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21/02/2023 | FRANCE | N°18/01785

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre a - commerciale, 21 février 2023, 18/01785


COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE







CC/CG

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 18/01785 - N° Portalis DBVP-V-B7C-EL4Z

jugement du 27 Juin 2018

Tribunal de Grande Instance du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 1702057





ARRET DU 21 FEVRIER 2023



APPELANTE :



CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'ANJOU

ET DU MAINE

[Adresse 8]

[Localité 5]



Représentée par Me Philippe LANGLOIS, sustitué par Me Audrey PAP

IN de la SCP ACR AVOCATS, avocats au barreau d'ANGERS - N° du dossier 71180363



APPELANTE INTERVENANTE VOLONTAIRE :



Société MCS ET ASSOCIES, venant aux droits de la CAISSE REGIONALE DE CRED...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE

CC/CG

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 18/01785 - N° Portalis DBVP-V-B7C-EL4Z

jugement du 27 Juin 2018

Tribunal de Grande Instance du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 1702057

ARRET DU 21 FEVRIER 2023

APPELANTE :

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'ANJOU

ET DU MAINE

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Philippe LANGLOIS, sustitué par Me Audrey PAPIN de la SCP ACR AVOCATS, avocats au barreau d'ANGERS - N° du dossier 71180363

APPELANTE INTERVENANTE VOLONTAIRE :

Société MCS ET ASSOCIES, venant aux droits de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'ANJOU ET DU MAINE, par suite d'une cession de créance intervenue entre la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'ANJOU ET DU MAINE et la société MCS ET ASSOCIES

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe LANGLOIS, sustitué par Me Audrey PAPIN de la SCP ACR AVOCATS, avocats au barreau d'ANGERS - N° du dossier 71180363

INTIMEES :

Madame [P] [L]

née le [Date naissance 1] 1956

[Adresse 10]

[Localité 6]

Madame [M] [Z]

née le [Date naissance 3] 1965

[Adresse 9]

[Localité 7]

Représentées par Me Pierre-emmanuel MEMIN, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 20130819

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 05 Décembre 2022 à 14H00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, Présidente de chambre qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme CORBEL, Présidente de chambre

Mme ROBVEILLE, Conseillère

M. BENMIMOUNE, Conseiller

Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 21 février 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine CORBEL, Présidente de chambre et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé du 13 septembre 2007 la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Anjou et du Maine (le Crédit agricole) a consenti à la SARL AEI, dont M. [Z] et M. [L] étaient les associés, une ouverture de crédit d'un montant de 50 000 euros remboursable à un taux d'intérêt variable et pour une durée indéterminée.

Suivant deux actes sous seing privés du même jour, les associés et leurs épouses respectives se sont portés cautions de cet engagement :

- M. et Mme [L], dans la limite de 32 500 euros et dans la limite de 84 mois,

- M. et Mme [Z], dans la limite de 26 000 euros et pour une durée de 84 mois.

Par jugement du tribunal de commerce du Mans du 6 mars 2012, la société AEI a ouvert une procédure de redressement judiciaire, convertie en liquidation judiciaire, le 15 janvier 2013.

Par lettre recommandée du 30 avril 2012 avec avis de réception du 7 mai 2012, le Crédit agricole a déclaré sa créance à la procédure pour une somme totale de 90 752,49 euros correspondant à deux créances d'un montant déclaré de 60 634,12 euros et 30 118,37 euros.

Après avoir vainement mis en demeure, par lettres recommandées des 3 mai 2012, 24 et 25 juin 2013, Mmes [L] et [Z] d'honorer leur engagement de cautions, le Crédit agricole les a assignées, le 26 juin 2017, devant le tribunal de grande instance du Mans en paiement d'une somme correspondant au montant de leur engagement respectif.

Par jugement du 27 juin 2018, le tribunal a :

-débouté Mmes [L] et [Z] de leur demande tendant à voir déclarer nul leurs engagements de caution consentis le 13 septembre 2007,

-constaté que le Crédit agricole n'a pas respecté son obligation d'information annuelle tant à l'égard de Mme [L] que de Mme [Z],

-dit que le Crédit agricole est déchu de son droit aux intérêts et pénalités de retard depuis le 13 septembre 2008,

-ordonné la réouverture des débats,

-invité le Crédit agricole à produire un décompte, depuis l'origine du crédit, sur lequel apparaissent les intérêts et frais décomptés,

-renvoyé la cause et les parties à l'audience de mise en état du 4 octobre 2018,

-sursis à statuer sur le surplus des demandes.

Par déclaration reçue au greffe le 29 août 2018, le Crédit agricole a interjeté appel des dispositions du jugement qui lui était défavorables, soit de toutes les dispositions sauf celle ayant débouté Mme [L] et Mme [Z] de leurs demandes de nullité du cautionnement.

Mmes [L] et [Z] ont formé un appel incident de ce chef.

La société MCS et associés est intervenue volontairement aux droits du Crédit agricole après une cession de créances du 26 novembre 2019.

Les parties ont conclu.

L'instruction de l'affaire a été clôturée par une ordonnance du 7 novembre 2022.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La société MCS et associés demande à la cour de :

-lui donner acte de son intervention volontaire et de sa reprise de l'instance à la suite de la cession de créance intervenue entre elle-même et le Crédit agricole le 26 novembre 2019 notifiée aux intimées le 3 mars 2021,

-la recevoir en son appel, ainsi qu'en ses demandes,

-Infirmer le jugement entrepris,

-débouter Mmes [L] et [Z] de l'intégralité de leurs demandes et des fins de leur appel incident,

-condamner Mme [L] à lui payer la somme de 32 500 euros, outre intérêts au taux conventionnel jusqu'au parfait paiement,

-condamner Mme [Z] à lui payer la somme de 26 000 euros, outre intérêts au taux conventionnel jusqu'au parfait paiement,

-condamner conjointement et solidairement Mme [L] et Mme [Z], à lui verser la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner conjointement et solidairement Mme [L] et Mme [Z], aux dépens de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Mmes [L] et [Z] demandent à la cour de :

-déclarer le Crédit agricole irrecevable et en tous les cas malfondé en son appel, ses demandes et contestations,

-l'en débouter,

-déclarer Mme [L] et Mme [Z] recevables et fondées en leurs demandes et en leur appel incident,

-réformer la décision entreprise en ce que Mme [L] et Mme [Z] avaient été déboutées de leurs demandes d'annulation du cautionnement souscrit le 13 Septembre 2007 ;

A titre principal

-déclarer les cautionnements signés par Mme [L] et Mme [Z] nuls et de nul effet,

-Déclarer le Crédit agricole irrecevable et en tous les cas malfondé en ses entières demandes,

-l'en débouter ;

A titre subsidiaire

-confirmer la décision entreprise en ce que le Tribunal a constaté le manquement du Crédit agricole à ses obligations d'information annuelle,

-ordonner la déchéance à perception de tous intérêts et pénalités de retard ;

En toute hypothèse

-condamner le Crédit agricole au paiement d'une somme de 2 000 euros au profit de Mme [L] et 2 000 euros au profit de Mme [Z] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner le Crédit agricole aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, dont distraction au profit de Maître Memin, membre de la SCP Lalanne Godard Heron Boutard Simon Villemont Memin Gibaud.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :

-le 28 février 2019 pour Mmes [L] et [Z],

-le 29 mars 2021 pour la société MCS et associés.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'intervention volontaire de la société MCS et associés :

Par acte sous seing privé du 26 novembre 2019 le Crédit agricole a cédé un portefeuille de créances à la société MCS et associés, contenant notamment les créances sur la société AEI. Cette cession de créances a été notifiée à Mme [Z] et Mme [L] par lettres simples du 3 mars 2021.

Il en résulte que la société MCS et associés, qui justifie d'un intérêt à poursuivre l'instance d'appel, ce qui n'est pas contesté par les parties adverses, doit être déclarée recevable en son intervention volontaire en application des dispositions de l'article 554 du code de procédure civile.

Sur la demande de nullité des cautionnements :

Mmes [L] et [Z] sollicitent le prononcé de la nullité de leurs cautionnements.

Elles soulèvent, d'abord, le fait que chacun des deux actes de cautionnement concerne des époux, ce qui leur paraît contraire au principe selon lequel le cautionnement est un engagement personnel et individuel qui n'engage le patrimoine que d'une seule personne.

Toutefois, aucune disposition n'impose de recueillir des engagements de caution par des actes distincts dès lors que chacune des cautions s'engage personnellement.

L'acte de cautionnement des époux [Z] identifie, en en-tête, les cautions comme étant [Z] [D] et [Z] [M]. Il contient sur la dernière page les mentions manuscrites correspondant chacune à celle exigée par l'article L. 341-2 du code de la consommation dans sa version applicable à la cause, immédiatement suivie de celle prévue à l'article L. 341-3 du même code. S'y trouvent deux signatures, que l'acte de prêt, signé par M. et Mme [Z] après l'indication de leurs noms et prénoms respectifs, permet d'attribuer pour la première à M. [Z] et pour la seconde à Mme [Z].

Il en est de même pour l'acte de cautionnement des époux [L] qui identifie en en-tête les cautions comme étant [L] [O] et [L] [P]. Il contient, de la même façon, la reproduction manuscrite des mentions prévues aux articles L. 341-2 et L.341-3 du code de la consommation pour chacun des époux. Les deux signatures qui se trouvent dans l'acte de prêt signé par eux permettent d'attribuer la première mention à M. [L] et la seconde à Mme [L].

Dès lors que chacune des mentions manuscrites et des signatures qui se trouvent dans les deux actes de cautionnement peuvent être attribuées à chacune des cautions, il est indifférent que seulement deux actes de cautionnement aient été établis.

Mmes [Z] et [L] se prévalent, ensuite, de l'irrégularité des cautionnements de leurs époux dont les signatures précèdent les mentions manuscrites au lieu de les suivre, pour obtenir la nullité de leurs propres engagements au motif qu'elles se seraient, chacune, engagée en considération de l'engagement de leur époux, de sorte que l'irrégularité d'un engagement entraînerait celle de l'autre, d'autant plus que chaque couple s'est engagé dans un seul acte.

En réponse, la société MCS et associés fait valoir que chaque époux s'est engagé personnellement, de sorte que l'irrégularité d'un cautionnement n'affecte pas la validité de l'engagement de son conjoint.

Il est constant que M. [L] et M. [Z] ont apposé leurs signatures immédiatement sous les clauses pré-imprimées de l'acte avant de rédiger la mention légalement requise.

Pour autant, le premier juge a justement retenu que Mme [L] et Mme [Z] s'étaient, chacune, engagée à titre personnel.

Elles ont rédigé des mentions manuscrites distinctes de celles de leurs époux par lesquelles elles s'engageaient à rembourser au prêteur les sommes qui lui étaient dues si la société AEI n'y satisfaisait pas, dans la limite respective de 32 500 euros et 26 000 euros.

La validité de leurs engagements n'est pas affectée par une éventuelle irrégularité de ceux de M. [L] et M. [Z].

Mme [L] fait, par ailleurs, valoir que la fin de la mention manuscrite qu'elle a apposée sur l'acte comporte un décalage et que sa signature ne se trouve pas juste en dessous mais sous une mention pré-imprimée du document.

La société MCS et associés fait valoir que les deux mentions manuscrites exigées par les articles L.341-2 et L.341-3 du code de la consommation précèdent la signature de Mme [L]. Elle indique que le fait qu'une partie de la seconde mention se trouve à côté de sa signature s'explique par un manque de place et qu'il n'existe aucun doute sur la compréhension par la caution de son engagement ainsi que sur le fait que la signature ait été apposée postérieurement à la rédaction de la mention.

Aux termes de l'article L. 341-2 du code de la consommation dans sa version applicable à la cause toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : "En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même."

L'article L. 341-3 du même code dispose que lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : "En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X..., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X...".

Le tribunal a relevé à juste titre que le formalisme édicté par ces textes, qui vise à assurer l'information complète de la personne se portant caution quant à la portée et à la durée de son engagement, conditionne la validité même de l'acte de cautionnement et que l'expression « faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante » signifie que l'engagement manuscrit émanant de la caution doit précéder sa signature. Le législateur exige que la signature soit placée sous les mentions manuscrites afin qu'il n'existe aucun doute quant à la compréhension de la portée de l'acte par la caution.

En l'occurrence, les deux mentions exigées par les dispositions précitées ont été rédigées par Mme [L], qui ne le conteste pas, dans un encadré figurant sur l'acte de cautionnement. Une partie de la seconde mention, «m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement la SARL AEI», a été rédigée en dehors du cadre dans lequel il n'y avait plus de place, dans le coin en bas à droite de la page et jusqu' au bout de celle-ci, à côté d'une mention pré-imprimée prenant l'espace de gauche. La signature de Mme [L] a été apposée entre la fin de cet encadré et le bas de la page juste à gauche de la fin de la seconde mention, dans l'espace qui restait.

Cette signature se trouve en dessous de l'encadré dans lequel sont rédigées les deux mentions, dans le seul espace disponible du bas de la page. Il est manifeste que cette signature a été apposée par Mme [L] seulement après avoir écrit toutes les mentions manuscrites.

La signature de Mme [L] en bas de page, à côté des deux dernières lignes de la seconde mention obligatoire, qui ne s'explique que par le manque de place, n'a affecté ni le sens ni la portée des mentions, ni leur parfaite compréhension par Mme [L].

La rédaction de la mention manuscrites et sa signature par Mme [L] sont donc conformes aux prescriptions des dispositions précitées.

Enfin, les mentions rédigées par Mme [Z] et Mme [L] étant conformes au formalisme imposé par les articles L.341-2 et L.341-3 du code de la consommation, elles expriment sans équivoque la volonté de Mme [Z] et Mme [L] de se rendre cautions pour des montants respectifs de 26 000 euros et 32 000 euros et doivent l'emporter sur les clauses imprimées de l'acte de prêt.

C'est donc à juste titre que le premier juge a retenu que les plafonds de leurs cautionnements était clairement définis dans l'acte de cautionnement et a rejeté le moyen tiré de la différence entre le montant garanti indiqué dans le contrat de crédit et dans l'acte de cautionnement.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mmes [L] et [Z] de leur demande tendant à voir déclarer nuls leurs engagements de caution.

Sur la demande de déchéance du droit aux intérêts et pénalités de retard :

Mmes [Z] et [L] invoquent la déchéance de la banque de son droit aux intérêts pour ne pas avoir respecté son obligation d'information à leur égard. Elles lui reprochent de ne pas rapporter la preuve de l'envoi des lettres d'informations annuelles et de l'information relative au premier incident de paiement. Elles contestent la valeur probante des éléments versés au débat par la banque tels que des copies d'écran et des constats d'huissiers. Elles ajoutent que l'obligation d'information de la banque ne prenait pas fin avec la liquidation judiciaire du débiteur principal.

Rappelant que l'exécution de l'obligation d'information peut être prouvée par tous moyens, la société MCS et associés estime rapporter cette preuve par la production de constats d'huissier et des lettres qu'elle prétend avoir adressées aux intimées pour les années 2008 à 2014.

Aux termes de l'article L. 341-6 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, il rappelle la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue par cette disposition emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement, déchéance des intérêts conventionnels échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information.

La banque n'est pas tenue de prouver que les lettres d'informations ont été reçues par les cautions mais elle doit justifier de leur envoi et de leur contenu.

Cette preuve est libre et peut notamment être suffisamment rapportée par les copies des lettres simples complétées par d'autres éléments tels que des procès-verbaux d'huissier de justice attestant globalement les envois annuels.

La seule production des copies de lettres simples ne suffit par à rapporter cette preuve.

La société MCS et associés produit des procès-verbaux de constat d'huissiers établis les 20 mars 2008, 24 février 2009, 11 mars 2010, 22 mars 2011, 28 février 2012, 21 février 2013 et 19 février 2014.

Elle produit également des documents, qu'elle indique correspondre à des lettres d'information, intitulés «contrôle infos caution » portant les noms de Mme [Z] et Mme [L], datées de janvier 2008, janvier 2009, janvier 2010, janvier 2011, janvier 2012 et janvier 2013, alors que les procès-verbaux de constats d'huissiers ont été établis pour ces années en février ou mars.

La société MCS et associés produit également des lettres intitulées « information des cautions » datées du 6 février 2014 et portant le nom de Mme [L] et Mme [Z].

Les huissiers de justice ayant établi les constats ont indiqué s'être transportés au siège de la société Cofilmo, s'être vus remettre des cd-rom contenant un listing des clients et des cautions destinataires des lettres d'information.

Dans le procès-verbal de 2008, l'huissier de justice mentionne seulement avoir procédé à la lecture du cd-rom remis et avoir relevé le nom de neuf clients au hasard, sans constater l'envoi d'aucune lettre d'information ni faire état des mentions figurant sur ces lettres.

Dans les procès-verbaux de 2009 à 2014 les huissiers de justice indiquent avoir constaté différentes enveloppes prêtes à être expédiées et avoir procédé à un prélèvement aléatoire d'enveloppes pour un nombre compris entre neuf et dix-huit plis, pour vérifier qu'elles contenaient des lettres d'informations. Ces procès-verbaux ne renseignent en rien sur le contenu des lettres d'information prélevées. S'il y est indiqué qu'une copie de la dizaine d'exemplaires des lettres est annexée au procès-verbal, aucune annexe n'est produite devant la cour.

Aucun de ces procès-verbaux ne mentionne le nombre de lettres concernées par le constat. Il n'est pas possible de savoir si les lettres destinées à Mme [L] ou Mme [Z] en faisaient partie. Invoquant le secret bancaire, la société MCS et associés a refusé de produire les listing des clients remis aux huissiers de justice.

Rien ne permet donc de démontrer que les intimées étaient destinataires de l'envoi d'une information annuelle.

En conséquence, la société MCS et associés ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la délivrance de l'information annuelle aux cautions dès lors que les constats d'huissiers ne comportent ni l'indication du nom du débiteur principal ni de ceux des cautions destinataires des lettres d'information, ni le contenu des lettres prélevées. De surcroît, la date des constats ne coïncident pas avec la date figurant sur les documents intitulés «contrôle info caution» que l'appelante désigne comme étant des lettres d'information.

La société MCS et associés ne produit aucune pièce concernant l'accomplissement de son obligation d'information par la banque postérieure à 2014 alors que l'information annuelle est due à la caution jusqu'à l'extinction de la dette, y compris durant la procédure judiciaire.

Sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner le moyen relatif à l'information concernant le premier incident de paiement, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le Crédit agricole n'avait pas respecté son obligation d'information annuelle et l'a déchu de son droit aux intérêts et pénalités de retard.

La déchéance du droit aux intérêts ne prend effet qu'à compter du 1er avril 2009, date à laquelle la première information était due. Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur la créance de la société MCS et associés

Le premier juge a justement considéré que la décision d'admission au passif de la procédure collective du débiteur principal a autorité de la chose jugée sur l'existence et le montant de la créance et est opposable à la caution, qui ne peut invoquer que des exceptions qui lui sont personnelles pour se soustraire à son engagement.

Le contrat de crédit d'exploitation mentionne que le compte support porte le numéro 19039212001 et que le numéro de référence du prêt est le 00039649660.

Par lettre recommandée du 30 avril 2012 avec avis de réception du 7 mai 2012 le Crédit agricole a déclaré sa créance à la procédure collective dont faisait l'objet la société AEI pour un montant total de 90 752,49 euros se décomposant de la façon suivante :

- 30 118,37 euros concernant un billet de trésorerie n°00027212271 d'un montant initial de 80 000 euros,

- 60 634,12 euros concernant l'ouverture de crédit n°19039212001 d'un montant initial de 50 000 euros, composés de 59 814,55 euros au titre du solde débiteur, 819,57 euros au titre des intérêts débiteur au taux de 13,80 %, 170,19 euros au titre de la 'commission plus fort découvert'.

La société MCS et associés produit un certificat d'admission de sa créance à cette procédure pour un montant de 60 634,12 euros correspondant à la créance déclarée au titre du crédit n°19039212001.

Il ressort de ces éléments et notamment, comme le remarque la société MCS et associés, du fait que le numéro de compte apparaissant sur ces documents est identique, que la créance admise à la procédure collective correspond à celle due au titre du contrat de crédit d'exploitation litigieux. L'indication dans la déclaration de créance de la date du 29 décembre 1997 comme date de réalisation procède manifestement d'une erreur purement matérielle.

Reste que le Crédit agricole, et par suite, la société MCS et associés, sont déchus du droit aux intérêts et pénalités de retard.

La société MCS et associés ne verse au débat aucun décompte permettant de déduire de la somme réclamée les intérêts qui ont été payés par la société débitrice principale depuis le 1er avril 2009 jusqu'à sa liquidation judiciaire.

Il en résulte que les créances de la société MCS et associés sont certaines en leur principe mais la cour, pas plus que les premiers juges, ne peut en déterminer leur montant au regard des pièces produites et s'assurer qu'elles ne sont pas inférieures à l'engagement limité à 32 500 euros pour l'une des cautions et à 26 000 euros pour l'autre après déduction des intérêts sur une période de près de cinq ans, étant relevé que les intérêts déclarés à la procédure collective étaient alors calculés au taux de 13,80 %.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a invité le Crédit agricole à produire un décompte sur lequel apparaissent les intérêts et frais décomptés, mais seulement à compter du 1er avril 2009, ordonné la réouverture des débat et sursis à statuer sur le surplus des demandes. Il sera ajouté que la société MCS et associés devra recalculer sa créance en retirant tous les intérêts.

La société MCS et associés qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à Mmes [L] et [Z], chacune, la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable la société MCS et associés en son intervention volontaire,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a déchu le Crédit agricole de son droit aux intérêts et pénalités de retard depuis le 13 septembre 2008,

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

Dit que la société MCS et associés est déchue de son droit aux intérêts et pénalités de retard à compter du 1er avril 2009, et qu'elle est invitée à recalculer sa créance en conséquence.

Condamne la société MCS et associés aux dépens d'appel qui seront recouvrés selon les modalités prévues à l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société MCS et associés à payer à Mmes [L] et [Z], chacune, la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

S. TAILLEBOIS C. CORBEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre a - commerciale
Numéro d'arrêt : 18/01785
Date de la décision : 21/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-21;18.01785 ?
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