COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - CIVILE
LE/IM
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 19/01061 - N° Portalis DBVP-V-B7D-EQIU
Jugement du 05 Février 2019
Tribunal de Grande Instance du MANS
n° d'inscription au RG de première instance 17/01512
ARRET DU 07 MARS 2023
APPELANTE :
SARL AUTO SERENITE anciennement dénommée SARL COURTIER AUTOMOBILES
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Jean-yves BENOIST de la SCP HAUTEMAINE AVOCATS, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 20141006
INTIMES :
Monsieur [J] [K]
né le 17 Mai 1972 à [Localité 8] (44)
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Claire MURILLO de la SCP PIGEAU - CONTE - MURILLO - VIGIN, avocat au barreau du MANS
S.A. AUTOMOBILES CITROÊN
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Dany DELAHAIE de la SCP CHANTEUX DELAHAIE QUILICHINI BARBE, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 2019147, et Me François-Xavier MAYOL, avocat plaidant au barreau de NANTES
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 09 Janvier 2023 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
Mme GANDAIS, conseillère
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 07 mars 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, conseillère faisant fonction de présidente, et par Christine LEVEUF, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
Le 3 mars 2012, M. [K] a acquis de la SARL Courtier Automobile un véhicule de Citroën de type C4 Picasso, mis en circulation le 13 novembre 2007 et ayant déjà parcouru 89.990 km, pour un prix de 11.500 euros.
Dans le cadre de cette acquisition, M. [K] a souscrit auprès de la société Covea Fleet, une garantie mécanique.
Le 21 décembre 2013, une panne est survenue ayant entraîné l'immobilisation du véhicule.
Après expertise amiable du 27 décembre 2013, la société Covea Fleet a refusé toute prise en charge, estimant que la panne résultait des joints d'injecteur et n'était donc pas couverte par sa garantie.
Les sociétés Courtier Automobile et Automobiles Citroën n'ayant par ailleurs pas répondu à ses sollicitations, M. [K] a saisi le juge des référés aux fins d'expertise, mesure prononcée par ordonnance du 10 décembre 2014.
L'expert a déposé son rapport le 25 septembre 2016 en concluant notamment à l'existence d'un vice de construction.
Dans ces conditions et par exploits du 24 avril 2017, M. [K] a fait assigner la société venderesse ainsi que la SA Automobiles Citroën devant le tribunal de grande instance du Mans, aux fins de résolution de la vente.
Suivant jugement du 5 février 2019, le tribunal de grande instance du Mans a :
- déclaré irrecevable comme prescrite la demande en garantie des vices cachés formée par M. [K] à l'encontre de la SA Automobiles Citroën,
- ordonné la résolution de la vente du véhicule Citroën modèle C4 Picasso immatriculé CE 086 K intervenue le 3 mars 2012 entre M. [K] et la SARL Courtier Automobile,
En conséquence,
- condamné la SARL Courtier Automobile à restituer à M. [K] la somme de 11.500 euros, en remboursement du prix de vente, outre les intérêts au taux légal à compter de la décision,
- dit que M. [K] devra restituer à la SARL Courtier Automobile le véhicule Citroën modèle C4 Picasso immatriculé CE 086 K aux frais de cette dernière,
- condamné la SARL Courtier Automobile à régler à M. [K] la somme de 13.099,90 euros, au titre des préjudices annexes, outre la somme de 8 euros par jour pour la période du 18 mars 2017 à la date du jugement au titre des frais de gardiennage,
- débouté M. [K] de ses demandes d'indemnisation complémentaire,
- condamné la SA Automobiles Citroën à régler à la SARL Courtier Automobile la somme de 10.000 euros en restitution d'une partie du prix de vente,
- condamné la SA Automobiles Citroën à garantir la SARL Courtier Automobile de l'ensemble des condamnations mises à sa charge au titre des préjudices annexes de M. [K] et au titre des frais de gardiennage,
- condamné la SARL Courtier Automobile à régler à M. [K] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la SA Automobiles Citroën à régler à la SARL Courtier Automobile la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouté la SA Automobiles Citroën de sa demande à ce titre,
- condamné la SARL Courtier Automobile et la SA Automobiles Citroën in solidum aux dépens, qui comprendront notamment ceux de l'instance en référé et les frais d'expertise, dont distraction au profit de la SCP Pigeau Conte Murillo,
- condamné la SA Automobiles Citroën à garantir la SARL Courtier Automobile des condamnations prononcées à son encontre au titre des dépens et des frais de justice,
- ordonné l'exécution provisoire.
Par déclaration déposée au greffe de la cour le 24 mai 2019 (RG 19/1061), la SARL Auto Sérénité anciennement dénommée Courtier Automobile a interjeté appel de cette décision en ses dispositions :
- ayant ordonné la résolution de la vente du véhicule Citroën modèle C4 Picasso immatriculé CE 086 K intervenue le 3 mars 2012 entre M. [K] et elle,
- l'ayant condamnée à restituer à M. [K] la somme de 11.500 euros, en remboursement du prix de vente, outre les intérêts au taux légal à compter de la décision,
- ayant dit que M. [K] devra lui restituer le véhicule Citroën modèle C4 Picasso immatriculé CE 086 K à ses frais,
- l'ayant condamnée à régler à M. [K] la somme de 13.099,90 euros, au titre des préjudices annexes, outre la somme de 8 euros par jour pour la période du 18 mars 2017 à la date du jugement au titre des frais de gardiennage,
- l'ayant condamnée à régler à M. [K] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- l'ayant condamnée avec la SA Automobiles Citroën in solidum aux dépens, qui comprendront notamment ceux de l'instance en référé et les frais d'expertise, dont distraction au profit de la SCP Pigeau Conte Murillo,
intimant dans ce cadre M. [K] ainsi que la SA Automobiles Citroën.
Aux termes de conclusions déposées le 5 novembre 2019, cette dernière personne morale a déclaré former appel incident de ce même jugement.
M. [K], par écritures du 12 novembre 2019, a également formé appel incident de cette décision.
Suivant déclaration déposée au greffe de la présente juridiction le 25 mars 2019 (RG 19/555), la SA Automobiles Citroën a interjeté appel de ce même jugement en ses dispositions :
- l'ayant condamnée à régler à la SARL Courtier Automobile la somme de 10.000 euros en restitution d'une partie du prix de vente,
- l'ayant condamnée à garantir la SARL Courtier Automobile de l'ensemble des condamnations mises à sa charge au titre des préjudices annexes de M. [K] et au titre des frais de gardiennage,
- ayant condamné la SARL Courtier Automobile à régler à M. [K] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- l'ayant condamnée à régler à la SARL Courtier Automobile la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- l'ayant déboutée de sa demande à ce titre,
- l'ayant condamnée avec la SARL Courtier Automobile in solidum aux dépens, qui comprendront notamment ceux de l'instance en référé et les frais d'expertise, dont distraction au profit de la SCP Pigeau Conte Murillo,
- l'ayant condamnée à garantir la SARL Courtier Automobile des condamnations prononcées à son encontre au titre des dépens et des frais de justice,
- ordonné l'exécution provisoire,
intimant dans ce cadre l'acquéreur du véhicule ainsi que la société venderesse finale.
M. [K], par écritures du 17 septembre 2019, a, dans le cadre de cette procédure, également formé appel incident du jugement de février 2019.
Par conclusions déposées le 27 septembre 2019, la société Auto Sérénité a formé appel incident de cette même décision.
Saisi par cette dernière société, le premier président de la cour d'appel d'Angers statuant par ordonnance de référé du 16 octobre 2019 a notamment débouté la requérante de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du tribunal de grande instance du Mans du 5 février 2019.
Suivant ordonnance du 22 janvier 2020, intervenue dans le cadre de la procédure 19/555, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de la SARL Auto Sérénité notifiées le 27 septembre 2019 et a ordonné la jonction de cette procédure avec celle enrôlée sous le numéro 19/1061.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 6 juillet 2022 et l'audience de plaidoiries, après défixation, s'est tenue le 9 janvier 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 19 mai 2020, la SARL Auto Sérénité (la venderesse) demande à la présente juridiction de :
- la recevoir en son appel et l'en déclarer fondée,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance du Mans le 5 février 2019 en ce qu'il :
- l'a condamnée à régler à M. [K] une somme de 1.000 euros en réparation de son préjudice de jouissance,
- l'a condamnée à régler à M. [K] une somme de 11.724,40 euros au titre des frais de gardiennage, à parfaire pour la période du 18 mars 2017 au jour du jugement à hauteur de 8 euros par jour,
- confirmer pour le surplus le jugement rendu par le tribunal de grande instance du Mans le 5 février 2019, en particulier en ce qu'il a :
- condamné la S.A. Automobiles Citroën à lui régler la somme de 10.000 euros en restitution d'une partie du prix de vente
- condamné la S.A. Automobiles Citroën à la garantir de l'ensemble des condamnations mises à sa charge au titre des préjudices annexes de M. [K] et au titre des frais de gardiennage
- condamné la S.A. Automobiles Citroën à lui régler la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la S.A. Automobiles Citroën à la garantir des condamnations prononcées à son encontre au titre des dépens et des frais de justice
- condamner in solidum M. [K] et la société Automobiles Citroën à lui régler une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 11 février 2020, la SA Automobiles Citroën (le constructeur) demande à la présente juridiction de :
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé prescrite l'action de M. [K],
- débouter M. [K] de ses demandes à son encontre,
- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il l'a condamnée à payer diverses sommes à la société Courtier Automobiles (devenue Auto Sérénité) et à la garantir,
Statuant de nouveau :
- déclarer prescrite l'action de la société Auto Sérénité à son encontre, et par conséquent irrecevable,
- débouter la société Auto Sérénité de ses demandes à son encontre,
A titre subsidiaire :
- dire et juger que sa responsabilité n'est pas engagée,
- dire et juger que, par conséquent, M. [K] et la société Auto Sérénité sont mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions,
- débouter M. [K] et la société Auto Sérénité de leurs demandes, fins et conclusions à son encontre,
À titre infiniment subsidiaire :
- dire et juger que M. [K] ne pourra être garanti par elle pour les postes de préjudices suivants :
- 11.500 euros au titre de la résolution de la vente,
- 20.614,40 euros au titre de différents préjudices,
- réduire à de plus justes proportions le montant des sommes réclamées,
En tout état de cause :
- condamner M. [K] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Aux termes de ses écritures déposées les 17 septembre (RG 19/555) et 12 novembre 2019 (RG 19/1061), M. [K] (l'acquéreur) demande à la présente juridiction de :
- dire et juger la SA Automobiles Citroën mal fondée en son appel du jugement du tribunal de grande instance du Mans du 5 février 2019,
- dire et juger la SARL Auto Sérénité mal fondée en son appel du jugement du tribunal de grande instance du Mans du 5 février 2019,
- confirmer ladite décision en ce qu'elle a prononcé la résolution du contrat de vente conclu entre lui et la SARL Courtier Automobile et en ce qu'elle l'a indemnisé au titre des frais d'immatriculation et de gardiennage,
- le dire et juger recevable et fondé en son appel incident,
- infirmer ladite décision en ce qu'elle a déclaré son action prescrite contre la SA Automobiles Citroën, en ce qu'elle a limité l'indemnité du préjudice de jouissance à la somme de 1.000 euros, en ce qu'elle l'a débouté de ses demandes relatives aux frais d'entretien et d'assurance,
- le dire et juger recevable et fondé en l'ensemble de ses demandes,
- condamner la SARL Auto Sérénité et la SA Automobiles Citroën à lui verser la somme totale de 5.727,11 euros en indemnisation du préjudice de jouissance, des frais d'entretien et des frais d'assurance,
- condamner la SARL Auto Sérénité et la SA Automobiles Citroën à lui verser une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la SARL Auto Sérénité et la SA Automobiles Citroën en tous les dépens qui incluront le référé les frais d'expertises amiable et judiciaire, dépens qui seront recouvrés par la SCP Pigeau Conte Murillo Vigin conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile, aux dernières écritures, ci-dessus mentionnées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Liminairement, il doit être observé que s'il a été interjeté appel de la décision de première instance en ce qu'elle a ordonné la résolution de la vente ainsi que la restitution tant du prix que du véhicule, aucune des parties ne conclut à l'infirmation de ces dispositions qui seront donc confirmées sans examen au fond, sauf à préciser que l'immatriculation du véhicule est [Immatriculation 7] et non CE 086 K, comme mentionné par erreur purement matérielle au dispositif du jugement.
Sur les fins de non-recevoir :
En droit, l'article 1648 du Code civil dispose désormais que : 'L'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.
Dans le cas prévu par l'article 1642-1, l'action doit être introduite, à peine de forclusion, dans l'année qui suit la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices ou des défauts de conformité apparents'.
Par ailleurs, l'article L 110-4 du Code de commerce, après avoir prévu un délai décennal, précise, depuis le 17 juin 2008, que : 'Les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes'.
Enfin, l'article 564 du Code de procédure civile prévoit que : 'A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.
Le premier juge rappelant que l'action fondée sur les vices cachés doit être engagée en respectant les dispositions ci-dessus reprises, étant souligné que la prescription commerciale a été réduite en 2008 pour passer de 10 à 5 ans, en a déduit que l'action exercée par l'acquéreur final à l'encontre de la société Automobiles Citroën devait être engagée au plus tard le 18 juin 2013. De sorte qu'en agissant postérieurement à la panne du véhicule intervenue courant décembre 2013, M. [K] a été déclaré irrecevable en ses prétentions à l'encontre du constructeur. Cependant, s'agissant des demandes formées par le vendeur intermédiaire, il a uniquement été constaté qu'aucune fin de non-recevoir n'avait été soulevée à l'encontre de cette action récursoire.
Aux termes de ses dernières écritures, le constructeur rappelle qu'en application d'une jurisprudence qualifiée d'ancienne et 'confirmée quelle que soit la chambre [de] la Cour de cassation', 'l'action en garantie des vices cachés doit être engagée avant l'expiration du délai de prescription de droit commun, le point de départ de la prescription se situant au jour de la vente'. A ce titre, elle souligne avoir mis le véhicule litigieux en circulation le 13 novembre 2007, de sorte qu'au regard de l'entrée en vigueur de la réforme des prescriptions, il n'avait plus à répondre des éventuels vices cachés que présenterait ce véhicule au-delà du 18 juin 2013. Dans ces conditions, le constructeur indique que l'acquéreur final du véhicule était déjà prescrit lors de la saisine de la juridiction des référés. S'agissant de l'action récursoire, il indique que 'le point de départ du délai de prescription n'est pas, pour la partie qui en appelle une autre à la garantir, reporté au jour où elle a elle-même été assignée'. Il précise par ailleurs, que l'action récursoire est également enfermée dans les délais de l'article L 110-4 du Code de commerce, peu important que le vice ait été révélé postérieurement. S'agissant de l'argumentaire développé par sa contradictrice et fondé sur les dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile, il observe qu'il ne forme pas une demande nouvelle mais répond à l'action récursoire que la venderesse entend maintenir à son encontre.
Aux termes de ses écritures, l'acquéreur observe que sa contradictrice fonde son raisonnement, quant à la prescription qu'elle lui oppose, sur des décisions antérieures à la réforme de l'article 1648 et se basant donc sur le 'bref délai' qui devait nécessairement être 'enfermé dans le délai de droit commun, soit 30 ans'. Il soutient donc que depuis que l'action fondée sur les vices cachés ne peut être introduite que dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice 'il ne doit plus être tenu compte du délai de droit commun'. Ainsi au regard d'une découverte des vices à l'occasion de l'expertise amiable, il indique que son action n'est pas prescrite.
Aux termes de ses dernières écritures, la venderesse rappelle que l'action récursoire qu'elle exerce présentement est soumise, quant à sa recevabilité, aux dispositions de l'article 1648 du Code civil. S'agissant des arguments présentés par le constructeur, elle indique que la fin de non-recevoir qui lui est opposée correspond à une demande soutenue pour la première fois en cause d'appel et partant irrecevable comme contraire aux dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile. De plus, elle soutient que la prescription de droit commun ne s'applique pas en l'espèce, puisque l'action récursoire n'est pas enfermée dans ce délai. Ainsi, elle affirme que dans le cadre d'une action récursoire, le jour de la découverte du vice au sens de l'article 1648 du Code civil correspond à son assignation à l'initiative de l'acquéreur, délai de deux ans qu'elle a donc respecté. Au demeurant, elle souligne que 'la règle spéciale dérogeant à la règle générale, le délai biennal de l'article 1648 du Code civil ne doit pas se combiner, contrairement à ce qu'affirme faussement [le constructeur], au délai de droit commun de l'article L 110-4 du Code de commerce'. En tout état de cause, et s'il devait être fait application de la prescription quinquennale, la venderesse rappelle qu'en application des dispositions de l'article 2224 du Code civil, il doit être considéré qu'elle n'a pas eu connaissance des faits lui permettant d'agir, avant d'avoir elle-même été assignée par l'acquéreur du véhicule. Elle en conclut que son action récursoire est recevable.
Sur ce :
Liminairement et s'agissant du caractère nouveau contrevenant aux prescriptions de l'article 564 du Code de procédure civile, il doit être souligné que l'article 122 du Code de procédure civile pose le principe selon lequel les fins de non-recevoir constituent des moyens tendant à faire échec aux prétentions adverses sans examen au fond de sorte que cet argumentaire, présenté pour la première fois devant la cour, par le constructeur ne vise qu'à faire écarter les prétentions de la venderesse.
De plus il ne peut qu'être souligné que l'article 123 du Code de procédure civile précise que les fins de non-recevoir, qui comprennent notamment la prescription, peuvent être proposées en tout état de cause et donc pour la première fois en appel.
Dans ces conditions, l'argumentaire présenté par la venderesse et fondé sur les dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile ne peut qu'être rejeté.
Par ailleurs et sur la prescription tant des demandes dirigées contre le constructeur au titre des vices rédhibitoires que de l'action récursoire, qui correspond également à une demande fondée sur les vices cachés, il est constant que si l'article 1648 du Code civil pose désormais qu'elles doivent toutes deux être engagées dans les deux années de la découverte du vice, il n'en demeure pas moins que ces actions sont également enfermées dans un délai butoir qui, au regard d'une mise en circulation du véhicule antérieurement à l'année 2008 (novembre 2007), correspond au délai posé par l'article L 110-4 du Code de commerce.
A ce titre, en suite de la réforme des prescriptions ayant réduit de moitié le délai de la prescription commerciale et au regard d'un point de départ de ce délai correspondant en l'espèce au jour de la vente initiale, soit au cours du mois de novembre 2007, les actions fondées sur les vices rédhibitoires à l'encontre du constructeur, qu'elles soient principale ou récursoire, devaient être introduites au plus tard au cours du mois de juin 2013.
Or, et ainsi que l'a rappelé le premier juge, le juge des référés n'a été saisi aux fins d'expertise qu'en suite de la panne intervenue courant décembre 2013, soit postérieurement à l'expiration du délai quinquennal de l'article L 110-4 du Code de commerce.
Il résulte de ce qui précède que la décision de première instance doit être confirmée en ce qu'elle a déclaré prescrites les demandes formées par l'acquéreur à l'encontre du constructeur. Cette décision doit cependant être infirmée en ce qu'elle a :
- condamné la SA Automobiles Citroën à régler à la SARL Courtier Automobile la somme de 10.000 euros en restitution d'une partie du prix de vente,
- condamné la SA Automobiles Citroën à garantir la SARL Courtier Automobile de l'ensemble des condamnations mises à sa charge au titre des préjudices annexes de M. [K] et au titre des frais de gardiennage,
les demandes formées par la venderesse à l'encontre du constructeur et fondées sur l'existence de vices cachés devant être déclarées irrecevables.
Sur les conséquences de la résolution de la vente
En droit, les articles 1645 et 1646 du Code civil disposent que : 'Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur',
'Si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu'à la restitution du prix et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente'.
Le premier juge rappelant que le vendeur professionnel est irréfragablement présumé connaître le vice de la chose vendue a condamné la venderesse à indemniser l'acquéreur :
- du coût de la carte grise pour 375,50 euros,
- de son préjudice de jouissance pour 1.000 euros, correspondant à la nécessité d'acquérir un nouveau véhicule ainsi que la gêne subie au cours de la période ayant couru entre l'immobilisation du véhicule C4 Picasso et l'acquisition d'une nouvelle voiture,
- des frais de gardiennage pour 8 euros par jour et d'ores et déjà facturés à hauteur de 11.724,40 euros pour la période ayant couru jusqu'au 17 mars 2017.
Les demandes formées au titre :
- du montant d'une facture d'entretien du 14 août 2013 pour 342,33 euros,
- ainsi que des frais d'assurance,
ont été rejetées comme correspondant à des frais engagés pour permettre de bénéficier de l'usage du véhicule jusqu'à la panne ayant conduit à son immobilisation.
Aux termes de ses dernières écritures, la venderesse appelante indique n'être qu'un intermédiaire et, dans ces conditions, ne pas avoir eu connaissance des vices de la chose. Elle considère donc que ne constituent pas des frais occasionnés par la vente :
- le préjudice de jouissance, qui au demeurant apparaît disproportionné alors que l'acquéreur a disposé d'un 'moyen de locomotion alternatif',
- les frais de gardiennage étant au surplus souligné qu'il n'est pas justifié d'un contrat de gardiennage.
En tout état de cause et à titre subsidiaire, l'appelante indique que l'acquéreur a fait le choix d'entreposer ce véhicule dans un garage 'alors qu'il lui aurait appartenu, pour mettre un terme aux frais de gardiennage, de retirer son véhicule pour l'entreposer chez lui ou chez une de ses connaissances disposant d'un garage'. Elle considère qu'il a ainsi participé de son propre préjudice.
Aux termes de ses écritures, l'acquéreur intimé indique qu'en sa qualité de professionnelle, la venderesse est présumée avoir connu les vices affectant le véhicule. Il sollicite donc l'indemnisation de son préjudice de jouissance à hauteur de 50 euros par mois, soit une somme de 3.600 euros pour les six années écoulées. S'agissant des frais d'assurance et d'entretien, il souligne que la résolution de la vente implique que les parties soient remises 'dans l'état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat', or ces derniers frais ont uniquement été engagés du fait de la vente désormais résolue.
Sur ce :
En l'espèce, l'appelante soutient ne pas pouvoir être considérée comme ayant eu connaissance des vices affectant le véhicule, indiquant être simple intermédiaire de vente.
Cependant, il doit être souligné qu'aucune des parties ne communique le bon de commande voire même la facture émise dans le cadre de la vente litigieuse.
En tout état de cause au regard de l'accord à ce titre, il est constant que la cession est intervenue le 4 mars 2013.
A ce titre, la seule pièce communiquée et concomitante à la cession correspond à la garantie complémentaire souscrite lors de cette vente, présentant le vendeur comme étant la SARL Courtier Automobile. De plus, les conditions générales de cette garantie présentent le souscripteur comme étant 'le garage vendeur du véhicule d'occasion couvert par le présent contrat'.
Il en résulte donc que l'appelante est un garage faisant commerce de véhicules d'occasion et partant ne peut qu'être considérée comme vendeur professionnel tenu de connaître les vices affectant le véhicule litigieux.
Dans ces conditions et par application de l'article 1645 ci-dessus repris, elle est tenue de réparer les préjudices subis par l'acquéreur.
A ce titre, au regard de l'immobilisation du véhicule, de son caractère économiquement irréparable, il est établi que l'acquéreur a subi un préjudice de jouissance dont l'indemnisation a été justement appréciée par le premier juge comme devant être fixée à la somme de 1.000 euros.
S'agissant des frais de gardiennage, il ne peut aucunement être fait grief à l'acquéreur d'avoir maintenu le véhicule au sein d'un garage pour sa conservation étant souligné qu'il ne peut aucunement être supposé que le maintien d'un tel bien chez des tiers serait par principe gratuit.
En tout état de cause, l'intimé communique aux débats diverses factures émanant de la société Boisdon Automobiles pour 11.724,40 euros dont 11.308,80 correspondent à des frais de gardiennage arrêtés au 17 mars 2017, et précisant que le coût journalier de cette prestation est de 8 euros.
La somme de 415,60 euros, également retenue par le premier juge au titre des frais liés au maintien du véhicule dans les locaux de cette société, correspond en réalité à une facture du 24 septembre 2015, portant sur :
- la 'lecture mémoire calculateurs test global sur véhicule',
- le 'remplacement couvre culasse',
- le 'remplacement turbo',
- le 'remplacement crépine pompe à huile'.
Or les pièces annexées au rapport d'expertise judiciaire comprennent cette facture avec la mention 'Facture à la charge de l'expert M. [D]' étant souligné que le mémoire d'honoraires et de frais de l'expert fait état de cette somme.
Il en résulte que la décision de première instance doit être infirmée en ce qu'elle a retenu que les frais de gardiennage, préjudice en lien direct avec les vices affectant le véhicule, devaient être indemnisés par l'allocation d'une somme de 11.724,40 euros, l'indemnisation de ce préjudice devant être fixée à la somme de 11.308,80 euros.
S'agissant des frais d'entretien, rejetés par le premier juge et portant sur la facture de 342,33 euros, il doit être souligné qu'aux termes du rapport d'expertise, ils portent sur un entretien du moteur, une recharge de climatisation ainsi que le remplacement du moteur de climatisation.
Or de tels frais sont sans lien avec les vices, de sorte que le premier juge était fondé à rejeter les demandes formées à ce titre.
Enfin, s'agissant des frais d'assurance inutilement exposés, il ne peut qu'être constaté que l'acquéreur ne produit aucune pièce établissant le principe même de cette dépense de sorte que la décision de première instance sera également confirmée à ce titre.
Sur les demandes accessoires :
Au regard de l'issue du présent litige, la venderesse qui succombe doit être condamnée aux dépens d'appel et les dispositions de la décision de première instance à ce titre doivent être infirmées.
Ainsi la venderesse doit, seule, être condamnée aux dépens de première instance qui ne peuvent comprendre les frais de l'expertise amiable, mais uniquement ceux liés à l'expertise judiciaire par application de l'article 695 5èment du Code de procédure civile.
Par ailleurs l'équité commande de la condamner au paiement à M. [K] de la somme de 2.500 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile et les dispositions de la décision de première instance doivent être confirmées en ce qu'elles emportent condamnation de la venderesse au paiement à l'acquéreur d'une somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.
Cependant au regard de l'issue du litige, le jugement doit être infirmé en ses dispositions ayant condamné le constructeur aux frais irrépétibles ainsi qu'à garantir les condamnations prononcées à l'encontre de la venderesse au titre des frais de procédure.
Enfin, les demandes formées au titre des frais irrépétibles par le constructeur ne peuvent qu'être rejetées en ce qu'elles sont formées à l'encontre d'une partie non tenue aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour,
REJETTE la fin de non-recevoir soulevée par la SARL Auto Sérénité et fondée sur les dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile ;
INFIRME le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 5 février 2019 mais uniquement en celles de ses dispositions ayant :
- condamné la SARL Courtier Automobile à régler à M. [K] la somme de 13.099,90 euros, au titre des préjudices annexes,
- condamné la SA Automobiles Citroën à régler à la SARL Courtier Automobile la somme de 10.000 euros en restitution d'une partie du prix de vente,
- condamné la SA Automobiles Citroën à garantir la SARL Courtier Automobile de l'ensemble des condamnations mises à sa charge au titre des préjudices annexes de M. [K] et au titre des frais de gardiennage,
- condamné la SA Automobiles Citroën à régler à la SARL Courtier Automobile la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la SA Automobiles Citroën aux dépens,
- condamné la SA Automobiles Citroën à garantir la SARL Courtier Automobile des condamnations prononcées à son encontre au titre des dépens et des frais de justice,
Le CONFIRME, dans les limites de sa saisine, pour le surplus sauf à préciser que l'immatriculation du véhicule Citroën Picasso est [Immatriculation 7] ;
Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
DECLARE irrecevables les demandes formées par la SARL Auto Sérénité à l'encontre de la SA Automobiles Citroën et fondées sur les dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil ;
CONDAMNE la SARL Auto Sérénité à régler à M. [J] [K] la somme de 12.684,30 euros (douze mille six cent quatre vingt quatre euros et trente centimes), au titre des préjudices annexes ;
CONDAMNE la SARL Auto Sérénité à régler à M. [J] [K] la somme de 2.500 euros (deux mille cinq cents euros) par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
REJETTE les demandes formées par la SARL Auto Sérénité ainsi que par la SA Automobiles Citroën et fondées sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la SARL Auto Sérénité aux dépens ;
ACCORDE au conseil de M. [J] [K] le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
C. LEVEUF C. MULLER