COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - CIVILE
LE/CG
ARRET N°
AFFAIRE N° RG 18/02494 - N° Portalis DBVP-V-B7C-ENNI
jugement du 23 Octobre 2018
Tribunal de Grande Instance du MANS
n° d'inscription au RG de première instance : 17/00406
ARRET DU 07 MARS 2023
APPELANT :
Monsieur [N] [J]
né le 17 Décembre 1953 à SAINT DENIS DE LA REUNION (97)
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représenté par Me Inès RUBINEL, avocat au barreau d'ANGERS, en qualité d'administratrice provisoire de Me Benoît GEORGE, associé de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocat postulant au barreau D'ANGERS et par Me Julie DEGENEVE, avocat plaidant au barreau de LYON
INTIMEES :
S.A.R.L. [...], en liquidation judiciaire
C/O ABC LIV Bureau de domiciliation
[Adresse 4]
[Localité 6]
Assignée, n'ayant pas constitué avocat
S.A. MMA IARD
[Adresse 1]
[Localité 5]
S.A. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentées par Me Elise HERON de la SCP LALANNE - GODARD - HERON - BOUTARD - SIMON, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 20190002
S.A. MMA VIE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Annabelle LEFEVRE, avocat au barreau du MANS
S.A.S. [...] anciennement dénommée [...]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Raphaël PAPIN, substituant Me Thierry GUYARD de la SELARL 08H08 AVOCATS, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Me Céline LEMOUX, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du 13 Décembre 2022 à 14H00, Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la Cour composée de :
Madame MULLER, Conseillère faisant fonction de Présidente
M. WOLFF, Conseiller
Mme ELYAHYIOUI, Vice-présidente placée
qui en ont délibéré
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
ARRET : arrêt par défaut
Prononcé publiquement le 07 mars 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Christine LEVEUF, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
M. [N] [J] a souscrit le 7 décembre 1991, par l'intermédiaire de la société [...], une adhésion à un contrat d'assurance-vie 'Evidence 2" proposé par la société Mutuelle du Mans Assurances Vie.
Le contrat d'une durée initiale de 22 ans, prévoyait un versement de 24.000 francs (3.660 euros) puis des cotisations mensuelles de 2.000 francs, soit 305 euros, à compter du 1er janvier 2002.
Selon les conditions générales, ce contrat, destiné à permettre à l'adhérent de se constituer un capital épargne, était adossé aux actions de la société d'investissement à capital variable (SICAV), Mutuelles du Mans Valeurs dont le portefeuille est composé d'actions et d'obligations françaises, à au moins 50%.
La gestion du contrat a été assurée, à compter du mois d'avril 2008, par la société [...].
En 2012, M. [J], indiquant constater la baisse, du capital investi, a cherché à obtenir des explications de la société gestionnaire, qu'il a estimées insatisfaisantes.
Dans ces conditions et par exploits des 24 et 27 janvier 2017, il a fait assigner les sociétés Financière [...], [...], MMA IARD, MMA IARD Assurances Mutuelles et MMA Vie, devant le tribunal de grande instance du Mans pour voir reconnaître leurs manquements à leurs obligations d'information et de conseil et obtenir la réparation de son préjudice.
Suivant jugement du 23 octobre 2018, le tribunal de grande instance du Mans a :
- déclaré l'action engagée par M. [J] irrecevable comme étant prescrite,
- débouté la société [...] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- débouté MMA Vie de sa demande de dommages-intérêts,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,
- condamné M. [J] aux dépens de l'instance avec application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile au profit de Me Bons et de Me Lefevre,
- condamné M. [J] à payer à la société [...], à MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, et à MMA Vie, chacune, une somme de 1.500 euros soit au total 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs plus amples demandes ou contraires au jugement.
Par déclaration reçue au greffe le 11 décembre 2018, M. [J] a interjeté appel de ce jugement en ses dispositions ayant déclaré prescrites ses demandes et l'ayant condamné aux dépens et au paiement de diverses sommes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; intimant dans ce cadre la SARL [...], la SA MMA IARD, la société civile MMA IARD Assurances Mutuelles, la SA MMA Vie ainsi que la SAS [...] anciennement dénommée [...].
Assignée par actes d'huissier en date du 4 mars 2019 contenant dénonce de la déclaration d'appel et du 3 avril 2019 contenant dénonce des conclusions de l'appelant, délivrés tous deux en l'étude de l'huissier, la SARL [...] n'a pas constitué avocat.
Par jugement du 22 décembre 2020, le tribunal de commerce de Paris a placé la société [...] en liquidation judiciaire simplifiée, le liquidateur désigné dans ce cadre n'a pas été attrait à la présente procédure.
Suivant conclusions déposées le 6 juin 2019, la société [...] a formé appel incident du jugement de 2018. Par écritures du 11 de ce même mois la SA MMA Via a également interjeté appel incident de cette même décision.
Après une première fixation, la clôture de l'instruction a finalement été prononcée par ordonnance du 11 mai 2022 et l'audience de plaidoiries fixée au 13 décembre de la même année.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par conclusions déposées le 2 septembre 2021, M. [J] demande à la présente juridiction de :
1°/ sur la fin de non-recevoir :
- juger que son action à l'encontre des sociétés MMA et de la société [...] relève du régime de prescription quinquennale,
- juger que son action à l'encontre de la société [...] relève également du régime de prescription quinquennale,
- constater que le relevé d'information annuel 2008 n'est pas daté, incomplet et non conforme aux impératifs de l'article L.132-22 du Code des assurances ne peut être considéré comme une information suffisante du droit d'action au sens de l'article 2224 du Code civil,
- juger que le point de départ du délai de prescription est indéterminé, et en toutes hypothèses, que la prescription a été interrompue à l'égard des sociétés MMA,
- infirmer, en conséquence, le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 23 octobre 2018 en ce qu'il a déclaré son action irrecevable comme étant prescrite,
- déclarer recevable son action,
2°/ sur le fond :
- juger que la société MMA IARD, la société MMA IARD Assurances Mutuelles, la société MMA Vie et la société [...] ont manqué à leurs obligations générales d'information et de conseil préalablement à la signature du contrat 'Evidence 2",
- juger que la société MMA IARD, la société MMA IARD Assurances Mutuelles et la société MMA Vie doivent être tenues responsables de l'inexécution de la société [...] de son obligation générale d'information et de conseil,
- juger que la société [...] a manqué à son obligation particulière d'information et de conseil en cours de contrat,
- juger, par conséquent, qu'il a subi un préjudice tiré de la perte de chance de n'avoir pu contracter à des conditions plus favorables,
- infirmer le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 23 octobre 2018 en toutes ses dispositions,
- condamner in solidum les sociétés [...], MMA IARD, MMA IARD Assurances Mutuelles, MMA Vie et [...] à l'indemniser et à lui payer la somme de 100.000 euros en réparation du préjudice subi,
- condamner les sociétés [...], MMA IARD, MMA IARD Assurances Mutuelles, MMA Vie et [...] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,
- débouter les sociétés [...], MMA IARD, MMA IARD Assurances Mutuelles, MMA Vie et [...] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
Par conclusions déposées le 11 juin 2019, la SA MMA Vie demande à la présente juridiction de :
- confirmer le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 23 octobre 2018 sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts, et de :
- dire et juger les demandes de M. [J] à son encontre irrecevables du fait de la prescription et mal fondées,
- débouter M. [J] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
A titre subsidiaire :
- dire et juger qu'elle a parfaitement satisfait à ses obligations,
- dire et juger que M. [J] n'est pas fondé à engager sa responsabilité et le débouter de l'ensemble de ses demandes,
- prononcer sa mise hors de cause,
A titre infiniment subsidiaire :
- dire et juger que M. [J] ne justifie d'aucun préjudice réel et sérieux et le débouter de l'ensemble de ses demandes,
En toute hypothèse :
- condamner M. [J] à lui payer une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- condamner M. [J] à lui payer une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- la [le'] condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Annabelle Lefevre, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières écritures déposées le 8 avril 2019, les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles demandent à la cour de :
- confirmer purement et simplement le jugement rendu par le tribunal de grande instance du Mans le 23 octobre 2018 en ce qu'il a jugé prescrite l'action de M. [J] ainsi qu'en ses autres dispositions relatives à l'article 700 et à la charge des dépens,
- débouter M. [J] de l'ensemble des arguments et des demandes qu'il présente au soutien de son appel,
- en conséquence, en application des articles L.114-1 et suivants du Code des assurances ainsi que du bulletin d'adhésion signé de M. [J] et en application des dispositions de l'article 2224 du Code civil, dire et juger prescrites les demandes de M. [J] à leur encontre et débouter M. [J] de sa demande visant à ce que son action soit jugée recevable,
Subsidiairement, pour le cas où la cour d'appel viendrait à juger recevable l'action de M. [J] :
- dire et juger que M. [J] est mal fondé en ses demandes présentées à leur encontre, lesdites sociétés étant des entités distinctes de la MMA Vie et M. [J] ne rapportant pas la preuve d'une faute délictuelle qui aurait été commise par elles ou encore d'un lien de droit entre lesdites entités et la société [...],
- dire et juger que M. [J] ne rapporte pas non plus la preuve du lien de causalité entre le manquement qu'il leur reproche et le préjudice qu'il dit subir ni la preuve d'un préjudice actuel, réel, sérieux et liquide,
- débouter M. [J] des demandes indemnitaires qu'il présente à leur encontre,
- débouter M. [J] de la demande d'indemnité qu'il présente à leur encontre en application de l'article 700 et le condamner à leur verser une indemnité à chacune d'elle d'un montant de 2.500 euros en application de l'article 700 soit 5.000 euros au total,
- débouter M. [J] de sa demande visant à ce que les dépens soient supportés par elles in solidum avec les autres parties et condamner M. [J] aux entiers dépens de l'appel,
- faire application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile au profit de Me Heron avocat.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 25 avril 2022, la société [...] demande à la cour, de :
- juger que M. [J] est irrémédiablement prescrit en ses demandes,
A titre subsidiaire :
- juger qu'elle n'a commis aucune faute,
A titre infiniment subsidiaire :
- juger que M. [J] ne justifie pas d'un préjudice réparable présentant un quelconque lien de causalité avec les fautes invoquées,
A titre reconventionnel :
- condamner M. [J] à lui verser une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
En tout état de cause :
- débouter M. [J] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner M. [J] au paiement d'une somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens [dont] distraction au profit de Me Nasri par application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions ci-dessus mentionnées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la prescription :
En droit, l'article 2224 du Code civil dispose que : 'Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer'.
En outre l'article L 114-1 du Code des assurances prévoit en son premier alinéa, que : 'Toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance'.
Le premier juge a observé que l'action de M. [J] était fondée sur un manquement de l'assureur à ses obligations de conseil et d'information de sorte qu'il ne pouvait être considéré qu'elle dérivait d'un contrat d'assurance. Dans ces conditions, le délai de prescription d'exception posé par l'article L 114-1 du Code des assurances ne trouvait pas à s'appliquer. Par ailleurs et sur le fond de la fin de non-recevoir, il a été rappelé que si le client faisait grief à ses contradictrices de ne pas l'avoir informé des risques de fluctuation à la baisse du contrat, il n'en demeurait pas moins qu'il avait été rendu destinataire des relevés d'information annuels et notamment de celui du 31 décembre 2008 qui faisait d'ores et déjà apparaître une baisse du capital au regard des années précédentes. Au surplus, il a été souligné que M. [J] fondait notamment ses prétentions sur cette baisse constatée dès décembre 2008. Il a donc été considéré que la prescription visée à l'article 2224 du Code civil avait commencé à courir à compter de la réception de cette information annuelle et non au jour où il a décidé d'interroger le gestionnaire du contrat, de sorte qu'en agissant au cours du mois de janvier 2017, il est tardif et partant prescrit en ses demandes.
Aux termes de ses dernières écritures, l'appelant indique qu'il est de jurisprudence constante que l'action en responsabilité à l'encontre de l'assureur ayant manqué à ses obligations précontractuelles d'information et de conseil ne dérive pas du contrat d'assurance de sorte que le délai biennal de prescription ne s'applique pas. Par ailleurs, il souligne que son action à l'encontre de la société [...] est indépendante du contrat d'assurance, dès lors que cette personne morale n'en était que le gestionnaire. Sur le point de départ du délai de prescription quinquennal, il indique n'avoir pris conscience de son préjudice qu'à compter de ses échanges de mails avec la société [...] du 13 février 2012. A ce titre, il indique que 'la Cour de cassation considère que le dommage consistant en la perte de la chance d'éviter la réalisation d'un risque financier ne peut survenir qu'au jour où les gains manqués et les pertes subies sont révélés aux souscripteurs de façon certaine', il en déduit donc que son préjudice s'est réalisé au moment où il a été informé 'du caractère volatile de son investissement financier'. Il soutient donc que ce n'est qu'au cours du mois de février 2012 qu'il 'a pris conscience' des risques attachés à son investissement, dans le cadre des échanges avec le gestionnaire du contrat, où ce dernier lui a précisé que la baisse de son épargne était liée au fait qu'il s'agissait d'un placement reposant sur des unités de compte. S'agissant du point de départ du délai retenu par le premier juge, il rappelle qu'en application de l'article 2224 du Code civil, il doit correspondre à 'un jour' (déterminé). Or il a été mentionné que cette date correspondait à la réception du relevé d'information de décembre 2008, sans qu'elle puisse être déterminée, puisqu'ignorée de tous outre que ce document n'est lui-même pas daté. De plus, il soutient que ce document est 'incomplet et peu lisible' et au surplus non conforme aux dispositions de l'article L132-22 du Code des assurances, pour ne pas comporter toutes les informations qui y sont visées. Ainsi, il indique que ce relevé ne comporte aucune mise en garde quant au caractère fluctuant des unités de compte, pas plus qu'il ne mentionne l'évolution annuelle de leur valeur depuis la souscription du contrat... Dans ces conditions, il affirme qu''un relevé d'information annuel, non conforme aux prescriptions légales ne peut raisonnablement être considéré comme ayant été suffisant pour informer son destinataire de son droit d'action'. En tout état de cause, il soutient que le délai de prescription a été interrompu en exécution de l'article 905 du bulletin d'adhésion litigieux, par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception le 20 février 2012. Il conclut donc à la recevabilité de ses demandes.
Aux termes de ses dernières écritures la société MMA Vie soutient que la prescription biennale de l'article L 114-1 du Code des assurances a vocation à s'appliquer en l'espèce, dès lors que son contradicteur entend invoquer un défaut d'information et de conseil à l'encontre de tous les intimés. A ce titre, elle souligne que l'appelant a, chaque année, reçu une information quant à la situation de son contrat, aux termes desquelles il a pu constater une baisse dès 2008, sans solliciter d'explication à ce titre. Elle affirme donc que le délai de prescription a commencé à courir à compter de cette date. En tout état de cause, l'intimée indique que si le délai retenu est celui de l'article 2224 du Code civil, la prescription est également acquise, dès lors que son contradicteur ne conteste aucunement avoir reçu les relevés d'information, qu'au demeurant il produit lui-même aux débats. S'agissant du caractère irrégulier de l'avis délivré au titre de l'année 2008, elle soutient que l'appelant ne fait pas preuve de bonne foi en ne produisant qu'une pièce incomplète. Par ailleurs sur l'interruption de prescription visée à l'article 905 du bulletin d'adhésion, l'intimée souligne qu'elle n'est pas intervenue dès lors que le courrier recommandé invoqué par l'appelant n'a pas été adressé à la société visée par ces stipulations.
Aux termes de leurs dernières écritures les deux autres sociétés MMA indiquent également que l'article L 114-1 du Code des assurances a vocation à s'appliquer, et qu'au surplus le contrat rappelle expressément que 'toutes actions dérivant du contrat est prescrite (sic) à compter de l'événement qui y donne naissance par deux ans à l'égard de l'adhérant'. Ainsi, elles concluent à l'application d'un délai biennal de prescription dès lors que 'la demande de M. [J] se fonde bien sur les stipulations du bulletin d'adhésion qu'il a signé puisqu'il affirme n'avoir pas été suffisamment informé et conseillé dans le cadre de la signature dudit bulletin'. Au surplus, elles observent que leur contradicteur se fonde lui-même sur les stipulations de ce bulletin dès lors qu'il invoque son article 905 s'agissant de l'interruption du délai de sorte que 'si l'appelant se fonde sur les stipulations du bulletin d'adhésion, cela signifie que son action découle du contrat qu'il a signé et que, par conséquent, la prescription biennale lui est opposable' (notamment celle de l'article 904 de la convention). En tout état de cause et si ce délai ne devait pas être retenu, les intimées indiquent que l'article 2224 du Code civil trouve à s'appliquer et que le délai qui y est prévu a commencé à courir le 19 juin 2008. S'agissant du point de départ du délai de prescription, elles soulignent que l'appelant a lui-même admis, par mail du 13 février 2012, avoir annuellement reçu les informations relatives à son contrat. Au regard de cet aveu, les intimées indiquent que quand bien même l'information sur l'état du capital au 31 décembre 2008, avait été reçue en fin d'année 2009, il n'en demeure pas moins que l'action de l'appelant est prescrite au regard d'une assignation délivrée en 2017. De plus, elles rappellent que leur contradicteur est directeur de société et était avisé par la seule lecture du bulletin d'adhésion que 'les versements [qu'il effectuait, servaient] à acquérir des SICAV' et partant du caractère fluctuant de son placement. Enfin, s'agissant de l'interruption de la prescription, si elle devait être retenue, cela implique nécessairement l'application du délai biennal, de sorte qu'en invoquant un événement survenu en 2012, l'appelant est d'ores et déjà tardif au regard d'un délai ayant commencé à courir courant 2008/2009, mais au surplus il aurait dû dans ce cas agir courant 2014, si l'action n'était pas déjà prescrite. En tout état de cause, elles soulignent que cette lettre est mal adressée et qu'au surplus seul un accusé de réception est produit.
Aux termes de ses dernières écritures la société [...] indique que la concernant seules les dispositions de l'article 2224 s'appliquent et que son contradicteur a pu constater l'absence de garantie en capital de son placement plus de cinq ans avant l'assignation délivrée. A ce titre elle observe que la lettre d'information relative à l'année 2006, expose que l'assureur ne s'engage que sur le nombre d'unités de compte et non sur leur valeur qui n'est pas garantie. Elle en conclut que dès cette date il était possible à l'appelant d'agir sur le fondement de la perte de chance qu'il invoque présentement. Par ailleurs, elle souligne que l'appelant a pu constater l'existence d'un rendement négatif dès l'information relative à l'année 2008 dont la réception n'est pas contestée et qui n'a pu intervenir qu'au cours de l'année 2009. S'agissant du caractère non conforme des avis produits, l'intimée observe que l'appelant limite sa communication à la seule première page d'un courrier en comportant quatre, les trois autres pages comportant les éléments argués d'absents. S'agissant du point de départ invoqué par l'appelant, l'intimée indique qu'en faisant partir la prescription à compter de son interrogation sur la diminution du capital, il 'rend de facto son action imprescriptible' et 'serait le seul maître de la date à laquelle il a choisi de réagir'. Enfin s'agissant de l'interruption alléguée, elle rappelle que le Code civil ne présente pas la lettre recommandée avec demande d'avis de réception comme en étant une cause et que l'article 905 invoqué résulte d'une convention à laquelle elle n'est pas partie et qu'en tout état de cause, cet article et celui qui le précèdent ne sont que la reprise des articles L114-1 et -2 du Code des assurances et portent donc sur les actions dérivant du contrat ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Sur ce :
En l'espèce, il résulte des écritures de l'appelant que ses demandes en réparation ne résultent pas de difficultés survenues lors de l'exécution de la convention régularisée courant décembre 1991, mais de manquements allégués des intimés à leurs obligations précontractuelles d'information et de conseil et sollicite donc en conséquence l'indemnisation du préjudice lié à la perte de chance de ne pas souscrire un placement plus sécurisé.
Ainsi cette action ne dérivant aucunement du contrat litigieux, puisqu'elle porte nécessairement sur des informations dont il est affirmé qu'elles auraient dû être délivrées antérieurement à sa conclusion, seul le délai de prescription de droit commun posé par l'article 2224 du Code civil s'applique aux diverses sociétés MMA, à l'exclusion de celui présenté par l'article L 114-1 du Code des assurances, par ailleurs repris par l'article 904 des conditions générales litigieuses.
S'agissant du point de départ de ce délai, il est communiqué aux débats copie des informations annuelles adressées à l'appelant au titre de son placement 'Evidence 2" au 31 décembre 2008, cette pièce mentionnant notamment : 'Rappel : montant de votre capital au 31/12/2007 : 92.278,83 euros'. Cette précision est à mettre en relation avec le même montant une année plus tard qui est présenté comme étant de 58.235,50 euros.
De plus, cette pièce expose que les 'performances nettes de l'unité de compte (coupon réinvesti)' ont connu sur un an une évolution de -39,18% et sur 5 ans +1,21%.
Il en résulte que la seule lecture de cette pièce permettait à l'appelant de se convaincre 'de la volatilité de son capital', puisqu'il y est expressément fait état d'une baisse de son capital de plus de 30.000 euros soit de plus de 30%.
Par ailleurs, s'agissant de la réception de cet avis par M. [J], il doit être souligné que par courriel du 13 février 2012, il mentionnait : 'les faits suivants ont été constatés après examen de vos courriers transmis annuellement sur la situation du contrat :
- Montant du capital au 31/12/2007 : 92278,83 Eur
- Montant du capital au 31/12/2008 : 58235,50 Eur'.
Ainsi, l'appelant y admet lui-même avoir reçu les avis annuels portant sur la situation de son placement.
S'agissant du caractère éventuellement non conforme de ces avis par rapport aux prescriptions de l'article L 133-22 du Code des assurances, il doit être souligné qu'il est sans incidence en l'espèce, dès lors qu'il est uniquement recherché la date à partir de laquelle l'appelant a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance de la 'volatilité de son investissement financier' étant au surplus observé que l'irrégularité de l'avis n'est aucunement sanctionnée par une quelconque invalidité ou nullité.
Ainsi et dès lors que l'appelant admet avoir annuellement reçu à tout le moins partie de l'information légalement prévue et en tous les cas avoir été avisé de l'évolution de son capital, il ne peut qu'être considéré qu'au plus tard au cours de l'année 2009, il a reçu l'avis portant à sa connaissance le fait que, sur l'année antérieure, son capital avait connu une baisse de plus de 30%.
Ainsi au cours de l'année 2009, l'appelant a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance du fait que le placement qu'il avait souscrit comportait des risques, dès lors que ces derniers s'étaient déjà manifestés et cette concrétisation de la 'volatilité' de son placement lui avait été notifiée par un avis qu'il admet lui-même avoir reçu.
Par ailleurs, concernant l'interruption du délai qu'il allègue et qui résulte de l'article 905 des conditions générales ('le délai de prescription peut être interrompu dans les cas ordinaires d'interruption ou par l'envoi à la Mutuelle du Mans Assurances Vie d'une lettre recommandée avec avis de réception par l'adhérent ou le bénéficiaire'), il doit être souligné que l'appelant se borne à produire un avis d'envoi ainsi qu'un avis de réception mentionnant MMA Assurances et l'adresse de la société MMA Vie.
Cependant, outre que l'interruption mentionnée à cet article vise manifestement le délai mentionné à l'article qui le précède et qui est lié aux actions dérivant du contrat, le seul caractère relativement concomitant de cet envoi avec les courriels manifestant le mécontentement du client face à la baisse de ses placements, n'est pas de nature à démontrer le contenu de la missive ainsi envoyée.
De l'ensemble, il résulte qu'au cours de l'année 2009 au plus tard, M. [J] était avisé du caractère 'volatile' du placement qu'il avait souscrit, de sorte que le délai de prescription de la présente action a commencé à courir au cours de cette année, sans avoir été interrompu, de sorte qu'en agissant plus de sept ans plus tard, il ne peut qu'être considéré comme étant tardif en son action en réparation.
Dans ces conditions la décision de première instance doit être confirmée en ce qu'elle a déclaré ses demandes irrecevables pour être prescrites.
Sur les demandes reconventionnelles en réparation :
En droit, l'article 32-1 du Code de procédure civile dispose que : 'Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés'.
Le premier juge constatant que les sociétés [...] et MMA Vie ne démontraient pas l'existence d'un préjudice à indemniser, a rejeté leurs demandes en réparation.
Aux termes de ses dernières écritures, la société [...] observe qu'alors même que le placement litigieux permet à l'appelant la réalisation d'une plus-value, une action en réparation a été introduite par ce dernier aux fins 'manifestement de battre monnaie' à son détriment. Elle souligne au demeurant, que son contradicteur, manifestement prescrit, a poursuivi son entreprise en appel, détournant les voies procédurales, à 'son préjudice', mettant ainsi en cause 'fallacieusement' son professionnalisme. Elle sollicite donc l'infirmation de la décision de première instance et la condamnation de l'appelant au paiement d'une somme de 2.000 euros 'au titre de la procédure qu'il a abusivement engagée'.
Aux termes de ses dernières écritures, la société MMA Vie indique que les prétentions de son contradicteur sont infondées et que dans ces conditions, il convient d'infirmer le jugement et de condamner l'appelant à lui verser une somme de 2.000 euros 'au titre de la procédure qu'il a abusivement engagée'.
Aux termes de ses dernières écritures, l'appelant ne conclut pas spécialement à ce titre sauf à solliciter le rejet de l'ensemble des prétentions de ses contradictrices.
Sur ce :
En l'espèce, les sociétés intimées ne précisent pas même quelle serait la nature du préjudice dont elles sollicitent présentement réparation.
Dans ces conditions, la décision de première instance doit être confirmée en ce qu'elle a rejeté les demandes reconventionnelles en réparation.
Sur les demandes accessoires :
L'appelant qui succombe doit être condamné aux dépens.
En outre l'équité commande de le condamner au paiement à :
- la société [...] de la somme de 3.500 euros,
- la société MMA Vie de la somme de 3.500 euros,
- la société MMA IARD de la somme de 1.750 euros,
- la société MMA IARD assurances mutuelles de la somme de 1.750 euros,
en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Enfin au regard de l'issue du présent litige, la décision de première instance s'agissant de ses dispositions relatives aux demandes accessoires doit être confirmée.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
CONFIRME, dans les limites de sa saisine, le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 23 octobre 2018 ;
Y ajoutant :
CONDAMNE M. [N] [J] au paiement à la SAS [...] de la somme de 3.500 euros (trois mille cinq cents euros) par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [N] [J] au paiement à la SA MMA Vie de la somme de 3.500 euros (trois mille cinq cents euros) par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [N] [J] au paiement à la SA MMA IARD de la somme de 1.750 euros (mille sept cent cinquante euros) par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [N] [J] au paiement à la société MMA IARD Assurances mutuelles de la somme de 1.750 euros (mille sept cent cinquante euros) par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [N] [J] aux dépens ;
ACCORDE aux conseils de l'ensemble des sociétés intimées le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
C. LEVEUF C. MULLER