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29/04/2022 | FRANCE | N°18/01571

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre a - civile, 29 avril 2022, 18/01571


COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - CIVILE







CM/CL

ARRET N°:



AFFAIRE N° RG 18/01571 - N° Portalis DBVP-V-B7C-ELLH



Jugement du 18 Décembre 2017

Tribunal de Grande Instance d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance 11/01927







ARRET DU 29 AVRIL 2022





APPELANTS :



Madame [I] [T] épouse [F]

née le 19 Janvier 1962 à [Localité 6] (37)

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Patrick

BARRET de la SELARL BARRET PATRICK & ASSOCIES, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 180260



Monsieur [N] [F]

né le 06 Juillet 1963 à [Localité 5] (49)

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté par Me Patrick BARRET...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - CIVILE

CM/CL

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 18/01571 - N° Portalis DBVP-V-B7C-ELLH

Jugement du 18 Décembre 2017

Tribunal de Grande Instance d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance 11/01927

ARRET DU 29 AVRIL 2022

APPELANTS :

Madame [I] [T] épouse [F]

née le 19 Janvier 1962 à [Localité 6] (37)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Patrick BARRET de la SELARL BARRET PATRICK & ASSOCIES, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 180260

Monsieur [N] [F]

né le 06 Juillet 1963 à [Localité 5] (49)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Patrick BARRET de la SELARL BARRET PATRICK & ASSOCIES, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 180260

INTIMEE :

SARL CHAUVIN MARCEL

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Arnaud BARBE de la SCP CHANTEUX DELAHAIE QUILICHINI BARBE, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 2011552

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 04 Octobre 2021 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame MULLER, Conseiller qui a été préalablement entendu en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame ROUSTEAU, Président de chambre

Madame MULLER, Conseiller

Mme REUFLET, Conseiller

Greffière lors des débats : Madame LEVEUF

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 29 avril 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MULLER, Conseiller, en remplacement de Sylvie ROUSTEAU, Président de chambre, empêchée et par Christine LEVEUF, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

Exposé du litige

M. [N] [F] et son épouse Mme [I] [T] (les maîtres de l'ouvrage) ont entrepris la construction, sur un terrain situé [Adresse 7], d'une maison d'habitation dont ils ont confié la maîtrise d'oeuvre à la SARL Christian Bouyer Atelier d'architecture (le maître d'oeuvre) selon contrat en date du 11 juillet 2003 et la réalisation à diverses entreprises, les travaux du lot maçonnerie étant attribués à la SARL Boidron (l'entreprise de maçonnerie) et ceux du lot plomberie et chauffage, incluant des planchers chauffants alimentés par une pompe à chaleur, à la SARL Chauvin Marcel (l'entreprise de chauffage).

Des désordres ayant été dénoncés dans l'année de la réception de l'ouvrage intervenue le 6 septembre 2004, l'assureur de protection juridique des maîtres de l'ouvrage a mandaté un expert qui a remis son rapport le 8 juillet 2005 et des protocoles d'accord ont été régularisés avec les entreprises concernées au sujet des travaux de reprise à effectuer.

S'étant plaints de l'inexécution partielle de ces travaux de reprise et de l'apparition de nouveaux désordres (défaut du réseau d'évacuation des eaux usées avec remontées d'humidité en cloisons, fissures en plafond), les maîtres de l'ouvrage ont, sur assignation en référé délivrée le 20 mai 2008 au maître d'oeuvre et à l'entreprise de chauffage, obtenu le 12 juin 2008 la désignation en qualité d'expert de M. [C] [H] qui, après extension de la mesure à d'autres entreprises, a déposé son rapport le 5 mai 2010.

Par acte d'huissier en date du 28 avril 2011, ils ont fait assigner le maître d'oeuvre et les entreprises de maçonnerie et de chauffage devant le tribunal de grande instance d'Angers en responsabilité pour fautes et réparation des désordres et autres préjudices subis.

Ils ont fait constater par huissier le 18 février 2013 que la température ambiante restait supérieure de plus de 5°C à la température de consigne de l'installation de chauffage malgré le changement de la sonde extérieure défectueuse effectué par le fabricant au cours des opérations d'expertise de M. [H].

Par jugement en date du 1er septembre 2014, le tribunal a sursis à statuer sur l'ensemble des demandes des parties, ordonné une nouvelle expertise confiée à M. [V] [Y] sur les désordres affectant l'installation de chauffage, renvoyé l'affaire à la mise en état et réservé le sort des dépens.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 29 juin 2015.

Par jugement en date du 18 décembre 2017, le tribunal a :

- condamné in solidum la SARL Christian Bouyer Atelier d'architecture et la SARL Boidron à payer à M. [F] et son épouse Mme [T] à titre de dommages et intérêts les sommes de 7.835,21 euros, avec indexation sur l'indice BT01 en vigueur au mois de mai 2010, s'agissant du préjudice matériel et de 3.000 euros s'agissant du préjudice immatériel

- déclaré, dans les rapports entre elles, la SARL Christian Bouyer Atelier d'architecture et la SARL Boidron responsables des désordres chacune à hauteur de 50 %

- condamné chacune à garantir l'autre à hauteur de 50 % de toutes Ies condamnations prononcées à son encontre par le jugement, en ce compris Ies dépens et les frais irrépétibles

- débouté M. [F] et son épouse Mme [T] de l'ensemble de Ieurs demandes formées à l'encontre de la SARL Chauvin Marcel

- ordonné l'exécution provisoire du jugement

- condamné in solidum la SARL Christian Bouyer Atelier d'architecture et la SARL Boidron aux dépens, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire ordonnée en référé le 12 juin 2008

- laissé les dépens exposés à l'encontre de la SARL Chauvin Marcel à la charge de M. [F] et son épouse Mme [T], en ce compris les frais de l'expertise judiciaire ordonnée par le tribunal le 1er septembre 2014

- condamné in solidum la SARL Christian Bouyer Atelier d'architecture et la SARL Boidron à payer à M. [F] et son épouse Mme [T] la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné M. [F] et son épouse Mme [T] à payer à la SARL Chauvin Marcel la somme de 1.500 euros sur le même fondement.

Pour rejeter les demandes à l'encontre de l'entreprise de chauffage fondées sur l'article 1147 ancien du code civil, il a considéré que l'écart entre la température de consigne et la température réelle ne constitue pas un désordre et peut être « facilement » corrigé selon l'expert M. [Y], que les réglages de l'installation de chauffage étaient « favorables » à la livraison et auraient dû être adaptés sur les cinq dernières années afin de tenir compte des évolutions de la construction, ce à la charge de l'entreprise assurant la maintenance de l'installation selon le même expert, que les maîtres de l'ouvrage ne justifient pas que l'entreprise de chauffage devait assurer cette maintenance et ne produisent aucun contrat d'entretien la liant à celle-ci et qu'au regard de la « notice d'installation » qu'ils produisent, stipulant au chapitre 7 que « toute intervention doit être réalisée par du personnel qualifié et habilité pour ce genre de matériel » et que les opérations de maintenance doivent être effectuées au moins une fois par an, ils ne justifient pas avoir chargé une entreprise de cette maintenance ni l'avoir informée de l'écart entre la température de consigne et la température réelle.

Suivant déclaration en date du 23 juillet 2018, M. [F] et son épouse Mme [T] ont relevé appel de ce jugement en ce qu'il les a déboutés de l'ensemble de Ieurs demandes à l'encontre de la SARL Chauvin Marcel et condamnés aux dépens exposés à son encontre, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire ordonnée le 1er septembre 2014, ainsi qu'à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, intimant la SARL Chauvin Marcel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 septembre 2021.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions, à savoir les conclusions d'intimés sur appel incident en date du 1er avril 2019 pour les appelants et les conclusions en date du 3 janvier 2019 pour l'intimée, qui peuvent se résumer comme suit.

M. [F] et son épouse Mme [T] demandent à la cour, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, L. 111-13-1 du code de Ia construction et de l'habitation et, subsidiairement, de l'ancien article 1147 du code civil, de :

- constater que l'ouvrage réalisé par la SARL Chauvin Marcel est impropre à sa destination et, en conséquence, dire sa responsabilité engagée sur le fondement de l'article 1792 du code civil et la débouter de sa demande au titre de son appel incident tendant à leur condamnation au paiement de la somme de 4.500 euros pour procédure abusive

- à titre subsidiaire, constater que la SARL Chauvin Marcel a manqué à son devoir de conseil et d'information et, en conséquence, dire sa responsabilité engagée sur le fondement contractuel

- dès lors, infirmer partiellement le jugement dont appel en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes à I'encontre de la SARL Chauvin Marcel

- statuant à nouveau sur ce point, condamner la SARL Chauvin Marcel à procéder à la réalisation des travaux de réglage préconisés par l'expert à la page 19 de son rapport d'expertise et au déplacement de la sonde et du thermostat, ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le mois de la signification de la décision à intervenir, et à payer la somme de 5.000 euros au titre de l'usure prématurée de leur ouvrage

- si mieux n'aime la cour, condamner la SARL Chauvin Marcel au paiement de la somme de 15.570 euros TTC représentant le coût de l'installation mise en place dont le réglage s'avérerait impossible

- en tout état de cause, condamner la SARL Chauvin Marcel au paiement des sommes de 2.000 euros au titre de leur trouble de jouissance, de 2.500 euros au titre de Ia surconsommation énergétique et de 3.500 euros au titre de |'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris Ies frais d'expertise.

La SARL Chauvin Marcel demande à la cour de confirmer le jugement querellé et, reconventionnellement au titre de l'appel incident, de condamner M. [F] et son épouse Mme [T] à lui payer les sommes de 4.500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens de l'instance.

Sur ce,

En droit, l'entrepreneur lié au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage répond envers celui-ci des dommages non réservés ni apparents à la réception sur le fondement de la responsabilité décennale de plein droit des constructeurs édictée par l'article 1792 du code civil si, dans le délai de dix ans à compter de la réception de l'ouvrage, ces désordres soit compromettent la solidité de l'ouvrage, soit affectent l'ouvrage dans l'un de ses éléments constitutifs ou de ses éléments d'équipement et le rendent impropre à sa destination.

En l'espèce, au regard de l'article L. 111-13-1 du code de la construction et de l'habitation selon lequel, en matière de performance énergétique, l'impropriété à la destination ne peut être retenue qu'en cas de dommages résultant d'un défaut lié aux produits, à la conception ou à la mise en 'uvre de l'ouvrage, de l'un de ses éléments constitutifs ou de l'un de ses éléments d'équipement conduisant, toute condition d'usage et d'entretien prise en compte et jugée appropriée, à une surconsommation énergétique ne permettant l'utilisation de l'ouvrage qu'à un coût exorbitant, les appelants soutiennent que le positionnement de la sonde au rez-de-chaussée sur un mur dans lequel passent de nombreuses canalisations est inadapté et empêche un réglage adéquat de la température de chauffage, ainsi qu'il ressort du rapport d'expertise de M. [Y], et que ce défaut d'implantation constitutif d'un défaut de conception entraîne, selon l'expert M. [H], une surconsommation du chauffage.

Or ce texte issu de la loi n°2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte est inapplicable au litige puisque les travaux de chauffage en cause ont été réalisés, et le délai d'épreuve décennal a expiré, avant son entrée en vigueur.

En outre, si M. [H] a relevé, au sujet du 'problème de réglage de la température intérieure' qui 'est toujours 5° au dessus de la température affichée au thermostat', que 'ce dysfonctionnement engendre nécessairement une surconsommation du chauffage', il l'a imputé à la défaillance, constatée par la société Cedeo après intervention du fabricant, de la sonde extérieure et, ayant recommandé de changer cette sonde dès sa note n°1 adressée aux parties le 12 janvier 2009, il a constaté lors de la réunion de synthèse organisée le 18 juin 2009 que le fabricant avait procédé à ce changement et a conclu qu'il avait ainsi été remédié au problème.

Les maîtres de l'ouvrage ont, certes, informé cet expert par l'intermédiaire de leur conseil le 7 octobre 2010, soit après le dépôt de son rapport, que la commande de chauffage ne fonctionnait pas mieux malgré le remplacement de la sonde, puis fait constater par huissier le 18 février 2013 que la température ambiante de l'habitation, mesurée avec un thermohygromètre infrarouge dans le couloir près de la sonde fixée au mur à gauche de la porte donnant sur le garage, atteignait 21,6°C alors que la température de consigne de l'installation de chauffage était réglée à 15°C.

Toutefois, M. [Y] n'a nullement relevé une surconsommation énergétique qui, pour la période postérieure au remplacement de la sonde extérieure, ne ressort d'aucun élément versé aux débats.

Pour sa part, il a attribué l'écart persistant constaté entre la température de « consigne ambiance hiver » (code 08) et la température réelle présente à l'intérieur de l'habitation 'à de mauvais réglages des paramètres de régulation et à une incompréhension du rôle de la sonde d'ambiance de cette installation' et estimé que 'ces défaillances ne représentent pas un désordre et peuvent être facilement corrigées, sans affecter l'usage de l'ouvrage'.

Il a, en effet, expliqué de manière précise et convaincante que :

- la régulation de la pompe à chaleur n'est pas basée sur la température intérieure mais uniquement sur la température extérieure, de sorte que l'utilisation de chauffages d'appoint de type poêle à bois ou à pétrole, tels que ceux mise en place par les maîtres d'ouvrage pour minorer leurs factures d'électricité en hiver (voir leur dire à expert du 9 juin 2015), vient augmenter la température intérieure sans réduire le fonctionnement de la pompe à chaleur

- comme spécifié dans la notice d'installation de l'unité intérieure, notice dont il reproduit, en pages 12 et 13 de son rapport, des extraits indiquant notamment que, en mode chauffage (hiver), 'Le générateur est commandé selon une consigne résultante de température d'eau (retour plancher) calculée selon une loi d'eau dépendant de la température extérieure. La consigne résultante peut être corrigée éventuellement par la température ambiante régnant dans la pièce principale. Un écart de + ou - 1 degré de la température ambiante par rapport à la consigne de température ambiante 'Hiver' (paramètre 08) provoque respectivement une diminution ou une augmentation de 2 degrés de la consigne résultante. La modification de la consigne résultante ne peut toutefois pas excéder 4 degrés (en plus ou en moins)', la correction d'ambiance entraîne une réduction de la température du réseau d'eau desservant le plancher chauffant de 4°C maximum

- la sonde d'ambiance implantée dans un dégagement où, du fait d'une densité importante de canalisations à proximité des collecteurs de répartition dans le placard du rez-de-chaussée, la température ambiante est toujours plus élevée que dans les autres pièces, ce qui entraîne un abaissement permanent de la température de départ, est d'une utilité très relative

- une meilleure adaptation de la régulation consisterait à réduire de 4 à 5°C la température de consigne hiver actuellement réglée à 35°C, ce depuis le 21 janvier 2009, et éventuellement à supprimer cette sonde d'ambiance

- l'effet des défauts de réglage a augmenté au fil des années avec le séchage de la structure et l'équilibre des matériaux puis avec les modifications réalisées et, si les réglages lors de la livraison de la maison étaient favorables (température de consigne hiver réglée à 45°C), ils auraient nécessité des adaptations après 4 ou 5 années de fonctionnement par l'entreprise assurant l'exploitation et l'entretien de l'installation.

Il s'en déduit que, quand bien même l'écart de température serait qualifié de désordre, il n'entraîne aucune impropriété à destination de l'installation de chauffage et procède de défauts de réglages non imputables à l'entreprise de chauffage, plutôt que d'un défaut de conception relatif au lieu d'implantation de la sonde d'ambiance.

La responsabilité de l'entreprise de chauffage ne saurait donc être engagée sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

Sur le fondement, subsidiaire, de l'article 1147 ancien du code civil qui exige la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice, les appelants soutiennent que l'entreprise de chauffage a manqué à son devoir de conseil en omettant de les informer, d'une part, de l'impossibilité de régler manuellement la température de chauffage grâce à la sonde et au thermostat installés au même endroit, d'autre part, de la nécessité de faire procéder à un entretien annuel et à des nouveaux réglages au bout de de 2 mois puis au bout de 5 ans environ après la réception de la maison.

Or il est clairement indiqué à l'article « 7 - instructions de maintenance » de la notice d'installation de l'unité extérieure remise aux maîtres de l'ouvrage qui la versent aux débats que 'toute intervention doit être réalisée par du personnel qualifié et habilité pour ce genre de matériel' et qu'il faut 'effectuer les opérations suivantes au moins une fois par an' dont le 'contrôle des consignes et points de fonctionnement', de sorte que le défaut d'information sur la nécessité d'une maintenance annuelle réalisée par une entreprise spécialisée n'est pas caractérisé.

En outre, il ne peut pas être reproché à l'entreprise de chauffage de ne pas avoir informé les maîtres d'ouvrage plus avant sur les modalités particulières des réglages à effectuer dans le cadre de cette maintenance annuelle qui ne lui a pas été confiée.

En revanche, s'il ressort de la notice d'installation de l'unité intérieure que, comme l'explique M. [Y], la régulation du chauffage par le sol est basée uniquement sur une courbe de réglage de la température de retour agissant en fonction de la température extérieure, la sonde d'ambiance ne venant qu'en correction de cette courbe en plus ou en moins dans une proportion très limitée, l'attention des maîtres de l'ouvrage n'a pas été suffisamment attirée sur l'impossibilité en résultant de régler la température intérieure par action sur la régulation complémentaire mise en place, a fortiori compte tenu du lieu d'implantation de la sonde d'ambiance entraînant un abaissement permanent, donc non modulable même dans la limite de 4 degrés indiquée dans cette notice, de la température de départ, ni sur l'existence d'autres systèmes de régulation qui auraient mieux répondu à leurs attentes.

Ces autres systèmes, dont M. [Y] précise que les plus sophistiqués permettent de réaliser un réglage pièce par pièce avec thermostat et vannes motorisées individuelles par boucle de chauffage, ne se limitent pas à l'option « commande mode économique » évoquée par l'entreprise de chauffage et permettant uniquement un abaissement de température lors du passage en fonctionnement économique, option qui n'a pas été demandée par les maîtres d'ouvrage mais que l'entreprise de chauffage ne justifie pas davantage avoir proposée à ceux-ci.

Il y a donc lieu de considérer que l'entreprise de chauffage a manqué à son devoir de conseil sur la régulation complémentaire.

Toutefois, cette faute ne saurait justifier de la condamner sous astreinte à réaliser les travaux de réglage comprenant, tels que préconisés par M. [Y] et détaillés en page 19 de son rapport, le rinçage complet de l'installation, une remise en eau avec un traitement adapté pour plancher chauffant basse température, le réglage de la production de chaleur en cohérence avec l'étude thermique (action de la régulation complémentaire par la sonde d'ambiance désactivée) et consigné sur un PV, la vérification des boucles de chauffage et du circulateur et leur adaptation si nécessaire avec les besoins actuels, des vérifications régulières (mesures hebdmodaires de température intérieure et extérieure, ou enregistrement continu) durant la prochaine saison de chauffe avec adaptation de la courbe de chauffage de base (une action mensuelle afin d'en apprécier l'impact) et la remise en service de la régulation complémentaire par la sonde d'ambiance après stabilisation des réglages de base (après 3 ou 4 mois de fonctionnement), dès lors que de tels réglages incombent à l'entreprise en charge de la maintenance de l'installation, ce que n'a jamais été l'entreprise de chauffage, et encore moins de la condamner à rembourser le coût de l'installation dont M. [Y] indique, sans être techniquement démenti, qu'elle peut aisément faire l'objet de réglages efficaces par une entreprise spécialisée dans le cadre d'un contrat de suivi, le refus de la société Savelys de réaliser les réglages ponctuels pour lesquels elle a été sollicitée par les maîtres de l'ouvrage sans connaître l'antériorité de l'installation étant compréhensible en l'absence d'un contrat de ce type.

L'entreprise de chauffage peut tout au plus être condamnée, pour remédier à son défaut de conseil, à déplacer la sonde d'ambiance dans une pièce principale à un endroit convenu avec les maîtres de l'ouvrage, ce dans un délai d'un mois à compter de la validation du nouvel emplacement par l'entreprise en charge de la maintenance de l'installation, cette obligation étant assortie d'une astreinte provisoire qui paraît nécessaire pour en assurer l'exécution selon les modalités précisées au dispositif du présent arrêt, ainsi qu'à indemniser les maîtres de l'ouvrage du préjudice de jouissance lié à l'inconfort d'une température intérieure non modulable auquel elle les a exposés faute de les avoir complètement informés, préjudice pouvant être estimé à la somme de 2.000 euros demandée, hors de toute prise en compte d'une usure prématurée de l'ouvrage qui a été écartée par M. [Y] et d'une surconsommation énergétique qui n'est pas établie.

Compte tenu de ce qui précède, l'action des maîtres de l'ouvrage, partiellement fondée, ne revêt aucun caractère abusif susceptible de les exposer au paiement de dommages et intérêts envers l'entreprise de chauffage dont la demande en ce sens ne pourra qu'être rejetée.

Les parties, qui succombent l'une et l'autre partiellement en leurs prétentions, conserveront chacune à sa charge ses propres dépens, sans application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre, que ce soit en appel ou en première instance, seuls les frais d'expertise de M. [Y], qui sont compris de droit dans les dépens en vertu de l'article 695 4° du même code, étant répartis par moitié entre elles.

Par ces motifs,

La cour,

Infirme dans les limites de sa saisine le jugement entrepris.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la SARL Chauvin Marcel engage sa responsabilité contractuelle envers M. [F] et son épouse Mme [T] pour manquement à son devoir de conseil sur la régulation complémentaire de l'installation de chauffage.

La condamne à déplacer la sonde d'ambiance dans une pièce principale à un meilleur endroit convenu avec M. [F] et son épouse Mme [T], ce dans un délai d'un mois à compter de la validation du nouvel emplacement par l'entreprise en charge de la maintenance de l'installation et sous astreinte provisoire, passé ce délai, de 50 (cinquante) euros par jour de retard pendant une durée de quatre mois.

La condamne à payer à M. [F] et son épouse Mme [T], ensemble, la somme de 2.000 (deux mille) euros en réparation de leur préjudice de jouissance.

Déboute M. [F] et son épouse Mme [T] du surplus de leurs demandes.

Déboute la SARL Chauvin Marcel de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Laisse à la charge de chaque partie ses propres dépens, excepté les frais d'expertise de M. [Y] qui seront répartis entre elles par moitié.

LE GREFFIER P/ LA PRESIDENTE EMPECHEE

C. LEVEUF C. MULLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre a - civile
Numéro d'arrêt : 18/01571
Date de la décision : 29/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-29;18.01571 ?
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