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05/02/2013 | FRANCE | N°11/017291

France | France, Cour d'appel d'Angers, 03, 05 février 2013, 11/017291


COUR D'APPEL
D'ANGERS
Chambre Sociale

ARRÊT N
BAP/ SLG

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 01729.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 07 Juin 2011, enregistrée sous le no 0/ 00653

ARRÊT DU 05 Février 2013

APPELANT :

Monsieur Durmus ALI X...
...
49000 ANGERS

représenté par Maître Lucie GUILLON, avocat substituant Maître Jean pierre BOUGNOUX, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :

SNC EIFFAGE CONSTRUCTION PAYS D

E LOIRE
11 route de Gachet
44818 NANTES

représentée par Maître CAPARICCIO, avocat substituant maître Philippe LEVY, avocat au ...

COUR D'APPEL
D'ANGERS
Chambre Sociale

ARRÊT N
BAP/ SLG

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 01729.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 07 Juin 2011, enregistrée sous le no 0/ 00653

ARRÊT DU 05 Février 2013

APPELANT :

Monsieur Durmus ALI X...
...
49000 ANGERS

représenté par Maître Lucie GUILLON, avocat substituant Maître Jean pierre BOUGNOUX, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :

SNC EIFFAGE CONSTRUCTION PAYS DE LOIRE
11 route de Gachet
44818 NANTES

représentée par Maître CAPARICCIO, avocat substituant maître Philippe LEVY, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Novembre 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président
Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller
Madame Anne LEPRIEUR, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT :
prononcé le 05 Février 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE

M. Durmus Ali X...a été engagé par la société Fonteneau en qualité de coffreur OQ1, selon contrat de travail à durée déterminée du 10 janvier 1986, à effet au 13 janvier suivant, dont le terme était fixé au 11 juillet suivant.
La relation de travail s'est poursuivie entre les parties à l'issue, à savoir, étant venue aux droits de la société Fonteneau, la société Blandin Fonteneau, établissement de la société Eiffage construction Pays de Loire, puis la société Eiffage construction Maine et Loire, établissement de la société Eiffage construction Pays de Loire ; dans son dernier état, M. X...occupait la position de coffreur, compagnon professionnel, niveau III, coefficient 210, de la convention collective du bâtiment, contre un salaire mensuel brut de base de 1 633, 49 euros.

Le 25 octobre 2005, M. X...a été victime d'un accident du travail, pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels par la Caisse primaire d'assurance maladie.

**

Par jugement du tribunal correctionnel d'Angers du 31 mai 2007, définitif, la société Blandin Fonteneau, prise en la personne de son représentant légal, M. Y..., a été déclarée coupable de " blessures involontaires par personne morale suivie d'une incapacité de plus de trois mois " sur la personne de M. X..., ensuite de son accident du travail du 25 octobre 2005, et condamnée de ce chef à une amende d'un montant de 15 000 euros, outre qu'ont été accueillies les constitutions de partie civile, d'une part, de M. X...en son nom propre au seul soutien de l'action publique, d'autre part, de son épouse, de M. et Mme X...en tant que représentants légaux de leurs quatre enfants mineurs, de M. Z...X...et de Mme Fatima X..., enfants majeurs, l'entreprise étant condamnée à payer à chacun de ces derniers des dommages et intérêts au titre de leur préjudice moral.

**

Par procès-verbal de conciliation signé le 11 septembre 2007 en application des articles L. 452-1 et suivants du code de la sécurité sociale, la société Eiffage construction Maine et Loire, a reconnu sa faute inexcusable dans l'accident du travail advenu à M. X..., et il a été convenu d'une majoration à 100 % de la rente devant lui être servie et de ce qu'il conviendrait de désigner un expert afin de l'examiner, une fois la date de consolidation arrêtée par le médecin-conseil.
La consolidation a été fixée au 24 septembre 2007.
Le 4 janvier 2008, la Caisse a notifié à M. X...que son taux d'incapacité permanente était de 100 %, et qu'une rente lui était attribuée, à compter du 25 septembre 2007, à raison d'une somme de 2 595, 77 euros par mois.
Le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Angers, saisi par M. X...en référé, a ordonné, le 25 mars 2008, une expertise le concernant.
Le rapport ayant été déposé, le tribunal des affaires de sécurité sociale, par jugement du 9 juin 2009, a fixé à la somme de 110 000 euros, " toutes causes confondues ", l'indemnisation du préjudice personnel de M. X..., la provision de 5 000 euros précédemment accordée étant à déduire, la décision étant déclarée commune à la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers, M. X...renvoyé devant la Caisse pour la liquidation de ses droits, la société Eiffage construction invitée à communiquer à la Caisse les coordonnées de sa compagnie d'assurance ainsi que condamnée à verser à M. X...la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, étant dit n'y avoir lieu à dépens.
Ce jugement a été frappé d'appel, et la cour, après arrêt avant dire droit du 1er février 2011, a, par arrêt du 21 février 2012, contre lequel la société Eiffage construction Maine et Loire s'est pourvue en cassation, confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, hormis en ce qu'il a fixé la réparation du préjudice d'agrément de M. X...à la somme de 40 000 euros, et statuant à nouveau sur ce point, ainsi qu'y ajoutant, a :
- fixé aux sommes suivantes les indemnités destinées à réparer le préjudice résultant pour M. X...de l'accident du travail dont il a été victime le 25 octobre 2005
o chef de préjudice couvert par le livre IV du code de la sécurité sociale, 100 000 euros au titre du préjudice d'agrément,
o chefs de préjudice non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale
. 35 452, 29 euros au titre des frais divers,
. 7 672 euros au titre des besoins en tierce personne avant consolidation,
- condamné la société Eiffage construction à payer à M. X...ces deux dernières sommes,
- dit que, déduction faite de la somme de 110 000 euros déjà versée, la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine et Loire, venant aux droits de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers, devra faire l'avance à M. X...de la somme complémentaire de 60 000 euros destinée à couvrir le montant dû au titre des souffrances physiques et morales endurées, des préjudices esthétiques et du préjudice d'agrément, et qu'elle en récupérera le montant auprès de la société Eiffage construction Maine et Loire, laquelle devra lui communiquer les coordonnées de sa compagnie d'assurance,
- condamné la société Eiffage construction à payer à la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine et Loire le coût de l'expertise judiciaire des docteurs C...et D...,
- laissé à la charge de M. X...le coût de l'expertise du docteur A...,
- avant dire droit sur la demande indemnitaire relative à l'aménagement du logement occupé par M. X..., ordonné une expertise architecturale du dit logement, confiée aux docteurs C...et D... et à M. B..., architecte d'intérieur, fixant à 2000 euros la provision à valoir sur les frais et honoraires des experts à la charge de la société Eiffage construction,
- débouté M. X...de sa demande de provision sur le préjudice au titre de l'aménagement du logement, de sa demande d'astreinte, de sa demande de solidarité, de sa demande au titre du préjudice permanent exceptionnel,
- condamné la société Eiffage construction à payer à M. X...la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
- ordonné la réouverture des débats à l'audience du 27 novembre 2012 à 14 heures,
- rappelé que la procédure en matière de sécurité sociale est gratuite et sans frais.

**

Par courrier recommandé avec accusé de réception de son avocat du 22 avril 2010, M. X...a sollicité de la société Eiffage construction qu'elle le convoque au titre de la visite médicale de reprise prévue à l'article R. 4624-21 du code du travail.

Le 18 juin 2010, M. X...a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers pour voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Les parties n'ayant pu se concilier à l'audience du 9 juillet 2010, l'affaire a été renvoyée en formation de jugement.

La visite médicale de reprise en un examen, étant visé le danger grave et imminent, a eu lieu le 18 août 2010.
Le médecin du travail a conclu à l'inaptitude définitive de M. X..., tant à son poste de travail, qu'" à tout poste de travail dans l'entreprise et à l'extérieur ".

À la suite de cette déclaration d'inaptitude, la société Eiffage construction a réuni les délégués du personnel, le 3 septembre 2010, quant aux possibilité de reclassement de M. X....

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 octobre 2010, la société Eiffage construction Maine et Loire a convoqué M. X...à un entretien préalable en vue d'un licenciement fixé au 28 octobre suivant, tout en lui indiquant qu'il pouvait aussi s'y faire représenter.

M. X...ne s'est pas déplacé à cet entretien, et a été licencié, par courrier recommandé avec accusé de réception du 5 novembre 2010, pour " impossibilité de reclassement consécutive à l'avis d'inaptitude émis par le Médecin du Travail ".

La société Eiffage construction Maine et Loire lui a fait parvenir, par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 novembre 2010, l'ensemble des documents et pièces afférents à la fin de son contrat de travail.

À l'audience du conseil de prud'hommes, qui s'est tenue le 22 mars 2011, M. X...a sollicité, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, au moins celle de droit, étant alors calculée la moyenne de ses trois derniers mois de salaire, que :
- soit prononcée la résiliation judiciaire de son contrat de travail, celle-ci produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- la société Eiffage construction Pays de Loire soit condamnée à lui verser les sommes ci-après
o 3 306, 40 euros d'indemnité compensatrice de préavis,
o 21 179, 32 euros d'indemnité spéciale de licenciement
o 19 838, 40 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
o 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- soit ordonnée à la société Eiffage construction Pays de Loire de lui délivrer
o un certificat de travail,
o une attestation Pôle emploi,
o un certificat de congés payés,
sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
- la société Eiffage construction Pays de Loire soit condamnée aux dépens.

Par jugement du 7 juin 2011 auquel il est renvoyé pour l'exposé des motifs, le conseil de prud'hommes a :
- dit et jugé que la société Eiffage construction Maine et Loire a respecté ses obligations contractuelles, légales et conventionnelles,
- dit et jugé que M. Durmus Ali X...ne démontre nullement les manquements graves commis par la société Eiffage construction Maine et Loire,
- en conséquence, débouté M. Durmus Ali X...de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, ainsi que de l'ensemble de ses demandes
-débouté les parties du surplus de leurs demandes, non fondées ou insuffisamment justifiées,
- condamné M. Durmus Ali X...aux entiers dépens.

Cette décision a été notifiée à M. X...et à la société Eiffage construction le 22 juin 2011.

M. X...en a formé régulièrement appel, par courrier recommandé avec accusé de réception posté le 4 juillet 2011.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions enregistrées au greffe le 6 mars 2012 reprises et précisées oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, M. Durmus Ali X...sollicite l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau comme y ajoutant, que :
- soit prononcée la résiliation judiciaire de son contrat de travail, celle-ci produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- la société Eiffage construction Pays de Loire soit condamnée à lui verser
o une indemnité de 19 838, 40 euros pour licenciement abusif,
o 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- soit ordonné à la société Eiffage construction Pays de Loire de lui délivrer une attestation Pôle emploi rectifiée, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
- la société Eiffage construction Pays de Loire soit condamnée aux entiers dépens.

Il déclare qu'il ne reprend pas ses demandes, ni d'indemnité compensatrice de préavis, ni d'indemnité spéciale de licenciement, pas plus que de remise d'un certificat de travail et d'un certificat de congés payés, indemnités qui lui ont été réglées et documents que lui a fait parvenir la société Eiffage construction Pays de Loire après son licenciement.

En revanche, il maintient qu'il est en droit d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur, malgré le licenciement, celui-ci n'étant intervenu que postérieurement à sa saisine du conseil de prud'hommes pour résiliation du contrat ; la cour se doit donc d'examiner le bien-fondé de sa demande en résiliation au préalable, n'ayant à statuer sur la mesure de licenciement que si elle l'en déboute.

Selon lui, il doit être accueilli en cette demande de résiliation, puisque :
- il est incontestable qu'il remplissait les conditions pour bénéficier de la visite médicale de reprise prévue à l'article R. 4624-21 du code du travail,
- le fait que la société Eiffage construction Pays de Loire ne lui ait donné aucune réponse à cette demande se comprend comme un refus tacite de sa part de mettre en place cette visite, qui est analysé par la jurisprudence en un licenciement,
- il est vain, du côté de la société Eiffage construction Pays de Loire, de tenter de régulariser la situation en saisissant le service de santé au travail ; cette saisine date, en effet, de plus de trois semaines après la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, de plus de deux mois après que son conseil en ait fait la demande, et surtout de près de trois ans après que son état ait été consolidé.
Il ajoute que, " s'il n'existe pas de délai précis dans le code du travail pour procéder à cette visite " ainsi que l'a noté le conseil de prud'hommes, une visite de reprise, organisée dans un intervalle de temps aussi long après la consolidation, ne peut que caractériser la faute suffisamment grave de la part de l'employeur justifiant la rupture du contrat de travail aux torts de ce dernier.

Subsidiairement, si la cour estimait que la société Eiffage construction Pays de Loire n'a pas manqué à ses obligations en matière de visite de reprise, elle devra constater, indique-t'il, que l'entreprise a gravement manqué à son obligation de sécurité de résultat en matière de santé de ses salariés, et que son inaptitude est la conséquence de ce manquement qui a valu à la société Blandin Fonteneau, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction Pays de Loire, d'être condamnée par le tribunal correctionnel d'Angers, et alors que la faute inexcusable, alors commise par l'entreprise, a également été consacrée par le procès-verbal de conciliation dressé dans le cadre de la procédure menée, à cette fin, devant la Caisse primaire d'assurance maladie.
Or, la Cour de cassation a jugé, le 17 mai 2006, que " lorsqu'un salarié a été licencié en raison d'une inaptitude consécutive à une maladie professionnelle qui a été jugée imputable à une faute inexcusable de l'employeur, il a droit à une indemnité réparant la perte de son emploi due à cette faute de l'employeur. Les juges du fond apprécient souverainement les éléments à prendre en compte pour fixer le montant de cette indemnisation à laquelle ne fait pas obstacle la réparation spécifique afférente à la maladie professionnelle ayant pour origine la faute inexcusable de l'employeur ".

****

Par conclusions déposées le 15 novembre 2012 reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, la société Eiffage construction Maine et Loire, sollicite, au principal, la confirmation du jugement déféré, et, qu'en conséquence, M. Durmus Ali X...soit débouté de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, et de l'ensemble " de ses fins et conclusions ".
Très subsidiairement, dans l'hypothèse où il serait fait droit à cette action en résiliation judiciaire, elle demande que :
- il soit pris acte que M. Durmus Ali X...renonce à ses demandes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité spéciale de licenciement et de la remise du certificat de travail ainsi que du certificat de congés payés,
- la demande d'indemnisation de M. Durmus Ali X...au titre du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse soit réduite à de justes proportions.
En tout état de cause, elle sollicite que M. Durmus Ali X...soit condamné aux entiers dépens.

Si elle convient que le bien-fondé de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail formée par M. X...avant qu'elle ne le licencie doit être examiné, elle fait remarquer que les manquements de l'employeur invoqués à l'appui doivent être suffisamment graves pour la justifier, la résiliation devant, dans l'affirmative, être prononcée à la date du licenciement ; que, dans le cas contraire, il reste aux magistrats à se prononcer sur le fait que le licenciement intervenu par la suite repose bien sur une cause réelle et sérieuse.
Elle admet, par ailleurs, les obligations de l'employeur prévues aux articles R. 4624-21 et R. 4624-22 du code du travail en matière de visite de reprise, visite qui peut être sollicitée par le salarié.

Néanmoins, elle fait observer que M. X...ne peut se prévaloir de ces dispositions réglementaires relatives à la visite de reprise, son état lui interdisant, justement, toute reprise du travail, lui étant simplement possible de faire constater cette incapacité, et partant son inaptitude, par le médecin du travail.
De plus, elle indique qu'elle n'a jamais refusé à M. X...l'organisation de la visite de reprise qu'il avait demandée, qu'au contraire, les éléments du dossier démontrent qu'elle a organisé cette visite de reprise, qui a conduit à ce qu'il soit déclaré inapte par le médecin du travail, en un seul examen.
Enfin, elle déclare que la date de consolidation de l'état de M. X...n'est d'aucune incidence, alors que ce n'est que le 22 avril 2010 qu'il l'a informée de son invalidité et de son souhait de bénéficier de la visite médicale de reprise, et, qu'est tout aussi indifférente la date à laquelle elle a saisi le service de santé au travail, les délais que mentionnent M. X...étant par ailleurs erronés, alors que le code du travail ne stipule aucun délai pour cette saisine, outre que, comme l'a relevé le conseil de prud'hommes, c'est sans aucune relance à son endroit que M. X...a saisi le conseil de prud'hommes en résiliation judiciaire de son contrat de travail sur ce fondement.

Quant à d'éventuelles incidences de la faute inexcusable de l'employeur sur l'action en résiliation judiciaire du contrat de travail, M. X...ne peut, dit-elle, s'en prévaloir, via un manquement de son employeur à son obligation de sécurité de résultat à son endroit, alors qu'il y a déjà eu sanction de ce chef par les juridictions compétentes, à savoir le tribunal correctionnel et le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Angers.
Et, pour ce qui est de l'arrêt de la Cour de cassation du 17 mai 2006 que M. X...invoque pour la première fois, elle précise qu'il n'est pas applicable à l'espèce, en ce qu'il s'inscrit dans le cadre de la contestation d'un licenciement pour inaptitude, et que la Cour de cassation n'a absolument pas considéré que la faute inexcusable de l'employeur constituait un manquement grave permettant au salarié d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur.

Elle indique que la demande de production de l'attestation Pôle emploi, sous astreinte, est sans objet, alors que cette pièce a déjà été fournie à M. X...lors de son licenciement, au même titre que les autres documents de fin de contrat.

Si la cour venait à faire droit à la demande de résiliation judiciaire présentée par M. X..., elle dénonce le caractère manifestement excessif de la demande d'indemnisation de M. X..., alors même que le licenciement pour inaptitude est parfaitement justifié, d'autant que cette demande est fondée sur l'article L. 1235-3 du code du travail. Tout au plus, ajoute-t'elle, M. X...peut-il prétendre à l'indemnité légale minimale de six mois de salaire, et alors que la rente qu'il perçoit, après la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, est majorée à 100 % et s'élève à 2 595, 77 euros, son objet étant d'indemniser le salarié du déclassement professionnel qui pourrait résulter du licenciement.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le salarié peut demander au conseil de prud'hommes la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas de manquements de l'employeur à ses obligations. Si cette demande est justifiée, elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Les manquements de l'employeur sont, généralement, souverainement appréciés par les juges, qui peuvent tenir compte de toutes les circonstances intervenues jusqu'au jour du jugement.
Les faits allégués doivent, néanmoins, présenter une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat de travail.

Par ailleurs, lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, les juges doivent, avant tout, rechercher si la demande de résiliation était justifiée ; ce n'est que dans le cas contraire qu'ils ont, alors, à se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.

**

M. Durmus Ali X...ayant saisi le conseil de prud'hommes d'Angers d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, aux torts donc de son employeur, le 18 juin 2010, avant d'être licencié par la société Eiffage construction Maine et Loire le 5 novembre 2010 pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement, cette demande de résiliation judiciaire doit, par conséquent, être appréciée au préalable.

M. X...soulève deux moyens à l'appui de sa demande en résiliation judiciaire, qui seront successivement évoqués.

Sur le premier moyen

L'article R. 4624-21 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce, dispose :
" Le salarié bénéficie d'un examen de reprise de travail par le médecin du travail :
1o Après un congé de maternité ;
2o Après une absence pour cause de maladie professionnelle ;
3o Après une absence d'au moins huit jours pour cause d'accident du travail ;
4o Après une absence d'au moins vingt et un jours pour cause de maladie ou d'accident non professionnel ;
5o En cas d'absences répétées pour raisons de santé ".

L'article R. 4624-22 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce, poursuit :
" L'examen de reprise a pour objet d'apprécier l'aptitude médicale du salarié à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou d'une réadaptation du salarié ou éventuellement de l'une et de l'autre de ces mesures.
Cet examen a lieu lors de la reprise du travail et au plus tard dans un délai de huit jours ".

Enfin, l'article R. 4624-31 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce, précise :
" Sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail qu'après avoir réalisé :
1o Une étude de ce poste ;
2o Une étude des conditions de travail dans l'entreprise ;
3o Deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires ".

Il n'est ni contestable, ni contesté, que M. Durmus Ali X...a été victime d'un accident du travail, et que son absence de la société Eiffage construction Maine et Loire a été bien supérieure à huit jours.

Son avocat a adressé à la société Eiffage construction Maine et Loire, le 28 avril 2010, par recommandé avec accusé de réception distribué à sa destinataire le 30 avril suivant, un courrier daté du 22 avril 2010, libellé en ces termes :
" Je viens vers vous dans le dossier cité en référence en ma qualité de Conseil de Monsieur Ali Durmus X..., demeurant ..., qui a été victime d'un accident du travail le 25 octobre 2005 sur un chantier à ANDREZE (49) alors qu'il travaillait au service de votre entreprise.
Je précise que Monsieur X...souffre d'une incapacité permanente de 100 % dans les suites de son accident et qu'une procédure est actuellement en cours devant le Tribunal Aux Affaires de Sécurité sociale d'ANGERS pour l'indemnisation de ses entiers préjudices.
Monsieur X...reçoit toujours ses bulletins et salaires et, en raison de son handicap, il n'a pas pu reprendre à ce jour son travail dans l'entreprise.
Il convient désormais que Monsieur X...soit examiné par le médecin du Travail pour la visite de reprise.
C'est pourquoi, en application des dispositions de l'article R. 4624-21 du Code du Travail, je vous remercie de bien vouloir convoquer dans les meilleurs délais Monsieur X...pour l'examen de reprise de travail par le médecin du Travail.
Je précise que la saisine du médecin du Travail appartient normalement à l'employeur dès que le salarié en fait la demande.
Je vous invite à transmettre la présente à votre Avocat.
Vous en souhaitant bonne réception, dans l'attente de vous lire... ".

Le 6 juillet 2010, la société Eiffage construction Maine et Loire a sollicité le SMIA, Service médical interentreprises de l'Anjou, par lettre recommandée avec accusé de réception reproduite ci-après :
" Nous vous saisissons par la présente d'une demande de convocation aux fins d'examen médical de Monsieur Ali Durmus X...demeurant ....
La présente demande est faite en raison de ce que le conseil de l'intéressé nous a saisis à cette fin en invoquant les dispositions de l'article R. 4624-21 du Code du travail.
Nous vous précisons qu'à la suite d'un accident du travail survenu le 25 octobre 2005, Monsieur X...est atteint d'une incapacité permanente fixée à 100 % par la Caisse primaire d'Angers, la rente lui ayant été attribuée à partir du 25 septembre 2007.
En vous remerciant de l'attention que vous porterez à la présente, nous vous prions d'agréer, Docteur... ".

Le 18 août 2010, en une seule visite pour danger grave et imminent, le médecin du travail a déclaré M. X...inapte à son poste de travail, comme à tout autre poste de travail en général.

M. X...ne peut dire que la société Eiffage construction Maine et Loire a manqué à son obligation d'organiser la visite de reprise, aux motifs qu'il lui a fallu quasiment trois ans après qu'il ait été déclaré consolidé pour le faire, cette consolidation étant intervenue à la date du 24 septembre 2007, ou un peu plus de deux mois après qu'il l'en ait sollicitée, et encore parce qu'elle avait été convoquée devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes d'Angers qu'il avait saisi par courrier recommandé avec accusé de réception du 17 juin 2010 d'une demande de résiliation de son contrat de travail à ses torts, au regard de son inaction.

L'employeur, tenu certes d'une obligation de sécurité de résultat, ne peut laisser un salarié, lorsque celui-ci est dans l'un des cas visés à l'article R. 4624-21 précité, reprendre le travail sans lui faire passer la visite de reprise.

Mais, encore faut-il, et même si la consolidation a été fixée par la Caisse primaire d'assurance maladie, que ce salarié se soit manifesté auprès de son employeur afin de lui faire part de sa volonté de reprendre son travail, ou, à tout le moins, qu'il est consentant à une telle reprise.

Or, M. X...ne justifie, ni n'allègue d'ailleurs, qu'antérieurement à la lettre de son conseil expédiée à la société Eiffage construction Maine et Loire le 28 avril 2010, il se soit manifesté d'une quelconque façon auprès de son employeur après la consolidation de son état.

Et, dans le courrier émanant de son avocat ne ressort pas non plus une quelconque volonté de sa part de reprendre son travail ; il indique, au contraire, à la société Eiffage construction Maine et Loire, sans ambiguïté, qu'il est dans l'incapacité de reprendre le travail, restant affecté, ensuite de son accident du travail, d'une incapacité permanente dont le taux a été fixé à 100 %.

L'alinéa 2 de l'article R. 4624-22 précité est clair, en ce que la visite de reprise a lieu, justement, lors de la reprise du travail, l'employeur ayant alors huit jours pour la faire passer à son salarié, sauf à démontrer que, s'il l'a bien organisée dans ce délai, cette visite n'a pu se tenir dans le même délai pour des raisons indépendantes de sa volonté (et évidemment, dans l'intervalle, le salarié ne peut reprendre son travail).

M. X...ne s'étant pas présenté à son travail, étant pour cause dans l'incapacité totale de le faire, tout comme le seul courrier de son conseil ne pouvant correspondre à une lettre non équivoque à l'employeur d'expression de sa volonté de reprendre son travail, la société Eiffage construction Maine et Loire n'avait pas l'obligation, au sens des textes réglementaires susvisés, d'organiser la visite de reprise.

Dans ces conditions, M. X...ne peut, non plus, déplorer l'inertie fautive de son employeur, qui n'aurait finalement réagi à sa demande d'organisation de la visite de reprise qu'en réaction à sa propre saisine du conseil de prud'hommes.

Certes, M. X...a sollicité de la société Eiffage construction Maine et Loire qu'elle mette en place cette visite de reprise ; cependant, n'ayant pas manifesté sa volonté de reprendre son travail, l'entreprise n'était pas contrainte par le délai légal de huit jours pour organiser cette dernière.

Dès lors, qu'elle l'ait fait postérieurement, voire après qu'elle ait reçu sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, sont autant de circonstances inopérantes à caractériser un quelconque manquement de sa part envers M. X....

Dans ces conditions, M. X...ne peut prétendre à la résiliation judiciaire de son contrat de travail, au prétexte d'un manquement de son employeur à ses obligations en matière de visite de reprise, alors que de tels manquements ne sont pas caractérisés.

Ce premier moyen doit, dès lors, être rejeté.

Sur le deuxième moyen

M. Durmus Ali X...se prévaut du non-respect par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat dans l'accident du travail dont il a été victime, non-respect indubitable, dit-il, puisque la société Blandin Fonteneau, à l'époque, a été condamnée par le tribunal correctionnel d'Angers pour les blessures involontaires qu'elle lui a causées, non-respect qui a été lui-même cause de son inaptitude, et d'autant encore, que la faute inexcusable de la société Eiffage construction Maine et Loire, venant aux droits de la société Blandin Fonteneau, dans cet accident a été consacrée, un contentieux étant toujours pendant, à la suite, devant les juridictions de la sécurité sociale.

Il est exact, qu'en application de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat envers ses salariés, obligation dont il doit assurer l'effectivité, notamment en prenant les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et protéger leur santé physique et mentale.

Il est acquis aux débats que, c'est alors qu'il était dans l'exercice de son métier de coffreur au service de la société Eiffage construction Maine et Loire, aujourd'hui, que M. X...a fait une chute, le 25 octobre 2005.

La société Blandin Fonteneau, alors, a été condamnée par le tribunal correctionnel d'Angers le 31 mai 2007 à une peine d'amende, condamnation qui n'a pas été remise en cause, pour " avoir à Andreze, le 25 octobre 2005..., en qualité de personne morale, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, en l'espèce en ne respectant pas l'article R. 233-13-20 du code du travail qui prévoit que les travaux temporaires en hauteur doivent être réalisés à partir d'un plan de travail conçu, installé ou équipé de manière à garantir la sécurité des travailleurs et préservé leur santé causé à Durmus Ali X...une atteinte à l'intégrité de sa personne suivie d'une incapacité totale de travail supérieure à trois mois ".
La motivation du jugement permet d'apprendre que M. X...travaillait au sommet d'un silo en construction lorsque, marchant sur un plancher constitué de madriers en bois qui avait été installé afin de boucher l'une des ouvertures de la plate-forme sur laquelle il évoluait,- il mettait en place des tiges de métal avant de couler du béton-, il a fait une chute d'une quinzaine de mètres à l'intérieur du silo ; des constatations réalisées par l'inspection du travail, il s'avère que ce plancher n'avait pas été réalisé convenablement, sa superficie couvrant à peine le trou et son mode de conception, sommaire, permettant des déformations, avec, en conséquence, des possibilités de décalage, de déplacement et de perte des appuis sur les côtés du trou.

Également, la société Eiffage construction Maine et Loire, à ce moment-là, n'a fait aucune difficulté afin de reconnaître, le 7 septembre 2007, sa faute inexcusable dans cet accident, ayant signé le procès-verbal de conciliation au cours de la procédure de reconnaissance entamée par M. X...devant la Caisse primaire d'assurance maladie ; or, la faute inexcusable, même s'il s'agit d'une notion relevant du contentieux de la sécurité sociale, consiste dans le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, manquement qui peut être notamment révélé par l'accident survenu au salarié, alors que cet employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Il n'est en tout cas pas contestable, de par la description des faits ci-dessus évoqués, que la société Eiffage construction Maine et Loire a manqué à l'obligation de sécurité de résultat qu'elle devait à M. X...dans le cadre du contrat de travail qui les unissait ; faute, en effet, pour elle d'avoir pris les mesures de protection, simples, qui s'imposaient, elle n'a pas assuré la sécurité de son salarié, pas plus que protégé sa santé.

Le fait qu'elle ait été condamnée dans un cadre pénal est sans incidence quant à l'action de M. X...devant les juridictions prud'homales ; la condamnation infligée vient sanctionner le non-respect de la législation en la matière, et n'a donc pas le même objet que la réclamation formée ensuite par M. X..., qui porte sur une résiliation de son contrat de travail au regard du manquement de son employeur à l'une de ses obligations contractuelles.
De même, qu'elle doive répondre devant les juridictions de sécurité sociale des conséquences de l'accident du travail en termes de réparation des préjudices subis, ce en lien avec la faute inexcusable commise, n'a pas non plus le même objet que la réclamation formée depuis par M. X..., qui porte sur une résiliation de son contrat de travail au regard du manquement de son employeur à l'une de ses obligations contractuelles.

Le manquement de la société Eiffage construction Maine et Loire, ainsi rapporté, apparaît suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat de travail de M. X...aux torts de l'employeur, résiliation qui produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et qui sera fixée au 5 novembre 2010, date à laquelle l'entreprise a procédé au licenciement de M. X....

La décision des premiers juges sera donc infirmée en ce qu'elle a débouté M. X...de ses demandes, tant de résiliation de son contrat de travail, que d'indemnisation et de remise de documents.

La société Eiffage construction Maine et Loire devra fournir à M. X...une attestation Pôle emploi rectifiée de façon conforme au présent arrêt.
Il n'y pas d'éléments, en revanche, justifiant que la remise de ce document soit assortie d'une astreinte.

Il convient, par ailleurs, de constater que M. X...ne maintient pas sa demande de délivrance, sous astreinte, d'un certificat de travail et d'un certificat de congés payées, au motif que la société Eiffage construction Maine et Loire lui a fait parvenir les documents revendiqués.
Il sera donné acte à la société Eiffage construction Maine et Loire de cette remise.

**
Il sera également donné acte à M. Durmus Ali X...de ce qu'il ne maintient pas ses demandes en paiement de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité spéciale de licenciement, sommes qui lui ont déjà été réglées par la société Eiffage construction Maine et Loire.
Il sera décerné acte à la société Eiffage construction Maine et Loire du paiement de ces sommes.

**

M. Durmus Ali X...sollicite que lui soit allouée une indemnité de 19 838, 40 euros, se fondant sur l'article L. 1235-3 du code du travail et précisant que sa réintégration est, de fait, impossible au sein de la société Eiffage construction Maine et Loire.

La société Eiffage construction Maine et Loire ne discute pas l'application de cet article, hormis à s'en tenir au minimum de six mois de salaire prévu.

La résiliation du contrat de travail prononcée produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. X...est en droit de se prévaloir des dispositions de cet article, selon lesquelles :
" Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise...
Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 ".

C'est la rémunération brute dont bénéficiait le salarié pendant les six derniers mois précédant la rupture de son contrat de travail qui est à considérer comme base d'indemnité minimale. L'éventuel surcroît relève de l'appréciation souveraine des juges du fond.

En l'espèce, le salaire mensuel brut de base de M. X...s'établissait, précédemment à la rupture de son contrat de travail, à la somme de 1 633, 49 euros, ce qui donne, sur une période de six mois, une somme totale de 9 800, 94 euros.

Au regard de la situation particulière de M. X..., notamment, de son ancienneté au service de la société Eiffage construction Maine et Loire, comme de son âge au moment du licenciement, la cour, par voie d'infirmation de la décision des premiers juges, dispose des éléments nécessaires pour fixer à. la somme 9 850 euros l'indemnité propre à réparer le préjudice résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

****

La décision des premiers juges sera infirmée pour ce qui est des frais irrépétibles et des dépens.

La société Eiffage construction Maine et Loire sera condamnée à verser à M. Durmus Ali X...la somme de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Elle sera également condamnée à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Prononce au 5 novembre 2010 la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. Durmus Ali X...aux torts de la société Eiffage construction Maine et Loire,

Dit que cette résiliation produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Eiffage construction Maine et Loire à verser à M. Durmus Ali X...une indemnité de 9 850 euros à ce titre,

Ordonne à la société Eiffage construction Maine et Loire de remettre à M. Durmus Ali X...une attestation Pole emploi rectifiée en conformité avec le présent arrêt,

Dit n'y avoir lieu à assortir cette remise d'une astreinte,

Donne acte à M. Durmus Ali X...de ce qu'il ne réclame plus le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis comme d'une indemnité spéciale de licenciement,

Donne acte à la société Eiffage construction Maine et Loire de ce qu'elle a réglé les sommes correspondantes à M. Durmus Ali X...,

Donne acte à M. Durmus Ali X...de ce qu'il ne réclame plus la remise, sous astreinte, d ‘ un certificat de travail et d ‘ un certificat de congé payés,

Donne acte à la société Eiffage construction Maine et Loire de ce qu'elle a délivré ces documents à M. Durmus Ali X...,

Condamne la société Eiffage construction Maine et Loire à verser à M. Durmus Ali X...la somme de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Condamne la société Eiffage construction Maine et Loire aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 03
Numéro d'arrêt : 11/017291
Date de la décision : 05/02/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-02-05;11.017291 ?
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