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24/09/2008 | FRANCE | N°430

France | France, Cour d'appel d'Angers, Ct0063, 24 septembre 2008, 430


1ère CHAMBRE BBD / CJ ARRET N
AFFAIRE N : 07 / 02504
Jugement du 12 Novembre 2007 Tribunal de Grande Instance de LAVAL no d'inscription au RG de première instance 07 / 00176

ARRET DU 24 SEPTEMBRE 2008

APPELANTS :
Monsieur Eric X... "... " 53170 ST DENIS DU MAINE
Monsieur Louis Y... né le 02 Août 1943 à CHANZEAUX (49750)... 49220 PRUILLE
Monsieur David Z... né le 02 Mars 1970 à CHATEAU-GONTIER (53200)... 53290 BEAUMONT PIED DE BOEUF
Monsieur Christophe A... né le 15 Octobre 1969 à LAVAL (53000)... 53940 ST BERTHEVIN
Monsieur Dominique B... nÃ

© le 12 Décembre 1954 à MESLAY DU MAINE (53170)... 53960 BONCHAMP LES LAVAL
Madame Lucien...

1ère CHAMBRE BBD / CJ ARRET N
AFFAIRE N : 07 / 02504
Jugement du 12 Novembre 2007 Tribunal de Grande Instance de LAVAL no d'inscription au RG de première instance 07 / 00176

ARRET DU 24 SEPTEMBRE 2008

APPELANTS :
Monsieur Eric X... "... " 53170 ST DENIS DU MAINE
Monsieur Louis Y... né le 02 Août 1943 à CHANZEAUX (49750)... 49220 PRUILLE
Monsieur David Z... né le 02 Mars 1970 à CHATEAU-GONTIER (53200)... 53290 BEAUMONT PIED DE BOEUF
Monsieur Christophe A... né le 15 Octobre 1969 à LAVAL (53000)... 53940 ST BERTHEVIN
Monsieur Dominique B... né le 12 Décembre 1954 à MESLAY DU MAINE (53170)... 53960 BONCHAMP LES LAVAL
Madame Lucienne B... née le 18 Avril 1926 à PREAUX (76160)... 53960 BONCHAMP LES LAVAL
Monsieur Samuel C... né le 26 Novembre 1979 à LAVAL (53000)... 53170 MESLAY DU MAINE
Monsieur Rémy X... né le 16 Juin 1949 à ST QUENTIN LES ANGES (53400)... 53170 MESLAY DU MAINE

Monsieur Jean-Pierre D...... 49480 SAINT SYLVAIN D'ANJOU
représentés par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour-No de dossier 44. 658 assistés de Maître FALLOURD, avocat au barreau de CHARTRES

INTIMEES :
SOCIETE GENERALI FRANCE... 75009 PARIS
S. A. ANJOU MAINE CEREALES, venant aux droits de la Société Ets Guy Michel Zone Industrielle de Bellitourne 53200 CHATEAU-GONTIER
représentées par Me Jacques VICART, avoué à la Cour-No du dossier 00013238 assistées de Maître DEVIN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 02 Juillet 2008 à 13 H 45, en audience publique, Monsieur DELETANG, président, ayant été préalablement entendu en son rapport, devant la Cour composée de :
Monsieur DELÉTANG, président de chambre Monsieur TRAVERS, conseiller Madame VAUCHERET, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Madame PRIOU
ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 24 septembre 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur DELETANG, président, et par Madame PRIOU, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

DECISION DEFEREE A LA COUR
Par jugement du Tribunal de Grande Instance de LAVAL, en date du 12 novembre 2007, il a été statué en ces termes :
- déboute Messieurs Eric et Rémy X..., D..., Y..., Z..., A..., Dominique et Lucienne B..., Samuel C... de toutes leurs demandes,
- les condamne aux dépens dont distraction au profit de Maître Olivier H... conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

*****
Vu les dernières conclusions de messieurs Eric X..., Jean-Pierre D..., Louis Y..., David Z..., Christophe A..., Dominique B..., Samuel C..., Rémy X... et de madame Lucienne B... en date du 16 juin 2008,
Vu les dernières conclusions de la société ANJOU MAINE CÉRÉALES venant aux droits de la société établissements Guy Michel (la société ANJOU MAINE CÉRÉALES) et de la société GENERALI en date du 27 juin 2008,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 30 juin 2008,
*****
Monsieur Eric X... est entraîneur public de chevaux de course depuis 1999 et s'est vu confier huit trotteurs. Pour l'alimentation des chevaux, il s'approvisionne en avoine exclusivement auprès des établissements Guy MICHEL (devenus ANJOU MAINE CÉRÉALES), grainetier spécialisé dans l'alimentation pour chevaux de course. Celui-ci lui a livré 10 tonnes de marchandise le 15 décembre 2003.
Dès la fin du mois de décembre 2003, monsieur X... a constaté que plusieurs de ses chevaux présentaient un amaigrissement, des problèmes de miction avec extériorisation de la verge, sans émission d'urine, et cystite hémorragique sans apparition de pathologies infectieuses. Les performances des chevaux sont devenues inexistantes.
La totalité de l'effectif devait être atteint.
Le Docteur I..., vétérinaire habituel de l'écurie est intervenu à partir du 23 décembre et a procédé à des examens cliniques et des analyses sanguines.
L'avoine a été suspectée compte tenu d'une part de la concomitance entre la consommation de la nouvelle livraison et d'autre part de la forte odeur dégagée par l'avoine.
Le 4 février 2004, monsieur X... a cessé d'alimenter les chevaux avec ce produit.
Suite à une déclaration de sinistre par la société ANJOU MAINE CÉRÉALES, une expertise amiable a été réalisée par le Docteur I..., vétérinaire, et par le Docteur DE J... P..., toxicologue, pharmacologue. Le premier a mis en cause l'avoine qui présentait selon lui des quantités anormalement élevées de moisissures et de levures toxinogènes, le second a estimé que la seule cause probable des incidents pathologiques constatés était liée à l'avoine distribuée et à la présence de mycotoxines T2 prioritaire, due à une contamination fongique.
Une expertise judiciaire a été alors ordonnée le 25 août 2004 par le président du tribunal de grande instance de PARIS, confié au Docteur K.... Le rapport a été déposé le 4 novembre suivant.
Sans pouvoir affirmer que l'avoine était saine, l'expert indiquait qu'il n'avait pas été possible de mettre en évidence des substances toxiques ou polluantes dans cette avoine, les signes cliniques observés n'étant évocateurs d'aucune mycotoxine ou aucune substance chimique ou polluante connue. Il ne mettait en évidence aucun trouble particulier capable d'expliquer le défaut de performance des chevaux. La reproduction de troubles identiques chez le cheval Mi-Majeur, pris comme animal test, le conduisait à émettre l'hypothèse d'une maladie virale, la rhinopneumonie, sans pouvoir la privilégier.
Par acte du 12 janvier 2007, messieurs Eric X..., Jean-Pierre D..., Louis Y..., David Z..., Christophe A..., Dominique B..., Samuel C..., Rémy X... et de madame Lucienne B... ont assigné en réparation de leur préjudice la société ANJOU MAINE CÉRÉALES, venant aux droits des établissements Guy MICHEL et son assureur, la compagnie GENERALI devant le tribunal de grande instance de LAVAL sur le fondement de l'article 1386-1 du Code civil, subsidiairement 1147 du même code.
Par jugement du 12 novembre 2007, ils ont été déboutés de leurs demandes.
Ils ont relevé appel de cette décision.
Ils demandent à la cour de : • dire qu'ils sont recevables et bien fondés en leurs demandes, • dire les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES responsables des préjudices subis par les demandeurs sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du Code civil, • à titre subsidiaire, dire les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES responsables des préjudices subis par les demandeurs sur le fondement des articles 1147 et 1604 du Code civil, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES à payer à monsieur Eric X... la somme de 850. 77, 25 €, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES à payer à monsieur Jean-Pierre D... la somme de 52. 958, 51 €, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES à payer à monsieur Louis Y... la somme de 133. 133, 40 €, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES à payer à monsieur David Z... la somme de 3. 710 €, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES à payer à monsieur Christophe A... la somme de 3. 710 €, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES à payer à monsieur et madame L... la somme de 6. 650 €, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES à payer à monsieur Samuel C... la somme de 16. 000, 50 €, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES à payer à monsieur Rémy X... la somme de 15. 751, 50 €, • ordonner l'exécution provisoire des condamnations à intervenir, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES à payer à l'ensemble des demandeurs la somme de 8. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, A titre infiniment subsidiaire • désigner un pharmacien toxicologue expert avec mission de :- dire si les analyses réalisées sur l'avoine dans le cadre de l'expertise amiable révèlent la présence de mycotoxines,- dire si les symptômes constatés lors de l'expertise amiable et par le Professeur K... révèlent l'existence d'une intoxication par les mycotoxines identifiés lors des analyses réalisées sur l'avoine par les parties lors de l'expertise amiable, • condamner solidairement les sociétés GENERALI et GUY MICHEL devenue ANJOU MAINE CÉRÉALES aux entiers dépens dont distraction au profit de l'avoué conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Ils font valoir que l'avoine distribuée présentait des défauts : présence de charançons, forte concentration de moisissures, présence de mycotoxines, et ils considèrent que ceux-ci sont à l'origine des troubles présentés par les chevaux en raison de leur toxicité, spécialement pour ce qui concerne les mycotoxines. Ils estiment que leurs adversaires ne font pas la preuve de l'innocuité du produit, dont la provenance n'est pas exactement déterminée en raison de l'absence de traçabilité de la marchandise livrée. Les études scientifiques produites par ANJOU MAINE CEREALES sont en outre, selon eux, insuffisamment documentées sur les mycotoxines et sont contredites par la consultation qu'ils versent aux débats. Ils soulignent que les investigations menées n'ont fait apparaître aucune autre cause possible, la thèse de la rhinopneumonie forme nerveuse n'étant en aucun cas démontrée.
La société ANJOU MAINE CÉRÉALES et la société GENERALI demandent de : • dire les appelants non recevables, en tout cas non fondés en leur appel et les en débouter, • dire que la preuve du défaut n'est nullement rapportée, • confirmer la décision entreprise, • subsidiairement, dire que la preuve du préjudice n'est aucunement rapportée, • encore plus subsidiairement, dire que le préjudice doit être ramené à de plus justes proportions, • condamner les appelants au paiement de la somme de 8. 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile, • condamner les appelants aux entiers dépens dont distraction au profit de l'avoué conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Ils contestent plusieurs éléments factuels : la chronologie des faits (estimant qu'il n'était pas démontré que l'avoine distribuée ait servi à alimenter les chevaux dès la livraison), le fait que les animaux auraient tous été malades en même temps (ce qui irait dans le sens d'une intoxication plutôt que d'une pathologie infectieuse), leur accord pour des essais sur un cheval test (Mi Majeur) ou encore l'abandon de leur site de production d'ARGENTRE pour cause de vétusté. Ils rappellent que l'expertise judiciaire K..., après l'analyse de l'avoine, des tests sur un autre cheval (KAISER DU HOMMET), et la recherche de symptômes, n'a pas mis en évidence des substances toxiques ou polluantes dans l'avoine et qu'une autre hypothèse, celle d'une rhinopneumonie nerveuse, reste la plus probable. Ils soulignent que, si l'expert a relevé que l'avoine n'avait pas la qualité attendue (à tort selon eux l'analyse étant faite 9 mois après la livraison), il n'a jamais lié la maladie des chevaux à l'insuffisance du produit. Ils critiquent l'avis du Professeur M..., toxicologue dépourvue selon eux de compétence en matière de pathologies équines, au contraire du Professeur N..., vétérinaire, qui, lui, a formellement exclu le rôle de mycotoxines dans la maladie des chevaux.
MOTIFS
Messieurs Eric X..., Jean-Pierre D..., Louis Y..., David Z..., Christophe A..., Dominique B..., Samuel C..., Rémy X... et madame Lucienne B... recherchent, à titre principal, la responsabilité de la société ANJOU MAINE CÉRÉALES sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du Code civil.
Aux termes de ceux-ci, le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime. Le demandeur doit prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage. Le producteur est alors responsable de plein droit, sous réserve d'exceptions.
Il n'est pas contesté en l'espèce que l'avoine fournie constitue un produit et que monsieur X... s'approvisionnait exclusivement auprès des établissements Guy MICHEL qui ont la qualité de fournisseur. Il est également établi que les chevaux de l'élevage ont présenté des troubles à l'origine de l'interruption définitive de leur carrière de trotteurs de courses.
Le déroulement factuel des événements, tel que donné par les demandeurs, conduisait de prime abord à envisager l'implication de l'alimentation dans les troubles présentés par les chevaux : ensemble des chevaux en bonne santé avant la livraison le 15 décembre 2003 de l'avoine des établissements Guy MICHEL, alimentation des chevaux exclusivement avec cette avoine à compter de cette date, problèmes de santé et baisse de performance de plusieurs chevaux dès la fin du mois de décembre. Il était relevé également un problème similaire dans l'élevage de monsieur O... à ALEXAIN, approvisionné par le même fournisseur.
Par ailleurs, les premières observations et analyses médicales conduisaient à des conclusions identiques, outre la concomitance entre alimentation et troubles de santé : une forte odeur de l'avoine (qui alerte le Docteur I..., vétérinaire), l'évolution de la santé du cheval Mi-Majeur (qui, alors qu'il était en bonne santé, dépérit en trois jours après avoir été nourri exclusivement avec l'avoine litigieuse), des analyses de l'avoine pratiquées par trois laboratoires mettant en évidence des taux élevés de mycotoxines T2 (Irish Equine Center), un taux anormalement élevé de moisissures toxinogènes (Laboratoire Techna), un taux non négligeable d'ochratoxine A (Laboratoire IEEB), une contre-épreuve avec le cheval KAISER DU HOMMET, placé dans le même environnement mais nourri avec une avoine d'origine différente et qui reste indemne de toute pathologie.

C'est dans ces conditions que l'expertise amiable réalisée avec l'assentiment de GENERALI, en sa double qualité d'assureur responsabilité des établissements Guy MICHEL et d'assureur protection juridique de monsieur X... conduisait aux conclusions convergentes du Docteur DE J...-P..., spécialiste de nutrition animale, toxicologue et pharmacologue, et du Docteur I..., vétérinaire, lesquels mettaient en cause l'alimentation des chevaux dans les conditions ci-dessus rappelées, sans avoir mis en évidence d'autres causes (eau, épidémie...).
Néanmoins, le premier juge a écarté la responsabilité de la société ANJOU MAINE CÉRÉALES.
Il s'est appuyé sur les conclusions de l'expert judiciaire K..., expert vétérinaire. Il rappelle ainsi que celui-ci relativise les conclusions qui peuvent être tirées des taux de mycotoxines T2 (fabriquées par des champignons sous certaines conditions et qui contaminent les plantes sur pied avant la récolte), celles-ci pouvant être réparties de manière très hétérogène dans l'avoine et les taux relevés ne pouvant être interprétés selon les critères classiques de toxicologie. Il rappelle aussi qu'elles sont mal connues, souvent inoffensives, et que celles connues produisent des syndromes peu caractérisés, les troubles se limitant à des retards de performances chez les animaux, une baisse de l'état général et, dans les formes aiguës, des nécroses des muqueuses notamment à l'origine de coliques, symptômes différents de ceux constatés.
Citant les termes du rapport, le premier juge a rappelé que l'expert avait considéré que les teneurs en mycotoxines relevées étaient trop faibles pour produire des troubles mais qu'il ne pouvait être exclu, compte tenu de l'hétérogénéité que des taux supérieurs aient pu se trouver dans l'alimentation, que les examens médicaux n'avaient pas permis de déceler de troubles particuliers expliquant les baisses de performances, que les troubles constatés (baisse de forme sportive avec des troubles locomoteurs, signes urinaires avec une irrégularité de miction et une ptose de la verge intermittente mais persistante pendant plusieurs semaines et chez les femelles une paralysie du sphincter vésical et un amaigrissement chez les chevaux) n'étaient évocateurs d'aucune affection ou maladie classique et qu'une infestation parasitaire ou bactérienne était exclue. Le jugement a relevé que, examinant trois hypothèses de pathologie, l'expert avait conclu que l'hypothèse de mycotoxines classiques ne pouvait être incriminée, notamment en ce que la ptose pénienne est un symptôme qui n'a pas été retrouvé dans les effets connus des mycotoxines, que l'hypothèse de toxine botulique était peu vraisemblable et que l'hypothèse de rhinopneumonie n'était pas plus certaine, le développement de la maladie dans l'élevage n'étant pas conforme à l'évolution habituelle, la très forte contagion dans l'élevage ne s'étant pas accompagnée de cas dans d'autres établissements et l'amaigrissement n'étant jamais décrit dans les formes nerveuses de la rhinopneumonie.
Le premier juge a conforté sa décision par d'autres éléments : l'absence de critiques de la qualité de l'avoine lors d'un contrôle des stocks dans les silos de l'entreprise Guy MICHEL fin novembre 2003 par un organisme officiel, l'absence de difficultés dans les autres élevages alimentés avec de l'avoine de la même provenance et les résultats négatifs d'une expérience sur des rats nourris avec l'avoine litigieuse.
En cause d'appel, cette analyse est fortement critiquée par Messieurs Eric X..., Jean-Pierre D..., Louis Y..., David Z..., Christophe A..., Dominique B..., Samuel C..., Rémy X... et madame Lucienne B....

Ils soulignent l'absence de traçabilité du produit livré, qui rend inopérante l'attestation délivrée par l'Office National Interprofessionnel des Grandes Cultures, les établissements Guy MICHEL possédant plusieurs dépôts, et ils émettent des doutes sur l'état du site d'ARGENTRE, depuis lors supprimé. Ils font observer qu'il n'est pas établi que d'autres éleveurs auraient été approvisionnés avec des produits de la même origine.
Mais le contrôle de qualité satisfaisant sur le site d'ARGENTRE contredit les allégations de vétustés et de mauvais état sanitaire des installations et les établissements Guy MICHEL expliquent de manière plausible que la suppression du site d'ARGENTRE est la conséquence d'une politique de restructuration immobilière. L'examen des pièces produites relatives aux livraisons ne démontre pas l'inexactitude des affirmations du mis en cause sur la fourniture d'alimentation de produits de la même origine à d'autres centres, étant observé que le fournisseur délivrait un produit constitué d'un mélange de grains issus de plusieurs producteurs, qu'il n'est pas établi que le problème de santé survenu dans l'élevage de monsieur O... puisse être rattaché à la même origine et que l'épreuve faite avec le cheval KAISER DU HOMMET reste un " test négatif ".
En ce qui concerne l'expérimentation sur les rats nourris sans problème avec l'avoine litigieuse, il ne peut rien en être déduit en l'absence de certitudes sur la pertinence d'une transposition des conclusions au cheval.
Devant la cour, Messieurs Eric X..., Jean-Pierre D..., Louis Y..., David Z..., Christophe A..., Dominique B..., Samuel C..., Rémy X... et madame Lucienne B... s'appuient particulièrement sur la consultation du Professeur M..., toxicologue, spécialiste des mycotoxines, pour contredire le rapport K.... Cette spécialiste a considéré que deux classes de mycotoxines observées dans l'avoine pouvaient être responsables de la majorité des effets constatés sur les chevaux. Cette affirmation est toutefois contredite par le professeur N..., professeur d'école vétérinaire, qui lui reproche, outre son absence de compétence en matière vétérinaire, d'avoir effectué un travail purement théorique, dont les conclusions sont de surcroît en contradiction avec ses propres publications pour ce qui concerne les seuils de toxicité.
Cette étude, menée à la demande des appelants sur les seules pièces communiquées par elles, n'emporte pas la conviction. Il n'apparaît pas qu'il puisse en être diligentée utilement une autre, ni par de nouvelles analyses à partir d'un produit qui, à supposer qu'il en existe encore des échantillons, ne présenterait pas les caractéristiques du produit servi compte tenu de son ancienneté, critique déjà faite par les parties pour les expertises en cours de procédure, ni sur pièces afin d'arbitrer les divergences doctrinales entre les techniciens, conseils des parties, et alors que celles-ci ont, à l'occasion d'investigations multiples, été en mesure de faire valoir leurs observations et solliciter les analyses qui leurs paraissaient utiles.
Le professeur N..., mandaté par GENERALI, privilégie, quant à lui, l'hypothèse de la Rhinopneumonie, également avancée par l'expert judiciaire. Cette affection reste, au vu des analyses développées, une hypothèse que rien ne permet de préférer, si elle ne peut être exclue.
La chronologie elle-même de l'apparition de la maladie dans l'élevage de monsieur X... n'est pas aussi déterminante qu'il y paraissait à l'origine puisque, outre le fait qu'il n'est pas certain que tous les chevaux ont été alimentés avec l'avoine litigieuse dès la livraison, il apparaît que les troubles se sont manifestés en plusieurs étapes : fin décembre pour IDEAL NOVO, début février suivant pour MAGIC D'OUDON et MYRTILLE D'OUDON, et seulement après pour les autres chevaux.
Messieurs Eric X..., Jean-Pierre D..., Louis Y..., David Z..., Christophe A..., Dominique B..., Samuel C..., Rémy X... et madame Lucienne B..., auxquels incombent la charge de la preuve du défaut du produit et du lien de causalité entre le défaut et le dommage ne rapportent donc pas la démonstration du défaut.
S'ils avancent un faisceau d'éléments de conviction, au bénéfice des premières constatations et études, cet ensemble reste contredit pas trop d'éléments pour qu'il puisse asseoir la responsabilité du fournisseur du produit.
Subsidiairement, Messieurs Eric X..., Jean-Pierre D..., Louis Y..., David Z..., Christophe A..., Dominique B..., Samuel C..., Rémy X... et madame Lucienne B... ont recherché la responsabilité de la société ANJOU MAINE CÉRÉALES sur le fondement des articles 1147 et 1604 du Code civil.
Il résulte de l'expertise du professeur K... que l'avoine était polluée de charançons et de moisissures.
Mais l'expertise a été réalisée neuf mois après la livraison et la consommation du produit par les chevaux. Outre que l'état du produit à la livraison reste inconnu, il ne résulte pas des expertises produites aux débats que les troubles des chevaux puisse être la conséquence de ces circonstances.
Le jugement sera en conséquence confirmé.
Il ne sera pas fait droit à la demande présentée par la société ANJOU MAINE CÉRÉALES et la compagnie GENERALI par application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les appelants, qui échouent en leur recours, supporteront les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Rejette toutes demandes ;
Condamne in solidum Messieurs Eric X..., Jean-Pierre D..., Louis Y..., David Z..., Christophe A..., Dominique B..., Samuel C..., Rémy X... et madame Lucienne B... aux entiers dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

D. PRIOU B. DELÉTANG


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Ct0063
Numéro d'arrêt : 430
Date de la décision : 24/09/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Laval, 12 novembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2008-09-24;430 ?
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