COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - COMMERCIALE
CC/IM
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 21/01555 - N° Portalis DBVP-V-B7F-E3IU
Ordonnance du 20 Mai 2021
Juge de la mise en état du MANS
n° d'inscription au RG de première instance 20/01321
ARRET DU 26 AVRIL 2022
APPELANT :
Monsieur [B] [J]
né le [Date naissance 3] 1947 à [Localité 6] ([Localité 6])
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Alexandra REPASKA de la SELARL CABINET AR, avocat au barreau du MANS
INTIMEE :
SOCIETE BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE DE L'OUEST
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Frédéric BOUTARD de la SCP LALANNE - GODARD - HERON - BOUTARD - SIMON, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 20200581
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 07 Février 2022 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, Présidente de chambre, qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, Présidente de chambre
Mme ROBVEILLE, Conseiller
M. BENMIMOUNE, Conseiller
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : contradictoire
Prononcé en chambre du conseil le 26 avril 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine CORBEL, Présidente de chambre, et par Sophie TAILLEBOIS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
~~~~
Par acte sous seing privé du 1er avril 2011, la BANQUE POPULAIRE DE L'OUEST (ci-après BPGO) a consenti à la SARL AMBULANCES VEDAQUAISES un prêt professionnel d'un montant en principal de 347 000 euros, pour l'achat des parts de la SARL [J], remboursable en 84 échéances mensuelles de 4 807,17 euros chacune assurance comprise, au taux de 3,53 % l'an.
Le même jour, M. [J] s'est porté caution solidaire du remboursement du prêt, dans la limite de la somme de 48 580.00 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard.
La débitrice principale ayant cessé d'honorer ses engagements à compter de la mensualité du mois d'août 2013, la BPGO a obtenu un jugement du tribunal de commerce du Mans rendu le 19 septembre 2014 qui :
- condamne la SARL AMBULANCES à lui payer la somme de 273 933,60 euros due au 20 janvier 2014, outre intérêts postérieurs au taux de 3,53 % l'an sur la somme de 271 745,57 € du 21/01/2014 jusqu'à complet règlement, ce avec capitalisation,
- condamne M. [J] solidairement à régler la somme de 48 580 euros, montant de son engagement de caution solidaire, outre les intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2014, avec anatocisme.
Ce jugement a été signifié le 7 octobre 2014 à M. [J].
Le 16 juin 2020, M. [J] a assigné la BPGO devant le tribunal judiciaire du Mans aux fins :
- A titre principal,
* de déclarer nul et de nul effet l'acte de cautionnement souscrit le 1er avril 2011,
* de condamner la BPGO à lui payer la somme de 48 580 € à titre de dommages et intérêts,
- A titre subsidiaire,
* De dire et juger les stipulations de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion figurant dans le cautionnement souscrit par M. sont réputées non écrites,
* De dire que la caution souscrite est une caution simple,
* Condamner la BPGO au paiement de la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Saisi sur incident de la BPGO, le juge de la mise en état a, par ordonnance du 20 mai 2021, déclaré l'action de M. [J] irrecevable et l'a condamné à payer à la BPGO la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.
Le juge de la mise en état a retenu que l'action de M. [J] se heurte, à la fois, à l'autorité de la chose jugée tenant au jugement du tribunal de commerce du Mans rendu le 19 septembre 2014 qui le condamne en exécution de son cautionnement solidaire, autant pour la demande de nullité ou de la requalification du cautionnement solidaire que pour la demande de dommages et intérêts fondée sur la faute de la banque tenant à faire souscrire un engagement nul, et à la prescription dont il a fait partir le point de départ du délai à la date de souscription du cautionnement.
Suivant déclaration du 1er juillet 2021, M. [J] a interjeté appel de cette ordonnance en attaquant expressément chacun de ses chefs.
Par conclusions remises le 21 janvier 2022, M. [J] sollicite de la cour qu'elle :
- infirme la décision en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
- déboute la société BPGO de toutes ses 'demandes incidentes',
- condamne la BPGO à lui payer la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions remises le 13 octobre 2021, la BPGO demande à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise et de condamner M. [J] à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
M. [J] soutient que son action n'est pas prescrite en faisant valoir qu'en application de l'article 2224 du code civil et selon la jurisprudence, le point de départ de la prescription de l'action en nullité est le jour où le titulaire de l'action a connu le vice affectant l'acte. Prétendant n'avoir pas reçu un exemplaire de l'acte de cautionnement lors de sa signature et n'avoir pu avoir connaissance du vice affectant cet acte que le 16 novembre 2020 lorsque le conseil de la BPGO le lui a remis, il en déduit que son action n'est pas prescrite.
Mais le premier juge a, à juste titre, constaté que M. [J] avait apposé sa signature sous la mention indiquant qu'il reconnaissait qu'une copie de son engagement lui avait été remise.
Force est de constater que M. [J] n'oppose aucun moyen de droit pour critiquer ce motif du premier juge.
Par cette mention que M. [J] a approuvée, la BPGO rapporte la preuve que l'acte de cautionnement a été remis à la caution le jour de son engagement.
En outre, la BPGO justifie de ce que M. [J] a souscrit en sa qualité de caution, le 4 décembre 2012, un avenant au contrat de prêt cautionné, de ce qu'elle lui a envoyé de nombreuses lettres relativement à son engagement de caution et qu'elle lui a fait signifier, le 21 mai 2015, un commandement de payer en vertu du jugement du 19 septembre 2014 , de sorte que M. [J], s'il avait eu un doute sur la validité de son engagement comme il l'indique, n'aurait pas manqué de réclamer cet acte s'il n'en avait pas été alors en possession.
Il s'ensuit que le point de départ de l'action en nullité ou requalification de l'acte et celui de l'action en responsabilité que M. [J] a engagée contre la BPGO se situe à la date de la souscription du cautionnement, soit le 1er avril 2011.
Par suite, en application des dispositions de l'article 1304 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 qui impartissent un délai de cinq pour agir en nullité d'un acte et 2224 du code civil qui impartissent le même délai pour exercer des actions personnelles comme l'action en responsabilité, l'action engagée le 16 juin 2020 est prescrite.
Ce motif justifie à lui seul l'irrecevabilité des demandes et la confirmation de l'ordonnance entreprise.
Cette ordonnance est également justifiée en ce qu'elle a retenu la fin de non-recevoir tenant à l'autorité de la chose jugée.
Aux termes de l'article 1355 du code civil, 'l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité'.
M. [J], partant de ce que l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement et a été tranché dans son dispositif, fait valoir que le jugement du 19 septembre 2014 n'a pas statué sur la nullité du cautionnement, d'autant moins qu'il n'avait pas comparu et n'avait donc soulevé aucun moyen.
Mais il incombe au défendeur de présenter, dès l'instance relative à la première demande, l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à justifier son rejet total ou partiel.
Il s'ensuit qu'il appartenait à la caution de soulever le moyen tiré de la nullité ou de la requalification de l'acte de cautionnement dans l'instance ayant abouti au jugement du 19 septembre 2014 qui le condamne en exécution de ce cautionnement, de sorte que l'autorité de chose jugée attachée à ce jugement fait obstacle à une action en nullité ou requalification de ce même acte de cautionnement.
L'équité commande de condamner M. [J] à payer à la BPGO la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,
Confirme l'ordonnance entreprise,
Y ajoutant,
Condamne M. [J] à payer à la BPGO la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [J] aux dépens.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,
S. TAILLEBOIS C. CORBEL