COUR D'APPEL
D'[Localité 6]
CHAMBRE A - CIVILE
LE/IM
ARRET N°
AFFAIRE N° RG 22/00237 - N° Portalis DBVP-V-B7G-E6P7
Ordonnance du 16 Décembre 2021
Président du TJ d'[Localité 6]
n° d'inscription au RG de première instance : 21/00288
ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2022
APPELANTE :
S.A.R.L. STOCKINBOX prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
lieu-dit '[Adresse 8]
[Adresse 11]
[Localité 5]
Représentée par Me Aurélie HOUI de la SELAS ORATIO AVOCATS, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 20190664
INTIMES :
Monsieur [B] [V]
né le [Date naissance 1] 1962 à CHERBOURG (50)
Lieudit '[Adresse 10]'
[Localité 3]
Madame [K] [E] épouse [V]
née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 7] EN VALLEE (49)
Lieudit '[Adresse 10]'
[Localité 3]
Représentés par Me Cyrille GUILLOU de la SELARL BOIZARD - GUILLOU, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 200380
S.C.I. [O] E.I prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège
[Adresse 9]
[Localité 4]
Représentée par Me Jean BROUIN de la SCP AVOCATS DEFENSE ET CONSEIL, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 321109, et Me Rachel CORILLION, avocat plaidant au barreau de RENNES
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du 21 Juin 2022 à 14 H 00, Mme ELYAHYIOUI, Vice-présidente placée, ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la Cour composée de :
Madame MULLER, Conseiller faisant fonction de Président
Monsieur BRISQUET, Conseiller
Madame ELYAHYIOUI, Vice-présidente placée
qui en ont délibéré
Greffière lors des débats : Madame LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 27 septembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, Conseiller faisant fonction de Président, et par Christine LEVEUF, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
M. [B] [V] et Mme [K] [E] épouse [V] sont propriétaires d'une maison d'habitation située au lieu-dit '[Adresse 13] (49).
Leur fonds est mitoyen de celui de la SCI [O] E.I, propriétaire d'une parcelle cadastrée [Cadastre 15], située au même lieu-dit, qu'elle loue, depuis le 1er août 2018, selon bail commercial consenti par acte notarié du 24 juillet 2018, à la [...] laquelle y exploite une activité de stockage d'objets mobiliers pour particuliers ou entreprises (activité dite de 'self-stockage').
Par exploit du 5 mai 2021, estimant que la [...] exploitait sur le terrain qu'elle louait une activité de location de containers maritimes et en kit avec un accès permanent à ces derniers, alors même qu'il s'agissait de terres agricoles, et se plaignant de subir, en conséquence, de nombreuses nuisances sonores et des allées et venues incessantes, diurnes comme nocturnes, M. et Mme [V]/[E] ont fait assigner la locataire en référé devant le président du tribunal judiciaire d'Angers, sur le fondement des articles 544 et 1240 du Code civil, 835 du Code de procédure civile et L. 131-1 du Code des procédures civiles d'exécution, aux fins notamment, de :
- mettre fin au trouble manifestement illicite causé par la présence de ces installations,
- condamner la [...] à cesser son activité de location sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée, le tout un mois après la signification de l'ordonnance,
- condamner la [...] à leur payer une somme de 2.000 euros, demande portée à 2.500 euros à l'audience, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par acte d'huissier du 22 juin 2021, la [...] a fait assigner la SCI [O] E.I en garantie devant le tribunal judiciaire d'Angers, pour obtenir la jonction des deux instances, la condamnation de la SCI [O] E.I à lui payer une indemnité provisionnelle de 95.000 euros, outre la condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 3.000 euros, demande portée à 4.000 euros à l'audience, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
En défense, la SCI [O] E.I a sollicité du juge des référés, au vu de contestations considérées comme sérieuses, de se déclarer incompétent ; en tout état de cause, de rejeter toutes les prétentions formées à son encontre, subsidiairement et s'il était fait droit à la demande des époux [V] à son encontre, de condamner la [...] à la garantir intégralement, de condamner la même société à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de ses frais irrépétibles, ainsi qu'aux dépens.
Suivant ordonnance de référé du 16 décembre 2021, le président du tribunal judiciaire d'Angers a :
- condamné la [...] à cesser son activité de location de box disposés aux fins de stockage d'objets mobiliers pour particuliers et entreprises sur la parcelle [Cadastre 14] située à [Adresse 13] (49), lieu-dit 'La Petite Bergerie', propriété de la SCI [O] EI, ce dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision,
- dit que, passé ce délai, la [...] sera tenue à une astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard pendant un délai de deux mois à l'expiration duquel il sera à nouveau fait droit,
- débouté la [...] de sa demande de condamnation au versement d'une provision,
- condamné la [...] à payer à M. et Mme [B] [V] une somme de 1.700 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la [...] à payer à la SCI [O] E.I une somme de 900 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- rejeté la demande de la [...] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la [...] aux dépens,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- rappelé que la décision est, de plein droit, exécutoire à titre provisoire.
Par déclaration formée au greffe le 8 février 2022, la [...] a interjeté appel de cette ordonnance de référé en son entier dispositif à l'exclusion du rejet des demandes plus amples ou contraires et de la mention relative à l'exécution provisoire, intimant dans ce cadre M. [B] [V] et Mme [K] [E] épouse [V] ainsi que la SCI [O] E.I.
Par requête du 16 février 2022, la [...] a sollicité du premier président de la cour d'appel d'Angers l'autorisation de faire assigner les intimés à jour fixe. Autorisation qui lui a été délivrée le 25 de ce même mois, pour une audience se tenant le 21 juin 2022 à 14 heures.
Lors des débats, il a d'office été soulevé le fait que l'assignation devant la présente cour statuant à jour fixe n'avait pas été déposée antérieurement à l'audience,et les observations des parties ont été sollicitées à ce titre.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 16 juin 2022, la [...] demande à la cour de :
- la déclarer recevable et fondée en son appel, y faisant droit,
vu les dispositions de l'article 835 du Code de procédure civile,
vu les dispositions des articles 1719 et suivants du Code civil,
vu le bail commercial du 24 juillet 2018,
- infirmer l'ordonnance de référé du président du tribunal judiciaire d'Angers rendue le 16 décembre 2021 en ce qu'elle :
- l'a condamnée à cesser son activité de location de box disposés aux fins de stockage d'objets mobiliers pour particuliers et entreprises sur la parcelle [Cadastre 14] située à [Adresse 13] (49), lieu-dit 'La Petite Bergerie', propriété de la SCI [O] EI, ce dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision,
- a dit que passé ce délai, elle sera tenue à une astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard pendant un délai de deux mois à l'expiration duquel il sera à nouveau fait droit,
- l'a déboutée de sa demande de condamnation au versement d'une provision,
- l'a condamnée à payer à M. et Mme [B] [V] une somme de 1.700 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- l'a condamnée à payer à la SCI [O] E.I une somme de 900 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- a rejeté sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- l'a condamnée aux dépens,
A titre principal :
- dire et juger que son activité n'est pas à l'origine de nuisances de nature à constituer un trouble manifestement illicite,
A titre subsidiaire : si par extraordinaire la cour devait confirmer l'ordonnance du président du tribunal judiciaire d'Angers rendue le 16 décembre 2021 en ce qu'il l'a condamnée à cesser son activité de location de box disposés aux fins de stockage d'objets mobiliers pour particuliers et entreprises sur la parcelle [Cadastre 14] située à [Adresse 13] (49), lieu-dit 'La Petite Bergerie', propriété de la SCI [O] E.I,
- dire et juger qu'elle disposera d'un délai raisonnable pour exécuter la présente décision,
- rejeter toute demande éventuelle d'astreinte,
- dire et juger que la SCI [O] E.I a manqué à son obligation de délivrance,
- condamner en conséquence, la SCI [O] E.I à lui payer la somme provisionnelle de 95.000 euros,
En tout état de cause :
- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions éventuellement formulées à son encontre par M. et Mme [V] ou par la SCI [O] E.I,
- condamner in solidum M. et Mme [V] et la SCI [O] E.I à lui payer la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance,
- condamner in solidum M. et Mme [V] et la SCI [O] E.I à lui payer la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles d'appel,
- condamner in solidum M. et Mme [V] et la SCI [O] E.I aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Aux termes de leurs dernières écritures déposées le 20 juin 2022, M. [B] [V] et Mme [K] [E] épouse [V] demandent, au visa des articles 835 du Code de procédure civile, 1240 du Code civil, L. 131-1 du Code des procédures civiles d'exécution ainsi que des articles A. 2.1.1 et A 2.2.3 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal d'[Localité 6] [Localité 12] Métropole, à la cour de :
- débouter la société Stockinbox de son appel et de toutes fins qu'il comporte,
- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire d'Angers du 16 décembre 2021,
Y ajoutant,
- condamner la société Stockinbox ou tout succombant à leur payer une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 6 avril 2022, la SCI [O] E.I demande à la présente juridiction de :
vu l'article 935 alinéa 2 du Code de procédure civile,
vu les articles 1231-1, 1103 et suivants du Code civil,
vu le bail notarié en date du 24 juillet 2018,
vu les contestations sérieuses existantes,
- débouter la société Stockinbox de son appel et de toutes ses demandes,
- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire d'Angers le 16 décembre 2021,
Y ajoutant,
- condamner la société Stockinbox à lui payer une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Stockinbox aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile aux dernières conclusions ci-dessus mentionnées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'assignation à jour fixe
En droit, les articles 922, 923 et 925 du Code de procédure civile disposent notamment que : 'La cour est saisie par la remise d'une copie de l'assignation au greffe.
Cette remise doit être faite avant la date fixée pour l'audience, faute de quoi la déclaration sera caduque.
La caducité est constatée d'office par ordonnance du président de la chambre à laquelle l'affaire est distribuée',
'Le jour de l'audience, le président s'assure qu'il s'est écoulé un temps suffisant depuis l'assignation pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense. Le cas échéant, il ordonne sa réassignation.
Si l'intimé a constitué avocat, les débats ont lieu sur-le-champ ou à la plus prochaine audience, en l'état où l'affaire se trouve (...)',
'En cas de nécessité, le président de la chambre peut renvoyer l'affaire devant le conseiller de la mise en état'.
Par note déposée en cours de délibéré le 5 juillet, l'appelante rappelle avoir été autorisée par le délégué du premier président de la cour d'appel d'Angers à assigner à jour fixe et cela en suite d'une requête qu'elle a présentée le 14 février 2022. Par ailleurs elle souligne avoir signifié sa déclaration d'appel ainsi que ses conclusions les 16 février et 3 mars courant avant de faire délivrer son assignation, par exploits du 5 avril 2022. Elle observe que par suite de ses démarches procédurales ses contradicteurs ont constitué avocat et que dans ce cadre, pièces et moyens ont contradictoirement pu être échangés. S'agissant du dépôt de l'assignation au greffe, l'appelante souligne qu'il s'agit d'un moyen qui a été soulevé d'office alors même qu'aucune partie ne l'a fait, ou ne se prévaut de quelque grief à ce titre ou de l'existence d'un délai trop bref pour débattre contradictoirement. De plus l'appelante rappelle que l'ordonnance du délégué du premier président, est une mesure d'administration judiciaire dont les suites n'ont pas d'incidence sur la recevabilité de l'appel. Elle en déduit que la caducité du fait de l'absence de remise de l'assignation au greffe ne porte que sur l'ordonnance du premier président et non sur l'appel. Au surplus, elle soutient qu'une telle sanction porterait une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge alors même qu'elle a régulièrement formé appel et qu'en 'tout état de cause, les assignations à jour fixe ont été remises à la cour lors de l'audience et l'affaire a pu être plaidée par les parties. Dans ces conditions, il n'y [a] pas lieu de retenir la caducité de la déclaration d'appel. Dans l'hypothèse où il serait considéré que l'affaire ne peut en tout état de cause être mise en délibéré sur le fond en l'état, la cour bénéficie d'un pouvoir discrétionnaire pour ordonner la réassignation des intimés à une prochaine audience en vertu des dispositions de l'article 923 du Code de procédure civile ou de renvoyer l'affaire devant le conseiller de la mise en état conformément aux dispositions de l'article 925 du Code de procédure civile'.
Par note déposée en cours de délibéré le 12 juillet 2022, les époux [V]/[E] rappellent qu'en application des dispositions de l'article 922 du Code de procédure civile la remise de l'assignation au greffe doit être effectuée par voie électronique exclusivement et avant le jour de l'audience. Ainsi, ils indiquent qu'il est inopérant de soutenir que le dépôt a été effectué physiquement lors de l'audience alors qu'il devait être fait antérieurement et par voie dématérialisée. Dans ces conditions, ils précisent que, dès lors que la caducité est encourue, il n'y a pas lieu à renvoi à une prochaine audience ou devant le conseiller de la mise en état.
Sur ce :
En l'espèce, il ne peut qu'être rappelé que les assignations n'ont pas été déposées au greffe antérieurement à l'audience de plaidoiries mais au cours des débats.
Or le 2ème alinéa de l'article 922 ci-dessus repris pose l'obligation pour l'appelant souhaitant agir à jour fixe, de déposer ces actes avant la date fixée pour l'audience et cela, selon le 3ème alinéa de ce même article à peine de caducité de la déclaration d'appel, cette difficulté pouvant être relevée d'office.
Ainsi, il est indifférent que cette situation n'ait pas été soulevée par l'une des parties ou que les intimés aient pu présenter leurs propres moyens de défense.
Par ailleurs, les développements portant sur le fait que cette irrégularité ne peut entraîner d'irrecevabilité de l'appel sont également inopérants dès lors que l'article 922 du Code de procédure civile ne pose aucunement le principe d'une telle sanction.
De plus, ce même article n'indique aucunement que la caducité atteigne exclusivement l'ordonnance du premier président autorisant l'assignation à jour fixe, mais pose expressément que 'faute de' remise au greffe dans les délais d'une copie de l'assignation, 'la déclaration sera caduque'.
En outre et concernant la faculté d'ordonner une nouvelle assignation, il doit être souligné que l'article 923 ci-dessus repris présente cette option aux cas dans lesquels les délais accordés aux intimés étaient insuffisants pour leur permettre de préparer leur défense, ce qui n'est aucunement invoqué en l'espèce.
Enfin, l'appelante n'indique aucunement quelle serait la nécessité, au sens de l'article 925 du Code de procédure civile, de renvoyer l'affaire devant le conseiller de la mise en état.
De l'ensemble, il résulte que malgré le fait que la présente juridiction ait attendu jusqu'à l'ouverture des débats pour recevoir copie des assignations effectivement délivrées les 5 et 7 avril 2022, ces actes n'ont été déposés qu'au cours des débats, de sorte que cette remise ne peut qu'être considérée comme tardive au sens des dispositions de l'article 922 du Code de procédure civile.
En conséquence, la caducité de l'appel doit être constatée.
Sur les demandes accessoires
Eu égard à l'issue du litige, l'appelante doit être condamnée aux dépens et au paiement aux époux [V] d'une part et à la société [O] d'autre part de la somme de 3.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
CONSTATE la caducité de la déclaration d'appel formée le 8 février 2022 par la [...] ;
CONDAMNE la [...] au paiement à M. [B] [V] et Mme [K] [E] épouse [V] de la somme de 3.000 euros (trois mille euros) par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la [...] au paiement à la SCI [O] E.I de la somme de 3.000 euros (trois mille euros) par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la [...] aux dépens.
LA GREFFIERELA PRESIDENTE
C. LEVEUF C. MULLER