COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - CIVILE
YW/IM
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 21/01140 - N° Portalis DBVP-V-B7F-E2KI
Ordonnance du 22 Avril 2021
TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ANGERS
n° d'inscription au RG de première instance 21/00061
ARRET DU 16 MAI 2023
APPELANTES :
S.A.S. SONEL
[Adresse 10]
[Localité 5]
S.A.R.L. OMEGA TOP-COATINGS
[Adresse 11]
[Localité 3]
Représentées par Me Isabelle BERTHELOT de la SELARL H2C, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 20210127, et Me Alexandre TESSIER, avocat plaidant au barreau de RENNES
INTIMES :
Monsieur [V] [I]
né le [Date naissance 2] 1942 à [Localité 8] ([Localité 8])
[Adresse 7]
[Localité 4]
Représenté par Me Bertrand BRECHETEAU de la SELAS AVOCONSEIL, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 210041
MMA IARD SA
[Adresse 1]
[Localité 6]
MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentées par Me GANGA substituant Me Jean charles LOISEAU de la SELARL GAYA, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier L020005
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 23 Janvier 2023 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. WOLFF, conseiller qui a été préalablement entendu en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
M. WOLFF, conseiller
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 16 mai 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Yoann WOLFF, conseiller, pour la présidente empêchée, et par Christine LEVEUF, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
La Société Nyoisienne d'Électrolyse (la société SONEL) a pour objet le traitement de pièces par procédé électrolytique et chimique, et relève à ce titre de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement. Elle est assurée auprès des sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles (les MMA).
Alors que M. [V] [I] était l'actionnaire majoritaire et le président du conseil d'administration de la société SONEL, la société Omega Top Coatings a, aux termes d'un protocole d'accord du 13 septembre 2001, acquis la totalité des actions de celle-ci.
Arguant de la découverte, en 2020, sous le site d'exploitation de la société SONEL d'eaux souterraines polluées par le trichloréthylène, et d'un coût de dépollution de 896 500 euros, les sociétés Omega Top Coatings et SONEL ont, par acte d'huissier de justice du 21 janvier 2021, fait assigner M. [I] et les MMA en référé devant le président du tribunal judiciaire d'Angers, afin qu'une expertise soit ordonnée.
Par ordonnance du 22 avril 2021, le juge des référés a notamment :
Rejeté la demande d'expertise ;
Condamné in solidum les sociétés Omega Top Coatings et SONEL à verser à M. [I] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné in solidum les sociétés Omega Top Coatings et SONEL aux dépens.
Le juge a considéré que la prétention des sociétés Omega Top Coatings et SONEL était manifestement vouée à l'échec, dès lors que l'état de pollution allégué était évoqué explicitement dans les pièces échangées au cours du processus de vente, et que les intéressées ne peuvent ainsi affirmer qu'elles ne l'ont découvert qu'en 2020.
Intimant l'ensemble des autres parties, les sociétés Omega Top Coatings et SONEL ont relevé appel de ces chefs de l'ordonnance par déclaration du 6 mai 2021.
L'avis de fixation a été adressé le 26 octobre 2022, puis la clôture de l'instruction est intervenue le 4 janvier 2023.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 26 décembre 2022, les sociétés Omega Top Coatings et SONEL (les appelantes) demandent à la cour :
D'infirmer l'ordonnance ;
D'ordonner une expertise ;
De rejeter les demandes de M. [I] et des MMA ;
De condamner solidairement M. [I] et les MMA à leur verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
De réserver les dépens.
Les appelantes soutiennent que :
Après que la présence d'eaux souterraines au droit du site de la société SONEL a été mise en évidence et que deux nouveaux piézomètres ont été implantés en mars 2020, une pollution importante de ces eaux au trichloréthylène a été identifiée. Le rapport de visite constatant cette pollution date du 15 juin 2020. Les investigations ont mis en évidence une pollution régulière, voire journalière, antérieure à 2001. Cette pollution latente n'a jamais été portée à la connaissance de la société Omega Top Coatings. Les éléments qui avaient été portés à sa connaissance n'ont rien à voir avec la pollution découverte, laquelle apparaît majeure, en profondeur et volontaire. En outre, la société SONEL n'avait pas à mettre en place de surveillance des eaux souterraines aux termes de l'arrêté ministériel du 30 juin 2006. Le coût des travaux de dépollution est estimé à 896 500 euros.
Elles sont fondées à rechercher judiciairement, d'une part, la responsabilité du cédant, tant sur le plan contractuel, pour manquement à l'obligation d'information, pour dol et pour manquement à l'obligation de délivrance conforme, que sur le plan délictuel, et, d'autre part, la garantie des MMA.
Seule une expertise judiciaire permettra de déterminer la pollution, sa nature et son origine.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 janvier 2023, M. [I] demande à la cour :
De confirmer l'ordonnance ;
De condamner les appelantes à lui verser la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
De les condamner aux dépens.
M. [I] soutient que :
Il ne nie pas l'existence d'une pollution, mais rappelle que son existence était déjà connue en 2001. La société Omega Top Coatings ne peut pas prétendre qu'elle ne savait pas que le site était pollué. Cette information figurait noir sur blanc dans le dossier. La question de la pollution et/ou du risque de pollution du sol était un des items principaux des travaux effectués en vue de l'obtention du nouvel arrêté d'autorisation d'exploiter requis en 2003. Dès lors qu'une pollution était connue, les contours de celle-ci importent peu. Il appartenait le cas échéant à la société Omega Top Coatings d'en tirer toute conséquence, soit en réalisant des investigations supplémentaires, soit en refusant d'acquérir la société SONEL.
Aucun des fondements invoqués par les appelantes ne peut servir de façon probable à une action au fond. Ni le défaut d'information, ni le dol, ni l'obligation de délivrance conforme ne peuvent trouver à s'appliquer dès lors, d'une part, que tout le dossier révèle que la question de la pollution des sols était au c'ur du débat au moment de la vente, et, d'autre part, qu'il est constant que lorsque l'acquéreur a la possibilité de mener des investigations ou de compléter son information sur la base d'indices qui lui étaient fournis dans le dossier d'acquisition, toute tentative de dissimulation de la part du vendeur est alors exclue.
La réglementation nationale et celle propre à la société SONEL obligeaient les appelantes à connaître très tôt l'état du sous-sol : dès 2006 pour ce qui concerne l'arrêté ministériel du 30 juin 2006, et dès 2013 pour ce qui concerne l'arrêté préfectoral du 14 juin 2013, lequel imposait à la société SONEL des contrôles de la nappe souterraine dans les six mois de sa promulgation. Or les appelantes ont résisté à l'application de ce dernier arrêté, et c'est cette mauvaise volonté caractérisée qui a fait qu'elles n'ont su qu'en 2017 qu'il y avait des eaux souterraines à surveiller.
Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 26 novembre 2021, les MMA demandent à la cour :
À titre principal, de confirmer l'ordonnance ;
Subsidiairement, de les déclarer hors de cause et de condamner les appelantes à leur verser la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Plus subsidiairement, de modifier la mission de l'expert judiciaire de la manière suivante :
Vérifier la réalité des pollutions invoquées ;
En rechercher la ou les causes ;
Préciser pour chaque polluant son imputabilité et ses conséquences.
Les MMA soutiennent que :
La pollution litigieuse était parfaitement connue de la société Omega Top Coatings. Celle-ci avait connaissance en effet que l'ancien gérant avait utilisé du trichloréthylène pendant près de 15 ans, que les procédés industriels nécessitaient l'utilisation de divers solvants, et que de nombreux solvants figuraient dans la liste des produits stockés. Il lui appartenait dès lors, si elle s'estimait insuffisamment renseignée, de solliciter des informations complémentaires sur l'état de pollution des sols.
Elles interviennent en qualité d'assureur de la société SONEL au titre d'une garantie atteinte à l'environnement et d'un contrat MMA PME. Or, pour chacun de ces contrats, aucune garantie n'est mobilisable.
MOTIVATION
Sur la demande d'expertise
Selon l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
Il est constant qu'un tel motif légitime existe lorsque :
L'action au fond éventuelle n'est pas manifestement vouée à l'échec. À cet égard, le juge n'a pas à se prononcer sur le bien-fondé ou même l'opportunité de cette action, mais doit s'assurer simplement qu'un procès au fond est plausible. Ainsi, l'article 145 précité ne lui impose pas de caractériser le motif légitime d'ordonner une mesure d'instruction au regard du ou des différents fondements juridiques de l'action que la partie demanderesse se propose d'engager (2e Civ., 8 juin 2000, pourvoi n° 97-13.962, Bull. 2000, II, n° 97).
La mesure demandée est légalement admissible.
Elle est utile et améliore la situation probatoire des parties.
Elle ne porte pas atteinte aux intérêts légitimes du défendeur.
En l'espèce, les appelantes produisent un rapport de la société Dekra Industrial du 6 octobre 2020, selon lequel «les investigations réalisées ont mis à jour la présence d'une source de pollution par les COHV [composés organiques halogénés volatils] dans les eaux souterraines en aval du site [de la société SONEL], ainsi qu'un impact en COHV dans le gaz du sol au droit du bâtiment», et ce, de la manière suivante :
En avril 2017, après qu'un sondage de reconnaissance a conclu à la présence d'une nappe d'eau souterraine au droit du site et qu'un piézomètre a été installé aux fins de prélèvement et d'analyses, «des traces de COHV» ont été relevées.
En mars 2020, l'implantation de deux piézomètres complémentaires et la réalisation d'une campagne de suivi de la qualité des eaux a mis en évidence «un impact significatif en COHV» en aval supposé de la nappe, et «des traces de TCE» (trichloréthylène, faisant partie des COHV) en amont.
Selon «l'interview d'un salarié» réalisée en juin 2020, «les bains de CHLOROTEN étaient périodiquement nettoyés et vidés à l'extérieur, à même le sol», et ce, pendant environ 12 ans au moins avant le rachat de la société SONEL par la société Omega Top Coatings.
En août 2020, d'autres investigations ont confirmé «l'impact en COHV ['] au droit des eaux souterraines en aval du site (Pz3, 4 et 5) [et mis] en évidence un impact en COHV dans les gaz du sol».
Il en ressort, cela est d'ailleurs admis par M. [I] et les MMA, que les eaux souterraines situées sous le site de la société SONEL sont très probablement polluées par des produits chimiques dont il n'est pas contesté qu'ils sont issus de l'activité de cette dernière.
À cet égard, selon un autre rapport, établi par la société Oolite le 28 octobre 2021, «les pollutions du site en Trichloréthylène, métaux lourds, sulfates et nitrates notamment, corroborent un mode d'évacuation des déchets industriels non conforme à la réglementation, par déversements sur le sol».
Cette conclusion est corroborée à son tour par deux attestations selon lesquelles des produits chimiques utilisés par la société SONEL auraient été déversés régulièrement à même le sol : celle, du 19 juillet 2021, de M. [R] [Z], ancien responsable méthodes de la société SONEL, selon lequel «les bains de chlorothène souillés environ 250 à 300 litres étaient vidangés environ 2 fois par an à l'extérieur de l'usine à même le sol», et celle, du 31 août 2021, de M. [L] [E], ancien ouvrier, selon lequel ils étaient «obligés de décaper les pièces avec de la nitrique sulfurique et 50 % d'eau lorsqu'il [sic] était usé nous le vidions sur le sol».
L'ensemble de ces éléments, à savoir l'existence d'une pollution des eaux souterraines du site de la société SONEL, soupçonnée d'être due à des pratiques anciennes non conformes, ainsi que le coût de la dépollution estimé par la société Dekra Industrial à 896 500 euros rendent plausible une action au fond tout au moins de la société Omega Top Coatings 'celle de la société SONEL est moins évidente' contre M. [I], ancien propriétaire et dirigeant de la société SONEL. Ce seul caractère plausible est de nature à justifier, dans cette matière technique et complexe, qu'une expertise judiciaire soit ordonnée, sans qu'il y ait lieu à ce stade, ni de dire si les faits sont réellement acquis, ni d'apprécier les fondements juridiques que les appelantes évoquent, sans que cela ne les lie, pour la future action éventuelle.
S'agissant des chances de succès de cette action, il ne peut, pour les motifs suivants, être affirmé qu'elle serait manifestement vouée à l'échec car prescrite du fait d'une connaissance ancienne de la pollution par la société Omega Top Coatings, et de l'écoulement, au moment de l'assignation du 21 janvier 2021, du délai de 5 ans prévu à l'article 2224 du code civil.
Contrairement à ce que M. [I] prétend et à ce que le premier juge a retenu, le rapport établi par la société BREUIL Consultants en avril 2002, après la cession litigieuse et dans le cadre de la demande de renouvellement de l'autorisation d'exploiter initiée antérieurement par la société SONEL, et notamment les passages que M. [I] cite pages 19 à 21 de ses conclusions, ne constatent à cette date aucune pollution des eaux souterraines du site de cette société.
En effet, lorsque ce rapport indique que «les pollutions du sol et du sous-sol sur le site de SONEL peuvent avoir plusieurs origines», il ne fait qu'identifier les sources de pollution accidentelle potentielles (percolation et infiltration, déversement accidentel et perforation des réseaux). Le rapport poursuit d'ailleurs en précisant que «c'est en quoi l'Arrêté Ministériel du 26 septembre 1985 préconise un certain nombre de règles basiques d'aménagement destiné à éviter le risque de pollutions accidentelles du sol et du sous-sol», et en concluant qu'«après aménagements, toutes les dispositions seront prises pour prévenir les risques de pollutions accidentelles par déversements de produits chimiques». Quant au tableau figurant pages 3 et 4 du rapport, s'il constate la non-conformité du mode de rejet alors en vigueur au sein de la société SONEL, il ne remet pas en cause le contenu de ce rejet qualifié d'«épuré», mais seulement son milieu récepteur («"cuvette" de la Missandière» plutôt que la rivière [Localité 12]). Il en va de même pages 80 et 94 du rapport.
Ainsi, si le rapport conclut que «le changement d'exploitant est l'occasion de mettre en conformité certains points, tels que [la] prévention des risques de pollutions accidentelles qui pourraient exister», il ne fait état d'aucune pollution passée ou présente, et mentionne au contraire une gestion des déchets «conforme aux réglementations en vigueur» (page 4), avec une station d'épuration qui «respecte les concentrations imposées par l'Arrêté Préfectoral en vigueur ainsi que les seuils de rejets imposés par l'Arrêté Ministériel du 26 septembre 1985» (page 80). C'est vers cette station que les «écoulements à ciel ouvert de l'atelier de Zincage» évoqués page 90 se font (voir page 109). Finalement, aucune dépollution n'est prévue par le rapport au titre de la remise en état du site lorsque l'activité s'arrêtera (page 141).
L'annexe 5 à l'acte de cession (lettre de l'inspecteur des installations classées du 18 décembre 2000) ne constate pas davantage l'existence d'une pollution particulière. Elle ne fait que fixer un objectif de zéro rejet, même épuré, en indiquant que la nouvelle demande d'autorisation «devra présenter un dossier "eau" dans lequel sera examinée la faisabilité technico-économique de mise en 'uvre de techniques visant l'absence de tout rejet liquide».
Pour le reste, ni l'acte de cession ni ses autres annexes ne font état d'une pollution du sous-sol.
Enfin, il n'est pas manifeste que les appelantes soient prescrites aux motifs que l'utilisation par la société SONEL de produits chimiques faisait présumer dès sa cession une pollution de son sous-sol, ou qu'elles auraient dû connaître cette pollution non pas au moment où les premières analyses qui l'ont révélée ont été faites, mais dès l'instant où la société SONEL a été tenue réglementairement de surveiller ses eaux souterraines. Ces éléments méritent au contraire un débat au fond.
Dans ces conditions, il ne peut être affirmé, comme le premier juge l'a fait, que l'action au fond éventuelle des appelantes est manifestement vouée à l'échec car prescrite, et l'expertise que ces dernières ont sollicitée sera ordonnée selon des modalités qui seront fixées au dispositif, après que l'ordonnance aura été infirmée.
2. Sur la demande subsidiaire de mise hors de cause des MMA
Les MMA, qui ne demandent leur mise hors de cause qu'à titre subsidiaire, indiquent elles-mêmes qu'elles sont liées à la société SONEL par deux contrats d'assurance qu'elles qualifient de «garantie atteinte à l'environnement» pour l'un, et de «contrat MMA PME» pour l'autre.
S'agissant notamment du premier de ces contrats, les conditions générales stipulent que la garantie s'applique aux «conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile de l'Assuré en raison des dommages corporels, matériels et immatériels subis par des tiers, faisant l'objet d'une réclamation [définie comme une demande en réparation amiable ou judiciaire] et résultant d'une atteinte à l'environnement», «lorsqu'un fait fortuit imputable à l'exercice des activités assurées se produit dans l'enceinte des sites de l'assuré».
Or contrairement à ce que les MMA font valoir, il n'est pas établi, mais seulement soupçonné 'ce sera justement à l'expertise judiciaire de le déterminer objectivement et précisément', que la pollution litigieuse est volontaire.
Une telle pollution, dont les conséquences et les implications vis-à-vis des tiers ne sont pas encore pleinement connues, rend plausible la recherche par les appelantes de la garantie des MMA, auxquelles les opérations d'expertise doivent donc pouvoir être communes.
La demande de mise hors de cause sera en conséquence rejetée.
3. Sur les frais du procès
L'ordonnance sera également infirmée à cet égard.
Les appelantes, au profit desquelles l'expertise est ordonnée, supporteront provisoirement, dans l'attente de l'éventuelle décision au fond, les dépens de première instance et d'appel.
Il n'apparaît pas inéquitable néanmoins que chaque partie conserve, à ce stade, la charge des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.
PAR CES MOTIFS
La cour :
INFIRME l'ordonnance en ses dispositions soumises à la cour ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Rejette la demande de mise hors de cause des sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles ;
Ordonne une expertise ;
Désigne pour y procéder M. [S] [J], inscrit sur la liste des experts près la cour d'appel d'Angers, avec pour mission de :
Se rendre sur les lieux situés [Adresse 9], et ce, en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et leurs avocats avisés, se faire remettre tout document utile et recueillir les observations des parties ;
Décrire les lieux et leur évolution dans le temps ;
Procéder à tout prélèvement et à toute analyse nécessaire et dire si les eaux souterraines du sous-sol font l'objet de la pollution décrite dans le rapport établi par la société Dekra Industrial le 6 octobre 2020 (pièce n° 3 des sociétés Omega Top Coatings et SONEL) ;
Le cas échéant, polluant par polluant :
Décrire précisément la pollution et fournir tout élément permettant d'en apprécier l'ampleur ;
Déterminer son ancienneté et son origine géographique ;
Rechercher la ou les causes de la pollution ;
Indiquer les conséquences de celle-ci et les moyens, tant matériels que financiers, pour y remédier, en en évaluant le coût et la durée d'exécution ;
Proposer une évaluation du préjudice subi par les sociétés Omega Top Coatings et SONEL ;
D'une façon générale et dans le cadre de sa mission ci-dessus définie, entendre tout sachant, procéder à toute investigation utile et fournir tout élément technique et de fait utile à la solution du litige ;
Communiquer un pré-rapport, avec les avis des sapiteurs éventuellement recueillis, aux parties qui disposeront d'un délai de 30 jours pour présenter leurs observations et, passé ce délai, répondre à leurs éventuelles observations écrites dans son rapport définitif ;
Rappelle que l'expert doit procéder personnellement aux opérations d'expertise, sauf à recueillir l'avis de tout sapiteur dans une spécialité autre que la sienne ;
Dit que les sociétés Omega Top Coatings et SONEL verseront ensemble par chèque libellé à l'ordre du régisseur des avances et des recettes du tribunal judiciaire d'Angers une consignation de 3 000 (trois mille) euros à valoir sur la rémunération de l'expert dans le délai d'un mois à compter de la présente décision ;
Rappelle qu'à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque selon les modalités fixées à l'article 271 du code de procédure civile ;
Dit que l'expert devra déposer au greffe du tribunal judiciaire d'Angers un rapport détaillé de ses opérations dans le délai de huit mois à compter de l'avis de versement de la consignation qui lui sera donné par le greffe du tribunal judiciaire d'Angers, et qu'il adressera copie complète de ce rapport, accompagné de sa demande de fixation de rémunération, à chacune des parties conformément aux articles 173 et 282 du code de procédure civile ;
Précise que l'expert adressera une copie du rapport à l'avocat de chaque partie et mentionnera dans son rapport l'ensemble des destinataires à qui il l'aura adressé ;
Dit qu'en cas de refus ou d'empêchement de l'expert désigné, il sera procédé à son remplacement par ordonnance sur simple requête ;
Désigne le juge chargé de contrôler les mesures d'instruction du tribunal judiciaire d'Angers à l'effet de contrôler le déroulement de l'expertise ;
Dit que les sociétés Omega Top Coatings et SONEL supporteront provisoirement les dépens des procédures de première instance et d'appel ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE P/LA PRESIDENTE EMPECHEE
C. LEVEUF Y. WOLFF