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21/06/2022 | FRANCE | N°17/02486

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre a - commerciale, 21 juin 2022, 17/02486


COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE







CC/IM

ARRET N°:



AFFAIRE N° RG 17/02486 - N° Portalis DBVP-V-B7B-EHNE



Jugement du 15 Novembre 2017

Tribunal de Commerce d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance 2017004715





ARRET DU 21 JUIN 2022





APPELANTS :



Monsieur [D] [W]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 6] ([Localité 6])

[Adresse 2]

[Localité 4]



Madame [E] [Y]

née le [

Date naissance 3] 1967 à [Localité 7] ([Localité 7])

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentés par Me Olivia BRULAY, avocat postulant au barreau d'ANGERS, et Me Elise HOCDE, avocat plaidant au barreau de TOURS





INTIM...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE

CC/IM

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 17/02486 - N° Portalis DBVP-V-B7B-EHNE

Jugement du 15 Novembre 2017

Tribunal de Commerce d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance 2017004715

ARRET DU 21 JUIN 2022

APPELANTS :

Monsieur [D] [W]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 6] ([Localité 6])

[Adresse 2]

[Localité 4]

Madame [E] [Y]

née le [Date naissance 3] 1967 à [Localité 7] ([Localité 7])

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentés par Me Olivia BRULAY, avocat postulant au barreau d'ANGERS, et Me Elise HOCDE, avocat plaidant au barreau de TOURS

INTIMEE :

SA COFIDIS Société à directoire et conseil de surveillance, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié au siège social, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Sophie DUFOURGBURG, avocat postulant au barreau d'ANGERS - N° du dossier 18008, et la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOET HELAIN, avocat plaidant au barreau de l'ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 14 Mars 2022 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, Présidente de chambre, qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme CORBEL, Présidente de chambre

M. RIEUNEAU, Conseiller

M. BENMIMOUNE, Conseiller

Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 21 juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par [E] CORBEL, Présidente de chambre, et par Sophie TAILLEBOIS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE

Selon un bon du 3 mai 2011, M. [W] a commandé à la société Ouest Alliance une installation solaire photovoltaïque en intégration de bâti comprenant 16 panneaux d'une puissance de 185 Wc, soit une puissance totale de 2960 Wc, de couleur silver, un ondulateur au prix de 21 100,00 euros TTC incluant les démarches administratives et les frais de raccordement par ERDF au réseau public.

Pour financer cette acquisition, M. [W] et Mme [Y] ont souscrit un crédit auprès de la société Sofemo, aux droits de laquelle vient la société Cofidis, d'un montant de 21 100 euros remboursable en 180 mensualités, au taux de 5,61 % l'an, selon offre du 3 mai 2011, acceptée le même jour.

Une déclaration préalable de travaux non soumis à permis de construire a été déposée à la mairie le 26 mai 2011 pour l'intégration des panneaux photovoltaïques au bâti.

Une facture d'un montant de 21 100 euros a été établie le 15 juillet 2021 par la société Ouest alliance au nom de M. [W].

La société Sofemo a confirmé le financement, précisant que la première échéance, d'un montant de 210,84 euros, sera prélevée le 17 juillet 2012

Le 19 juillet 2011, une attestation de livraison et de réalisation des travaux, portant demande au prêteur de verser le montant du prêt directement entre les mains de la société Ouest Alliance a été établie et signée par une personne identifiée comme étant M. [W], ce que celui-ci dénie.

Le même jour, M. [W] a signé un constat de réception des travaux, sans réserve.

Par acte sous seing privé du 20 mars 2013, les parties sont convenues d'un aménagement du crédit devenant remboursable à compter du 20 mars 2013 en 100 mensualités de 298,94 euros chacune, sans modification du taux d'intérêt et sans novation. Le tableau d'amortissement produit par M. [W] et Mme [Y] fait apparaître que la dernière échéance était prévue le 15 juillet 2021.

Les échéances du crédit ont été payées jusqu'au mois de mars 2014.

Par lettres recommandées du 25 juillet 2014 avec avis de réception du 1er août 2014, des échéances étant demeurées impayées, la société Sofemo a notifié à M. [W] et Mme [Y] la déchéance du terme et les a mis en demeure de lui payer la somme totale de 21 791,45 euros.

La société Ouest Alliance a été placée en liquidation judiciaire.

Le 22 décembre 2014, M. [W] et Mme [Y] ont assigné la société la société Groupe Sofemo devant le tribunal d'instance de Saumur pour voir prononcer la nullité du contrat de vente et celle, subséquente, du contrat de prêt et obtenir, notamment, la condamnation de l'organisme prêteur à procéder à la dépose de l'installation financée et à la repose de la toiture.

Par acte séparé, l'assignation visait également la Selarl Sarthe mandataire prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ouest alliance.

Par acte du 30 décembre 2014, rectifié par acte du 13 janvier 2015, la société Groupe Sofemo a fait assigner M. [D] [W] et Mme [E] [Y] devant le tribunal d'instance de Saumur pour les voir condamner solidairement au paiement des sommes restant dues au titre du prêt du 3 mai 2011.

Par jugement du 29 décembre 2015, le tribunal d'instance a invité les parties à conclure sur l'absence d'enrôlement de l'assignation de M. [D] [W] et de Mme [E] [Y] délivrée à la SELARL Sarthe mandataire ès qualités.

Par acte du 22 mars 2016, M. [D] [W] et Mme [E] [Y] ont fait assigner la SELARL Sarthe mandataire en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ouest alliance devant le tribunal d'instance de Saumur pour solliciter, notamment, la nullité du contrat de vente et celle du contrat de prêt.

Par jugement du 12 septembre 2016, le tribunal d'instance de Saumur a ordonné la jonction des trois procédures et, après avoir retenu le caractère commercial du contrat de vente et du contrat de prêt, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce d'Angers.

La cour d'appel d'Angers, saisie sur contredit par M. [W] et Mme [Y], a, le 6 mars 2017, rendu un arrêt entre M. [W] et Mme [Y], d'une part, et la SELARL Sarthe mandataire ès qualités et la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo, d'autre part, constatant l'irrecevabilité du contredit comme tardif.

L'affaire a alors suivi son cours devant le tribunal de commerce d'Angers.

Par jugement du 5 juillet 2017, le tribunal de commerce, ayant constaté que M. [W] et Mme [Y] n'avaient pas comparu à l'audience du 21 juin 2017, a radié l'affaire.

Le dossier a été réinscrit au rôle des affaires en cours pour être appelé à l'audience du 13 septembre 2017.

M. [W] et Mme [Y] n'ont pas comparu devant le tribunal de commerce pas plus que la Selarl Sarthe mandataire.

Par jugement du 15 novembre 2017, le tribunal de commerce d'Angers a :

- condamné solidairement M. [W] et Mme [Y] à payer à la SA Cofidis la somme de 21.791,45 euros outre les intérêts au taux contractuel de 5,61% l'an à compter du 25 juillet 2014 ;

- ordonné la capitalisation annuelle des intérêts à compter de l'assignation du 30 septembre 2014 ;

- débouté la société Cofidis de sa demande de dommage intérêts pour résistance abusive ;

- condamné solidairement M. [W] et Mme [Y] aux dépens ;

- condamné solidairement M. [W] et Mme [Y] à payer la somme de 2.000 euros à la SA Cofidis en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant déclaration reçue au greffe de la cour le 27 décembre 2017, M. [W] et Mme [Y] ont interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions sauf en celle qui a débouté la société Cofidis de sa demande de dommage intérêts pour résistance abusive, intimant la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo.

Les parties ont conclu.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe,

- le 18 février 2022 pour M. [W] et Mme [Y] ,

- le 2 mars 2022 pour la société Cofidis,

aux termes desquelles elles forment les demandes qui suivent :

M. [W] et Mme [Y] demandent à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :

Juger M. [W] et Mme [Y] bien fondés en leurs demandes.

Infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Statuant à nouveau :

Juger que Mme [Y] :

n'a pas le statut de commerçante ;

que son engagement sur le contrat de crédit affecté, qualifié de commercial cinq

ans après sa signature, est irrégulier ;

que le jugement déféré ne lui est pas opposable en sa qualité de consommatrice ;

que le litige qui l'oppose à Cofidis est soumis aux dispositions protectrices d'ordre public du code de la consommation.

En conséquence :

Juger recevable et bien fondée l'action de Mme [Y] sur le fondement des dispositions d'ordre public du code de la consommation ;

Sur le fond :

Juger forclose l'action de la SA Cofidis et dès lors irrecevables les demandes du prêteu ;

Juger mal fondée la procédure en paiement engagée par Sofemo en l'absence d'une déchéance du terme légalement acquise ;

En conséquence,

Débouter la SA Cofidis de ses demandes en paiement ;

Juger la rédaction du bon de commande en violation des dispositions, d'ordre public, de l'article L. 121-23 (ancien) du code de la consommation ;

Juger l'absence de la désignation de la marque et du type des matériels vendus en violation des dispositions d'ordre public des articles L.121-11s du code de la consommation ;

Juger l'absence d'accréditation du démarcheur de la société, en violation des dispositions d'ordre public de l'article L. 311-8 du code de la consommation, qui l'autoriserait de conseiller et rédiger un contrat de crédit ; Juger l'irrégularité des travaux en l'absence de l'accord administratif préalable à l'exécution des travaux prévu par les articles L. 422-1s, L 423-1 et R. 422-1s du Code de l'urbanisme ;

Juger l'irrégularité du document «attestation de fin de travaux/demande de décaissement des fonds» émise par la Banque en violation des dispositions de l'article 1325 (ancien) du code civil et de la jurisprudence de la Cour de cassation ;

Juger l'absence du document original «Attestation de fin de travaux/ demande de décaissement des fonds» qui seul permettait au prêteur de verser à son partenaire économique la somme de 21 100 €, en violation de la jurisprudence de la Cour de cassation et du Conseil d'Etat ;

Juger l'absence de la signature du cocontractant, tiers au débiteur principal, sur la prétendue attestation de fin de travaux/décaissement des fonds destinée à Cofidis (Sofemo) ;

Juger que Cofidis (Sofemo) a payé la facture de Ouest alliance le 21 Juillet 2011, avant même avoir informé l'emprunteur de son accord de crédit, avant même l'autorisation administrative, avant même que la prestation ne soit terminée ;

En conséquence,

Procéder à la vérification de l'originalité de la signature de Monsieur [W] sur le document «Attestation de fin de travaux/Demande de décaissement des fonds» ;

Déclarer nul et non avenu le contrat de crédit intervenu entre Cofidis (Sofemo) et les consorts [W] - [Y] en date du 03 mai 2011 ;

Juger que consorts [W] - [Y] renoncent définitivement au bénéfice des dispositions de l'article 1142 (ancien) du code civil ;

Si nullité des contrats de vente et de crédit avec fautes retenues contre la Banque :

Juger que Cofidis (Sofemo) a commis des fautes causant un préjudice matériel, financier et moral aux consorts [W] - [Y], la privant de tout droit à restitution de sa créance ;

Débouter Cofidis (Sofemo) de toute demande financière à l'encontre des consorts [W] - [Y] ;

Condamner Cofidis (Sofemo) à rembourser aux consorts [W] - [Y] les échéances versées du montant arrêté à la somme de 5 484, 84 € dans le délai de 1 mois suivant la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 150 € par jour de retard à l'expiration dudit délai ;

Ordonner à Cofidis (Sofemo) de procéder, si nécessaire, à la radiation de l'inscription au fichier FICP de la Banque de France dans le délai de 15 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 € par jour de retard à l'expiration dudit délai ;

Si nullité des contrats de vente et de crédit sans faute retenue contre la Banque :

Juger que le consommateur tiendra à la disposition de la société (ou de son liquidateur) les matériels, objet de la vente avec obligation pour cette dernière de remettre en état, à sa charge, la toiture de l'immeuble ;

Condamner Cofidis (Sofemo) à rembourser aux consorts [W] - [Y] les échéances versées du montant arrêté à la somme de 5 484,84 € dans le délai de 1 mois suivant la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 150 € par jour de retard à l'expiration dudit délai ;

Ordonner à Cofidis (Sofemo) de procéder, si nécessaire à la radiation de l'inscription au fichier FICP/Banque de France dans le délai de 15 jours suivant la signification du jugement à intervenir et sous astreinte de 150 € par jour de retard à l'expiration dudit délai ;

Subsidiairement :

Prononcer la déchéance des intérêts du contrat de crédit sur le fondement des dispositions d'ordre public de l'article L.311-8 du code de la consommation ;

En tout état de cause :

Condamner Cofidis (Sofemo) à la somme de 5 000 € à titre de dommage-intérêts sur le fondement de l'article 1147 du code civil ;

Condamner Cofidis (Sofemo) à verser à/aux consorts [W] - [Y] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

La société Cofidis prie la cour de :

Déclarer l'appel ainsi que les différentes demandes, fins, conclusions et autres prétentions des consorts [W] - [Y] irrecevables et en tout cas mal fondés et les en débouter,

Voir dire que les consorts [W] - [Y] ne peuvent en aucun cas porter atteinte à l'autorité de la chose jugée, et qu'en conséquence seules les dispositions du code de commerce et à défaut de textes spécifiques les dispositions du code civil sont applicables mais en aucun cas les dispositions du code de la consommation,

Voir dès lors dire que l'ensemble des parties a traité d'égal à égal et que les consorts [W] - [Y] ne peuvent en aucun cas solliciter une quelconque protection et dire et juger que l'intégralité des dispositions du code de la consommation est hors sujet, qu'il s'agisse des articles L.121-21 et suivants ou des articles L. 311-1 et suivants du code civil, notamment,

Voir tirer toutes les conséquences du refus des consorts [W] - [Y] de verser aux débats les pièces objet des sommations de communiquer contenues dans les conclusions,

Voir dire et juger que faute pour les consorts [W] - [Y] d'avoir interjeté appel et mis en cause le liquidateur du vendeur, les consorts [W] - [Y] sont irrecevables non seulement à faire valoir qu'ils n'ont pas obtenu satisfaction mais de surcroît qu'ils sont irrecevables en leur appel au regard de l'indivisibilité du litige et cela si la Cour venait à estimer qu'il s'agisse de conventions soumises aux dispositions du code de la consommation,

Voir rappeler qu'il ne peut y avoir en aucun cas nullité ou résolution du contrat de crédit, s'il n'y a pas d'abord nullité ou résolution du contrat de vente,

Voir constater que les consorts [W] - [Y] n'ont nullement interjeté appel à l'encontre du liquidateur du vendeur et que ce dernier n'est pas en cause devant la Cour et cela avec toute conséquence de droit,

Voir dire en conséquence qu'il ne peut en aucun cas y avoir de nullité du contrat de vente et encore moins du contrat de crédit,

Voir dès lors, quel que soit le droit applicable, condamner solidairement M. [W] et Mme [Y] à payer à la SA Cofidis venant aux droits de la SA Groupe Sofemo, avec intérêt au taux contractuel de 5,61% l'an, à compter du 24 juillet 2014 et suivant décompte produit' 21 791,45 euros.

En conséquence, confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions.

A titre subsidiaire, condamner solidairement M. [W] et Mme [Y] à rembourser à la SA Cofidis le capital emprunté d'un montant de 21 100 euros, en l'absence de faute de la société Sofemo et en toute hypothèse en l'absence de préjudice et de lien de causalité.

En toute hypothèse,

Voir quel que soit le cas de figure, condamner solidairement M. [W] et Mme [Y] à payer à la SA Cofidis, avec intérêt de droit à compter du prononcé du jugement entrepris :

- dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire : 5 000,00 euros

- indemnité article 700 du CPC au regard des très nombreuses procédures et diligences accomplies depuis l'origine : 5 000,00 euros.

Voir ordonner la capitalisation annuelle des intérêts dans le cadre de l'anatocisme,

Voir condamner solidairement M. [W] et Mme [Y] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être directement recouvrés par application de l'article 699 du CPC.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'application des dispositions du code de la consommation à l'égard de Mme [Y]

Mme [Y] revendique en sa qualité de co-emprunteur d'un crédit affecté l'application des dispositions d'ordre public du code de la consommation.

Partant de ce qu'elle n'a pas signé le bon de commande, elle soutient qu'elle ne peut être qualifiée de commerçante. Elle invoque, en outre, les dispositions de l'article L. 121-3 du code de commerce selon lesquelles le conjoint d'un commerçant n'est réputé lui-même commerçant que s'il exerce une activité commerciale séparée de son époux.

Elle en déduit qu'elle est signataire du contrat de crédit en qualité de consommatrice.

La société Cofidis oppose, en premier lieu, l'autorité de chose jugée attachée au jugement définitif du tribunal d'instance de Saumur qui a jugé que l'ensemble du litige était de nature commercial dès lors que la totalité de l'électricité produite avec l'installation acquise devait être revendue, ce qui constitue des actes de commerce par nature en application de l'article L. 110-1 du code de commerce, motif pour lequel il s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce en application de l'article L. 721-3 du code de commerce attribuant compétence aux tribunaux de commerce, notamment, pour statuer sur les contestations relatives aux actes de commerce entre toutes personnes.

Elle soutient que l'autorité de la chose jugée s'étend à tout ce qui a été implicitement jugé comme étant la conséquence nécessaire du dispositif, soit qu'il s'agit d'un préalable nécessaire à la décision, soit que la chose non exprimée est implicitement jugée parce qu'elle est une suite inéluctable de ce qui a été jugé.

Elle ajoute que dès lors que seul le tribunal de commerce a été désigné, celui-ci ne peut appliquer que les textes du code de commerce et, à défaut de textes spécifiques, les dispositions du code civil mais en aucun cas les dispositions du code de la consommation qui ne sont l'apanage que du tribunal d'instance en application de l'article L. 311-52 du code de la consommation dans sa version applicable à l'époque.

Mais, il découle de l'application combinée des articles 77 et 95 du code de procédure civile, dans leur rédaction applicable à la cause, que ce n'est que lorsque le juge a, en se prononçant sur la compétence, tranché dans le dispositif du jugement la question de fond dont dépend cette compétence que le jugement a autorité de la chose sur cette question de fond.

Dans le cas présent, le tribunal d'instance de Saumur s'étant limité, dans le dispositif de son jugement du 12 septembre 2016, à se déclarer incompétent au profit du tribunal de commerce d'Angers, la qualification d'acte de commerce retenue pour le crédit en cause n'est pas revêtue de l'autorité de la chose jugée.

Dès lors, Mme [Y] est recevable à contester la qualification du crédit d'acte de commerce par accessoire, étant rappelé que la compétence de la juridiction ne détermine pas la nature des règles applicables.

En second lieu, la société Cofidis fait valoir que Mme [Y] est emprunteur solidaire de M. [W] et que le contrat de crédit qui est destiné à financer l'opération est un acte commercial par accessoire. Elle expose que la facture de vente d'électricité produite par les appelants démontre qu'ils ont vendu l'électricité pendant toute l'année 2012 pour un montant de 1 430,96 euros.

Mme [Y] n'a pas répondu à ce moyen.

Il résulte des dispositions de l'article L. 110-1 du code de commerce que la production et la vente d'électricité, laquelle s'analyse en une vente de meuble, constitue un acte de commerce.

En l'occurrence, il est démontré, et d'ailleurs non contesté, que l'installation photovoltaïque financée par le crédit souscrit solidairement par Mme [Y] et M. [W] était destinée à produire de l'électricité pour la vendre et non à un usage personnel de ces derniers, ce qui ressort des factures établies par ERDF faisant apparaître que le compteur de contrôle de consommation est toujours resté à zéro alors que le compteur de production a enregistré une production d'électricité jusqu'au 17 octobre 2013, date après laquelle l'installation n'a plus été mise en fonctionnement.

Ainsi, il s'agissait de financer une activité destinée exclusivement à la vente d'électricité qui, en tant que telle, est de nature commerciale. Le contrat d'achat de l'installation et le contrat de crédit finançant celle-ci en sont les accessoires préparatoires, ayant, en cela, une nature commerciale qui exclut l'application des dispositions du code de la consommation.

Il en résulte que Mme [Y], bien que n'ayant pas la qualité de commerçante, n'est pas en droit de se prévaloir des dispositions du code de la consommation qu'elle invoque, qu'il s'agisse de l'article L. 311-37 anciens (forclusion), des articles L. 121-21 et suivants et L. 311-8 anciens (démarchage à domicile), de l'article L. 121-17 ancien (régularité du bon de commande) ou des règles relatives aux crédits affectés et, notamment, la privation du droit à remboursement du prêteur qui commet une faute en ayant libéré les fonds sans s'être assuré de l'exécution complète de la prestation financée (L. 311-20 à L. 311-33, anciens).

Par ailleurs, l'affirmation de Mme [Y] selon laquelle, si le prêt est de nature professionnel, elle ne pouvait avoir la qualité de co-emprunteur mais seulement de caution est dénuée de tout fondement.

Sur la déchéance du terme

Les appelants, pour invoquer l'absence de déchéance du terme régulière, se prévalent de la règle selon laquelle la déchéance du terme est subordonnée à l'envoi d'une mise en demeure préalable à l'emprunteur manifestant l'intention de l'organisme prêteur de se prévaloir de l'exigibilité de la totalité de sa créance en l'absence de stipulation expresse dispensant le créancier de mise en demeure, et qu'une assignation en paiement ne saurait entraîner en elle-même la déchéance du terme.

La société Cofidis n'a pas répondu à ce moyen.

La règle relative à l'envoi d'une mise en demeure préalablement au prononcé de la déchéance du termes tirée des articles 1134 et 1184, anciens, du code civil s'applique aux emprunteurs non commerçants.

Dans le cas présent, il n'est pas prétendu ni encore moins démontré que M. [W] et Mme [Y] auraient la qualité de commerçants.

Le contrat de crédit ne comporte pas de clause prévoyant que la déchéance du terme interviendrait sans mise en demeure préalable.

Il en résulte que la déchéance du terme n'a pas été régulièrement prononcée dès lors qu'il n'est pas justifié de l'envoi d'une mise en demeure avant la lettre du 25 juillet 2014 par laquelle le prêteur a notifié aux emprunteurs la déchéance du terme.

Pour autant, force est de constater que le crédit est arrivé à terme le 15 juillet 2021.

Il s'ensuit que la société Cofidis, si elle ne peut voir calculer sa créance en appliquant la déchéance du terme à la date du 15 juillet 2014, est en droit d'obtenir le paiement des échéances impayées depuis le mois d'avril 2014, soit 26 306,72 euros ([7 x 12 + 4 ] x 298,94), avec intérêts au taux contractuel à compter de la date de l'assignation pour les mensualités échues à cette date et, pour les suivantes, à compter de leur échéance ainsi qu'une indemnité de 8 % des mensualités dues, conformément aux stipulations du contrat, réduite à la somme réclamée de 1 576,25 euros.

Le montant total de ce qui est dû n'excède pas la demande compte tenu des intérêts courus, qui plus est, du fait de la capitalisation ordonnée à compter du 30 décembre 2014.

Sur la mise en jeu de la responsabilité de la société Cofidis

M. [W] et Mme [Y] forment, dans le dispositif de leurs conclusions, une demande de dommages et intérêt à hauteur de 5 000 euros sur le fondement de l'article 1147, ancien, du code civil. Dans la partie discussion de leurs conclusions, il invoquent des désordres affectant l'installation qui seraient à l'origine d'une impossibilité de l'utiliser et même de son caractère dangereux, reprochent à l'organisme prêteur d'avoir débloqué les fonds sans ordre de leur part, à tout le moins de Mme [Y], avant l'accord de l'administration et sans vérification de la bonne exécution par le vendeur de ses obligations. Ils prétendent subir un préjudice matériel, financier et moral du fait de l'absence de rentabilité de l'installation.

Mais, d'une part, ils ne peuvent, pour les raisons qui précèdent, invoquer les règles du droit de la consommation pour caractériser des fautes du prêteur devant le priver de son droit à remboursement ou ouvrant droit à indemnisation, et, d'autre part, ils ne démontrent aucune faute contractuelle de l'organisme prêteur étant précisé que le contrat de crédit ne mettait à la charge de celui-ci aucune obligation de contrôle de conformité des livraisons et prestations effectuées, étant observé que l'administration n'a opposé aucun refus à la déclaration préalable qui lui a été soumise, que l'installation a été livrée et raccordée au réseau public d'électricité, qu'elle a fonctionné les premiers temps, que les emprunteurs se sont d'ailleurs acquittés des mensualités jusqu'au mois d'avril 2014.

Ils seront déboutés de leur demande d'indemnisation.

Sur les demandes accessoires

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [W] et Mme [Y] qui succombent en appel seront condamnés aux dépens d'appel et à payer à la société Cofidis la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'est pas démontré par la société Cofidis que l'action engagée par M. [W] et Mme [Y] procède d'un abus du droit d'agir en justice ni qu'elle ait causé un préjudice distinct de celui consistant dans le retard dans le paiement de sa créance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné solidairement M. [W] et Mme [Y] à payer à la SA Cofidis la somme de 21.791,45 euros outre les intérêts au taux contractuel de 5,61% l'an à compter du 25 juillet 2014.

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne solidairement M. [W] et Mme [Y] à payer à la société Cofidis la somme de 26 306,72 euros avec intérêts au taux de 5,61 % à compter du 30 décembre 2014 pour les mensualités échues à cette date et, pour les suivantes, à compter de leur échéance ainsi qu'une indemnité de 1 576,25 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2014 ;

Rejette la demande de la société Cofidis en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Rejette les demandes de M. [W] et Mme [Y] ;

Condamne M. [W] et Mme [Y] à la société Cofidis la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [W] et Mme [Y] aux dépens d'appel qui pourront être directement recouvrés par application de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

S. TAILLEBOIS C. CORBEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre a - commerciale
Numéro d'arrêt : 17/02486
Date de la décision : 21/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-21;17.02486 ?
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