COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - COMMERCIALE
CC/CG
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 18/01676 - N° Portalis DBVP-V-B7C-ELTR
jugement du 27 Juin 2018
Tribunal de Commerce de LAVAL
n° d'inscription au RG de première instance 2017000140
ARRET DU 08 NOVEMBRE 2022
APPELANTE :
BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST -BPGO- venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE DE L'OUEST -BPO-
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Inès RUBINEL, avocat au barreau d'ANGERS
INTIME :
Monsieur [G] [X]
né le [Date naissance 2] 1971 à [Localité 6] (53)
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me Patrice LECHARTRE de la SCP DELAFOND-LECHARTRE-GILET, avocat au barreau de LAVAL - N° du dossier 117204
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 05 Septembre 2022 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, Présidente de chambre qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, Présidente de chambre
Mme ROBVEILLE, Conseillère
M. BENMIMOUNE, Conseiller
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 08 novembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine CORBEL, Présidente de chambre et par Sophie TAILLEBOIS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE :
La Banque Populaire de l'Ouest, ci-après dénommée la BPO, aux droits de laquelle vient la Banque populaire grand Ouest, ci-après dénommée la BPGO, a consenti plusieurs concours bancaires à la société [X] [G] dont M. [G] [X] est le gérant.
Suivant acte sous seing privé du 20 avril 2010, M. [G] [X] s'est porté caution solidaire de tous engagements pris par la société [X] [G] auprès de la BPO, dans la limite d'une durée de dix ans et d'un montant de 50 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou des intérêts de retard.
Sous le nom commercial Lofi Ouest, la BPO a consenti à la société [X] [G] un crédit-bail selon acte sous seing privé du 4 octobre 2012 pour l'acquisition d'un tombereau d'une valeur de 295 000 euros, remboursable en 72 loyers mensuels d'un montant de 4 629,71 euros et au taux nominal de 4,5%.
Par acte sous seing privé du 9 octobre 2012, M. [X] a souscrit un nouvel engagement de caution pour une durée de 96 mois et limité à la somme de 79 734,67 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités de retard, qui pourraient être dus par la société [X] [G] au titre du contrat de crédit-bail.
Par jugement du 8 avril 2015 rendu par le tribunal de commerce de Laval, la société [X] a été placée en redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire. La procédure de liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du tribunal de commerce de Laval du 7 décembre 2016.
Par lettre recommandée du 6 mai 2015, la Banque populaire de l'Ouest, a déclaré sa créance à la procédure entre les mains du mandataire judiciaire, pour un montant de 294 256,11 euros.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 20 septembre 2017,la BPO a mis en demeure M. [X] de lui payer la somme de 50 000 euros, au titre de son cautionnement.
En l'absence de paiement, la BPO a fait assigner M. [X] devant le tribunal de commerce de Laval, par acte d'huissier du 27 octobre 2017, en paiement de la somme de 50 000 euros portant intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2017.
Par un jugement du 27 juin 2018, le tribunal de commerce de Laval a :
- dit la Banque Populaire du Grand Ouest recevable en son intervention volontaire, l'a dit mal fondée et l'en déboute,
- condamné la Banque Populaire de l'Ouest à payer à M. [X] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la BPO aux entiers dépens de l'instance,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision ;
- débouté les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires.
Pour rendre cette décision, le tribunal de commerce a considéré que le cautionnement 'tous engagements' du 20 avril 2010 concernait toutes les opérations bancaires à l'exclusion de celle relative à un crédit-bail.
Il a retenu qu'il résulte du contrat de crédit-bail que la banque a entendu garantir ce financement par un engagement de caution spécifique mais qu'elle ne produit pas l'acte litigieux.
Par déclaration du 3 août 2018, la BPGO a interjeté appel de l'ensemble des chefs du jugement à l'encontre de M. [G] [X].
La BPGO et M. [X] ont conclu.
Une ordonnance du 29 août 2022 a clôturé l'instruction de l'affaire.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La Banque populaire grand Ouest demande à la Cour de :
- infirmer le jugement entrepris,Â
- constater que le cautionnement tous engagements s'appliquait au contrat de crédit-bail,
- constater qu'est produit l'acte de cautionnement garantissant expressément les obligations résultant du contrat de crédit-bail,
- condamner M. [X] à verser à la BPGO la somme principale de 62 330,59 euros, outre intérêts au taux légal sur la somme de 50 000 euros à compter du 20 septembre 2017 et à compter de la notification des conclusions pour le surplus,
- dire que les intérêts courus après une année écoulée seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts,
- condamner M. [X] à verser à la BPGO, en application de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes de 2 000 euros aux titres des frais irrépétibles d'instance et de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,
- déclarer M. [X] irrecevable, subsidiairement mal fondé en toutes ses demandes fins et conclusions, l'en débouter,
- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.
M. [X] sollicite de la Cour qu'elle :
- déclare mal fondée, la BPGO venant aux droits de la BPO en ses demandes devant la cour d'appel, l'en débouter,
- confirme entièrement le jugement du tribunal de commerce de Laval,
- condamne la BPGO à verser aux débats l'original de la copie de pièce qu'elle verse devant la cour d'appel sous le n°17 de son bordereau et à défaut de le faire, en tirer toutes conséquences,
- condamner la BPGO à régler 1 800 euros au titre des frais irrépétibles devant la cour d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :
- le 29 mars 2021 pour la Banque populaire grand Ouest,
- le 25 août 2022 pour M. [X].
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande en paiement de la Banque populaire grand Ouest
Sur le cautionnement du 20 avril 2010
La BPGO reproche aux premiers juges d'avoir dénaturé l'acte de cautionnement « tous engagements » du 20 avril 2010 en considérant qu'il était limité aux sommes remises à titre de prêt et qu'il ne s'étendait pas aux autres dettes de la société [X] [G]. Elle fait valoir que la mention du « prêteur » ne vise qu'à désigner le bénéficiaire du cautionnement et ne permet pas de limiter l'objet du cautionnement ou les obligations garanties quand les clauses dactylographiées indiquent clairement que la caution s'engage au paiement, en cas de défaillance du débiteur principal, au paiement de toutes les sommes que ce dernier pourrait devoir à la banque.
M. [G] [X] répond que le cautionnement ne se présume pas, qu'il doit être exprès et ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté. Il affirme qu'en l'espèce, le cautionnement 'tous engagements' ne visait que des opérations bancaires et pas le contrat de crédit-bail.
L'article 2292 du code civil, dans sa version applicable à l'acte de cautionnement contesté dispose que le cautionnement ne se présume pas, il doit être exprès et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté.
L'acte de cautionnement du 20 avril 2010 stipule que M. [X] se porte caution de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée [X] [G] dans la limite de la somme de 50 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou des intérêts de retard pour la durée de 10 ans. Il s'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur ses revenus et sur ses biens si l'entreprise [X] [G] n'y satisfait pas elle-même.
Les articles 1er et 2 des conditions de l'engagement de cautionnement précisent que M. [X] s'est porté caution au profit de la Banque Populaire de l'Ouest, à rembourser, en cas de défaillance du débiteur principal, toutes les sommes que ce dernier pourrait devoir à la banque dans la limite indiquée et qu'il a entendu « cautionner toutes les obligations dont le débiteur principal est ou pourrait être tenu vis-à -vis de la banque en toute monnaie, chez l'un quelconque de ses sièges, y compris celles trouvant leur origine en dehors des conventions intervenues entre eux, telles celles nées directement ou indirectement d'engagements à l'égard de la banque et incombant au débiteur ».
Il ressort ainsi de l'acte de cautionnement, sans aucune ambiguïté, que M. [X] a entendu cautionner toutes les obligations dont la société [X] [G] pourrait être tenue vis-à -vis de la Banque populaire de l'Ouest dans la limite de 10 ans et de 50 000 euros, ce qui incluent les sommes dues au titre d'un contrat de crédit-bail.
Le fait que la mention manuscrite désigne la Banque populaire de l'Ouest sous le terme de «prêteur», ne fait pas perdre de sa clarté au contrat de cautionnement et ne laisse pas entendre que seules les opérations de prêt seraient couvertes à l'exception du crédit-bail.
Par ailleurs, l'opération de crédit-bail a été conclue entre la société [X] [G] et Lofi Ouest. Lofi Ouest correspond au nom commercial de la Banque Populaire de l'Ouest pour les opérations de crédit-bail. Le logo de la banque populaire, figure d'ailleurs en en-tête du contrat de crédit-bail, renseignant sur ce lien.
Ainsi, l'engagement de cautionnement du 20 avril 2010, garantissait le contrat de crédit-bail conclu le 4 novembre 2012 entre la Banque populaire de l'Ouest, sous le nom-commercial Lofi Ouest, et l'entreprise [X] [G], sans qu'il en résulte une extension au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté la BPGO de sa demande en paiement.
Sur le cautionnement du 9 octobre 2012
Dès lors qu'au titre du cautionnement de 2010, M. [X] ne peut être tenu que dans la limite de 50 000 euros, et que la demande de la banque est supérieure, il convient d'examiner la demande au titre du second cautionnement invoqué.
M. [X] reproche à la BPO d'avoir nié en première instance l'existence d'un cautionnement portant spécifiquement sur le crédit-bail et soutenu que ce contrat était garanti par le cautionnement « tous engagements ».
Il a sollicité la production de l'original du document du 9 octobre 2012, dont une copie est produite par la BPGO, en application de l'article 1379 du code civil.
Il sera rappelé que les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux en appel et peuvent produire des nouvelles pièces et de nouvelles preuves.
Par suite, la BPGO, qui n'invoquait, en première instance que le cautionnement 'tous engagements' du 20 avril 2010, est recevable à invoquer, en appel, à l'appui de sa demande, un acte de cautionnement supplémentaire concernant spécifiquement la garantie de ce contrat..
Conformément à la demande de M. [X], la BPGO a versé au débat l'original de cet acte en cours d'instance d'appel.
La demande aux fins de production de l'original de sa pièce numéro 17 par la banque est, ainsi, devenue sans objet.
Cet acte du 9 octobre 2012 porte engagement de M. [X] de se porter caution « dans la limite de la somme de 79 734,67 euros, concernant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités et intérêts de retard et pour la durée de 96 mois ».
La BPGO rapporte ainsi la preuve de l'engagement de caution de M. [X] à hauteur de 79 734,68 euros en garantie du contrat de crédit-bail.
Tenant compte du moyen que M. [X] lui opposait à sa demande en paiement de la somme de 79 734,67 euros alors que le décompte détaillé des sommes restant dues laisse apparaître que la créance principale ne s'élevait qu'à 62 330,59 euros, la BPGO a réduit sa demande au paiement de cette somme.
M. [X] sera condamné à la lui payer, avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2017, date de la mise en demeure, sur la somme de 50 000 euros et à compter du 29 mars 2021 sur le surplus.
Sur les demandes accessoires
Les intérêts échus depuis une année seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,à compter du 2 avril 2018, date de la première demande.
Partie perdante, M. [X] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.
Il serait inéquitable que la BPGO conserve à sa charge les frais qu'elle a dû exposer pour faire valoir ses droits. M. [X] sera condamné à lui verser la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant contradictoirement et par arrêt mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Laval le 27 juin 2018 sauf en ce qu'il a dit la Banque populaire du Grand Ouest recevable en son intervention volontaire,
Statuant à nouveau des autres chefs et y ajoutant,
Condamne M. [G] [X] à payer la somme principale de 62 330,59 euros à la Banque populaire grand Ouest, avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2017, date de la mise en demeure, sur la somme de 50 000 euros et à compter du 29 mars 2021 sur le surplus.
Ordonne la capitalisation des intérêts échus depuis une année, à compter du 2 avril 2018.
Déboute M. [X] de l'intégralité de ses demandes,
Condamne M. [X] à payer la somme de 4 000 euros à la BPGO en application des dispositions de l'article 700 au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,
Condamne M. [X] aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
S. TAILLEBOIS C. CORBEL