constatée est nul lorsque cette inaptitude trouve sa cause directe et certaine dans des actes de harcèlement moral commis par l'employeur.
L'inaptitude de Mme [F] ayant pour origine le harcèlement moral dont elle a été victime de la part de M. [H] [N], son licenciement est conséquemment nul.
Partant, la cour infirmera le jugement déféré en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et, statuant à nouveau, dira que le licenciement de Mme [F] est nul.
Sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse
Compte-tenu du motif qui précède, il n'y a pas lieu de statuer sur ce chef de demande présenté à titre subsidiaire par Mme [F].
Sur le document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP)
Mme [F] sollicite la condamnation de son ancien employeur à des dommages et intérêts à hauteur de 1000 euros pour absence de DUERP jusqu'en 2018.
Les appelants concluent au rejet de cette demande faisant valoir qu'elle n'est pas fondée.
En vertu de l'article L.4121-1 du code du travail, l'employeur doit assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs par des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L.4161-1, par des actions d'information et de formation, et par la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes et met en 'uvre ces mesures sur le fondement des principes généraux de prévention définie par l'article L.4121-2.
En l'occurrence, s'il est constant et non contesté que la société Le Laboratoire Maine Anjou a établi un document unique d'évaluation des risques professionnels le 13 avril 2018 (pièce 15 de l'employeur), soit postérieurement à l'arrêt maladie initial de Mme [F] délivré le 22 février 2018, force est de constater cependant qu'elle ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité entre le défaut de DUERP et la dégradation de son état de santé.
En conséquence, la cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour absence de DUERP.
Sur les conséquences financières du licenciement nul
L'article L.1226-14 du code du travail dispose que «la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L.1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L.1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égal au double de l'indemnité prévue par l'article L.1234-9».
L'article L.1226-16 dudit code énonce que les indemnités prévues à l'article précité sont calculées sur la base du salaire moyen qui aurait été perçu par l'intéressé au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail provoqué par l'accident du travail ou la maladie professionnelle. Pour le calcul de ces indemnités, la notion de salaire est définie par le taux personnel, les primes, les avantages de toute nature, les indemnités et les gratifications qui composent le revenu.
Selon l'article L.1234-1 3°, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, à un préavis de deux mois.
L'article L.1226-17 du même code précise qu'en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, les dispositions relatives aux créances salariales mentionnées aux articles L.3253-15, L. 3253-19 à L.3253-21 du code du travail sont applicables au paiement de l'indemnité spéciale de licenciement et de l'indemnité compensatrice.
Sur l'indemnité compensatrice de préavis.
Mme [F] bénéficiait d'une ancienneté de 26 ans et 5 mois à la date de son licenciement. Le licenciement ayant été déclaré nul, elle peut prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis de deux mois sur la base d'un salaire mensuel brut de 1666,94 euros brut auquel s'ajoute 333,39 euros brut de prime d'ancienneté soit une somme globale de 2000,33 euros brut.
En conséquence, la cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a fixé au passif de la SAS Laboratoire Maine Anjou la somme de 4000,66 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis.
Sur l'indemnité spéciale de licenciement
L'indemnité de licenciement du salarié inapte en cas d'impossibilité de reclassement est égale au double de l'indemnité légale de licenciement, sauf dispositions conventionnelles plus favorables.
En l'occurrence, en dépit des dénégations de la SAS Laboratoire Maine Anjou et nonobstant le fait que la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle de Mme [F] par la CPAM de Maine et Loire lui ait été déclarée inopposable, il ressort des éléments du dossier qu'elle avait connaissance dès le 29 mai 2018, date à laquelle la CPAM de Maine et Loire a informé l'employeur d'une demande reconnaissance de maladie professionnelle par Mme [F], de l'origine professionnelle de son inaptitude.
Mme [F] bénéficiait d'une ancienneté de 26 ans et 7 mois au terme de son préavis. En application de l'article R.1234-2 du code de travail, l'indemnité spéciale de licenciement est calculée sur la base d'1/4 mois par année d'ancienneté pour les 10 premières années et 1/3 mois de salaire au-delà soit un total de 16'058,20 € soit une indemnité spéciale de licenciement doublée de 32'116,40 € de laquelle il convient de déduire la somme de 15'724,82 € déjà versée.
En conséquence, la cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a fixé au passif de la SAS Laboratoire Maine Anjou la somme de 16'391,58 € au titre de l'indemnité spéciale de licenciement.
Sur les dommages et intérêts pour licenciement nul.
En application de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, lorsque le juge constate que le licenciement est entaché de nullité pour des faits de harcèlement moral et que le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, il lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Au moment de son licenciement, Mme [F] avait une ancienneté de 26 ans et 5 mois et était âgée de 57 ans. Elle justifie travailler dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel (22 heures par semaine) depuis le 1er décembre 2020 moyennant une rémunération moindre que celle perçue au sein du Laboratoire Maine Anjou et fixée à la somme mensuelle de 967,64 euros brut à laquelle s'ajoute un complément de Pôle Emploi.
Au vu de ces éléments, la cour est en mesure d'évaluer son préjudice qui sera réparé par l'octroi de la somme de 37'000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.
En conséquence, la cour infirmera le jugement déféré en ce qu'il a alloué à Mme [F] une somme de 27'000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, statuant à nouveau, lui allouera la somme de 37'000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.
Sur le solde de congés payés
Se fondant sur les dispositions de l'article L. 3141-5 du code du travail et l'article 37 de la convention collective des prothésistes laboratoire de prothèse dentaire selon lesquelles sont considérées comme périodes de travail effectif pour le calcul de la durée de l'indemnité de congés payés les absences pour accident du travail ou maladie professionnelle dans la limite d'une durée ininterrompue d'un an, Mme [F] réclame la somme de 663,44 € bruts.
Au vu des éléments du dossier établissant le solde dû de congés à 9,95 jours et une rémunération de base de 2000,33 €, il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de ce chef et, statuant à nouveau, de fixer au passif de la SAS Laboratoire Maine Anjou la somme de 663,44 € bruts au titre du solde de congés payés.
Sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice moral
L'octroi de dommages et intérêts pour licenciement nul comme trouvant son origine dans un comportement constitutif de harcèlement moral et réparant la perte, illicite, de l'emploi, ne saurait faire obstacle à une demande distincte et à l'octroi de dommages intérêts pour harcèlement moral (Cass. Soc 30 novembre 2011 n° 11-10.527'; Cass. Soc 2 février 2017 n° 15-26.892'; Cass. Soc 1er juin 2023 n°21-23.438).
Les éléments médicaux versés aux débats permettent de mettre en évidence le suivi médical de Mme [F] sur plusieurs mois assuré à la fois par son médecin traitant, le médecin du travail, le psychiatre et le spécialiste du Service de Pathologie Professionnelle du CHU d'[Localité 4] ainsi que la lourdeur du traitement médical qu'elle a dû suivre pour soigner le syndrome anxio-dépressif dont elle souffrait en raison de la dégradation de ses conditions de travail par les agissements fautifs de son employeur. L'importance de sa souffrance psychique justifie l'octroi de dommages et intérêts à hauteur de 3'000 euros.
En conséquence, la cour infirmera le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et, statuant à nouveau, lui allouera la somme de 3'000 euros à ce titre.
Sur les dommages et intérêts pour refus abusif de mettre en 'uvre la procédure de licenciement pour inaptitude médicale
Mme [F] prétend que le Laboratoire Maine Anjou a attendu plus de six mois à compter de l'avis d'inaptitude du médecin du travail pour mettre en 'uvre la procédure de licenciement pour inaptitude dans le seul objectif de ne pas avoir à lui verser ses indemnités de rupture. Elle considère que cette inertie fautive est à l'origine d'un préjudice moral et psychologique, distinct de la perte injustifiée de son emploi, pour lequel elle sollicite une réparation à hauteur de 10'000 euros.
Les appelants estiment cette demande non fondée.
En l'occurrence, la chronologie des faits atteste que M. [N], président de la SAS Laboratoire Maine Anjou, a mis plusieurs mois avant d'engager la procédure de licenciement pour inaptitude médicale de Mme [F]. Pour autant, Mme [F] échoue à rapporter la preuve d'un préjudice moral et psychologique généré exclusivement par cette inertie et distinct du préjudice moral qu'il lui a été précédemment octroyé en raison des faits de harcèlement moral dont elle a été victime.
En conséquence, la cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [F] de ce chef de demande.
Sur les dommages et intérêts pour licenciement vexatoire
Mme [F] prétend que son employeur a adressé à au moins deux clients du Laboratoire Maine Anjou des courriers portant atteinte à son image et à sa réputation professionnelle et personnelle.
Les appelants s'opposent à cette demande la considérant non fondée.
Il est de jurisprudence constante (Cass. Soc 13 juin 2019 n°17-31.232) que le juge ne peut pas octroyer au salarié des dommages et intérêts en réparation du préjudice pour harcèlement moral et des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral inhérent aux circonstances vexatoires et déloyales de la rupture dans la mesure où ces deux sommes réparent le préjudice moral pour harcèlement moral.
Le principe de la réparation intégrale du préjudice ne permettant pas d'indemniser deux fois le même préjudice, Mme [F] sera déboutée de ce chef de demande.
Sur l'absence d'organisation des élections des représentants du personnel
Mme [F] explique que malgré sa demande formulée dès le dépôt de sa requête introductive d'instance, le Laboratoire Maine Anjou s'est toujours refusé de verser aux débats son registre du personnel et à justifier du respect de ses obligations en matière d'organisation des élections des représentants du personnel sur la période de 2014 à 2019 alors que la société comportait plus de 11 salariés.
En réplique, Maître [S], ès qualités, conclut au rejet de la demande faisant valoir que Mme [F] est défaillante dans la charge de la preuve qui lui incombe.
En application de l'article L.2312-2 du code du travail, la mise en place des délégués du personnel est obligatoire si l'effectif de 11 salariés et plus est atteint pendant 12 mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes.
L'article L.2316-1 du même code poursuit en énonçant que l'employeur qui ne respecte pas ses obligations est passible des peines prévues en matière de délit d'entrave.
Il est de jurisprudence constante que l'employeur qui n'a pas accompli, bien qu'il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d'institutions représentatives du personnel, sans qu'un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause nécessairement un préjudice aux salariés, privant ainsi d'une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts (Cass. Soc 17 mai 2011 n° 10-12.852'; Cass. Soc 17 octobre 2018 n° 17-14.392'; Cass. Soc 15 mai 2019 n° 17-22.224'; Cass. Soc 8 janvier 2020 n° 18-20.591).
En l'occurrence, la société Le Laboratoire Maine Anjou, qui refuse de verser aux débats le registre du personnel tout en ne contestant pas la présence de plus de 11 salariés au sein de la structure durant la période de 2014 à 2019, ne rapporte pas la preuve d'avoir accompli, bien qu'elle y soit légalement tenue, les diligences nécessaires à la mise en place d'institutions représentatives du personnel et d'avoir établi un procès-verbal de carence. Ce manquement fautif est nécessairement préjudiciable à chacun des salariés de la structure lesquels se retrouvent privés de la possibilité d'être représentés et défendus dans leurs intérêts pendant l'exécution de leur contrat de travail ainsi qu'au moment de la rupture.
En conséquence, la cour infirmera le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de ce chef et, statuant à nouveau, fixera au passif de la SAS Le Laboratoire Maine Anjou la somme de 500 euros en réparation du préjudice subi du fait du défaut de mise en 'uvre des élections des représentants du personnel.
Sur le remboursement de la complémentaire
Mme [F] explique que faute de paiement des cotisations par l'employeur, elle a été radiée de la complémentaire entreprise le 18 février 2019 sans en avoir été informée au préalable. En dépit de cette radiation, le Laboratoire Maine Anjou a continué de déduire de son salaire de février et mars 2019 sa part contributive mensuelle de 29,21 euros soit la somme globale de 58,42 euros.
Les appelants considèrent cette demande non fondée.
Indépendamment du fait que le Laboratoire Maine Anjou a délivré pas moins de quatre bulletins de salaire pour le mois de février 2019 avec des montants de rémunération à chaque fois différents, Mme [F] ne saurait réclamer le remboursement intégral de sa contribution à la complémentaire pour ce mois de référence, la radiation étant intervenue le 18 février 2019. Elle peut prétendre seulement à remboursement au prorata soit, en l'occurrence, la somme de 12,51 €.
Concernant le paiement indû de sa contribution à la complémentaire pour le mois de mars 2019, l'analyse du bulletin de salaire du mois concerné en atteste la réalité.
En conséquence, la cour infirmera le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande au titre du remboursement de sa contribution à la complémentaire pour le mois de février 2019 et a fixé au passif de la SAS Le Laboratoire Maine Anjou la somme de de 29,21 euros au titre de la cotisation de la complémentaire pour le mois de mars 2019.
Statuant à nouveau, la cour fixera la créance de Madame [F] au passif de la SAS Le Laboratoire Maine Anjou à la somme de 41,72 euros au titre du remboursement de la cotisation de la prévoyance.
Sur l'opposabilité de l'arrêt au CGEA de [Localité 3]
Le présent arrêt doit être déclaré commun et opposable au CGEA de [Localité 3] dans les limites prévues par l'article L.3253-8 du code du travail et les plafonds prévus par les articles L.3253-17 et D3253-5 du même code.
Sur les documents sociaux
Afin de permettre à Mme [F] de faire valoir ses droits, il convient d'enjoindre à Maître [S], ès-qualités de mandataire judiciaire de la SAS Laboratoire Maine Anjou de lui remettre les bulletins de salaire correspondants au préavis et les documents de fin de contrat rectifiés (attestation Pôle Emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte) conformes au présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une astreinte.
Sur le remboursement des indemnités chômage
En application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner à Maître [S], ès-qualités de mandataire judiciaire de la SAS Laboratoire Maine Anjou, de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Mme [F] dans la limite de un mois d'indemnités de chômage.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens.
La SAS Laboratoire Maine Anjou, prise en la personne de Maître [S], ès-qualités de mandataire judiciaire, partie succombante à la présente instance, supportera la charge des dépens d'appel.
La cour, considérant que la demande de fixation au passif de la SAS Le Laboratoire Maine Anjou d'une indemnité de procédure sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile s'analyse en une demande de condamnation du liquidateur ès-qualités, infirmera le jugement déféré en ce qu'il a fixé au passif concerné la somme de 2500 € à ce titre. Statuant à nouveau, la cour condamnera Maître [S], ès-qualité de liquidateur judiciaire, à payer à Madame [F] une indemnité de procédure de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile laquelle vaudra pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La COUR,
Statuant dans les limites de l'appel, par arrêt contradictoire, prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement prononcé le 8 décembre 2020 par le conseil de prud'hommes d'Angers en ce qu'il a dit que l'origine de l'inaptitude de Mme [F] est de nature professionnelle';
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de DUERP';
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de dommages et intérêts pour refus abusif de mettre en 'uvre la procédure de licenciement pour inaptitude médicale ;
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire';
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a fixé la créance de Mme [F] au passif de la SAS Laboratoire Maine Anjou, prise en la personne de Maître [S], ès-qualités de mandataire judiciaire, aux sommes suivantes':
- quatre mille euros et soixante six centimes d'euros (4000,66 €) brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis';
- seize mille trois cent quatre vingt onze euros et cinquante huit centimes d'euros (16'391,58 €) au titre de l'indemnité spéciale de licenciement';
INFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions';
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant':
DIT que le licenciement de Mme [F] est nul';
FIXE la créance de Mme [F] au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Laboratoire Maine Anjou, prise en la personne de Maître [S], ès-qualités de mandataire judiciaire, aux sommes suivantes':
- Trente-sept mille euros (37'000 €) brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul';
- Six cent soixante-trois euros et quarante-quatre centimes d'euros (663,44€) brut au titre du solde de congés payés';
- Trois mille euros (3'000 €) à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral';
- Cinq cents euros (500 €) en réparation du préjudice subi du fait du défaut de mise en place des représentants du personnel';
- Quarante et un euros et soixante-douze centimes d'euros (41,72 €) au titre de la cotisation prévoyance';
FIXE la créance de Pôle Emploi au passif de la SAS Laboratoire Maine Anjou, prise en la personne de Maître [S], ès-qualités de mandataire judiciaire, à UN (1) mois d'indemnités de chômage effectivement versé à Mme [F] par suite de son licenciement ;
DÉCLARE le présent arrêt commun et opposable au CGEA-AGS de [Localité 3], tenu à garantir la créance de Mme [F] ainsi fixée, en l'absence de fonds disponibles et dans la limite des plafonds réglementaires et légaux, à l'exclusion de la somme allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
ENJOINT à Maître [S], ès-qualités de mandataire judiciaire, de la SAS Laboratoire Maine Anjou, de remettre à Mme [F] des bulletins de salaire, un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation Pôle Emploi conformes au présent arrêt, sans astreinte';
CONDAMNE la SAS Le Laboratoire Maine Anjou, prise en la personne de Maître [S], ès-qualité de mandataire judiciaire, à payer à Mme [F] la somme de quatre mille euros (4000 €) au titre de l'article 700 du code de procédure civile qui vaudra pour ses frais irrépétibles de première instance et en cause d'appel';
CONDAMNE la SAS Laboratoire Maine Anjou, prise en la personne de Maître [S], ès-qualité de mandataire judiciaire, aux entiers dépens de première instance et de la procédure d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Viviane BODIN Clarisse PORTMANN