La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/11/2013 | FRANCE | N°12/000421

France | France, Cour d'appel d'Angers, 03, 05 novembre 2013, 12/000421


COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale

ARRÊT N
CLM/ FB

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00042.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 08 Décembre 2011, enregistrée sous le no 11/ 00777

ARRÊT DU 05 Novembre 2013

APPELANT :

Monsieur Gilles X...
...
49100 ANGERS

représenté par Maître PFLIGERSDORFFER Olivier, substituant Maître Philippe PAPIN, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :

Madame Zhor Y...
...
49130

LES PONTS DE CE

représentée par Monsieur Nicolas Z..., délégué syndical ouvrier

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispo...

COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale

ARRÊT N
CLM/ FB

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00042.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 08 Décembre 2011, enregistrée sous le no 11/ 00777

ARRÊT DU 05 Novembre 2013

APPELANT :

Monsieur Gilles X...
...
49100 ANGERS

représenté par Maître PFLIGERSDORFFER Olivier, substituant Maître Philippe PAPIN, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :

Madame Zhor Y...
...
49130 LES PONTS DE CE

représentée par Monsieur Nicolas Z..., délégué syndical ouvrier

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Septembre 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président
Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller
Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT :
prononcé le 05 Novembre 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE :

A compter du 27 octobre 2005, Mme Catherine A...épouse X... a employé Mme Zhor Y...en qualité de femme de ménage, fonctions qui étaient exercées au domicile privé de M. et Mme Gilles X..., ....

A compter du18 novembre 2005, M. Gilles X... a employé Mme Zhor Y...en qualité de femme de ménage, fonctions qui étaient exercées au sein de son cabinet d'orthophoniste situé ....

A compter du 8 novembre 2005, Mme Christiane A..., mère de Mme Catherine X..., a employé Mme Zhor Y...en qualité de femme de ménage à son domicile privé situé ....

Mme Zhor Y...était rémunérée par chacun de ces trois employeurs au moyen de chèques emploi service.

Il ne fait pas débat qu'en 2010, son dernier jour de travail avant son départ en vacances d'été s'est situé le 18 juin 2010, ses vacances s'achevant le 26 juillet suivant.

Il n'est pas non plus discuté que, le 20 août 2010, arguant d'un licenciement verbal intervenu le 18 juin précédent, Mme Zhor Y...a téléphoné aux époux X... afin de solliciter la délivrance de ses documents de fin de contrat.

Le 21 août 2010, Mme Catherine X... a adressé le courrier suivant à Mme Zhor Y...: " Je, soussignée, Catherine X... atteste que madame Y...Zhor a travaillé à mon service par le moyen de chèque emploi service particuliers et m'a signifié avant son départ en vacances que pour des raisons de modifications d'horaires, elle ne désirait pas reprendre son service. ". signé : " Catherine X... ".
Ce courrier est établi à l'entête de " Catherine et Gilles X... ".

Par lettre recommandée du 26 août 2010, Mme Zhor Y...a opposé que :
- le 18 juin précédent, à la fin de son travail, l'employeur lui avait indiqué verbalement qu'elle était remplacée définitivement par quelqu'un " qui ne part pas en vacances " ;
- elle avait donc attendu une procédure de licenciement et ses documents de fin de contrat ;
- ne disposant pas de ces éléments à la date du 20 août 2010, elle lui avait téléphoné pour les lui réclamer, sur quoi, elle avait reçu le courrier du 21 août susvisé ne répondant ni aux caractéristiques d'une procédure de licenciement, ni à celles d'un certificat de travail mais à une tentative de laisser croire, de sa part, à une démission qu'elle contestait vigoureusement ;
- elle considérait avoir été licenciée verbalement de manière abusive le 18 juin 2010 et sollicitait, dans les plus brefs délais, le paiement des indemnités de rupture et la remise de ses certificats de travail.

Par courrier du 2 septembre 2010 établi à l'entête de M. et Mme Gilles X..., Mme Catherine X... a répondu à Mme Zhor Y...qu'il n'avait jamais été question de " remplacement définitif " et encore moins de " licenciement " la concernant et elle lui a demandé de se présenter à son poste le lundi 6 septembre 2010 à 8 heures.

Par lettre du 7 septembre 2010 adressée à M. et Mme Gilles X..., la salariée a souligné que, si M. et Mme Gilles X... contestaient qu'il ait été question de " départ définitif " la concernant, force était de constater que, suite à son appel téléphonique du 20 août 2010 et aux termes du courrier du 21 août 2010, il n'avait jamais été question qu'elle reprenne son travail et que c'était seulement après sa lettre recommandée du 26 août 2010 qu'elle recevait un courrier lui intimant de reprendre son poste le lundi 6 septembre, la demande lui ayant en outre été faite par téléphone de venir le jeudi 9 septembre pour " signer un contrat et de nouveaux horaires pour être clair ".
Elle concluait en réitérant ses demandes en paiement des indemnités de fin de contrat et remise de l'attestation destinée à l'assurance chômage.

Par courrier du 9 septembre 2010 établi à l'entête de M. et Mme Gilles X..., soulignant que Mme Zhor Y...ne s'était pas présentée à son travail les lundi 6 et jeudi 9 septembre 2010, Mme Catherine X... lui a demandé de bien vouloir lui adresser un justificatif de ses absences.

Par courrier du 10 septembre 2010, soulignant que Mme Zhor Y...ne s'était pas présentée à son travail le vendredi 10 septembre 2010, M. Gilles X... lui a demandé de bien vouloir lui adresser un justificatif de son absence.

Par courrier du 10 septembre 2010, soulignant que Mme Zhor Y...ne s'était pas présentée à son travail les lundi 6, mercredi 8 et vendredi 10 septembre 2010, Mme Christiane A...lui a demandé de bien vouloir lui adresser un justificatif de ses absences.

Par lettre du 15 septembre 2010, Mme Zhor Y...a répondu à M. et Mme Gilles X... qu'elle n'avait toujours pas eu de réponse à ses courriers des 26 août et 7 septembre 2010, qu'ils ne pouvaient pas lui demander des justificatifs d'absence pour un contrat qu'ils avaient déjà rompu comme en témoignait le participe passé employé dans le courrier du 21 août 2010 et, sous peine d'une instance prud'homale, elle les mettait en demeure de lui régler sous huitaine les sommes qui lui étaient dues et de lui remettre ses certificats de travail et attestations Pôle emploi.

Par courrier du 28 septembre 2010 adressé à M. et Mme X... et à Mme A..., le conseil de Mme Zhor Y..., arguant d'un licenciement verbal intervenu le 18 juin 2010, a déclaré mettre une " ultime fois " les employeurs en demeure de payer à la salariée les sommes lui étant dues et de lui remettre les documents de fin de contrat.

Par trois courriers séparés du 12 octobre 2010, chacun de Mme Catherine X..., M. Gilles X... et Mme Christiane A...a convoqué Mme Zhor Y...à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 15 octobre 2010 en précisant que cette mesure était envisagée en raison de son absence au travail depuis le début du mois de septembre 2010.

Par trois courriers séparés du 22 octobre 2010 annulant et remplaçant ceux du 12 octobre 2010, chacun des employeurs a, pour le même motif d'absence au travail, adressé à Mme Zhor Y...une convocation à un entretien préalable nouvellement fixé au 2 novembre 2010.

Par trois courriers séparés du 9 novembre 2010, chacun de Mme Catherine X..., M. Gilles X... et Mme Christiane A...a notifié à Mme Zhor Y...son licenciement pour faute grave tenant à un abandon de poste de travail et non-réintégration malgré mise en demeure.

Après protestation amiable et mise en demeure de son conseil établie par lettre recommandée du 29 novembre 2010, le 24 décembre 2010, Mme Zhor Y...a saisi le conseil de prud'hommes de trois instances distinctes pour contester chaque mesure de licenciement et obtenir le paiement des indemnités de rupture, d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour non-respect de la procédure de licenciement ainsi que des dommages et intérêts pour travail dissimulé, cette prétention n'étant toutefois pas élevée à l'encontre de M. Gilles X....

Dans le cadre de l'instance engagée à l'encontre de M. Gilles X..., par jugement du 8 décembre 2011 rendu contradictoirement et en dernier ressort auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers a :
- condamné M. Gilles X... à payer à Mme Zhor Y...les sommes suivantes :
¿ 254, 60 ¿ d'indemnité compensatrice de préavis outre 25, 40 ¿ au titre des congés payés afférents,
¿ 305, 52 ¿ d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application des dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail,
¿ 60 ¿ de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,
¿ 116, 69 ¿ au titre d'indemnité légale de licenciement ;
¿ 250 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné " le rétablissement d'une attestation Pôle Emploi conforme aux dispositions du jugement avec une rupture en date du 18 juin 2010 " et ce, sous astreinte de 30 ¿ par jour à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement ;
- débouté Mme Zhor Y...de ses autres prétentions ;
- débouté M. Gilles X... de toutes ses demandes, c'est à dire de ses demandes en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité de procédure ;
- condamné ce dernier aux dépens.

M. Gilles X... et Mme Zhor Y...ont reçu notification de cette décision respectivement le 15 et le 17 décembre 2011. L'employeur en a relevé appel par lettre recommandée postée le 6 janvier 2012.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Aux termes de ses conclusions enregistrées au greffe le 9 août 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Gilles X... demande à la cour :

- de déclarer son appel recevable au motif que c'est à tort que les premiers juges ont qualifié leur décision " en premier ressort " alors que la salariée ne sollicitait pas seulement le paiement de sommes d'argent mais demandait à la juridiction prud'homale de déterminer l'imputabilité de la rupture de son contrat de travail ;

- d'infirmer le jugement entrepris ;

à titre principal,

- de juger que Mme Zhor Y..., qui ne prouve pas le licenciement verbal qu'elle invoque a, en réalité, démissionné le 18 juin 2010, la preuve de cette démission résultant suffisamment de ce qu'elle ne s'est pas présentée à nouveau au travail à l'issue de ses congés et de ce qu'elle n'a jamais réclamé le paiement de ses salaires après le 18 juin ;
- par voie de conséquence, de la débouter de l'ensemble de ses prétentions et de la condamner à lui payer la somme de 152, 79 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis de démission ;

à titre subsidiaire, si la cour écartait la démission,
- de juger que le licenciement notifié à Mme Zhor Y...le 9 novembre 2010 repose bien sur une faute grave en ce que l'abandon de poste invoqué est établi ;
- en conséquence, de débouter Mme Zhor Y...de l'ensemble de ses demandes ;

en tout état de cause,
- de la condamner à lui payer la somme de 2 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Aux termes de ses conclusions enregistrées au greffe le 21 juin 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, Mme Zhor Y...demande à la cour :

- de juger l'appel irrecevable au motif que le jugement déféré a été exactement qualifié en dernier ressort dès lors où elle ne demandait pas au conseil de prud'hommes de déterminer l'imputabilité de la rupture, ce qui n'était pas nécessaire puisqu'il suffisait de " constater " qu'elle avait fait l'objet d'un licenciement verbal le 18 juin 2010, seul son employeur ayant posé le débat sur le terrain de l'imputabilité de la rupture du contrat de travail en invoquant une démission, mais sollicitait seulement le paiement des indemnités de rupture et la réparation de ses préjudices pour un montant global inférieur au taux du dernier ressort devant le conseil de prud'hommes ;

- de juger qu'elle a fait l'objet, de la part de M. Gilles X..., d'un licenciement verbal le 18 juin 2010, ce licenciement verbal étant notamment caractérisé par le participe passé employé dans le certificat établi par l'employeur le 21 août 2010, mais aussi par le fait qu'elle a dû, le 18 juin, remettre les clés lui permettant d'accéder à son lieu de travail de sorte qu'elle a été empêchée de travailler et qu'il lui était impossible de revenir chez son employeur le 26 juillet 2010, date de fin de ses propres vacances ;
- de confirmer le jugement déféré s'agissant des sommes qui lui ont été allouées à titre d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité pour licenciement injustifié et d'indemnité de procédure et en ce qu'il a ordonné la délivrance d'une attestation Pôle emploi rectifiée ;
- de l'infirmer s'agissant du montant de la somme allouée pour non-respect de la procédure de licenciement et de condamner M. Gilles X... à lui payer de ce chef la somme de 152, 76 ¿ en application des dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail ;
- de débouter l'appelant de l'ensemble de ses prétentions ;
- de le condamner à lui payer la somme de 500 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Mme Zhor Y...conteste avoir démissionné le 18 juin 2010 et oppose que la preuve d'une telle démission n'est pas rapportée par l'employeur.
Elle fait valoir enfin que le licenciement du 9 novembre 2010, intervenu fort tardivement, procède d'une mise en scène et d'un prétexte mais ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ; qu'elle n'a pas commis de faute en ne se présentant pas à son travail début septembre 2010 dans la mesure où son contrat de travail de travail était déjà rompu depuis le mois de juin précédent.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité de l'appel :

Attendu qu'aux termes de ses écritures déposées devant le conseil de prud'hommes et reprises oralement à l'audience, la salariée demandait tout d'abord aux premiers juges, de " juger que la rupture de son contrat de travail a eu lieu le 18 juin 2010 " et de " juger que la rupture verbale de son contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ", puis elle sollicitait la condamnation de l'employeur au paiement des indemnités de rupture, d'une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour travail dissimulé pour un montant total de 829, 57 ¿ ;

Attendu que la demande tendant à voir juger que la rupture de son contrat de travail était en réalité intervenue dès le 18 juin 2010, soit antérieurement au licenciement pour faute grave notifié le 9 novembre suivant, et la demande tendant à voir juger que cette rupture initiale procédait d'un licenciement verbal, et comme tel, nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse, sont bien des demandes à caractère indéterminé en sorte que, nonobstant la qualification de " dernier ressort " inexactement retenue par les premiers juges, le jugement entrepris est bien susceptible d'appel et le recours introduit par M. Gilles X..., dans le délai d'un mois imparti par la loi, doit être déclaré recevable ;

Sur la rupture du contrat de travail :

1o) sur la démission :

Attendu que la démission ne se présume pas ; qu'il s'agit d'un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ;

Attendu qu'il ne fait pas débat en l'espèce que Mme Zhor Y...n'a établi aucun écrit aux termes duquel elle aurait énoncé sa volonté de démissionner ; que, contrairement à ce que soutient l'employeur, la circonstance que la salariée ne se soit pas présentée au travail à son retour de vacances et qu'elle n'ait pas réclamé le paiement de ses salaires postérieurement au 18 juin 2010 n'est pas de nature à caractériser de sa part une volonté claire et non équivoque de démissionner alors surtout qu'elle a, dès les premiers échanges épistolaires avec son employeur, constamment soutenu qu'à cette date, elle avait fait l'objet d'un licenciement verbal ; que l'employeur est donc défaillant à rapporter la preuve de la démission alléguée ;

Que, les premiers juges n'ayant écarté la démission qu'aux termes des motifs de leur décision, sans statuer sur ce point dans le dispositif, il convient de débouter M. Gilles X... de sa demande tendant à voir juger que le contrat de travail s'est trouvé rompu par la démission de Mme Zhor Y..., la décision entreprise étant confirmée en ce qu'elle a débouté l'employeur de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis de démission ;

2o) sur le licenciement verbal :

Attendu qu'aux termes de l'article L. 1232-6 du code du travail, lorsque l'employeur décide de licencier le salarié, il doit lui notifier sa décision par une lettre de licenciement contenant l'énonciation du ou des motifs du licenciement, à défaut de quoi celui-ci est sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu qu'après avoir relevé que les conditions dans lesquelles il avait été mis un terme aux relations de travail ne reposaient que sur des échanges verbaux, qu'ils devaient s'en remettre aux éléments écrits et objectifs soumis à leur appréciation, que la démission n'était pas prouvée et que la procédure de licenciement déclenchée le 12 octobre pour abandon de poste " paraissait peu crédible ", pour considérer, aux termes des seuls motifs du jugement sans que cette disposition ne soit reprise dans le dispositif, que la salariée avait été licenciée dès le 18 juin 2010, les premiers juges ont retenu que " les conditions de la rupture du contrat de travail de Mme Zhor Y...reposaient peut-être sur un malentendu mais que celui-ci incombait aux employeurs " en ce qu'ils n'avaient, à cette date, ni pris acte d'une démission effective de la salariée, ni mis fin à son contrat de travail selon une procédure légale de licenciement ;

Mais attendu qu'il convient d'apprécier séparément chacune des trois relations de travail et ce, en considération des éléments du dossier qui s'y rapportent ;
Or attendu que Mme Zhor Y...ne justifie d'aucun fait objectif imputable à M. Gilles X... qui permettrait de caractériser que ce dernier lui a bien notifié verbalement son licenciement le 18 juin 2010 ; que l'allégation selon laquelle il lui aurait dit qu'elle était définitivement remplacée par une personne ne partant pas en vacances n'est étayée par aucun élément ; qu'il en est de même de l'allégation selon laquelle les époux X... l'aurait invitée à se présenter le 9 septembre 2010 afin de " signer un contrat et de nouveaux horaires pour être clair " ; qu'elle ne peut tirer aucune conséquence des termes du certificat du 21 août 2010 s'agissant de la relation de travail l'ayant unie à M. Gilles X... dans la mesure où ce document émane exclusivement de Mme Catherine X... ; qu'en tout état de cause, si l'emploi du participe passé dans cet écrit peut être significatif d'une rupture intervenue avant sa date, aucun élément objectif du dossier ne permet de le rattacher plutôt au licenciement verbal invoqué par la salariée qu'à la démission alléguée par l'employeur, étant observé que le licenciement verbal a été avancé pour la première fois par Mme Zhor Y...aux termes de son courrier du 26 août 2010 ;

Attendu, s'agissant de la remise des clés, qu'aucun élément ne vient étayer non plus l'affirmation de la salariée selon laquelle elle aurait disposé des clés des locaux professionnels de M. Gilles X... et encore moins son affirmation relative au fait qu'elle aurait été invitée à remettre ces clés à son employeur le 18 juin 2010 ; et attendu qu'à la supposer établie, compte tenu des caractéristiques de la relation de travail tenant à la nature de l'emploi occupé et au très faible nombre d'heures de travail accompli mensuellement au cabinet

d'orthophoniste de M. Gilles X... (9 à 12 heures par mois selon les termes non discutés de l'attestation Pôle emploi), cette remise des clés des locaux professionnels de l'employeur par la salariée le jour de son départ en vacances, ne serait pas de nature à caractériser le licenciement verbal allégué ;

Que, faute pour elle de rapporter la preuve du licenciement verbal qu'elle impute à M. Gilles X..., la salariée sera déboutée de sa demande tendant à voir juger que le contrat de travail la liant à cet employeur a été rompu dès le 18 juin 2010 par l'effet d'un licenciement verbal ;

3o) sur le licenciement pour faute grave :

Attendu que la lettre de licenciement adressée le 9 novembre 2010 par M. Gilles X... à Mme Zhor Y..., et qui fixe les termes du litige, est ainsi libellée :
" Madame,
Je fais suite à l'entretien préalable à licenciement du 2 novembre 2010 auquel vous n'avez pas daigné vous présenter.
Par la présente je vous notifie votre licenciement pour faute grave au motif suivant :
- Abandon de votre poste de travail depuis le 6 septembre 2010 et non réintégration dudit poste, malgré une mise en demeure du 8 septembre.
La présente est à effet immédiat, sans préavis ni indemnité.... " ;

Attendu que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve ;

Attendu que la preuve d'une rupture du contrat de travail dès le 18 juin 2010 n'est pas rapportée et que la salariée indique elle-même que l'employeur est revenu de vacances seulement le 20 août 2010 ; qu'en considération d'un nombre d'heures de travail mensuel de 9 à 12 heures, il n'est pas établi que la salariée aurait dû se présenter au cabinet professionnel de M. Gilles X... avant le 10 septembre 2010 ; attendu que, par courrier de cette date dont la réalité n'est pas contestée, ce dernier a demandé à Mme Zhor Y...de justifier de son absence ; qu'il est constant que cette dernière n'a pas déféré à cette demande, ne s'est plus présentée au travail et qu'elle n'a fourni aucun justificatif de ses absences, se contentant d'invoquer un licenciement verbal d'ores et déjà intervenu le 18 juin 2010 constamment contesté par l'employeur et non démontré ; que la matérialité du grief d'abandon de poste est donc établie ; que, par contre, si cet abandon de poste constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, les circonstances de la cause telles qu'elles ressortent des échanges des parties et le délai mis à déclencher la procédure de licenciement ne permettent pas de considérer qu'il constitue une faute grave au sens ci-dessus rappelé ;

Qu'il convient donc de dire le licenciement de Mme Zhor Y..., intervenu le 9 novembre 2010, justifié par une cause réelle et sérieuse et, par voie de conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il lui a alloué, en considération d'un délai congé de deux mois prévu par l'article 12 de la convention collective des salariés du particulier employeur s'agissant d'une salariée ayant plus de deux ans d'ancienneté, la somme non discutée de 254, 60 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 25, 40 ¿ de congés payés afférents, mais aussi en ce qu'il lui a alloué le somme, exactement appréciée et non discutée, de 116, 69 ¿ à titre d'indemnité de licenciement ;

Attendu que la procédure de licenciement a été respectée puisque Mme Zhor Y...a été convoquée à un entretien préalable pour le 2 novembre 2010 dans les formes requises par l'article 12 de la convention collective applicable, la régularité de la procédure de licenciement ayant donné lieu à la rupture notifiée le 9 novembre 2010 n'étant d'ailleurs pas discutée ; que, par voie d'infirmation du jugement déféré, la salariée sera donc déboutée tant de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement que de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur les dépens et frais irrépétibles :

Attendu, chaque partie succombant partiellement en cause d'appel, qu'il convient de dire que chacune d'elle conservera la charge de ses dépens et frais irrépétibles d'appel, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire ;

Déclare l'appel de M. Gilles X... recevable ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamné à payer à Mme Zhor Y...la somme de 305, 52 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 60 ¿ de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement ;

Le confirme en ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau et ajoutant au jugement déféré,

Déboute M. Gilles X... de sa demande tendant à voir juger que Mme Zhor Y...a démissionné le 18 juin 2010 et déboute cette dernière de sa demande tendant à voir juger qu'elle a fait l'objet d'un licenciement verbal à cette date ;

Juge le licenciement notifié à Mme Zhor Y...le 9 novembre 2010 justifié par une cause réelle et sérieuse ;

La déboute de ses demandes d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Dit que chacune d'elles conservera la charge de ses dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 03
Numéro d'arrêt : 12/000421
Date de la décision : 05/11/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-11-05;12.000421 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award