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15/09/2022 | FRANCE | N°20/00087

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre prud'homale, 15 septembre 2022, 20/00087


COUR D'APPEL

d'ANGERS

Chambre Sociale













ARRÊT N°



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00087 - N° Portalis DBVP-V-B7E-EULI.



Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 22 Janvier 2020, enregistrée sous le n° 18/00604





ARRÊT DU 15 Septembre 2022





APPELANTE :



Madame [I] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par Me

Bertrand SALQUAIN de la SELARL INTER BARREAUX NANTES ANGERS ATLANTIQUE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de NANTES







INTIMEE :



S.A.S.U. SUN CITY Prise en la personne de son représentant légal domicilié ...

COUR D'APPEL

d'ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N°

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00087 - N° Portalis DBVP-V-B7E-EULI.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 22 Janvier 2020, enregistrée sous le n° 18/00604

ARRÊT DU 15 Septembre 2022

APPELANTE :

Madame [I] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Bertrand SALQUAIN de la SELARL INTER BARREAUX NANTES ANGERS ATLANTIQUE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE :

S.A.S.U. SUN CITY Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Bertrand CREN de la SELARL LEXCAP, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Maître CAHEN, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Avril 2022 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame GENET, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Estelle GENET

Conseiller : Madame Marie-Christine DELAUBIER

Conseiller : Mme Nathalie BUJACOUX

Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN

ARRÊT :

prononcé le 15 Septembre 2022, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame GENET, conseiller faisant fonction de président, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE :

Mme [I] [Z] a été embauchée par la société [P] [G] à compter du 2 juillet 1984, en qualité de patronière gradueuse.

À la suite de la cession à plusieurs reprises du fonds de commerce, elle était embauchée par la SAS Sun City à compter du 8 décembre 2016 et occupait un poste de modéliste. Son contrat de travail était soumis à la convention collective nationale des industries de l'habillement. Elle percevait en dernier état de la relation de travail un salaire mensuel de 2873,57 euros brut.

Par courrier du 19 avril 2018, l'employeur a convoqué Mme [Z] à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique. Le licenciement lui a été notifié par courrier en date du 14 mai 2018.

Par requête reçue au greffe le 19 décembre 2018, Mme [Z] a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers d'une contestation de son licenciement.

Par jugement en date du 22 janvier 2020, le conseil de prud'hommes d'Angers a:

- jugé que le licenciement de Mme [I] [Z] est dépourvu de cause réelle et sérieuse par méconnaissance par la société Sun City de son obligation de reclassement ;

- condamné la société Sun City à payer à Mme [I] [Z] une indemnité de 25'000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- dit que cette somme produit intérêt au taux légal à compter de la date du jugement ;

- dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement en application de l'article 515 du code de procédure civile ;

- débouté la société Sun City de ses demandes ;

- ordonné le remboursement à Pôle Emploi des indemnités allouées à Mme [I] [Z] dans la limite de 3 mois ;

- condamné la société Sun City à payer à Mme [I] [Z] la somme de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Pour statuer en ce sens, les premiers juges ont considéré que le licenciement reposait bien sur un motif économique, mais que l'employeur ne justifiait pas des recherches et des actions menées en vue de reclasser la salariée, sur les postes le cas échéant disponibles, de même catégorie ou de catégorie inférieure, au sein de sa propre organisation, celle notamment engendrée par la nouvelle stratégie économique, comme au sein du groupe.

Mme [Z] a interjeté appel de cette décision par déclaration transmise par voie électronique au greffe de la cour d'appel le 20 février 2020.

La SAS Sun City a constitué avocat en sa qualité de partie intimée, par voie électronique le 6 mars 2020.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 17 novembre 2021 et l'affaire a été fixée à l'audience du conseiller rapporteur du 4 avril 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Mme [I] [Z], dans ses conclusions, régulièrement communiquées, transmises au greffe le 13 mai 2020 par voie électronique, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de :

- réformer le jugement en toutes ses dispositions, excepté en ce qu'il a dit et jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison de la méconnaissance par la société Sun City de son obligation de reclassement, et pour ce qui concerne l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;

Statuant à nouveau :

- juger le motif économique justifiant le licenciement illégitime ;

- juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse pour absence de motif économique ;

- condamner la société Sun City à lui payer la somme de 57'471,40 euros équivalent à 20 mois de salaire, sur le fondement de l'article L. 1235 ' 3 du code du travail ;

- condamner la société Sun City à lui payer la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Sun City en tous les dépens.

À l'appui de sa demande, Mme [Z] fait valoir que son licenciement est justifié dans la lettre non pas par une cause économique, mais par une cessation partielle d'activité motivée uniquement par un nouveau projet de l'employeur consistant à « se recentrer sur un positionnement « Mass Market » ». Elle ajoute qu'en septembre 2017, l'employeur rassurait les salariés quant à la situation économique de l'entreprise invoquant des chiffres en nette progression. Elle souligne par ailleurs que la société ne justifiait pas de difficultés économiques sérieuses, celles-ci pouvant en tout état de cause être anticipées en l'absence d'événements sportifs majeurs en 2017, alors que l'année 2018 s'annonçait bien meilleure avec les jeux olympiques et la coupe du monde de football.

Mme [Z] fait en outre valoir qu'il est étonnant que la société n'ait trouvé aucun poste de reclassement à lui proposer au vu de la taille du groupe.

Mme [Z] conteste également les sommes qui lui ont été allouées à titre de dommages et intérêts en première instance, indiquant qu'elle avait 33 ans et 10 mois d'ancienneté et que licenciée à l'âge de 53 ans, elle n'a toujours pas retrouvé d'emploi ce qui impacte ses droits à la retraite.

**

Par conclusions récapitulatives d'intimé et d'appelant incident, régulièrement communiquées, transmises au greffe par voie électronique le 26 octobre 2021, ici expressément visées, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la SAS Sun City demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a jugé le licenciement économique dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- statuant à nouveau, débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes ;

- subsidiairement, ramener les demandes de Mme [Z] à de plus justes proportions;

- condamner Mme [Z] à lui rembourser la somme de 10'000 euros indûment perçue;

- subsidiairement, ordonner la compensation judiciaire entre les sommes dues ;

- condamner Mme [Z] à lui payer la somme de 4000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses intérêts, la société Sun City fait valoir que les pertes d'exploitation suffisent à caractériser les difficultés économiques lesquelles ont perduré plus de 3 mois.

Elle prétend qu'il n'y avait aucun reclassement possible pour Mme [Z] et que les emplois intitulés « stylistes » concernent des salariés qui ne créent pas de vêtements et qui travaillent sur ordinateur à l'utilisation de dessins destinés à de l'impression sur tissus. Elle ajoute qu'aucune embauche n'a été réalisée au moment du licenciement pour un poste compatible avec ses fonctions et compétences et que par la suite, le groupe a été contraint de poursuivre sa réorganisation pour survivre en procédant à de nouveaux licenciements en 2019 et 2020.

Elle réfute la qualification de grand groupe international et soutient être une société familiale employant une cinquantaine de salariés.

À titre reconventionnel, elle sollicite le remboursement par Mme [Z] d'une surprime qui lui avait été accordée pour compenser le préjudice financier résultant du licenciement, en contrepartie de l'engagement de la salariée de ne pas contester celui-ci. Elle invoque le fondement de l'enrichissement sans cause.

Enfin, elle affirme que Mme [Z] a perçu pendant une période de 19 mois la somme de 40'016,51 euros, à laquelle s'ajoutent la surprime de 10'000 euros net et l'indemnité légale de licenciement de 41'134,33 euros net.

MOTIS DE LA DECISION

La lettre de licenciement du 14 mai 2018 est ainsi rédigée :

« Nous faisons suite à l'entretien préalable qui s'est tenu le 27 avril 2018 et nous avons le regret de vous faire part de notre décision de procéder à votre licenciement pour motif économique.

Les raisons de cette décision sont les suivantes : la modification de l'offre commerciale, du style et des réseaux de distribution du pôle luxe New Man nous impose un arrêt de l'activité au sein de l'entreprise. En effet, jusqu'à ce jour, l'offre New Man consiste à cibler exclusivement un positionnement haut de gamme, avec un réseau de distribution composé de magasins spécialisés qui correspondent à ce positionnement. L'organisation actuelle de cette activité au sein de l'entreprise répond à cette offre, mais elle ne permet plus une exploitation viable et pérenne de l'activité New Man.

La nouvelle offre commerciale va consister à se recentrer sur un positionnement « Mass Market » avec des réseaux de distribution correspondant, comme la grande distribution, les sites Internet spécialisés, etc.

Dans ces conditions, la modification complète et profonde de l'offre commerciale, du style et des réseaux de distribution du pôle luxe New Man implique un arrêt de cette activité et la suppression des postes affectés à l'exploitation de cette activité. Par conséquent, le poste de modéliste New Man dont vous êtes titulaire est supprimé.

En application des critères d'ordre de licenciement, vous avez été désignée comme «susceptible d'être licenciée ».

Afin d'éviter la mesure, nous avons recherché les postes disponibles susceptibles de vous être proposés à titre de reclassement interne. En dépit de nos recherches effectuées au sein de notre groupe, conformément à l'article L. 1233 ' 4 du code du travail, nous n'avons pas trouvé de poste de reclassement [...] ».

Sur le motif économique de licenciement

Aux termes des dispositions de l'article L. 1233-3 du code du travail dans sa version issue de la loi du 29 mars 2018 :

'Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :

a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;

b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;

c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;

d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;

2° A des mutations technologiques ;

3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

4° A la cessation d'activité de l'entreprise.

La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.

Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché.

Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l'une des causes énoncées au présent article, à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants et de la rupture d'un commun accord dans le cadre d'un accord collectif visée aux articles L. 1237-17 et suivants.'

Il incombe à l'employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué.

La durée d'une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires, telle que définie à l'article L. 1233-3, 1°, a à d, du code du travail, de nature à caractériser des difficultés économiques, s'apprécie en comparant le niveau des commandes ou du chiffre d'affaires au cours de la période contemporaine de la notification de la rupture du contrat de travail par rapport à celui de l'année précédente à la même période (Soc. 1er juin 2022, n°20-19.957).

La cessation d'activité totale et définitive de l'entreprise justifie les licenciements prononcés dès lors qu'elle n'est pas due à la faute ou à la légèreté blâmable de l'employeur. Mais une cessation d'activité partielle ou temporaire de l'activité ne constitue pas, à elle seule, un motif légitime de licenciement qui doit alors reposer sur des difficultés économiques, des mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise.

En l'espèce, la lettre de licenciement invoque une cessation partielle d'activité et la nécessité de la modification de l'offre commerciale, du style et des réseaux de distribution du pôle luxe New Man.

Trois motifs économiques sont donc invoqués : la cessation partielle d'activité, la réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité et l'existence de difficultés économiques.

Dans ses écritures, la société invoque une diminution de son chiffre d'affaires et du résultat net en 2017 par rapport à l'exercice précédent. Elle ajoute que ses difficultés économiques ont perduré au cours de l'exercice 2018 pour lequel il a également été constaté des pertes d'exploitation, ainsi qu'au cours de l'année 2019 qui s'est soldé par un déficit.

Elle justifie ainsi par la production de ses résultats comptables d'une diminution de son chiffre d'affaires entre l'exercice 2016, l'exercice 2017 et celui 2018 : le chiffre d'affaires net est passé de 91 626 682,87 euros au 31 décembre 2016, à 76'688'126 euros au 31 décembre 2017, puis à 73'401 506 euros au 31 décembre 2018. Elle justifie même d'un chiffre d'affaires net à la clôture de l'exercice 2019 de 62'702'076 euros. A cette diminution de chiffre d'affaires s'ajoute une diminution des résultats lesquels étaient positifs au 31 décembre 2016 à hauteur de 851'269 euros, puis négatifs en 2017 (-1'162'494 euros), en 2018 (- 2'264'658 euros) et en 2019 (- 1'482'537). Les comptes consolidés du groupe font également apparaître une perte de résultat entre 2016 et 2017 (- 779 600 euros contre 1 718 300 euros pour l'exercice précédent).

Dans ces conditions, il apparaît que les conditions posées à l'article L. 1233 ' 3 du code du travail précité sont parfaitement remplies, que ce soit concernant les difficultés économiques et notamment la baisse significative du chiffre d'affaires et/ou les pertes d'exploitation qui sont avérées. Il est dès lors justifié que la société ait fait le choix de se réorganiser en interne pour préserver sa compétitivité.

Pour s'opposer à cette analyse, Mme [Z] fait valoir l'existence de « signaux» contradictoires adressés par l'employeur sur la situation économique du groupe en évoquant un partenariat avec une société américaine et des perspectives favorables pour l'année 2018 avec un chiffre d'affaires attendu de 140 millions d'euros.

Cependant, la réalité des chiffres est bien différente.

Le motif économique du licenciement n'est pas sérieusement contestable.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur l'obligation de reclassement

Selon l'article L. 1233 ' 4 du code du travail dans sa version en vigueur depuis le 22 décembre 2017 :

«Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.»

En l'espèce, la lettre de licenciement fait mention de l'absence de postes de reclassement disponibles au sein du groupe.

Comme l'ont justement relevé les premiers juges, elle ne justifie d'aucune recherche de reclassement.

En cause d'appel, elle n'apporte aux débats aucun élément significatif justifiant de l'absence de poste de reclassement disponible.

Il aurait fallu qu'elle justifie du périmètre du groupe avec indication précise du nombre de sociétés le composant. Au contraire, elle reste particulièrement floue sur la consistance du groupe Sun City qui constitue à l'évidence un groupe d'envergure internationale comme en atteste la présentation qu'elle verse elle-même aux débats (sa pièce 4). Elle revendique une cinquantaine de salariés mais se contente de produire une liste qu'elle présente comme étant celle de ses salariés. Celle-ci n'est pas datée et ne comporte aucune indication sur les entrées et sorties des personnels.

Dans ces conditions, et devant le peu d'éléments produits aux débats par la société pour justifier du respect de l'obligation de reclassement dans les conditions précitées de l'article L. 1233 ' 4 du code du travail, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que la société avait manqué à son obligation de reclassement et a considéré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le conseil de prud'hommes a en outre fait une juste appréciation du montant des dommages-intérêts à allouer à Mme [Z] compte tenu de son ancienneté et des conditions de son licenciement. Mme [Z] ne justifie d'ailleurs nullement de sa situation après le mois de janvier 2020.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur le remboursement des indemnités à Pôle Emploi

La société Sun City ne présente aucune demande sur ce point.

Le jugement est donc confirmé de ce chef.

Sur le remboursement de la surprime

Aux termes des dispositions de l'article 1303 du code civil, «En dehors des cas de gestion d'affaires et de paiement de l'indu, celui qui bénéficie d'un enrichissement injustifié au détriment d'autrui doit, à celui qui s'en trouve appauvri, une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de l'enrichissement et de l'appauvrissement.»

La société Sun City réclame le remboursement par Mme [Z] de la somme de 10'000 euros qui lui aurait été versée à titre de prime supplémentaire en contrepartie de son engagement à ne pas contester le licenciement.

Mme [Z] verse aux débats un courrier qu'elle a adressé en lettre recommandée avec accusé de réception le 17 mai 2018 à son employeur (sa pièce 10) dans lequel elle indique qu'elle s'engage à ne pas poursuivre d'action à l'encontre de la société Sun City si elle obtient le versement de cette prime supra légale de 10'000 euros net.

Elle verse également aux débats le courrier de réponse de son employeur en date du 23 mai 2018 (sa pièce 11) l'informant qu'il lui verse une indemnité complémentaire de préjudice d'un montant de 10'000 euros net de CSG-CRDS et qu'il prend note, compte tenu de ce versement, de l'engagement de la salariée à renoncer à toute action concernant l'exécution ou la rupture du contrat de travail.

À la lecture de ces deux courriers, il apparaît que Mme [Z] a bien obtenu le versement de cette prime complémentaire en échange de son engagement à ne pas contester le licenciement.

Or, elle a saisi quelques mois après le conseil de prud'hommes précisément à cette fin.

Elle a donc manqué à son engagement et doit rembourser à la société Sun City la somme de 10'000 euros en procédant par compensation avec les sommes qui lui sont dues par la société Sun City.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement est confirmé s'agissant des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.

Chaque partie succombant à l'instance assumera la charge de ses propres dépens d'appel.

Les demandes présentées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes d'Angers du 22 janvier 2020 ;

Y AJOUTANT ;

CONDAMNE Mme [I] [Z] à verser à la SAS Sun City la somme de 10'000 euros en remboursements de la surprime légale ;

DIT qu'il pourra être procédé par compensation avec les sommes dues à Mme [I] [Z] par la SAS Sun City ;

REJETTE les demandes présentées par les parties sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que chaque partie conservera à sa charge ses propres dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

Viviane BODINEstelle GENET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 20/00087
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;20.00087 ?
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