COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - COMMERCIALE
CC/IM
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 17/02343 - N° Portalis DBVP-V-B7B-EHAX
Jugement du 25 Octobre 2017
Tribunal de Commerce de Laval
n° d'inscription au RG de première instance 2014/7111
ARRET DU 14 JUIN 2022
APPELANTE :
SARL CARAIBES DEVELOPPEMENT prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 7]
[Localité 4]
Représentée par Me Pascal LANDAIS de la SELARL OUTIN GAUDIN ET ASSOCIES JURIDIQUE DU MAINE, avocat postulant au barreau de LAVAL - N° du dossier 20173166, et Me Charlène LE FLOC'H, avocat plaidant au barreau de FORT DE FRANCE
INTIMEE :
SAS [U] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés à cette fin audit siège
[Adresse 8]
[Localité 2]
Représentée par Me Anne-marie MAYSONNAVE de la SCP MAYSONNAVE- BELLESSORT, avocat au barreau de LAVAL - N° du dossier 154004
INTERVENANTE VOLONTAIRE
LA SOCIETE GENERALE DE BANQUE AUX ANTILLES, représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Pascal LANDAIS de la SELARL OUTIN GAUDIN ET ASSOCIES JURIDIQUE DU MAINE, avocat postulant au barreau de LAVAL - N° du dossier 20173166, et Me Charlène LE FLOC'H, avocat plaidant au barreau de FORT DE FRANCE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 14 Mars 2022 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, Présidente de chambre, qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, Présidente de chambre
M. RIEUNEAU, Conseiller
M. BENMIMOUNE, Conseiller
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 14 juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine CORBEL, Présidente de chambre, et par Sophie TAILLEBOIS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
~~~~
EXPOSE DU LITIGE
La société Caraïbes développement, dont le siège est situé en Martinique, a pour activité le transport et remorquage de tous véhicules notamment hors d'usage.
A la suite d'un devis établi le 28 avril 2014 par la société [U], la société Caraïbes développement lui a passé commande, laquelle a été acceptée le 23 mai 2014, d'un véhicule Isuzu D-Max single 4X4 cabine courte ATFS 86 (modèle 2014) avec transformations sur le véhicule de base et adaptation d'un équipement dépanneuse, moyennant le prix de 62 000 euros.
Par courriel du 7 mai 2014, la société Caraïbes développement précisait à la société [U] qu'une facture pro forma sera à établir au nom de Sogelease Dept Crédit bail - Caraïbes Levage.
La facture de vente n'est pas produite.
Le véhicule a été réceptionné par la société Caraïbes développement avec deux sièges.
Par message électronique du 5 août 2014, la société Caraïbes développement faisait savoir à la société [U] qu'elle venait d'être informée par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) que le véhicule ne serait autorisé à circuler qu'avec une place, ce qui lui posait un 'grave problème' parce qu'il ne s'agissait pas d'un véhicule 'fourrière' mais 'assistance-dépannage' et lui demandait de lui confirmer que le véhicule était bien un véhicule à deux places.
Après avoir reçu le procès-verbal de réception à titre isolé (RTI), daté du 16 septembre 2014 spécifiant que le véhicule ne dispose que d'une seule place, la société Caraïbes développement a notifié par un mail du 24 septembre 2014, réitéré le 6 octobre puis par lettre officielle de son conseil du 15 octobre suivant, à la société [U] son intention de se prévaloir de la résolution de la vente pour non conformité du bien vendu aux caractéristiques attendues, d'obtenir la restitution du prix et l'indemnisation de divers préjudices.
La société [U] s'étant opposée à ces prétentions, la société Caraïbes développement l'a assignée, le 24 novembre 2014, devant le tribunal de commerce de Laval.
Par jugement rendu le 25 octobre 2017, le tribunal a déclaré la société Caraïbes développement irrecevable à agir pour défaut de qualité à agir, l'a condamnée aux dépens et à payer à la société [U] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que le véhicule en cause était la propriété du bailleur SGBA Sogelease et que, si la société Caraïbes développement produisait un mandat de cette société pour agir, du 1er février 2016, encore que n'étaient pas précisés la qualité et le nom du signataire de ce mandat, il ne ressortait ni de l'assignation ni de ses conclusions que la société Caraïbes développement agissait comme mandataire de cette société, au nom de celle-ci.
Par déclaration du 12 décembre 2017, la société Caraïbes développement a interjeté appel de ce jugement en attaquant toutes ses dispositions, intimant la société [U].
La société Générale de banque aux Antilles est intervenue volontairement à l'instance par conclusions remises le 12 mars 2018.
Dans leurs dernières conclusions remises le 11 février 2021, la société Caraïbes développement et la société Générale de banque aux Antilles demandent à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :
- déclarer recevables et bien fondées ses demandes en sa qualité de propriétaire du véhicule Isuzu immatriculé sous le numéro [Immatriculation 6] ;
en tout état de cause,
- prendre acte de l'intervention volontaire de la société Générale de banque aux Antilles en sa qualité de propriétaire et bailleur du véhicule,
- déclarer recevable l'intervention volontaire de la société Générale de banque aux Antilles en sa qualité de proprietaire et bailleur du véhicule,
- prendre acte du mandat donné par la société Générale de banque aux Antilles à la société Caraïbes développement pour exercer l'action en résolution du contrat de vente du véhicule Isuzu immatriculé sous le numéro DH~475-NW,
- dire que le mandat donné par la société Générale de banque aux Antilles à la société Caraïbes développement pour exercer l'action en résolution du contrat de vente du véhicule lsuzu immatriculé sous le numéro [Immatriculation 6] est régulier,
- déclarer recevables et bien fondées les demandes de la société Caraïbes développement en sa quailité de mandataire du bailleur et pour le compte du bailleur,
dès lors,
- prononcer Ia résolution du contrat de vente du véhicule Isuzu immatriculé sous le numéro [Immatriculation 6] (n° de série: MPATFS86JET003993), matérialisée par le devis accepté n°14-04-13,
si nécessaire,
- ordonner la nomination d'un expert judiciaire aux frais de la société [U] pour dire si le véhicule est conforme ou non dans tous les cas pouvant se présenter lors d'opérations de dépannage,
en conséquence,
- condamner la société [U] à rembourser la somme de 62.000,00 euros versée par la société Caraïbes développement au titre de l'acquisition du véhicule, somme portant intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 15/10/2014,
- dire que la restitution du véhicule Isuzu immatriculé sous le numéro [Immatriculation 6] (n° de série: MPATFS86JET003993) se fera aux frais du vendeur,
- condamner la société [U] à verser la somme de 6.255,34 euros verseé par la société Caraïbes développement au titre des frais de transport du véhicule,
- condamner la société [U] à verser à la société Caraïbes développement la somme de 291,75 euros au titre des frais d'installation du kit main libre Debrouilla, outre 250 euros au titre des frais de transport aller/retour du siège de la société à la société Debrouilla,
- condamner la société [U] à verser à la société Caraïbes développement la somme de 493,00 euros au titre des frais d'immatriculation du véhicule,
- condamner la société [U] à verser à la société Caraïbes développement la somme de 1.560 euros au titre des frais de peinture et de sérigraphie Socasi, outre 250 euros au titre des frais de transport aller/retour du siège de Ia société à la société Socasi,
- condamner la société [U] à verser à la société Caraïbes développement la somme de 22.749,00 euros au titre de la perte de l'avantage fiscal de défiscalisation Girardin industriel,
- condamner la société [U] à verser à la société Caraïbes développement la somme de 218.345.40 euros au titre des frais de location d'un véhicule de remplacement du 11/08/2014 au 29/02/21, à actualiser jusqu'à la restitution du prix du véhicule.
- condamner la société [U] à verser à la société Caraïbes développement la somme de 150 euros au titre des frais de transport du port vers le siège de la société,
- condamner la société [U] à verser à la société Caraïbes développement la somme de 40.664 euros correspondent aux frais de stationnement et de garde du véhicule du 05/08/2014 au 29/02/21 à actualiser jusqu'à parfaite restitution du véicule,
- condamner la société [U] à verser la société Caraïbes développement la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral subi notamment par le silence dolosif garde par la société [U] puis par ses déclarations mensongères,
- condamner la société [U] à faire insérer, à ses frais, et sous astreinte de 250 euros par jour de retard à compter du prononce du jugement à intervenir, une annonce dans un journal spécialisé tel que le magazine LDM The towing magazine » n°1 mondial des magazines du dépannage [Adresse 5], aux termes de laquelle il sera expressément mentionné Ia limitation réglementaire à une place assise pour le véhicule Maxilift PF 3.000 4x4 ISUZU Cabine courte ATFS.
- condamner la société [U] à verser à la société Caraïbes développement la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société [U] aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions remises le 25 février 2021, la société [U] prie la cour de :
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'i| déclaré irrecevable la société Caraïbes développement en sa demande faute de qualité pour agir.
Dire et juger qu'en cause d'appel, il n'est pas justifié de la qualité pour agir de la société Générale de banque aux Antilles.
La déclarer irrecevable en son intervention.
Que tout le moins, Ia société Générale de banque aux Antilles ne forme aucune demande.
Dire et juger au demeurant ses demandes irrecevables au visa de l'article 554 du code de procédure civile.
Dire et juger que la société Caraïbes développement n'a jamais agi en qualité de mandataire faute de se prévaloir de Ia dite qualité tant dans son appel que dans ses écritures faute de mention intervenante en qualité de mandataire.
Dire et juger que les demandes formulées à titre personnel par la société Caraïbes développement et non en qualité de mandataire de la société Générale de banque aux Antilles sont irrecevables faute de qualité pour agir.
Dire et juger que la société Caraïbes développement ne justifie pas de sa qualité
pour agir en qualité de propriétaire.
Dire et juger en conséquence la société Caraïbes développement irrecevable pour l'ensemble de ses demandes.
Dire et juger en toute hypothèse que le défaut de qualité pour agir de la société Caraïbes développement n'a été régularisé que postérieurement à son appel de sorte qu'elle ne justifiait d'aucune qualité pour agir lors de l'appel.
La déclarer irrecevable et la débouter de l'ensemble de ses demandes.
Subsidiairement,
Dire et juger mal fondée la demande de résolution de vente.
Constater la prescription de l'action en garantie des vices cachés au visa de l'article 1648 du code civil .
Dire la demande mal fondée de ce chef.
Dire et juger mal fondées Ies demandes de dommages et intérêts.
Débouter Ies demanderesses de l'ensemble de leurs demandes comme mal fondées.
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Caraïbes développement au paiement d'une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance.
Condamner en cause d'appel la société Caraïbes développement et la société Générale de banque aux Antilles à payer à la société [U] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les condamner aux entiers dépens en cause d'appel.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des moyens les parties à leurs dernières conclusions.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de la société Générale de banque aux Antilles
L'article 554 dispose que 'peuvent intervenir en cause d'appel, dès lors qu'elles y ont intérêt, les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité'.
Dans le cas présent, les premiers juges ont retenu que la société Générale de banque aux Antilles n'était pas représentée devant eux.
Elle doit donc être considérée comme n'ayant pas été partie en première instance.
La société Générale de banque aux Antilles affirme être l'acquéreur initial du véhicule en cause, ce que conteste la partie adverse qui prétend que cette société n'en justifie pas.
Il sera, d'abord, relevé qu'il suffisait à la société [U] de produire la facture de vente du véhicule pour établir l'identité de l'acquéreur, ce qu'elle ne fait pas.
Le certificat d'immatriculation du véhicule portant la date du 10 juillet 2014 mentionne 'SGBA Sogelease' comme propriétaire du véhicule, étant observé que l'entête figurant sur la facture de cession établie le 18 décembre 2018 au profit de la société Caraïbes développement fait apparaître que Sogelease est le département crédit-bail de la société générale de banque aux Antilles. Il ressort ainsi des pièces du dossier que la vente dont la résolution est demandée a été conclue entre la société Générale de banque aux Antilles et la société [U].
La société Générale de banque aux Antilles a donc intérêt et qualité à agir en résolution au contrat de vente auquel elle était partie, conformément aux dispositions de l'article 1610 du code civil.
Son intervention volontaire ne soumet pas en appel un litige nouveau par rapport à celui qui a été soumis aux premiers juges puisqu'elle tend aux mêmes fins, à savoir la résolution du même contrat de vente.
Elle est donc recevable.
Sur la recevabilité de la demande de résolution du contrat de vente
La société Caraïbes développement critique les premiers juges pour l'avoir déclarée irrecevable en ses demandes en faisant valoir qu'ils auraient dû retenir que son défaut de qualité à agir avait été régularisé par la production d'un mandat d'agir que lui avait consenti la propriétaire du véhicule.
La société [U] approuve les motifs des premiers juges partant du constat que la société Caraïbes développement n'était pas propriétaire du véhicule pris en crédit-bail lorsqu'elle a engagé l'action en résolution du contrat de vente, ce qui est apparu sur le certificat d'immatriculation qu'elle a produit aux débats et qu'elle ne peut utilement prétendre avoir reçu mandat de la société Générale de banque aux Antilles, dès lors qu'elle n'a pas indiqué agir au nom de cette société mais, au contraire, a agi en son propre nom.
Le contrat de crédit-bail n'a pas été produit aux débats mais seulement une feuille d'un contrat comportant une clause stipulant que l'action en résolution de la vente ne pourra être exercée par la locataire qu'en qualité de mandataire du bailleur. Pour autant, il n'est pas contesté que la société Caraïbes développement qui a passé commande du véhicule et a toujours été l'interlocutrice de la société vendeuse n'était que crédit-preneuse du véhicule, qualité qu'elle avait lorsqu'elle a engagé l'action en résolution de la vente.
Il en résulte que la société Caraïbes développement n'avait pas qualité à engager en son propre nom l'action en résolution comme elle l'a fait, dès lors qu'elle n'est pas partie au contrat de vente.
Le fait qu'elle a pu justifier, en cours de première instance, d'un mandat pour agir que lui avait donné la société Générale de banque aux Antilles le 1er février 2016 n'a pas régularisé en première instance son défaut de qualité à agir dès lors qu'elle a continué à agir en son propre nom et non au nom de la société Générale de banque aux Antilles ainsi que cela ressort de ses conclusions récapitulatives devant le tribunal de commerce de Laval produites par la partie adverse et du jugement.
La société Caraïbes développement fait valoir qu'en tout état de cause, la fin de non-recevoir est régularisée en appel, dans un premier temps, par l'intervention volontaire de la société Générale de banque aux Antilles, et ensuite par le fait qu'elle est devenue propriétaire du véhicule.
La société [U] répond que si la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir peut être régularisée conformément aux dispositions de l'article 126 du code de procédure civile, encore faut-il que la régularisation intervienne avant l'expiration du délai pour agir. Considérant que la preuve de la cession du véhicule à la société Caraïbes développement par la société Générale de banque aux Antilles n'est pas établie en l'absence d'un certificat de cession, de la carte grise et de la justification du règlement du prix et observant que la cession du véhicule serait survenue le 18 décembre 2018, soit postérieurement à la déclaration d'appel, elle en déduit que la société Caraïbes développement n'avait pas qualité à agir lorsqu'elle a fait appel et alors qu'elle ne s'est alors pas prévalu d'un mandat de représentation de la société Générale de banque aux Antilles. Elle relève, en outre, que la société Générale de banque aux Antilles ne forme en son nom aucune demande, ce à quoi s'opposeraient, selon elle, les dispositions de l'article 554 du code de procédure civile.
La circonstance que la société Générale de banque aux Antilles ait revendu, par la suite, le véhicule à la société Caraïbes développement qui en serait actuellement propriétaire, ne confère pas à celle-ci la qualité à agir en résolution de la première vente à laquelle elle n'est pas partie.
Toutefois, dans le dispositif de leurs conclusions prises conjointement, la société Caraïbes développement et la société Générale de banque aux Antilles demandent à la cour de déclarer recevables et bien fondées les demandes de la première en sa qualité de mandataire du bailleur pour le compte de ce dernier, de sorte qu'en cause d'appel, la société Caraïbes développement justifie agir en résolution de la vente au nom de la société Générale de banque aux Antilles, partie au contrat de vente dont la résolution est demandée et ce, conformément aux stipulations du contrat-bail.
La régularité de ce mandat confirmé par l'intervention volontaire de la seconde ne prête pas à discussion.
Comme il a été dit ci-avant, lors de l'examen de la recevabilité de l'intervention de la société Générale de banque aux Antilles, celle-ci est recevable à intervenir à l'instance pour autoriser la société Caraïbes développement à agir en son nom en résolution du contrat de vente, ce qui ne modifie pas l'objet du litige par rapport à la première instance, qui reste la résolution du même contrat de vente.
En application de l'article 126 du code de procédure civile, le défaut de qualité à agir de la société Caraïbes développement concernant l'action en résolution de la vente pouvait être régularisée à tout moment, jusqu'au jour où la cour statue, en l'absence de forclusion. Il importe donc peu que, dans la déclaration d'appel, la société Caraïbes développement n'ait pas indiqué agir, concernant l'action en résolution de la vente, en qualité de mandataire, mais ait agi en son propre nom. Par ailleurs, il n'est justifié d'aucune forclusion.
Par suite, la demande de résolution du contrat qui est formée par la société Caraïbes développement au nom de l'acquéreur, la société Générale de banque aux Antilles, est recevable.
Sur la demande de résolution du contrat de vente
La société Caraïbes développement et la société Générale de banque aux Antilles font grief à la société [U] d'avoir manqué à son obligation de délivrance qui lui incombe en application de l'article 1604 du code civil en ayant vendu un véhicule qui ne correspondait pas aux stipulations contractuelles dès lors que ce véhicule, qui était vendu pour l'exercice d'une activité de dépannage, devait nécessairement comporter deux places assises pour permettre de prendre en charge le conducteur dépanné.
Pour s'opposer à la demande de résolution du contrat de vente, la société [U] fait valoir qu'il ne résulte d'aucune stipulation que le véhicule vendu devait avoir deux sièges.
Il est vrai que l'acceptation de la commande établie le 23 mai 2014 par la société [U], seul document contractuel produit, liste les caractéristiques techniques du véhicule vendu sans préciser le nombre de sièges.
Pour autant, le véhicule a été vendu pour être utilisée comme dépanneuse et a été spécialement équipé à cet effet. Un second siège pour transporter le conducteur du véhicule dépanné devait donc être nécessairement prévu pour que le véhicule puisse répondre aux besoins de l'utilisation prévue par les parties.
D'ailleurs, dans sa première réponse à la réclamation de la société Caraïbes développement, la société vendeuse, par lettre du 20 octobre 2014, n'a pas contesté que le véhicule devait bien comporter deux places, ayant seulement tenté de faire croire que le véhicule était conforme à cette exigence dès lors que la carte grise indiquait qu'il s'agissait d'un véhicule deux places, pour relativiser l'indication contraire portée sur la carte blanche, présentée comme n'étant pas le titre de circulation.
C'est donc à tort que la société [U] affirme que l'exigence de deux places assises ne serait pas entrée dans le champ contractuel.
A aucun moment avant la livraison, la société [U] ne justifie avoir informé la société Caraïbes développement de la contrainte technique qu'elle invoque, à l'origine de la décision de l'administration de ne délivrer une carte blanche qu'à condition que le véhicule ne comporte qu'un siège pour le conducteur, ni que cette restriction aurait été connue de la société Caraïbes développement.
En outre, toutes les photographies du modèle choisi par la société Caraïbes développement figurant sur le site de la société [U] qui montrent l'intérieur avant des véhicules de ce type font apparaître deux fauteuils.
La direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement des Pays de Loire dans sa lettre du 13 novembre 2014 explique avoir imposé à la société [U] de réduire le nombre de places assises en supprimant la place du passager afin de respecter l'homologation du système de freinage et les prescriptions de l'arrêté du 30 septembre 1975 relatif à l'évacuation des véhicules en panne ou accidentés, de sorte que c'est par erreur que le certificat d'immatriculation indique que le véhicule est équipé de deux places assises.
Il en résulte que le véhicule qui ne peut circuler qu'avec un siège n'est pas conforme à ce qui avait été convenu entre les parties. Ce défaut de conformité, qui porte sur un élément essentiel du bien vendu puisqu'il ne permet pas à la société utilisatrice d'en faire un usage répondant aux besoins de son activité de dépannage, justifie la résolution du contrat de vente.
La société [U] fait valoir qu'il est établi au regard du procès-verbal de constat dressé le 23 février 2015 à la demande de la société Caraïbes développement que le véhicule dont la première date d'immatriculation est du 10 juillet 2014 avait, le 23 février 2015, parcouru plus de 8 000 kilomètres alors même qu'il avait été immobilisé à cause d'une grève depuis le 29 janvier 2015.
Mais, la circonstance que la société Caraïbes développement, qui est restée en possession du véhicule du fait du refus de la société [U] d'accepter la résolution de la vente, ait pu utiliser néanmoins le véhicule pour un autre usage que celui de dépanneuse, ne fait pas obstacle à la demande de résolution du contrat, n'étant pas en elle-même la preuve de ce que le véhicule était conforme aux caractéristiques attendues.
Enfin, la société [U] prétend qu'il suffit que la société Caraïbes développement prenne attache avec la DREAL pour obtenir le rétablissement de la seconde place.
Mais il appartenait à la société [U] de faire elle-même les modifications imposées pour obtenir l'établissement d'un nouveau RTI. De plus, il n'y a pas de certitude sur l'établissement par l'administration d'une autorisation de circulation de ce véhicule avec deux places assises.
Par suite, la résolution du contrat de vente est prononcée.
La résolution du contrat pour inexécution entraîne l'anéantissement rétroactif du contrat.
Les choses doivent donc être remises dans l'état où elles étaient au jour de la conclusion du contrat.
En conséquence, la société [U] devra restituer le prix de vente à la société Caraïbes développement prise en sa qualité de mandataire de la société Générale de banque aux Antilles, soit la somme de 62 000 euros.
Les intérêts sur cette somme sont dus du jour de la sommation de payer ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, conformément aux dispositions de l'article 1153 alinéa 3, ancien, du code civil, soit, en l'espèce, à compter de la mise en demeure du 15 octobre 2014.
En contre-partie, le véhicule devra être restitué à la société [U] aux frais de cette dernière.
Sur les demandes d'indemnisation
La société Caraïbes développement demande à la société [U] l'indemnisation de divers préjudices consécutifs à l'impossibilité d'user du véhicule comme dépanneuse.
La société [U] s'oppose à ces prétentions qu'elle estime non fondées et non justifiées en faisant observer que l'activité de la société Caraïbes développement a été bloquée en raison d'une grève qui, au mois de janvier 2016, avait duré plus de neuf mois et qu'en janvier 2018, la société était toujours fermée.
La société Caraïbes développement est en droit d'être indemnisée des dépenses qu'elle a engagées pour immatriculer le véhicule (493,00 euros) ainsi que la somme de 1.560 euros au titre des frais de peinture et de sérigraphie, outre 250 euros au titre des frais de transport aller/retour du siège de Ia société Caraïbes développement à l'entreprise qui a réalisé les travaux, soit un total de 2 303 euros.
Il n'est pas justifié du paiement de la somme de 6.255,34 euros que la société Caraïbes développement prétend avoir versée au titre des frais de transport du véhicule.
Il n'est pas démontré que le kit main libre installé sur le véhicule ne pourra pas être installé sur un autre véhicule. La demande en paiement de la somme de 291,75 euros au titre des frais d'installation du kit main libre Debrouilla, outre 250 euros au titre des frais de transport aller/retour du siège de la société installatrice est rejetée.
Il est établi que le 23 février 2015, le véhicule avait parcouru plus de 8 000 kilomètres. La demande en paiement d'une somme de 40.664 euros correspondant aux frais de stationnement et de garde du véhicule du 05/08/2014 au 29/02/21 à actualiser jusqu'à parfaite restitution du véhicule est rejetée.
Par ailleurs, les seules factures de location d'un véhicule produites au nom de Caraïbes Levage qui s'avère être une société liée à la société Caraïbes développement, sans que celle-ci ne démontre qu'elle les ait payées, alors que la partie adverse conteste la réalité de cette dépense notamment au regard de la paralysie de l'activité de l'entreprise du fait d'une grève persistante, ne rapportent la preuve que la société Caraïbes développement a effectivement engagé des frais de location d'un véhicule de remplacement. La demande en paiement de la somme de 218.345,40 euros au titre des frais de remplacement du 11/08/2014 au 29/02/21, à actualiser jusqu'à la restitution du prix du véhicule, sera rejetée.
Il n'est pas justifié des frais de transport du port vers le siège de la société. La réclamation de la somme de 150 euros à ce titre est rejetée.
La société Caraïbes développement ne justifie pas du préjudice qu'elle invoque tenant à une prétendue perte de l'avantage fiscal de défiscalisation Girardin industriel. La demande en paiement de la somme de 22.749,00 euros à ce titre est rejetée.
Elle ne démontre pas que le comportement de la société [U] lui aurait causé un préjudice moral. Sa demande en paiement de la somme de 10.000 euros à ce titre est rejetée.
Enfin, il n'y a pas lieu de condamner la société [U] à faire insérer, à ses frais, une annonce dans un journal spécialisé telle que demandée.
Sur les demandes accessoires
Les dépens de première instance seront laissés à la charge de la société Caraïbes développement.
La société [U], qui succombe en appel, sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à la société Caraïbes développement la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant contradictoirement, et par arrêt mis à disposition au greffe,
Déclare recevable l'intervention volontaire de la société Générale de banque aux Antilles ;
Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
Déclare recevable la demande de la société Caraïbes développement agissant en sa qualité de mandataire de la société Générale de banque aux Antilles de résolution du contrat de vente du véhicule objet de la commande acceptée le 23 mai 2014 ;
Prononce la résolution de la vente portant sur le véhicule immatriculé sous le numéro [Immatriculation 6] (n° de série MPATFS86JET003993) conclue entre la société [U] et la société Générale de banque aux Antilles ;
Condamne la société [U] à restituer le prix de vente à la société Caraïbes développement prise en sa qualité de mandataire de la société Générale de banque aux Antilles, soit la somme de 62 000 euros, avec intérêts au taux légal compter du 15 octobre 2014 ;
En contre-partie, dit que le véhicule devra être restitué à la société [U] aux frais de cette dernière ;
Condamne la société [U] à payer à la société Caraïbes développement la somme de 2 303 euros à titre de dommages et intérêts ;
Rejette le surplus des demandes de dommages et intérêts ;
Rejette la demande de condamnation de la société [U] à faire insérer, à ses frais, une annonce dans un journal spécialisé ;
Condamne la société [U] à payer à la société Caraïbes développement la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Laisse les dépens de première instance à la charge de la société Caraïbes développement ;
Condamne la société [U] aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
S. TAILLEBOIS C. CORBEL