Chambre Sociale
ARRÊT N
BA / AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 02165.
type de la décision déférée à la Cour,
juridiction d'origine,
date de la décision déférée,
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes de LAVAL, décision attaquée en date du 14 Septembre 2007, enregistrée sous le no 06 / 00356
ARRÊT DU 18 Novembre 2008
APPELANTE :
Madame Marie-Thérèse X...
... "
53410 ST PIERRE LA COUR
présente, assistée de Maître André LAIGNEAU, avocat au barreau de LAVAL,
INTIMEE ET INCIDEMMENT APPELANTE :
S. A. R. L. ALMIS
3 rue de la Mutualité
53000 LAVAL
représentée par Maître Anne-Florence LE GOURIFF de la SCPA OUTIN GAUDIN et Associés, avocat au barreau de LAVAL,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Octobre 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame ANDRE, conseiller chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur BOTHOREL, président
Madame ANDRE, conseiller
Madame LECAPLAIN-MOREL, conseiller
Greffier, lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT :
prononcé le 18 Novembre 2008, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur BOTHOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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I / Exposé du litige, moyens et prétentions des parties
Marie-Thérèse X... a été recrutée par la société ALMIS exploitant deux magasins, l'un à Laval, l'autre à Vitré, à l'enseigne JANICK, en qualité de vendeuse au sein du magasin de Laval.
Un autre point de vente à été créé à Mayenne en 1992, puis deux magasins ont été exploités à Fougères et Avranches, soit au total cinq magasins d'exploitation.
La convention collective applicable est devenue celles des maisons à succursale de vente au détail de l'habillement.
Marie-Thérèse X... a été classée agent de maîtrise de catégorie A.
La société ALMIS a vendu le fonds de commerce situé à Avranches.
La convention collective applicable est devenue celle de commerce de détail de l'habillement et des articles textiles.
Marie-Thérèse X... a été classée employée catégorie VII de cette convention.
Marie Thérèse X... a été déclarée inapte à son travail par les deux visites médicales de reprise après un long arrêt maladie.
Elle a été licenciée pour inaptitude, le 7 août 2001.
Elle a saisi le conseil de prud'hommes de Laval le 26 avril 2004 pour se faire reconnaître le statut de cadre, et a formé une demande de rappel de salaire en conséquence de cette requalification de statut ; elle a sollicité le paiement d'une prime d'étalage, des dommages intérêts pour travail dissimulé, inexécution déloyale du contrat, licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés.
Par jugement du 14 septembre 2007, le conseil de prud'hommes de Laval a fait droit aux demandes de rappel de la prime d'étalage et d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents, et a accordé à Marie-Thérèse X... une indemnité de 500 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Marie-Thérèse X... a relevé appel de ce jugement.
Elle expose que l'avis médical d'inaptitude ne dispensait pas l'employeur de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise, et le cas échéant, du groupe de magasin dépendant de la société, or la société ALMIS s'est affranchie de cette obligation.
Elle affirme que la société ALMIS ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle aurait cherché à reclasser la concluante dans l'un de ses établissements, et qu'elle procède par assertion lorsqu'elle indique qu'elle aurait interrogé le médecin du travail sur les possibilités de reclassement ; elle ne mentionne pas dans la lettre de licenciement du 7 août 2001 des recherches qu'elle aurait prétendument opérées en vue du reclassement de la salariée.
Elle sollicite de la cour qu'elle dise que le licenciement soit jugé comme étant dénué de cause réelle et sérieuse ; elle réclame à ce titre la somme de 15000 Euros à titre de dommages intérêts, outre une indemnité compensatrice de préavis.
Elle réclame une requalification de sa qualification de vendeuse responsable en cadre catégorie A1 de l'avenant cadre de la convention collective du commerce de détail et de l'habillement et des articles textiles, le changement de convention collective ne pouvant avoir pour effet de modifier le statut et les avantages qui étaient attachés à la qualification de cadre revendiquée par la salariée, puisque ceux-ci étaient incorporés à son contrat individuel.
Elle considère qu'au regard des tâches qu'elle assumait au sein de l'entreprise et de son expérience professionnelle elle doit être classée dans la catégorie professionnelle de cadre catégorie A1 ; elle réclame 8099, 31 Euros de rappel de salaire, outre les congés payés y afférents, ainsi qu'un rappel de prime d'ancienneté d'octobre 2000 à juillet 2001.
Elle demande également que les cotisations sociales afférentes à la reconnaissance de cette qualification de cadre soient versées auprès des organismes sociaux, et ce, sous astreinte.
Elle demande aussi les garanties conventionnelles dues aux cadres malades et notamment le maintien de la rémunération à 100 % pendant deux mois et demi, et à 75 % pendant un mois et demi.
Elle réclame une indemnité compensatrice de prime d'étalage et les congés payés y afférents, faisant valoir que l'employeur a de façon unilatérale modifié le contrat de travail en lui réduisant sa prime d'étalage, puis en la supprimant à compter du 26 septembre 2000.
Elle prétend avoir effectué des heures supplémentaires non réglées et considère apporter des éléments de preuve irréfutables ; elle conclue également, et en conséquence, au paiement d'une indemnité pour travail dissimulé.
Elle estime que l'employeur a été déloyal dans l'exécution du contrat, et demande des dommages intérêts à ce titre.
Elle forme une demande d'indemnité compensatrice de congés payés pour cinq jours retirés par l'employeur, ainsi qu'un rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement, le calcul effectué par l'employeur étant erroné.,
Elle réclame 2500 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SARL ALMIS s'oppose à ces demandes.
Elle met en avant le caractère infondé de la revendication d'un statut cadre, et des demandes de rappels de salaire y afférents.
Elle rappelle que la salariée est titulaire d'un CAP ménager et d'un CAP de couture et qu'elle ne peut prétendre au bénéfice du statut, ce statut requérant le cumul de trois critères, une formation constatée par un diplôme ou une expérience validante, un commandement et une autonomie.
Aucun salarié de la société ALMIS n'a le statut de cadre.
La qualification de Marie-Thérèse X... qui a été d'employée de niveau VII selon la classification des emplois de la convention collective du commerce de détail et de l'habillement et des articles textiles, est devenue agent de maîtrise de catégorie A selon la classification prévue à la convention collective des maisons à succursales de vente au détail de l'habillement, pour revenir après la vente d'un magasin à la convention collective initiale et sa classification initiale.
Elle souligne que de toute façon la discussion instaurée par la salariée est sans intérêt, car sa rémunération était au dessus des minima sociaux, de plus, pour la demande concernant le maintien du salaire pendant les arrêts maladie, la convention invoquée n'était pas applicable.
Elle affirme ne pas devoir de rappel de primes d'étalages, car la prime d'étalage est allouée en contre partie d'un travail, à savoir la mise en vitrine des articles, ce qui n'a pas été le cas pendant son arrêt maladie et, lors de sa reprise en mi-temps thérapeutique, cette tâche avait été dévolue à un autre salarié, elle a donc cessé de percevoir cette prime sans qu'une modification de son contrat de travail ait existé, car elle n'avait pas le monopole contractuellement de cette tâche.
Elle s'oppose à toute demande en paiement d'heures supplémentaires effectuées et non réglées, la salariée ne mentionnant pas le nombre d'heures qu'elle aurait effectuées, de plus, elle ne travaillait que pendant les heures d'ouverture du magasin, par ailleurs, elle souligne que les demandes sont prescrites comme ayant trait à une situation alléguée antérieure au 26 avril 1999, et elle ne peut pas solliciter des dommages intérêts pour tenter de contourner la prescription quinquennale ; elle demande la confirmation du jugement de ce chef, et le rejet de la demande en paiement de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.
II / Motifs de la décision
Sur le licenciement
A la suite d'un accident opératoire, Marie-Thérèse X... a été en arrêt maladie du 10 octobre 1998 au 28 février 1999, puis elle a bénéficié d'un mi-temps thérapeutique à compter du 1er mars 1999.
Elle a repris son travail à temps plein à compter du 1er juillet 1999, elle a été en arrêt de travail du 25 septembre 1999 au 26 septembre 2000, puis elle a bénéficié à compter de 26 septembre 2000 d'un mi-temps thérapeutique pour être à nouveau en arrêt de travail à compter de juin 2001.
Le médecin du travail, lors des deux visites de reprises, les 3 et 19 juillet 2001, a déclaré la salarié inapte, pas de reclassement possible au sein de l'entreprise.
L'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout travail dans l'entreprise ne s'impose à l'employeur qu'en ce qui concerne l'inaptitude à l'emploi précédemment occupé par le salarié, et ne dispense pas l'employeur de rechercher une possibilité de reclassement dans l'entreprise, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail, ou aménagement au poste de travail.
La société ALMIS employait dix salariées, toutes vendeuses, et un assistant de direction.
Le reclassement ne peut être effectué que sur des postes disponibles dans l'entreprise.
Or, aucun poste n'était disponible, et tous les postes occupés étaient des postes correspondant à la qualification professionnelle de Marie-Thérèse X... pour laquelle elle a été déclarée inapte, bien que travaillant en mi-temps thérapeutique.
Aucun poste nouveau n'a été créé après le départ de la salariée, et Marie-Thérèse X... a été remplacée par une nouvelle vendeuse effectuant les tâches de Marie-Thérèse X....
La lettre de licenciement vise l'impossibilité de reclassement de la salariée, pas seulement au vu de l'avis d'inaptitude du médecin du travail, mais également de l'avis du médecin du travail sur les postes compatibles dans l'entreprise avec l'état de santé de la salariée, alors même que cette salariée avait bénéficié d'une visite de préreprise, et était placée depuis un long moment en mi-temps thérapeutique pour correspondre à son état de santé, et alors que, même les reprises de travail à mi-temps, débouchaient sur des arrêts de travail.
La société a recueilli l'avis du médecin du travail pour connaître les emplois compatibles ou aménageables dans l'entreprise avec l'état de santé dégradé de sa salariée.
Dès lors, aucun reclassement n'était possible, et la société ALMIS a satisfait à ses obligations.
Le licenciement a reposé sur une cause réelle et sérieuse, la salariée sera déboutée de sa demande indemnitaire formée à ce titre, et de celles qui en sont la conséquence.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la qualification contractuelle
Marie-Thérèse X... prétend à la qualification de cadre catégorie A1 de la convention collective du commerce et de l'habillement, faisant valoir que la nature des tâches accomplies au sein de l'entreprise, et son expérience professionnelle, justifient cette qualification.
C'est au salarié, qui prétend que la classification retenue par l'employeur ne correspond pas à la classification qui aurait dû lui être reconnue, d'apporter les éléments concernant les tâches effectuées.
La convention collective dispose que sont considérés comme personnel d'encadrement, les collaborateurs possédant une formation technique, administrative, juridique commerciale ou financière constatée généralement par un diplôme ou acquise par l'expérience professionnelle ou reconnue équivalente ; ils exercent des fonctions de commandement, sur délégation de l'employeur, sur les collaborateurs, à tout le moins ils exercent leurs fonctions dans des conditions comportant initiative de décision et responsabilité et pouvant engager l'entreprise.
Ainsi trois critères sont cumulatifs, la formation, le commandement, l'initiative de décision, et la responsabilité engageant l'entreprise.
Marie-Thérèse X... possédait un CAP ménager et un CAP couture floue, elle n'exerçait aucune fonction de commandement, et n'effectuait aucun acte pouvant engager l'entreprise.
Elle travaillait en qualité de vendeuse avec présentation de la vitrine éventuelle, accueil de la clientèle, encaissement des achats, coordination et contrôle des autres vendeuses.
L'attestation de René Z... qui a participé à l'engagement de la salariée, énonce sa fonction qui était " la mise en place des articles reçus, la vente, la tenue de caisse et des stocks, la participation aux commandes des achats auprès des fournisseurs, et en dernier ressort, la responsabilité de l'étalage.
Elle n'avait aucun pouvoir décisionnel en matière d'achat de collections.
La société avait un seul cadre exerçant l'activité d'assistant de direction.
Les fournisseurs du magasin attestent qu'ils n'avaient pour interlocuteurs que le gérant de la société, et l'assistant de la direction.
L'attestation du VRP, Georges A..., versée aux débats par Marie-Thérèse X..., établit que la salariée ne le recevait qu'accompagnée de la direction, et qu'elle ne donnait que son avis sur la collection en fonction de la clientèle du magasin.
Cette attestation vantée par la salariée n'établit pas a contrario qu'elle aurait eu un pouvoir décisionnel sur l'achat des collections, et aurait pris des décisions engageant la société.
L'attestation du médecin du travail ne fait que relater les dires de la salariée sur ses activités.
Les attestations des clientes établissent les qualités professionnelles de la salariée, en sa qualité de vendeuse responsable de magasin.
Elle ne peut dès lors revendiquer le statut de cadre.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la prime d'étalage
Il résulte de l'attestation de René Z..., que la responsabilité de l'étalage avait été confiée à Marie Thérèse X... avec le paiement d'une prime mensuelle de 600 Francs.
Cette prime avait un caractère de fixité, et devait être versée à la salariée indépendamment de son travail à mi-temps, la responsabilité de l'étalage lui étant restée, et cette fonction n'ayant pas à être effectuée quotidiennement.
A défaut, pour l'employeur d'avoir dénoncé l'usage du paiement de cette prime, la salariée est fondée à en obtenir le paiement.
Cette prime étant un accessoire du salaire, la demande ne peut être formée que pour la période postérieure au 26 avril 1999 (la saisine est du 26 avril 2004).
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les heures supplémentaires
La preuve des heures supplémentaires n'incombe pas spécialement à une des parties.
La salariée indique avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires.
Cependant, elle n'indique pas la période de référence.
Elle estime n'avoir pas regardé ses heures supplémentaires, matin, midi et soir.
Cependant, toute demande est prescrite avant le 26 avril 1999.
Du 1er mars 1999 au 30 juin 1999, elle était à mi-temps thérapeutique, et ne peut avoir effectué des heures supplémentaires, mais éventuellement des heures complémentaires.
Du 1er juillet 1999 au 24 septembre 1999, elle a été à temps complet.
Du 25 septembre 1999 au 25 septembre 2000, elle a été en arrêt maladie.
Du 26 septembre 2000 à juin 2001, elle a été en mi-temps thérapeutique.
La période de temps complet est très courte.
L'employeur justifie par les attestations de commerçants exerçant dans la même rue (attestation E..., F..., G..., H...), que les heures d'ouverture du magasin étaient de 9 heures15 à 12heures 15, et de 14 heures à 19 heures.
Martine B... indique qu'elle ouvrait son magasin d'optique à 9 heures, et qu'elle était toujours la première à ouvrir.
Isabelle C... atteste même que Marie Thérèse X... partait le
soir plus tôt afin de prendre le train pour rentrer à son domicile, ce que confirme également Francine D..., qui précise que l'heure de départ de Marie Thérèse X..., le soir, était à 18 heures, alors que le magasin fermait à 19 heures afin qu'elle puisse prendre la micheline pour son retour à Saint Pierre Le Cour.
Ainsi la salarié qui se contente d'affirmer qu'elle aurait fait des heures supplémentaires sans offrir un détail des heures effectuées, sera débouté de sa prétention.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Il résulte de ces éléments que l'employeur a exécuté de façon légale le contrat de travail.
Sur les cinq jours de congés payés retirés
Marie Thérèse X... prétend que l'employeur lui aurait retiré cinq jours de congés payés lors du paiement de son solde de tout compte.
Cependant l'examen des bulletins de paie sur les années 2001 et 2000 fait apparaître que la salariée a bénéficié mensuellement de ses 2, 5 jours de congés, et qu'un retrait était effectué sur les congés acquis au titre de l'exercice passé.
Une cohérence apparaît, laissant à la salariée lors de son solde de tout compte un droit à congé de 24 jours, sans qu'aucun retrait arbitraire n'ait été effectué.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement ;
Confirme le jugement ;
Condamne Marie-Thérèse X... au paiement de la somme de 1500 Euros à la société ALMIS sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la même aux dépens de la procédure d'appel
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALL Philippe BOTHOREL