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28/02/2023 | FRANCE | N°21/00004

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre prud'homale, 28 février 2023, 21/00004


COUR D'APPEL

d'ANGERS

Chambre Sociale













ARRÊT N°



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00004 - N° Portalis DBVP-V-B7F-EYAB.



Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 04 Décembre 2020, enregistrée sous le n° F19/00457





ARRÊT DU 28 Février 2023





APPELANT :



Monsieur [G] [D]

[Adresse 1]

[Localité 4]



représenté par M

e Véronique PINEAU de la SELARL ATLANTIQUE AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Maître SALQUAIN, avocat plaidant au barreau de NANTES







INTIMEE :



Association MONTJOIE

[Adresse 2]

[...

COUR D'APPEL

d'ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N°

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00004 - N° Portalis DBVP-V-B7F-EYAB.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 04 Décembre 2020, enregistrée sous le n° F19/00457

ARRÊT DU 28 Février 2023

APPELANT :

Monsieur [G] [D]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Véronique PINEAU de la SELARL ATLANTIQUE AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Maître SALQUAIN, avocat plaidant au barreau de NANTES

INTIMEE :

Association MONTJOIE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Luc LALANNE de la SCP LALANNE - GODARD - HERON - BOUTARD - SIMON, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 20191072

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2022 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame DELAUBIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Estelle GENET

Conseiller : Mme Marie-Christine DELAUBIER

Conseiller : Mme Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS

Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN

ARRÊT :

prononcé le 28 Février 2023, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame DELAUBIER, conseiller pour le président empêché, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE

L'association Montjoie, constituée sous forme d'association loi 1901 reconnue d'intérêt général, anime des services d'accueil aux jeunes et aux adultes défavorisés en vue de leur socialisation et de leur insertion dans la société. Elle emploie plus de onze salariés et applique la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.

M. [G] [D] a été engagé par l'association Montjoie dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 20 février 2017 en qualité de directeur du centre de soins et d'accompagnement à la prévention des addictions (CSAPA), du centre d'accueil et d'accompagnement à la rééducation des risques pour les usagers de la drogue (CAARUD) et de directeur délégué adultes.

En dernier état de la relation contractuelle, sa rémunération mensuelle brute s'élevait à la somme de 4275,12 euros.

Par courrier du 19 octobre 2018, l'association Montjoie a convoqué M. [D] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 29 octobre suivant.

Puis, par lettre remise en mains propres contre décharge le 5 novembre 2018, l'association Montjoie a notifié à M. [D] son licenciement pour insuffisance professionnelle lui reprochant une 'carence de management et d'appui' envers Mme [J] [V], la nouvelle directrice du centre provisoire d'hébergement (CPH), mais aussi de ne pas avoir 'insufflé à ses équipes la dimension associative de la politique des ressources humaines', de ne pas avoir travaillé en transparence avec le bureau et ses homologues et enfin, de ne pas s'être rendu à la réunion de prise de décision du 26 octobre 2018 concernant l'arrêt de l'activité du dispositif FSL.

Contestant le bien-fondé de son licenciement, M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes du Mans le 28 octobre 2019 pour obtenir la condamnation de l'association Montjoie à lui verser, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire, le reliquat de l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis, un rappel de salaire au titre des congés trimestriels acquis et non pris, un rappel de salaire pour la fonction de directeur des ACT72 et les congés payés afférents, le remboursement des frais professionnels exposés, un rappel de salaire suite à la revalorisation du point de la convention collective applicable à compter du 1er février 2018 et les congés payés afférents, et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'association Montjoie s'est opposée aux prétentions de M. [D] et a sollicité sa condamnation au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 4 décembre 2020, le conseil de prud'hommes a :

- dit que les éléments invoqués dans la lettre de licenciement sont avérés et que le licenciement de M. [D] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- en conséquence, débouté M. [D] de ses demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire ;

- débouté encore M. [D] de ses demandes de paiement :

- du solde d'indemnité de licenciement ;

- du rappel d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents;

- du rappel au titre des congés trimestriels acquis et non pris ;

- du rappel de salaire au titre des fonctions de directeur des ACT 72 ;

- et du remboursement de frais exposés dans le cadre de son contrat de travail ;

- dit que la valeur du point dans la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées est de 3,80 euros à compter du 1er février 2019 et en conséquence condamné l'association Montjoie à verser la somme de 38,50 euros brut à M. [D] à titre de rappel sur salaire et 3,85 euros brut au titre des congés payés y afférents ;

- débouté l'association Montjoie de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. [D] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement pour la totalité des condamnations à caractère salarial au visa de l'article R. 1454-28 du code du travail ;

- condamné l'association Montjoie aux entiers dépens.

M. [D] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique au greffe de la cour d'appel le 5 janvier 2021, son appel portant sur tous les chefs lui faisant grief ainsi que ceux qui en dépendent et qu'il énonce dans sa déclaration.

L'association Montjoie a constitué avocat en qualité d'intimée le 11 janvier 2021.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 23 novembre 2022 et le dossier a été fixé à l'audience du conseiller rapporteur du 12 décembre 2022.

*

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [D], dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 6 avril 2021, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

- le recevoir en son appel et l'y déclarer bien fondé ;

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le rappel de salaire de 38,50 euros et le rappel de congés payés de 3,85 euros ;

Statuant à nouveau :

- dire que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamner l'association Montjoie au paiement de la somme de 17 956,43 euros à titre de dommages intérêts ;

- dire que son licenciement revêt un caractère vexatoire ;

- condamner l'association Montjoie au paiement de la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice subi ;

- condamner l'association Montjoie au paiement de la somme de 6771,59 euros à titre de rappel de 'prime de licenciement' ;

- condamner l'association Montjoie au paiement de la somme de 5888 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de préavis ;

- condamner l'association Montjoie au paiement de la somme de 588 euros au titre des congés payés ;

- condamner l'association Montjoie au paiement de la somme de 3758,39 euros à titre de rappel de congés payés ;

- dire et juger qu'il a assuré les fonctions de directeur des ACT 72 de février 2017 à février 2018 ;

- condamner l'association Montjoie au paiement de la somme de 3600 euros à titre de rappel de salaire, outre 360 euros au titre des congés payés afférents ;

- condamner l'association Montjoie au paiement de la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant le conseil de prud'hommes, outre 2000 euros au titre des frais exposés en cause d'appel ;

- condamner la même en tous les dépens.

Au soutien de son appel, M. [D] fait valoir que son licenciement pour insuffisance professionnelle est en réalité un 'licenciement économique déguisé', relevant qu'il n'a jamais été remplacé à son poste. Il soutient par ailleurs que les missions confiées n'ont pas été précisément définies et qu'il ne disposait d'aucune fiche de poste, à l'exception de celle établie pour la direction de l'ACT72.Il indique que l'association Montjoie a eu le temps d'apprécier ses qualités professionnelles dès lors qu'il a été définitivement recruté au terme d'une période d'essai de quatre mois. Enfin, il assure qu'il remplissait ses fonctions avec professionnalisme et sérieux et qu'il n'a fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire pendant l'exécution de son contrat de travail.

*

L'association Montjoie, dans ses dernières conclusions, adressées au greffe le 5 mai 2021, régulièrement communiquées, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris ;

- par voie de conséquence, débouter M. [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- à titre reconventionnel, condamner M. [D] au paiement d'une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

À titre liminaire, l'association Montjoie fait observer que M. [D] se contente de solliciter la réformation du jugement de première instance sans motiver ses demandes.

L'employeur soutient ensuite que le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. [D] est justifié par les quatre griefs mentionnés dans la lettre de licenciement lesquels sont précis et vérifiables.

En premier lieu, il affirme que M. [D] a eu un comportement non professionnel et irrespectueux à l'égard de Mme [J] [V] lors de sa prise de fonction au poste de directrice du centre provisoire d'hébergement.

En second lieu, l'association Montjoie met en avant le manque d'implication de M. [D] dans la politique 'RH' de l'association et indique qu'il dénigrait la posture de Mme [E] [I] en sa qualité de directrice des ressources humaines de l'association.

L'association Montjoie reproche ensuite le manque de transparence de M. [D] avec le bureau et ses homologues. À cet égard, elle indique qu'il ne leur a pas transmis un courriel d'alerte de Mme [J] [V] relatif à sept logements en état d'insalubrité extrême, et qu'il ne les a pas informés des difficultés budgétaires rencontrées concernant le dispositif de fonds de solidarité logement aux administrateurs.

Enfin, l'employeur assure que M. [D] ne s'est pas présenté à une réunion du 26 octobre 2018 dont l'objectif était de statuer sur l'arrêt éventuel de l'activité du dispositif du fonds de solidarité logement de la direction adulte alors que sa présence était particulièrement nécessaire.

L'association Montjoie estime par ailleurs que les circonstances du licenciement de M. [D] ne sont ni brutales ni vexatoires et qu'il ne justifie en tous cas d'aucun préjudice à ce titre.

Enfin, l'association Montjoie relève que le salarié ne produit aucun élément permettant de justifier sa demande de rappel de salaire pour la période de février 2017 à février 2018. Elle rappelle aussi que M. [D] n'a pas pris ses congés trimestriels durant le trimestre concerné de sorte que le salarié les a définitivement perdus sans contrepartie financière possible.

***

MOTIVATION

Liminairement, il sera relevé que M. [D] n'a pas interjeté appel des dispositions du jugement ayant dit que la valeur du point dans la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées est de 3,80 euros à compter du 1er février 2019 et en conséquence condamné l'association Montjoie à lui verser la somme de 38,50 euros brut à titre de rappel sur salaire et 3,85 euros brut au titre des congés payés y afférents. Ces dispositions, non critiquées par l'association Montjoie qui n'a pas relevé appel incident, sont désormais définitives.

En outre, la cour, statuant dans les limites de l'appel dont la portée est déterminée au regard des dernières conclusions, constate que M. [D] ne présente plus aucune demande au titre de ses frais professionnels de sorte que les dispositions du jugement l'ayant débouté de cette demande sont aussi définitives.

- Sur le bien fondé du licenciement :

Selon l'article L. 1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

En application de l'article L. 1235-1 du même code, en cas de litige portant sur le licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles et si un doute subsiste, il profite au salarié.

Selon l'article L. 1232-6 du même code, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur. Cette lettre, qui fixe les limites du litige, doit être suffisamment motivée et viser des faits et griefs matériellement vérifiables, sous peine de rendre le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse. Toutefois, lorsque l'employeur invoque une insuffisance professionnelle, la mention de celle-ci dans la lettre de licenciement constitue un grief matériellement vérifiable au sens de l'article L. 1232-6 du code du travail qui peut être précisé et discuté devant les juges du fond. Il n'est donc pas nécessaire que tous les éléments objectifs susceptibles d'être invoqués par l'employeur au titre de l'insuffisance professionnelle soient détaillés dans la lettre de licenciement.

L'insuffisance professionnelle, qui traduit l'incapacité objective et durable du salarié à exercer de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification, constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu'elle repose sur des éléments concrets et objectifs imputables au salarié.

Si l'appréciation des aptitudes professionnelles et de l'adaptation à l'emploi relève du pouvoir de l'employeur, pour justifier le licenciement, les griefs doivent être suffisamment pertinents, matériellement vérifiables et perturber la bonne marche de l'entreprise ou être préjudiciables aux intérêts de celle-ci.

En l'espèce, la lettre de licenciement du 5 novembre 2018 comporte quatre motifs d'insuffisance professionnelle qu'il convient d'examiner successivement.

1) Sur la carence en management envers Mme [J] [V]:

La lettre de licenciement énonce ce motif dans les termes suivants :

'- votre management envers la nouvelle directrice du CPH, Mme [J] [V] est une carence de management et d'appui dans ses fonctions de votre place de directeur délégué.

. Vous n'avez pas transmis les documents lui permettant une bonne prise de fonction en date du 18 juin 2018 :

- projet du dispositif

- dossiers des usagers présents à son arrivée

- plan des locaux et précision sur les aménagements déjà envisagés avant sa prise de fonction

- fiches des logements en cours

- réponse à l'appel à projet du dispositif du CPH

- au 21 septembre Mme [J] [V] n'avait toujours pas le projet social de la Maison relais alors que la prise de fonction en qualité de directrice de ce dispositif s'est effectuée le 13 juillet 2018.

. Vous n'avez pas pris la peine de la présenter :

- aux usager présents du dispositif du CPH le jour de sa prise de fonction

- à ses homologues présents lors de l'assemblée générale en date du 19 juin 2018

- aux partenaires locaux

- à l'équipe de la Maison relais lors de la prise de fonction de direction en date du 13 juillet 2018.

. Vous ne l'avez pas informée de l'ensemble des partenariats et des personnes ressources du territoire. Vous n'avez pas été dans le soutien et l'accompagnement.

. Vous n'avez pas laissé toute la latitude à cette directrice d'effectuer les recrutements comme elle le souhaitait en lui imposant de recevoir des professionnels en interne qui ne pouvaient correspondre au budget dont dispose le dispositif.

. Le 29 octobre à 7H42 vous informez, par mail, Madame [J] [V] qu'elle est d'astreinte 15 jours consécutifs à compter du même jour. C'est un défaut de management certain.'

Il ressort des éléments communiqués par l'employeur que dès le 26 juillet 2018, Mme [U], responsable de formation Montjoie, a fait état par écrit des difficultés rencontrées par Mme [J] [V], engagée depuis le 17 juin précédent en qualité de nouvelle directrice du CPH, exprimant une situation de 'malaisance' susceptible de constituer une situation de 'maltraitance' de la part de M. [D] et en tout cas un comportement non professionnel et irrespectueux (pièce 9).

Par courriel du 30 juillet 2018, Mme [N], directrice générale et directrice déléguée Ressources et Contrôle de l'association, a demandé à Mme [E] [I], directrice des ressources humaines, d'organiser une rencontre avec Mme [J] [V] afin de faire le point sur ses relations avec son supérieur hiérarchique, M. [D]. Elle précisait que Mme [J] [V] semblait 'en difficultés par rapport à cela', s'étant exprimée de 'façon informelle à une salariée de la DG. Ses propos nous ont un peu inquiétés et interrogés' (pièce 10).

Le compte-rendu de l'entretien de Mme [E] [I] ayant rencontré le 1er août 2018, à la demande de Mme [N], Mme [J] [V], confirme les multiples difficultés subies par cette dernière lors de sa prise de fonctions du 18 juin 2018 s'agissant en particulier de l'absence de transmission des documents sur le CPH (projet d'établissement, dossiers des usagers, fiches de logements...). Mme [J] [V] regrettait aussi que M. [D] ne l'ait pas présentée ni aux autres membres de la direction, ni aux salariés, ni aux partenaires présents, en particulier lors de l'assemblée générale du 19 juin suivant, et ne l'ait 'pas informée des personnes ressources, tant à l'interne qu'à l'externe'. Ce compte-rendu résumait le ressenti de Mme [J] [V] en ces termes : 'systématiquement dévalorisée - contrée par M. [D]', 'M. [D] cherche à lui mettre des bâtons dans les roues dans l'exercice de ses missions'. La nouvelle directrice concluait que 'M. [D] tente de la déstabiliser notamment en l'informant que le CPH n'est pas le timing attendu par le financeur, (...) en ne l'introduisant pas auprès des partenaires, en lui reprochant d'échanger trop souvent avec la DRH, en lui demandant de signer des conventions sans qu'elle en maîtrise les tenants et les aboutissants' (pièce 11).

Il ressort encore d'un compte-rendu d'une réunion du 7 août 2018 organisée à la demande de M. [D] en présence de Mme [E] [I] et de Mme [J] [V] pour 'faire le point sur les modalités de recrutement sur le dispositif CPH', qu'afin de favoriser la mobilité interne, M. [D] a 'imposé à Mme [J] [V] de recevoir Mme [R] en entretien' alors que l'intéressée, aux termes d'un précédent échange téléphonique, lui avait déjà indiqué que son organisation ne lui permettrait pas de travailler à plein temps tel que demandé. Mme [E] [I] relevait également que M. [D] 'n'accorde pas de crédit à la parole de Mme [J] [V]' (pièce 12).

Dans son attestation, Mme [J] [V] reproche à M. [D] en particulier de ne pas lui avoir fourni les éléments nécessaires à sa prise de fonction, relevant qu'il lui manquait toujours 'le projet social de la Maison Relais et de la Résidence sociale' au 21 septembre 2018. Concernant les 'partenaires et les personnes ressources du territoire', elle confirmait qu'ils ne lui 'ont pas été présentés à [sa] prise de fonction, ce qui a été compliqué pour ne serait-ce réaliser certains projets ou actions sur les établissements'. Elle précisait aussi qu'elle avait 'toujours une appréhension de lui nommer [ses] choix des candidats surtout quand ils'agissait de refuser la (les) candidature(s) en interne' pour les recrutements sur le dispositif du centre provisoire d'hébergement (pièce 22).

Enfin, il est établi que M. [D] a informé Mme [J] [V] le 29 octobre 2018 qu'elle serait d'astreinte à compter du jour même et ce pour une durée de 15 jours (échange de courriels entre M. [D] et Mme [J] [V] entre le 22 octobre 2018 et 29 octobre 2018 : pièce 13). Cependant, il doit être relevé que les faits ainsi dénoncés sont postérieurs à l'envoi de la convocation du directeur à l'entretien préalable du 19 octobre 2018 de sorte qu'ils ne sauraient justifier a posteriori la décision prise par l'association d'engager une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle.

M. [D] ne conteste pas son défaut de présentation des partenaires, des personnes ressources du territoire, des usagers du dispositif du CPH ou encore de ses homologues lors de l'assemblée générale du 19 juin 2018.

Ilse défend en faisant valoir l'absence de définition contractuelle précise des missions à accomplir, sans prétendre toutefois que les manquements reprochés ne relevaient pas de ses attributions. De fait, l'organigramme de l'association communiqué par le salarié lui-même (pièce 11) révèle que la délégation adulte qu'il dirigeait comprenait outre les établissements de santé et de soins tels que le CSAPA, le CAARUD et le ACT72 les établissements d'insertion par le logement tels que le centre provisoire d'hébergement (CPH) ou encore le centre de demandeur d'asile. Dès lors, en sa qualité de directeur de la délégation adulte, M. [D] se devait de favoriser l'accueil de la nouvelle directrice du CPH et de lui permettre d'assumer pleinement et efficacement ses nouvelles responsabilités.

Or, les éléments communiqués par l'association Montjoie confirment que M. [D] n'a aucunement favorisé l'accueil et la prise de fonctions de Mme [J] [V] en omettant de la présenter auprès des personnes ressources du territoire, des usagers du dispositif du CPH ou encore de ses homologues lors de l'assemblée générale du 19 juin 2018. Il ne lui a pas davantage communiqué les éléments de présentation de la structure qu'elle devait diriger.

Le compte-rendu de la réunion du 7 août 2018 confirme également que le directeur délégué n'a pas laissé toute la latitude à Mme [J] [V] pour les recrutements sur le dispositif du centre provisoire d'hébergement. Pourtant, Mme [J] [V] avait la responsabilité des recrutements sur le dispositif du centre provisoire d'hébergement compte tenu de ses fonctions de directrice.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments, à l'exception de la question relative à l'astreinte, que M. [D] n'a pas accompagné Mme [J] [V] lors de sa prise de fonction en qualité de directrice et ce sur plusieurs mois. Cette carence et ce manque de considération à son égard ont incontestablement fragilisé la nouvelle responsable du CPH alors qu'elle débutait dans ses nouvelles fonctions, ce qui apparaît préjudiciable aux intérêts de l'association.

- Sur le manque d'implication dans la dynamique de la politique 'RH' :

La lettre de licenciement est ainsi libellée sur ce motif :

- Vous n'insufflez pas à vos équipes la dimension associative de la politique ressources humaines. C'est pourtant votre rôle de par votre fonction de directeur délégué. C'est une carence.

. Vous ne vous êtes pas impliqué dans la dynamique de la politique RH de l'association

. Vous avez dénigré la posture du DRH et vous ne l'associez que partiellement à la gestion des ressources humaines de votre délégation.

. Vous n'instillez pas auprès des directeurs de votre délégation la pertinence de mettre à jour les fiches de postes et les transmettre pour validation DRH.

. Vous n'échangez pas sur les possibilités ou non de mobilité sur certains dispositifs et remettez en question la pratique du DRH.

. Vous ne travaillez pas en toute transparence : vous avez refusé que le service RH étudie, en août 2018, le suivi de l'annulation des professionnels du CSAPA. Fin septembre, cela a conduit à détériorer les relations entre le service RH et votre directeur adjoint.

. Le DRH a produit la fiche de poste de la directrice du CADA, APPUI et FSL le 5 juin 2018 et à ce jour vous ne lui avez fait aucun retour. Cette directrice n'a donc pas une fiche de route précise qui permettrait de rassurer les équipes qu'elle encadre sur la répartition de son temps de travail.

. En date du 27 septembre 2018, le DRH découvre le compte rendu du CODIRA adulte du 19 mars 2018 dans lequel vous avez fait référence aux modalités d'indemnisation des astreintes. Il n'y a eu aucune concertation en amont avec vos homologues du comité directeur ni le DRH. Cette notion juridique n'a pas été travaillée dans la dynamique d'une stratégie commune à Montjoie. Vous avez développé seul une réflexion. Ce n'est pas acceptable de la place d'un directeur délégué et démontre une véritable carence de positionnement.'

Le compte-rendu de la réunion du 7 août 2018 précité révèle en particulier que M. [D] reprochait à Mme [E] [I] de ne pas favoriser la mobilité interne sans en échanger avec elle. Il manifeste ainsi le désaccord du directeur quant à l'absence de prise en compte de la candidature de Mme [R] alors que cette dernière, par téléphone, avait déjà évoqué l'incompatibilité de son emploi du temps avec un temps plein. Il apparaît que malgré tout, M. [D] a imposé à Mme [J] [V] de recevoir Mme [R] ce, sans la présence de Mme [E] [I], au motif qu'elle va 'avoir un a priori et qu' [elle] serait sûrement désagréable'. La directrice des ressources humaines considère dans son résumé, que M. [D] 'met ainsi en doute [sa] capacité à conduire les entretiens comme il se doit'.

De fait, il résulte de ce compte-rendu que M. [D] a dénigré la posture de Mme [E] [I] quant à sa gestion des entretiens et qu'il ne l'associait que partiellement à la gestion des ressources humaines et ce, alors que ces missions étaient inhérentes à son poste de directrice de ressources humaines.

Un échange de courriels entre M. [D] et Mme [E] [I] (pièces 14 et 15) permet ensuite de constater que cette dernière a transmis à M. [D] une proposition de fiche de poste pour Mme [X] le 5 juin 2018 laquelle n'était toujours pas validée par le directeur délégué le 5 octobre suivant alors qu'il avait été relancé par courriel du 13 août 2018. En l'absence de fiche de poste, Mme [X], intervenant de surcroît sur trois services (CADA, FSL et APPUI), n'a pu rassurer ses équipes sur la répartition de leur temps de travail.

Il est également établi par l'employeur que M. [D] a résisté à la proposition de la directrice des ressources humaines d'assurer un suivi individuel de l'annualisation des professionnels du CSAPA à partir de supports que le salarié n'a jamais adressés à Mme [E] [I], et qu'il a finalement décliné cette proposition (pièce 16). M. [D] ne conteste pas davantage ces faits alors que l'association, sans être contredite, assure que cela entraîné la détérioration de ses relations avec le service des ressources humaines.

L'employeur justifie que Mme [E] [I] a été informée par courriel transmis par un chef de service le 27 septembre 2018 (pièce 17) qu'elle devait, le lendemain même, réaliser une présentation de l'outil d'annualisation, alors que manifestement elle n'avait pas été destinataire du mail initial expédié par Mme [Z]. L'employeur assure ainsi sans être contredit que Mme [E] [I] a découvert le compte rendu du CODIRA du 19 mars 2018 par l'intermédiaire du seul courriel du 27 septembre 2018.

Enfin, M. [D] ne critique pas l'association Montjoie lui reprochant de faire référence aux modalités d'indemnisation des astreintes, sans s'être concerté en amont avec ses homologues ce qui démontre selon elle une 'véritable carence de positionnement'.

Dans ces conditions, il est établi que M. [D] a présenté des carences de positionnement dans la gestion des ressources humaines, en écartant Mme [E] [I] de certaines décisions et en prenant alors ces décisions sans le contrôle de la direction des ressources humaines.

Le défaut d'implication dans la dynamique de la politique 'RH' de l'association et le dénigrement de la posture Mme [E] [I], directrice des ressources humaines, comme le fait de n'associer que partiellement cette dernière à la gestion des ressources humaines de sa délégation sont avérés.

- Sur l'absence de transparence avec le bureau et ses homologues :

Ce motif est ainsi développé dans la lettre de licenciement :

- Vous ne travaillez pas en transparence avec le bureau et vos homologues.

'Vous n'avez pas relayé la correspondance de Mme [J] [V] du 12 octobre 2018 qui vous a fait part d'une alerte qui peut être considérée comme un signalement concernant sept logements de la Maison Relais. Les photos attachées à cette correspondance montrent une très grande insalubrité et dégradation de ces logements, d'où l'alerte de la directrice de la Maison Relais. Conformément à l'article XII du règlement de fonctionnement de la Maison Relais le résident est responsable du bon entretien du logement mis à disposition. Vous auriez dû vous saisir immédiatement de cette alerte.

. Vous n'avez pas fait part des difficultés budgétaires que rencontrent le dispositif du FSL aux administrateurs lors du bureau du 18 octobre 2018.'

L'association Montjoie reproche encore à M. [D] de ne pas avoir relayé l'alerte donnée par Mme [J] [V] dans un courriel du 12 octobre 2018 ayant pour objet 'Maison relais-logements/ Signalements' concernant sept logements de la Maison Relais identifiés avec précision et dont elle souligne qu'ils 'ne répondent pas à l'article XII du règlement de fonctionnement', signalant, photos à l'appui et jointes à son courriel, l'existence d''une mise en danger du résident à son domicile au vu de l'état du logement' (pièce 18 employeur). M. [D] ne soutient pas avoir transmis cette alerte auprès de 'l'administrateur référent des ressources humaines' dont Mme [J] [V] mentionnait ignorer l'adresse électronique, ni avoir envoyé à cette dernière les coordonnées de l'interlocuteur compétent.

Au surplus ce défaut d'alerte est confirmé par l'attestation de Mme [N] qui constate que 'M. [D] n'a pas travaillé en transparence avec le bureau et ses homologues'. Elle se réfère plus précisément à la 'séance du bureau du 18 octobre 2018 au cours de laquelle M. [D] n'a pas mentionné l'état d'insalubrité extrême de sept logements de la maison relais, information dont il a eu connaissance par un mail reçu de Mme [J] [V] du 12 octobre'(pièce 23 employeur) .

Cette absence de transparence et le manque de communication entre M. [D] et ses homologues auraient pu avoir des conséquences sur l'association comme l'indique Mme [N] dans son attestation. Elle estime en effet que 'cela aurait pu conduire le partenaire financier à accuser l'association et à engager sa responsabilité pour faits de maltraitance envers les usagers'.

Il apparaît également, à la lecture du compte-rendu de la réunion du bureau du 18 octobre 2018 (pièce 24 employeur), que M. [D] n'a pas mentionné les difficultés budgétaires du 'Fond de Solidarité Logement' lequel présentait le 30 septembre 2018, un déficit de 13 467 euros (pièce 25 employeur).

Il s'en suit que l'absence de transparence de M. [D] avec le bureau et ses homologues est établie.

- Sur la réunion du 26 octobre 2018 :

La lettre de licenciement énonce un dernier motif dans les termes suivants :

'- Vous n'êtes pas au rendez-vous des attendus de votre poste en terme de stratégie.

. Le 26 octobre à 9h se tient une réunion de prise de décision pour l'arrêt éventuel d'activité du dispositif de FSL de la direction adulte. Vous avez fait le choix professionnel de vous exonérer de cette réunion. Or il s'agissait de statuer sur le maintien ou non de ce dispositif. Il n'avait rien de plus urgent qu'une prise de décision aussi stratégique pour la délégation dont vous avez la charge.'

L'association Montjoie fait grief à M. [D] de ne pas s'être rendu à la réunion du 26 octobre 2018 durant laquelle une décision devait être prise quant à l'arrêt éventuel du dispositif du Fonds de Solidarité Logement de la direction adulte compte tenu de ses difficultés budgétaires précitées (pièce 25 employeur).

Si l'employeur établit tant l'absence de M. [D] lors de cette réunion attestée par Mme [N] (pièce 23 employeur), que la situation financière dégradée par la production de la situation comptable au 30 septembre 2018 (pièce 25), il doit être relevé néanmoins que ce manquement ainsi repris est postérieur à l'envoi de la convocation à l'entretien préalable du 19 octobre 2018.

Dans ces conditions et à l'exception des manquements relatifs à la réunion du 26 octobre 2018 et à la prise d'astreinte de Mme [J] [V], postérieurs à la mise en oeuvre de la procédure de licenciement, l'association Montjoie justifie de griefs suffisamment pertinents, matériellement vérifiables et de nature à perturber la bonne marche de l'entreprise, caractérisant l'insuffisance professionnelle de M. [D].

Il sera rappelé que contrairement à ce que soutient le salarié, la confirmation de son embauche après une période d'essai, ne privait pas l'employeur de la possibilité d'invoquer ensuite l'insuffisance professionnelle du salarié, étant relevé que les manquements relevés sont bien postérieurs à son embauche définitive en date du 19 juin 2017.

De la même manière, l'absence de toute sanction disciplinaire ne saurait suffire à mettre en doute les insuffisances professionnelles reprochées et établies, lesquelles ne revêtent pas un caractère disciplinaire.

Enfin, M. [D] n'explique pas dans ses conclusions en quoi le licenciement prononcé aurait été motivé en réalité par un 'motif économique déguisé'. Il ne justifie pas l'absence de remplacement alléguée sur l'ensemble des fonctions qui lui avaient été contractuellement confiées et qui manifesterait, selon lui, une réorganisation de l'association à son détriment.

Du tout, il ressort que l'insuffisance professionnelle de M. [D] est parfaitement démontrée et que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

La demande présentée par M. [D] à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sera rejetée.

- Sur les conséquences financières du licenciement :

Le solde de tout compte produit par les parties et dont le détail figure sur le bulletin de paie de mars 2019 fait état du versement de la somme globale de 16 274,61 euros brut à M. [D]. Le bulletin de paie mentionne également le paiement d'une somme de 5130,41 euros à titre d'indemnité de licenciement.

- Sur l'indemnité de licenciement :

Selon l'article L. 1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d'un contrat à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte huit mois d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement calculée en fonction de la rémunération brute dont il bénéficiait avant la rupture du contrat de travail.

Il résulte des articles R. 1234-1 et R. 1234-2 du code du travail, que cette indemnité est calculée par année de service dans l'entreprise en tenant compte des mois accomplis au-delà des années pleines et ne peut être inférieure à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans, auxquels s'ajoutent un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de 10 ans.

Aux termes de l'article 10 de l'annexe 6 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, 'le cadre licencié qui compte plus de 2 ans d'ancienneté ininterrompue au service de la même entreprise a droit, sauf en cas de licenciement pour faute grave ou lourde, à une indemnité de licenciement distincte du préavis et égale à :

- 1/2 mois par année de service en qualité de non-cadre, l'indemnité perçue à ce titre ne pouvant dépasser 6 mois de salaire,

- 1 mois par année de service en qualité de cadre, l'indemnité perçue à ce titre de non-cadre et de cadre ne pouvant dépasser un total de 12 mois de salaire.

Le salaire servant de base à l'indemnité de licenciement est le salaire moyen des trois derniers mois de pleine activité.'

En l'espèce, M. [D] a été recruté par l'association Montjoie le 20 février 2017 et son licenciement lui a été notifié le 5 novembre 2018, fixant la rupture de son contrat de travail au terme du préavis d'une durée de quatre mois, soit le 4 mars 2019.

Il réclame dans le dispositif de ses conclusions un rappel de 'prime de licenciement' d'un montant de 6 771,59 euros, sans énoncer le moindre moyen ou argument au soutien de sa prétention.

Si le droit à l'indemnité de licenciement naît à la date où le congédiement est notifié, l'évaluation du montant de l'indemnité est faite en tenant compte de l'ancienneté à l'expiration du contrat c'est-à-dire à l'expiration normale du préavis même s'il y a eu dispense de l'exécuter.

Dans ces conditions, il doit être relevé qu'à la date de la notification du licenciement soit le 5 novembre 2018, M. [D] ne bénéficiait pas encore d'une ancienneté supérieure à deux ans de sorte qu'il ne pouvait prétendre à l'indemnité conventionnelle de licenciement prévue à l'article 10 de l'annexe précitée.

En revanche, ayant au moins 8 mois d'ancienneté, il avait droit à une indemnité légale de licenciement égale à 1/4 de mois de salaire x 2 années, soit sur la base d'un salaire moyen de 5 705,48 euros (moyenne des trois derniers mois de salaire plus avantageuse que celle des douze mois ayant précédé la rupture), à une somme de 2 852,74 euros.

Compte tenu de la somme déjà allouée par l'employeur à hauteur de 5 130 euros à titre d'indemnité de licenciement, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de paiement de solde d'indemnité de licenciement.

- Sur l'indemnité compensatrice de préavis :

Selon l'article L. 1234-5 du code du travail, le salarié qui n'exécute pas le préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité compensatrice, laquelle n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait exécuté son travail jusqu'au terme du préavis, indemnités de congés payés incluses.

En l'espèce, l'association Montjoie a dispensé M. [D] d'exécuter son préavis tout en lui rémunérant cette période de quatre mois. Il est ainsi établi que le directeur délégué de l'association a reçu 4 479,78 euros pour chacun des mois de novembre et décembre 2018, janvier et février 2019, l'employeur soulignant que cette somme correspond au salaire de base auquel s'ajoute l'avantage en nature concernant son véhicule et l'indemnité de sujétion liée au fonctionnement à l'exclusion toutefois des indemnités d'astreinte.

Pourtant, les indemnités d'astreintes apparaissaient explicitement sur les bulletins de salaire de M. [D] comme un élément de la rémunération brute du salarié, de sorte que ces indemnités doivent entrer dans le calcul du salaire auquel le salarié aurait eu droit s'il avait exécuté son travail jusqu'au terme du préavis (en ce sens : Soc., 13 juin 2018, pourvoi n° 17-14.482).

En conséquence, en prenant en compte les indemnités d'astreinte d'un montant moyen de 863,58 euros, M. [D] est en droit d'obtenir un rappel d'indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 3 454,32 euros brut, outre la somme de 345,43 euros brut de congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [D] de cette demande.

- Sur les circonstances vexatoires du licenciement :

Indépendamment de la cause réelle et sérieuse du licenciement, les circonstances dans lesquelles la mesure a été prononcée peuvent parfois être humiliantes ou vexatoires. Dans ce cas, si le comportement fautif de l'employeur crée un préjudice distinct au salarié, il peut en demander réparation.

Pour autant, si M. [D] sollicite des dommages et intérêts en raison du caractère vexatoire de son licenciement, il ne produit aucun argument à l'appui de cette demande et ne démontre pas l'existence d'un préjudice.

Dans ces conditions, il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et le jugement sera également confirmé.

- Sur les autres demandes :

- Sur la somme de 3758,39 euros réclamée à titre de rappel de congés payés :

La lecture du jugement entrepris révèle que la somme réclamée correspondrait à un rappel de congés payés trimestriels acquis et non pris.

Pour autant, M. [D] ne développe aucun moyen ni argument à l'appui de sa demande, du reste non repris dans la partie discussion de ses conclusions.

En l'absence d'éléments communiqués par le salarié à l'appui de cette prétention, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande présentée à ce titre.

- Sur les sommes de 3 600 euros et 360 euros réclamées à titre de rappel de salaire:

M. [D] sollicite la condamnation de son employeur à lui verser un rappel de salaire de 3 600 euros outre 360 euros sans autre précision. L'examen du dispositif comparé à la lecture du jugement entrepris semble établir que celle-ci se rattache à la demande de M. [D] de voir constater qu'il assurait les fonctions de directeur de l'ACT 72.

M. [D] produit seulement une délégation de pouvoir établie à son nom par l'association le 20 février 2017 au titre de ses fonctions de directeur d'établissement -ACT72.

Toutefois, ce seul élément est insuffisant à établir la créance de M. [D] tant en son principe qu'en son montant.

Dans ces conditions, il sera débouté de sa demande de rappel de salaire à ce titre et le jugement sera confirmé sur ce point.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Le jugement est confirmé s'agissant des dépens et de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est équitable d'allouer à M. [D] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 1 000 euros pour ses frais irrépétibles exposés à en cause d'appel.

L'association Montjoie, partie perdante même partiellement, sera déboutée de sa demande présentée sur le même fondement et condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant dans les limites de l'appel, par arrêt contradictoire, prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe

CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes du Mans le 4 décembre 2020 sauf en ce qu'il a rejeté la demande présentée par M. [G] [D] au titre du rappel de l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

CONDAMNE l'association Montjoie à verser à M. [G] [D] la somme de 3454,32 euros brut, outre la somme de 345,43 euros brut de congés payés afférents ;

CONDAMNE l'association Montjoie à verser à M. [G] [D] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

DÉBOUTE l'association Montjoie de sa demande présentée sur le même fondement ;

CONDAMNE l'association Montjoie au paiement des dépens de la procédure d'appel.

LE GREFFIER, P/ LE PRÉSIDENT empêché,

Viviane BODIN M-C. DELAUBIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/00004
Date de la décision : 28/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-28;21.00004 ?
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