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18/11/2008 | FRANCE | N°375

France | France, Cour d'appel d'Angers, Ct0146, 18 novembre 2008, 375


1ère CHAMBRE A EM / IM ARRET N 375
AFFAIRE No : 07 / 0198
Jugement du 28 Novembre 2006 du Tribunal de Grande Instance du MANS no d'inscription au RG de première instance 05 / 2598
ARRET DU 18 NOVEMBRE 2008

APPELANTE :
LA S. A. S. CORATOM La Jartre-Zone d'Activité-16390 ST SEVERIN
représentée par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour assistée de Me Annick DUMAS, avocat au barreau de LA ROCHELLE

INTIMEES :
LA SOCIETE FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE-FIDAL 12 boulevard du Général Leclerc-92200 NEUILLY SUR SEINE
représentée par l

a SCP DELTOMBE ET NOTTE, avoués à la Cour assistée de Me HASCOET, avocat au barreau de PARIS...

1ère CHAMBRE A EM / IM ARRET N 375
AFFAIRE No : 07 / 0198
Jugement du 28 Novembre 2006 du Tribunal de Grande Instance du MANS no d'inscription au RG de première instance 05 / 2598
ARRET DU 18 NOVEMBRE 2008

APPELANTE :
LA S. A. S. CORATOM La Jartre-Zone d'Activité-16390 ST SEVERIN
représentée par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour assistée de Me Annick DUMAS, avocat au barreau de LA ROCHELLE

INTIMEES :
LA SOCIETE FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE-FIDAL 12 boulevard du Général Leclerc-92200 NEUILLY SUR SEINE
représentée par la SCP DELTOMBE ET NOTTE, avoués à la Cour assistée de Me HASCOET, avocat au barreau de PARIS
LA S. A. KPMG sous l'enseigne KPMG ENTREPRISES 160 avenue Bollée-72016 LE MANS CEDEX 02
représentée par la SCP DUFOURGBURG-GUILLOT, avoués à la Cour assistée de Me BITTOUN substituant Me Jean-Claude GOFARD, avocats au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Avril 2008 à 14 H 00, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame VERDUN, conseiller chargé du rapport.

Ce Magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame VERDUN, conseiller faisant fonction de président vu l'empêchement de la Madame la présidente de la 1ère chambre A et en application de l'ordonnance du 12 décembre 2007, Monsieur MARECHAL, conseiller, et Madame JEANNESSON, vice-président placé faisant fonction de conseiller,
Greffier lors des débats : Madame LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 18 novembre 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Signé par Madame VERDUN, président, et par Madame LEVEUF, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE
Au terme d'une promesse synallagmatique de vente et d'achat du 5 juillet 2001 à effet du 31 juillet 2001, Monsieur Johannes E... F..., Madame Wilhelmina D... épouse E... F..., et Monsieur Mickaël E... F... ont vendu à monsieur G... ou toute personne morale qu'il se substituerait l'ensemble du capital social de la S. A. R. L. CHAUDRONNERIE EUROPE ayant son siège est à SAINT SÉVERIN (Charente) et exploitant un fonds de chaudronnerie industrielle.
Il était stipulé à l'article I intitulé " Promesse de cession " de cette convention que le prix pour l'acquisition des 1. 500 parts sociales convenu de 2. 200. 000 francs a été fixé " au vu d'une situation de la Société CHAUDRONNERIE EUROPE en date du 31 décembre 2000 et de la perspective d'une situation nette à la clôture du bilan au 31 juillet 2001 ou à tout autre date à déterminer après accord des parties en cas de report, comprise entre 950. 000 et 1. 000. 000 de francs, avec un résultat courant avant impôt supérieur ou égal à 270. 000 francs, ces deux derniers éléments étant à déterminer sans prise en compte des charges et dépenses exceptionnelles inhérentes à la présente cession, à la mise en oeuvre des conditions suspensives ci-après énumérées et notamment à la transformation de la S. A. R. L. en Société par Action Simplifiée (rapport du commissaire à la transformation, frais de greffe, de publicité, de conseil divers etc...) En cas de situation nette inférieure à 950. 000 francs, ce prix de 2. 200. 000 francs sera diminué de la différence entre la situation réelle existante à la clôture du bilan au 31 / 07 / 2001 et la situation nette ci dessus visée (950. 000 francs). "
Il était prévu, à l'article V-CONVENTION DE GARANTIE D'ACTIF ET DE PASSIF, que " le jour de la signature des cessions de parts, les promettants s'engagent à consentir aux bénéficiaires et / ou personnes physiques ou morales qu'ils se seront substitués, une convention de garantie assise sur le bilan ou la situation comptable, destinée à protéger le bénéficiaire d'éventuelles augmentations ou des dépenses non en rapport avec l'activité de la société CHAUDRONNERIE EUROPE, ainsi qu'à le garantir de tout passif de la société non déclaré, ou insuffisamment provisionné, mais existant à la date du bilan, ainsi que de tout passif ayant une cause antérieure à cette date et qui se révélerait ultérieurement, sauf à tenir compte de l'incidence fiscale ce dans les termes convenus entre les parties au terme de l'acte annexé à la présente ".
Un document intitulé " DÉCLARATIONS ET ATTESTATIONS CONVENTION DE GARANTIE " était également signé ce même 5 juillet 2001, qui précisait les modalités de la garantie de bilan comprenant une garantie du passif et une garantie d'actif et une annexe détaillant les méthodes d'évaluation devant servir à l'arrêté du bilan de la société au 31 juillet 2001 au terme de laquelle les cédants ainsi que monsieur Jacques G... ou la société CORATOM désignaient KPMG ENTREPRISES, département de KPMG SA pour la détermination contradictoire du bilan.
Il était notamment indiqué à l'article 3 de cette dernière convention que :
" En conséquence de la garantie de bilan (actif et passif) ci-avant stipulée, les GARANTS s'engagent à indemniser le BÉNÉFICIAIRE, en cas de révélation de tout passif social, fiscal, parafiscal ou autre et / ou de toute insuffisance d'actif ne figurant pas dans les comptes dès lors que le supplément de passif ou la diminution d'actif en résultant aurait une cause ou une origine imputable à des faits antérieurs au 31 juillet 2001 et entraînant une aggravation de la situation nette de la société " CHAUDRONNERIE EUROPE " telle qu'elle ressortira au bilan clos le 31 juillet 2001.
La prise en charge par les GARANTS de toute insuffisance d'actif net par rapport au bilan 1er juillet 2001 a un caractère indemnitaire et ne peut en tout état de cause s'analyser comme une révision de prix.
Par les présentes, les garants s'engagent à couvrir et à dédommager le bénéficiaire, à première demande, de tout préjudice définitif que ce dernier pourra subir dans les conditions déterminées ci-avant.
Ils reconnaissent expressément que leur engagement est conclu pour un montant indéterminé parce qu'il ne peut l'être à l'instant présent, mais n'est pas moins valable car il sera déterminable et leur engagement est donc explicite et non équivoque.
Pour la détermination définitive de l'indemnité que les GARANTS pourraient avoir à verser au BÉNÉFICIAIRE au titre de la garantie, il est expressément convenu que :

- les sommes garanties seront retenues pour leur montant taxes comprises, sauf lorsque la TVA facturée est récupérable par la SOCIÉTÉ ;
- elles comprendront outre le principal, toutes pénalités et (ou) intérêts de retard supportés par la société " CHAUDRONNERIE EUROPE " ;
- il sera tenu compte de toute déductibilité fiscale liée à l'impôt sur les sociétés et à lui seul qui résulterait de la charge incombant, le cas échéant, à la société du fait des augmentations de passif ou pertes constatées. En outre, les redressements ayant pour effet de rehausser les bénéfices mais constituant un simple déplacement dans le temps de la charge correspondante, par exemplaire la réintégration d'amortissements, ne seront retenus que pour le coût des majorations et pénalités en résultant, à l'exclusion par conséquent du principal. "
En fin d'année 2002, la société CORATOM faisait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er juillet 1998 au 31 juillet 2001. Après avoir constaté un défaut de TVA collectée et la non conformité des déclarations de TVA déductible au regard des règles applicables en matière de prestation de services, un redressement lui était notifié le 30 octobre 2002. Après observations du redevable, l'administration fiscale notifiait le 25 mars 2003 le maintien des rappels notifiés sur la TVA collectée et la TVA déductible déclarées par la SARL CHAUDRONNERIE EUROPE et portant sur des sommes de 18. 072 € pour l'exercice 1999 / 2000 et de 36. 200 € pour l'exercice 2000 / 2001, ainsi que la réintégration de ces mêmes sommes, pour les mêmes exercices, au titre de l'impôt sur les sociétés.
Monsieur G... agissant en qualité de mandataire social de la société CORATOM sollicitait alors de ses cédants une indemnisation au titre de la mise en oeuvre de la convention de garantie en indiquant :
- que la valeur estimée après prise en compte de tous les éléments d'actif et de passif de la Société CHAUDRONNERIE EUROPE était, au 31 juillet 2001, de 30 000 € alors que le prix avait été estimé au vu de l'audit KPMG à 320 000 € et payé à hauteur de 301 849, 05 € ;
- que le redressement fiscal, en 2002 et 2003 après contestations faites par les conseils des cédants et du cessionnaire a coûté plus de 110. 000 € à la Société, outre les frais de conseil.
Après conciliation préalable dans les conditions prévues à l'article 9 de la convention de garantie du 5 juillet 2001, il était convenu en juin 2004, d'un versement à la Société CORATOM par les cédants, en règlement des indemnités dues en exécution de leur engagement de garantie d'une somme limitée aux conséquences du redressement fiscal arrêtée à la somme de 31. 000 €. La clause de variation du prix étant prise en compte, les cédants renonçaient en outre à réclamer la somme correspondant à 10 % du prix, soit 220. 000 F.

Par acte d'huissier en date du 3 mai 2005, la Société CORATOM a fait assigner devant le tribunal de grande instance du Mans, au visa des articles 1144 et 1147 du Code Civil, d'une part la Société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE (FIDAL) intervenue pour la rédaction de l'acte de garantie de passif et d'autre part la Société d'Expertise Comptable KPMG, ayant établi l'étude financière prévisionnelle au projet de reprise à l'effet de :
" DIRE ET JUGER que la société FIDAL a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle au préjudice de la Société CORATOM. DIRE ET JUGER que la société d'Expertise Comptable KPMG ENTREPRISES a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle au préjudice de la Société CORATOM. CONDAMNER solidairement la société FIDAL et la Société d'Expertise KPMG ENTREPRISES à verser à la Société CORATOM la somme de DEUX CENT SOIXANTE DIX MILLE EUROS (270 000 €) avec intérêts à compter du 5 juillet 2001 en réparation du préjudice subi. CONDAMNER solidairement la société FIDAL et la Société d'Expertise KPMG ENTREPRISES à verser à la Société CORATOM la somme de SEPT MILLE EUROS (7 000 €) en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. ORDONNER l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et sans caution ".
Par jugement du 28 novembre 2006, auquel il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure ainsi que des motifs de cette décision, le tribunal de grande instance du MANS a statué dans les termes suivants :
« Déboute la Société CORATOM de toutes ses demandes. Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires. Condamne la Société CORATOM aux dépens dont distraction au profit des avocats des défendeurs par application des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ».
La SAS CORATOM a interjeté appel de cette décision le 9 janvier 2007
Les parties ont constitué avoué et l'ordonnance de clôture a été rendue le 27 mars 2008.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions déposées par la SAS CORATOM, le 13 mars 2008, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens en application des articles 455 et 954 du code de procédure civile, et aux termes desquelles il est demandé à la cour de :
" DÉCLARER RECEVABLE et bien fondé l'appel interjeté par la Société CORATOM. Vu l'article 1147 du code civil,- INFIRMER le jugement rendu le 28 novembre 2006 par le Tribunal de Grande Instance du MANS.- DIRE ET JUGER que la société FIDAL a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle au préjudice de la Société CORATOM.- DIRE ET JUGER que la société d'Expertise Comptable KPMG ENTREPRISES a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle au préjudice de la Société CORATOM.- DÉBOUTER la Société KPMG de sa demande de dommages et intérêts et de l'ensemble de ses demandes.- DÉBOUTER les intimées de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile-CONDAMNER solidairement la société FIDAL et la Société d'Expertise KPMG ENTREPRISES à verser à la Société CORATOM la somme de DEUX CENT SOIXANTE DIX MILLE EUROS (270 000 €) avec intérêts à compter du 5 juillet 2001 en réparation du préjudice subi.- CONDAMNER solidairement la société FIDAL et la Société d'Expertise KPMG ENTREPRISES à verser à la Société CORATOM la somme de SEPT MILLE EUROS (7 000 €) en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.- Les CONDAMNER aux entiers dépens qui pourront être recouvrés directement par la SCP GONTIER-LANGLOIS, Avoués à la Cour, sur son affirmation de droit, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. A TITRE SUBSIDIAIRE AVANT DIRE DROIT-ORDONNER une expertise et désigner tel Expert qu'il plaira à la Cour afin de dresser un rapport sur la tenue du dossier comptable et fiscal et notamment du dossier de la TVA par la société d'expertise comptable KPMG SA en 1999 et 2000. "

Vu les dernières conclusions déposées par la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE, le 14 février 2008, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens en application des articles 455 et 954 du code de procédure civile, et aux termes desquelles il est demandé à la cour :
" A TITRE PRINCIPAL-de confirmer le jugement Par suite-de dire et juger qu'elle a parfaitement exécuté la mission que lui avait confiée la société CORATOM, qu'elle n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité, que le lien de causalité entre le dommage allégué et sa prétendue faute n'est pas établi En conséquence-de dire et juger qu'elle n'est pas responsable du dommage subi par la SAS CORATOM-de la maintenir purement et simplement hors de cause A TITRE SUBSIDIAIRE, si la cour venait à infirmer le jugement entrepris-de réduire à de plus justes proportions ne dépassant pas la somme de 230. 440, 85 € le préjudice subi par la société CORATOM à raison du rachat des titres de la société CHAUDRONNERIE EUROPE-de dire et juger que la société CORATOM n'a eu à déplorer que la perte d'une chance de pouvoir ou non décider de contracter de certaines conditions avec les consorts E... F...- de dire et juger que la chance perdue est quasi nulle par conséquent-de réduire l'indemnisation sollicitée par la société CORATOM à une proportion infime des 230. 440, 85 € auxquels elle pourrait prétendre SUR LA DEMANDE DE DÉSIGNATION D'UN EXPERT JUDICIAIRE-de lui donner acte qu'elle s'en rapporte à justice quant à la demande formée par la SAS CORATOM de voir désigner tel expert qui se prononcera sur la tenue du dossier comptable et fiscal par la société KPMG en 1999 et 2000, EN TOUT ETAT DE CAUSE-de condamner la ou les partie (s) succombante (s) à lui verser la somme de 7. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. "
Vu les dernières conclusions déposées par la SA KPMG ENTREPRISES, le 4 mars 2008, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens en application des articles 455 et 954 du code de procédure civile, et aux termes desquelles il est demandé à la cour :
- de constater que la société CORATOM ne rapporte pas la preuve ni d'une faute de KPMG SA, ni d'un dommage, ni d'un quelconque lien de causalité entre cette prétendue faute et ce dommage en conséquence-de confirmer purement et simplement le jugement entrepris à titre subsidiaire-de débouter la société CORATOM de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions dans tous les cas-de condamner la société CORATOM à lui payer en réparation du dommage qui lui est causé par une procédure manifestement abusive une somme de 50. 000 € et infirmer par conséquent le jugement sur ce point-de condamner la société CORATOM à lui payer une somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et infirmer en conséquence le jugement entrepris sur ce point-de condamner la société CORATOM aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la faute contractuelle imputée à la SOCIÉTÉ FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE
Il résulte de la lettre adressée à monsieur G... le 16 mai 2001 par la société FIDAL, pour formaliser leur relation contractuelle que la mission de conseil et d'assistance de cette dernière consistait d'une part en la mise en place d'une société holding et d'autre part en le rachat de la société CHAUDRONNERIE EUROPE comportant pour cette dernière " Conseils et assistance pour la reprise de la société. Analyse de l'ensemble des projets transmis par notre confrère. Critiques et modifications à apporter. Conseils et assistance pour modifications des organes de direction. "
Le tribunal a, pour mettre hors de cause la société FIDAL, retenu qu'elle avait employé, pour la détermination du prix de cession ne pouvant intervenir qu'au jour de la date de signature de la convention, les mécanismes juridiques adaptés en pareil cas, à savoir une clause de variabilité du prix et une clause de garantie du passif de sorte qu'elle n'avait commis aucune faute pouvant être la cause des déconvenues de la société CORATOM.
La SAS CORATOM soutient au contraire que la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE, rédacteur de l'acte, aurait manqué à ses obligations de conseil dans la rédaction de l'acte de garantie de passif et commis une faute lourde de conséquence pour elle. Elle lui reproche précisément d'avoir retenu dans la convention de garantie signée le 5 juillet 2001 les comptes à la date du 31 juillet 2001 comme référence pour apprécier l'existence ou non d'un passif non révélé alors que les cédants ne pouvaient connaître les résultats des comptes au 31 juillet 2001 et que devaient être retenus des comptes de référence établis antérieurement au 5 juillet. Elle fait encore valoir que le passif fiscal qui lui a été révélé pour un montant de plus de 100. 000 € est bien inscrit dans les comptes de référence au 31 juillet 2001 de sorte que cette dette fiscale ne peut être considérée comme un passif supplémentaire au sens de la garantie de passif alors que s'il avait été fait référence à des comptes de référence établis à la date de la signature de la promesse, soit le 5 juillet 2001, et non à celle de sa prise d'effet, elle aurait eu connaissance de cette dette fiscale et des dettes d'un montant supérieur à celui annoncé et pris en compte au titre du bilan de référence établi ultérieurement par la SA KPMG.
Le rédacteur d'un acte est tenu, en application des articles 1135 et 1147 du code civil, de s'acquitter de son obligation de conseil de façon complète et objective mais aussi de s'assurer de l'efficacité de l'acte. À défaut sa responsabilité contractuelle est engagée. Il incombe à ce professionnel de démontrer que cette obligation a été respectée même à l'égard de l'autre partie.
Il est en l'espèce constant que la société FIDAL a été chargée par monsieur G... de créer la société CORATOM, société holding dont il était le seul associé, et de procéder, au moyen de cette structure, au rachat de la société CHAUDRONNERIE EUROPE, objet de la promesse synallagmatique de vente et d'achat et de la convention de garantie de bilan contenant une clause de variation de prix et une garantie de passif que cette société de conseil juridique a rédigée.
La garantie de passif convenue le 5 juillet 2001 prévoit expressément que les vendeurs garantissent les différents postes de passif au bilan clos le 30 juin 2000 ainsi que ceux qui apparaîtront dans le bilan comptable à établir au 31 juillet 2001. Il est expressément prévu que tout passif social non déclaré mais existant à la date du 31 juillet 2001 ou tout passif ou dette (notamment une dette résultant de redressements effectués par les administrations fiscales ou sociales) ayant une cause antérieure à cette date qui se révélerait ultérieurement donnera lieu à versement par les garants d'une indemnité au cessionnaire.
Il est de ce fait avéré que les comptes de référence à la date du 31 juillet, selon les mentions manuscrites à l'acte de garantie du 5 juillet 2001, n'étaient pas connus des parties au jour de la signature de l'acte de cession.
La clause de garantie de passif, en se référant à la situation comptable provisoire de l'exercice en cours, qui n'allait être clôturé que 26 jours plus tard et dont les comptes arrêtés ne seraient connus qu'ultérieurement, n'a pas permis à l'acquéreur d'anticiper d'éventuelles dettes fiscales qui se révéleraient à cette clôture des comptes. Les comptes annuels arrêtés au 31 juillet 2001 ont fait justement apparaître l'existence d'une dette de TVA résultant du défaut de déclaration conforme à la législation fiscale qui sera la cause du redressement ultérieur puisque le montant de la TVA collectée est inscrit au passif du bilan pour la somme de 494. 515, 19 F. La société FIDAL peut ainsi se voir reprocher de ne pas avoir intégré une clause de garantie de passif classique, assise sur la base d'un exercice clos et dont les résultats sont connus, et de n'avoir pas anticipé sur des difficultés financières pourtant prévisibles au regard de l'activité de la société pouvant résulter d'une telle situation dans la mesure où la holding ne tirait ses ressources et sa capacité de remboursement de l'emprunt consenti pour l'acquisition que des bénéfices attendus de la société mère, comme le révélait l'étude de l'expert comptable, ce que le conseil n'ignorait pas pour avoir rédigé l'acte constitutif de la holding.
Ainsi, en proposant à son client une convention de garantie de passif se référant à des comptes à établir alors que lesdits comptes devaient être connus de l'acheteur au moment de son engagement, la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE a manqué à son obligation de conseil et d'efficacité des clauses de la convention par elle rédigée.
La société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE, pour faire la démonstration qu'elle a néanmoins respecté son obligation de conseil, soutient en premier lieu que la convention de garantie n'aurait été régularisée que le 31 juillet 2001 et produit à l'appui de sa démonstration un document également intitulé " DÉCLARATION ET ATTESTATIONS CONVENTION DE GARANTIE " entièrement typographié (alors que la promesse synallagmatique et ses annexes datées du 5 juillet 2001 comportent de nombreuses mentions manuscrites ajoutées). Ce document, qui n'est pas daté et ne comporte que les signatures des cédants et non celle du cessionnaire ou de son représentant, est sans incidence sur la solution du litige dans la mesure où la convention de garantie a bien été signée, sous réserve des conditions suspensives prévues à la promesse, le jour même de la formalisation de l'accord des volontés des parties rendant la cession parfaite pour prendre effet au … 31 juillet.
La société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE soutient en second lieu inutilement que la clause de variation du prix prévu à la promesse de cession valant cession rendait impossible la référence à des comptes établis avant le 5 juillet 2001. La clause de variation du prix était en effet applicable sur la base des comptes établis à la date de réalisation de la cession soit le 31 juillet 2001 tandis que la clause de garantie de passif visait à garantir le cessionnaire des dettes non comptabilisées et non révélées avant la date de signature des actes de cession.
La garantie de passif prévoyant en l'espèce la garantie de dettes non révélées à la situation comptable au 31 juillet 2001, la dette fiscale apparue notamment pour les périodes comprises entre le 30 juin 2000 et le 31 juillet 2001 est restée de ce fait exclue de la garantie de passif des cédants prouvant ainsi l'inefficacité de la clause.
Sur la faute contractuelle imputée à la SA KPMG ENTREPRISES
La mission confiée par la SAS CORATOM à la société KPMG, telle qu'elle a été convenue entre les parties, est définie au préambule du rapport du 3 juillet 2001 intitulé " Etude financière prévisionnelle " ainsi qu'il suit :
" PRÉAMBULE : Cette étude entre dans le cadre d'un projet de reprise de la société « SARL Chaudronnerie Europe » par M. Jacques G.... Elle repose sur une structure juridique existante, dont les parts sociales seront acquises par une société holding dont M G... détiendra la quasi-totalité du capital. Une promesse synallagmatique de vente et d'achat de droits sociaux sous condition suspensive a été rédigée et signée par les intéressés. Celle-ci définit les conditions juridiques et financières qui régiront la reprise de la société prévue pour le 31 juillet prochain. Les données prévisionnelles présentées dans cette étude reposent principalement sur :- les analyses, statistiques et observations de J. M. G..., collectées au travers de son passé professionnel et des visites organisées sur le site de ST SEVERIN, lieu du siège social et du principal établissement de la société.- Les documents comptables arrêtés provisoirement au 31 décembre 2000 (soit au terme du premier semestre de l'exercice 2000 / 2001)- Des hypothèses d'exploitation fixée par M. G..., notamment le chiffre d'affaires, les investissements et les frais de personnel. L'intégralité de l'étude est présentée en francs. "
L'" Etude financière prévisionnelle " a donc été établie après analyse des comptes et des activités de l'entreprise. L'avis de la société KPMG a été donné sous forme de la conclusion ainsi rédigée :
" L'approche réalisée dans ce présent document laisse apparaître sur l'ensemble des 5 années étudiées un résultat bénéficiaire significatif, en harmonie avec le « passé » de la société. La politique de distribution choisie par les associés fait remonter 350 KF de dividendes, permettant ainsi le remboursement de l'emprunt souscrit par la holding Coratom. Les investissements réalisés en année 3 nécessiteront probablement un financement adapté, afin de ne pas dégrader la structure financière, et de permettre le développement attendu. Le plan de chargement de l'effectif de production reste cohérent, et l'apport de monsieur G... en terme d'organisation de l'efficience industrielle permettra de procurer des gains de productivité significatifs. La distribution de dividendes prévue en année 1 ne pourra s'opérer qu'au travers d'une distribution des résultats de l'exercice clos au 31 / 07 / 2001. Le cas échéant, la société mère serait en impasse de trésorerie pour honorer ses remboursements ; à moins de bénéficier par exemple d'un différé de paiement d'une année sur la mise en place de l'emprunt dans la holding Coratom. ».
La SA KPMG ENTREPRISES soutient que ce rapport n'était pas destiné à donner une appréciation sur une quelconque valorisation de la société CHAUDRONNERIE EUROPE mais avait seulement comme but de présenter l'opération à des banquiers afin de permettre à monsieur G... d'obtenir le financement dont il avait besoin pour mener à son terme la reprise projetée.
Il existe effectivement une première note adressée à monsieur G... par KPMG ENTREPRISES le 17 mai 2001 afin de permettre à la société CORATOM en cours de création de contracter un emprunt de 1, 5 MF afin d'acquérir 100 % des actions de la SAS CHAUDRONNERIE EUROPE. Cette note décrit sur trois pages de façon succincte la société CORATOM puis la société cible CHAUDRONNERIE EUROPE. On y observe d'ailleurs que le montant de l'opération de reprise est alors évalué par la SA KPMG ENTREPRISES à la somme de 2, 2 MF au titre de la transaction plus 100 KF au titre des frais sur la base d'un document intitulé " Projet de valorisation " en date du 5 janvier 2001 établi sur la base de la situation nette au 30 / 06 / 2000 et d'un actif net comptable de 974. 354 F.
Néanmoins, cette note est distincte de l'étude financière prévisionnelle du 3 juillet 2001 constituée de 20 pages comprenant des documents de synthèse (comprenant bilan prévisionnel, compte de résultat, plan de financement et situation financière initiale) et des éléments détaillés (activités et marges, frais de personnel, frais généraux, investissements, financements, distribution) relatifs à l'état financier de la société CHAUDRONNERIE EUROPE. C'est bien sur la base de cette étude financière prévisionnelle établie après analyse des comptes et résultats de la société cédée que le prix global des 1. 500 parts sociales a été fixé à la somme de 2. 200. 000 F net vendeur.
C'est dès lors à tort que le premier juge a considéré que l'étude financière reposait principalement sur les données communiquées par monsieur G... alors qu'il est constant que la société KPMG était en outre depuis octobre 2000 l'expert comptable de la société Chaudronnerie Europe, avait réalisé la clôture du bilan au 30 juin 2000, tenait la comptabilité de cette société et établissait les déclarations de TVA.
Par ailleurs, la SA KPMG soutient de manière inopérante que le prix des actions cédées n'aurait pas été fixé sur la base de l'étude à laquelle elle s'est livrée alors même qu'elle admettait, dans une lettre adressée le 20 août 2001 par Monsieur Didier I..., expert comptable associé KPMG, à Monsieur G..., être intervenue à la fin de l'année 2000 pour lui apporter son conseil sur le projet d'acquisition d'une société, avoir étudié le projet de valorisation de deux sociétés et avoir, après le choix par monsieur G... de la SARL CHAUDRONNERIE EUROPE, établi les documents prévisionnels afin de solliciter un financement bancaire et notamment une étude financière prévisionnelle finalisée dans sa 2° version en début juillet 2001 intégrant le projet d'entreprise, avoir facturé cette étude 16. 000 Francs (hors TVA), l'avoir assisté lors du rendez-vous de signature des actes du 5 juillet 2001, assistance facturée 2 500 Francs (hors TVA).
Or, il est avéré qu'après prise en compte de tous les éléments d'actif et de passif, les titres de la société Chaudronnerie Europe aurait dû être valorisés à la somme de 200. 000 F soit 30. 000 € ainsi que l'indique la société KPMG Entreprises elle-même dans un document intitulé " Approche de la valorisation après clôture 07 / 2001 " en date du 20 novembre 2003 après prise en compte des comptes annuels définitifs au 31 juillet 2001 comprenant un actif net comptable corrigé de 128. 801 F et un passif fiscal pour rappel de TVA de 600. 000 F.
En outre le tableau de l'étude financière initiale figurant en page 6 de l'étude financière prévisionnelle ne prend pas en compte, en sa partie relative à la situation de trésorerie, la dette de TVA collectée, bien que cette dernière soit exigible étant précisé que cette TVA collectée apparaît au passif des bilans successifs pour des sommes de l'ordre de 239 KF au 30 juin 2000, 215 KF au 31 décembre 2000 et sera de 494 KF au 31 juillet 2001.
Le redressement notifié à la Société Chaudronnerie Europe montre que la dette de TVA collectée et non déclarée retenue a été de 36. 200 € au seul titre de l'exercice clos en 2001 ce qui montre que le traitement de la TVA, qu'elle soit exigible dès la livraison du bien pour l'activité de fabrication et de vente ou lors du paiement de la prestation par le client s'agissant de l'activité de prestation de service, avait bien une incidence sur l'actif net de la société et sur l'état de sa trésorerie.
L'absence de comptabilisation de cette somme et de celles exigibles sur les exercices antérieurs dans l'étude financière prévisionnelle ou même de toute réserve sur ce point démontre l'absence d'examen sérieux conforme aux normes professionnelles de la situation de la société. La présentation de la situation de trésorerie, à laquelle s'est livrée la SA KPMG ENTREPRISES, était dès lors faussée de même que l'analyse pour l'avenir sur laquelle s'est fondée l'acquéreur pour réaliser l'opération. La SA KPMG ENTREPRISES a ainsi commis une faute dans la recherche des informations comptables et financières dans le cadre de la mission qui lui était impartie par la société CORATOM de contrôle des comptes impliquant notamment vérification sérieuse de la situation de la société CHAUDRONNERIE EUROPE au regard de ses obligations fiscales et sociales.
Sur ce point, il résulte de la " notification de redressement suite à une vérification de comptabilité " adressée par l'administration fiscale à la société CHAUDRONNERIE EUROPE le 30 octobre 2002 et de la réponse aux observations du contribuable du 25 mars 2003 que le redressement de TVA porte tant sur l'exercice comptable clos en 2001 que sur celui clos en 2000 alors que la vérification de la situation financière à laquelle la SA KPMG ENTREPRISES a procédé a porté sur les exercices antérieurs et que la SA KPMG ENTREPRISES ne pouvait ignorer qu'il existait au moins depuis l'exercice 1999-2000 un retard de paiement de TVA, un simple rapprochement des écritures comptables devant mettre en évidence l'écart entre la TVA encaissée et la TVA payée. C'est sur la base de cette comparaison entre le chiffre d'affaire comptabilisé au journal des ventes et déclaré au titre de l'impôt sur les sociétés et celui déclaré en matière de TVA qu'a été notifié le redressement fiscal de la société cédée du 30 octobre 2002 (pièce n° 7 de l'appelante).
La faute commise s'induit encore des circonstances dans lesquelles la société KPMG s'était vue confier la clôture de l'exercice au 30 juin 2000 et la tenue de la comptabilité de la société CHAUDRONNERIE EUROPE à la suite d'un redressement fiscal qui avait été notifié à cette dernière au cours du deuxième trimestre 2000 pour les mêmes causes de comptabilisation de la TVA exigible. Or, le deuxième redressement montre que dès l'établissement des comptes au 30 juin 2000, la société CHAUDRONNERIE EUROPE était en infraction avec les règles fiscales applicables en matière de TVA pour les mêmes motifs que ceux ayant motivé le premier redressement. La société KPMG devait à plus forte raison s'assurer que la société CHAUDRONNERIE EUROPE avait modifié ses pratiques et que les causes ayant provoqué le précédent redressement avaient disparu non seulement pour s'assurer en qualité d'expert comptable de la régularité fiscale des opérations qu'elle enregistrait mais surtout en sa qualité de conseil de la société CORATOM de la sincérité de l'évaluation financière prévisionnelle qu'elle lui proposait.
L'indication par la SA KPMG en page 8 de l'analyse prévisionnelle que " La TVA suit le régime des encaissements " démontre encore la négligence fautive commise par elle dans l'analyse de la situation puisqu'elle ne pouvait ignorer, notamment du fait du précédent contrôle fiscal subi par la société CHAUDRONNERIE EUROPE, que ce régime de TVA sur encaissement ne pouvait s'appliquer qu'à l'activité assimilée à des prestations de service et non à l'activité de livraison de bien.
Le fait que la SA KPMG ait, le 31 août 2001 soit postérieurement à l'exécution de l'acte de cession, informé le repreneur de l'existence de la dette de TVA est sans effet sur l'existence de la faute antérieurement commise et le manquement commis par la SA KPMG à son devoir de conseil envers l'acquéreur des parts sociales.
Sur le préjudice et le lien de causalité
La SAS CORATOM sollicite l'indemnisation du préjudice résultant des fautes contractuelles de la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE et de la SA KPMG ENTREPRISES qu'elle estime devoir être fixée à la différence entre la valeur réelle et la valeur surestimée, soit la somme de 270. 000 €.
Elle fait valoir à l'appui de son argumentation sur ce point que les comptes de référence arrêtés au 31 juillet 2001 révèlent une partie du passif que le cessionnaire ne connaissait pas au 5 juillet 2001 et que la garantie de passif ne pouvait être mise en jeu que pour une faible partie des charges invoquées correspondant à son préjudice. Elle indique avoir réglé aux cédants la somme de 301 849, 05 € n'ayant pas réglé le solde du prix de 10 % après mise en jeu de la clause de variation du prix et n'avoir pu recevoir des cédants qu'une somme de 31. 000 € au titre de la garantie de passif dont l'efficacité s'est trouvée limitée du fait de la rédaction de cette clause reprochable à la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE. La SAS CORATOM invoque encore pour justifier de son préjudice :
- la mauvaise situation de trésorerie présentant une différence de 656. 000 F entre le 30 juin 2001 et le 31 juillet 2001- les frais liés au contrôle fiscal-les frais financiers liés aux difficultés de trésorerie (frais d'affacturage et agios bancaires)- la mise en cause du plan de développement de la société du fait de la limitation par les banques du montant des découverts et du refus de prêts bancaires.
La faute commise par la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE a privé CORATOM de la possibilité de recouvrer auprès des cédants l'intégralité des sommes qu'elle aurait pu exiger au titre de la garantie de passif. L'inefficacité partielle de la clause de garantie de passif est en lien direct avec le préjudice subi par la SAS CORATOM résultant de l'impossibilité pour elle d'obtenir la garantie des cédants pour la totalité de la dette fiscale antérieure à la cession.
La faute commise par la SA KPMG ENTREPRISES a conduit à une sur-évaluation du prix de cession des parts sociales et à une dissimulation aux yeux de l'acquéreur du passif fiscal réel de la société au moment où il a signé l'acte d'acquisition de la société CHAUDRONNERIE EUROPE.
Ces fautes retenues à l'encontre de la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE et de la SA KPMG ENTREPRISES sont distinctes mais ont néanmoins concourues directement à la réalisation du même dommage qui consiste non en la perte d'une chance de décider si la société CORATOM désirait ou non contracter avec les consorts E... F... comme le soutient la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE mais bien en un préjudice économique dont il appartient à la cour de fixer l'étendue.
En outre, contrairement à ce que soutient la SA KPMG ENTREPRISES le fait que les demandeurs aient transigé avec leurs cédants ne saurait limiter l'indemnisation du préjudice indemnisable de la SAS CORATOM en relation causale avec les fautes commises par elle et par la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE. La société FIDAL reproche pour sa part de manière inopérante à la société CORATOM de n'avoir pas fait jouer la clause de variation du prix dès lors qu'il est avéré qu'elle a obtenu des vendeurs la diminution du prix effectif d'achat par application de cette clause.
Le préjudice subi réside dans l'acceptation par le cessionnaire d'un prix manifestement exagéré sans recours suffisant de ce chef contre les cédants. Il est donc équivalent à la différence entre la valeur réelle des titres de la société et la valeur surestimée même si une partie de la valorisation initiale du capital social de la société a procédé des hypothèses d'exploitation et des perspectives de développement telles qu'elles ont été fixées par monsieur G.... Il est en effet avéré que la situation réelle de la société au 31 juillet 2001caractérisée par un actif net comptable de 128 KF au lieu de 974 KF comme convenu à l'acte de cession, une situation nette de 457 KF au lieu de 950 KF et une trésorerie de 670 KF au 30 juin 2001 contre 14 KF au 31 juillet 2001, ainsi que par l'exigibilité immédiate de la dette fiscale et des frais associés, ont eu une incidence sur les résultats ultérieurs de la société et sur les frais financiers qu'elle a dû supporter.
Le préjudice dont il convient d'accorder réparation in solidum à la charge de la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE et de la SA KPMG doit en conséquence, au vu des éléments au débat, être fixé à la somme de 270. 000 €.
Sur les autres demandes
La demande de dommages et intérêts formée par la SA KPMG ne pourra, au regard de ce qui précède, qu'être rejetée.
La société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE et de la SA KPMG seront in solidum tenues des entiers dépens de première instance et d'appel. Il n'existe aucune considération d'équité qui permette de les dispenser de contribuer aux frais irrépétibles que leur adversaire a dû exposer dans le cadre de la présente instance. Il convient en conséquence d'accueillir, dans les limites précisées au dispositif de la décision sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la demande formée par la SAS CORATOM au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

STATUANT publiquement et contradictoirement,
INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
STATUANT à nouveau,
CONDAMNE in solidum la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE et la SA KPMG à payer à la SAS CORATOM la somme de 270 000 € à titre de dommages et intérêts ;
CONDAMNE in solidum la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE et la SA KPMG à payer à la SAS CORATOM la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE la SA KPMG de sa demande dommages et intérêts ;
CONDAMNE in solidum la société FIDUCIAIRE JURIDIQUE ET FISCALE DE FRANCE et la SA KPMG aux entiers dépens de première instance et d'appel et DIT que ces derniers seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

C. LEVEUF F. VERDUN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Ct0146
Numéro d'arrêt : 375
Date de la décision : 18/11/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance du Mans, 28 novembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2008-11-18;375 ?
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