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24/06/2008 | FRANCE | N°242

France | France, Cour d'appel d'Angers, Ct0146, 24 juin 2008, 242


1ère CHAMBRE A
FV / IM ARRET N 242
AFFAIRE N : 07 / 01330
Jugement du 22 Mai 2007 Tribunal de Grande Instance du MANS no d'inscription au RG de première instance 06 / 02148
ARRET DU 24 JUIN 2008

APPELANTE :
L'ADMINISTRATION DES IMPOTS prise en la personne du Directeur des Services Fiscaux de la SARTHE 23 rue Pasteur-BP 24831-72004 LE MANS CEDEX 01
représentée par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour

INTIMES :
Monsieur Michel X......
Madame Dominique Y... épouse X......
représentés par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la C

our assistés de Me Maria BONON, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a é...

1ère CHAMBRE A
FV / IM ARRET N 242
AFFAIRE N : 07 / 01330
Jugement du 22 Mai 2007 Tribunal de Grande Instance du MANS no d'inscription au RG de première instance 06 / 02148
ARRET DU 24 JUIN 2008

APPELANTE :
L'ADMINISTRATION DES IMPOTS prise en la personne du Directeur des Services Fiscaux de la SARTHE 23 rue Pasteur-BP 24831-72004 LE MANS CEDEX 01
représentée par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour

INTIMES :
Monsieur Michel X......
Madame Dominique Y... épouse X......
représentés par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour assistés de Me Maria BONON, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 05 Mai 2008 à 14 H 00, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame CHAUVEL, conseiller, désignée par ordonnance du Premier Président en date du 12 décembre 2007 pour exercer les fonctions de président, Madame VERDUN, conseiller ayant été entendu en son rapport, et Monsieur MARECHAL, conseiller,
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame LEVEUF ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 24 juin 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Signé par Madame CHAUVEL, président, et par Madame LEVEUF, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE
Par acte notarié en date du 29 juillet 1995, Michel X... a reçu en donation de Clément A... la... située sur la commune de Saint Mars la Brière, et d'une contenance de 153 ha.
Par acte notarié du 3 novembre 1995, il a, avec son épouse Dominique Y... épouse X..., reçu en donation de Madeleine X... la ..., d'une superficie de 1 200 ha, répartie sur les communes de Bonnétable, Saint Denis des Coudrais et Saint Georges du Rosay.
Désirant bénéficier du régime fiscal de faveur institué en matière de mutation à titre gratuit de bois et forêts, dans les conditions prévues à l'article 793-2, 2o du Code général des impôts, les époux X... ont fourni à l'Administration fiscale, lors du dépôt de leurs déclarations de donation :
- leur engagement d'appliquer pendant 30 ans le plan simple de gestion forestière et de ne le modifier qu'avec l'agrément du centre régional de la propriété foncière,- et les certificats établis par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt attestant que les deux forêts étaient susceptibles d'aménagement et d'exploitation régulière, datés des 23 janvier et 19 octobre 1995.
Ils ont demandé à bénéficier de la même exonération partielle en matière d'Impôt sur la fortune (ISF) aux termes de déclarations annuelles remises à compter de l'année 1996, sans y joindre les engagement et certificats déjà fournis au titre des droits de mutation.
Le 24 décembre 2004, le service de la fiscalité immobilière du centre des Impôts du Mans a notifié aux époux X... un redressement en matière d'ISF portant :
- réintégration de la valeur des forêts considérée comme omise dans les déclarations d'ISF de 1996 à 2004,- refus de l'exonération des quarts au titre des années 2001 à 2004, au motif que les justificatifs fournis lors de la déclaration initiale ne concernaient pas l'ISF mais les droits de mutation.
Après le rejet partiel de leur recours amiable, à l'issue duquel l'Administration a maintenu le redressement ISF sur la période de 2001 à 2004, pour un montant de droits de 206 294 euros, puis le rejet de leur demande par le conciliateur fiscal, les époux X... ont saisi le tribunal de grande instance du MANS d'une réclamation contentieuse, par acte d'huissier de justice en date du 10 mars 2006.
Par un jugement du 22 mai 2007, ce tribunal a retenu l'argumentation des contribuables selon laquelle l'exonération au titre de l'ISF suivant le régime institué en matière de droits de mutation par l'article 793-2, 2o du Code général des impôts, l'Administration n'était pas fondée à réclamer d'autres pièces justificatives que celles qui lui ont été initialement fournies, puis renouvelées 10 ans plus tard, au titre des droits de mutation pour appliquer la même exonération au titre de l'ISF, et a déclaré que les époux X... étaient en droit de bénéficier de cette exonération pour les années 2001 à 2004.
L'Administration des impôts de la SARTHE a relevé appel de cette décision par déclaration du 22 juin 2007.
Les parties ont conclu. La clôture de l'instruction a été prononcée le 29 avril 2008.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions déposées par l'Administration des impôts de la SARTHE le 14 mars 2008 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens en application des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, et par lesquelles elle demande à la cour :
· d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, au visa des articles L 55 et L. 57 du Livre des procédures fiscales, 793-2, 2o, 885 A, 885 D et 885 H du Code général des impôts, · de reconnaître les redressements fondés pour un montant de 206 294 euros au titre des droits et de 36 884 euros au titre des intérêts de retard, · de confirmer la décision de rejet notifiée le 17 janvier 2006, · de condamner les époux X... à verser à Monsieur le comptable des impôts du Mans la somme de 243 158 euros, correspondant à l'avis de recouvrement émis le 26 juillet 2007, · de la décharger de toute condamnation prononcée à son encontre, · de condamner les époux X... aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Vu les dernières conclusions déposées par les époux X... le 10 avril 2008, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens en application des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, et par lesquelles ils sollicitent :

· le rejet de l'appel principal et la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, par application des articles 793-2, 2o et 885 H du Code général des impôts ; · subsidiairement, le constat que la proposition de rectification du 24 décembre 2004, laquelle ne vise pas spécifiquement l'article 885 H du Code général des impôts comme base légale de rectification, est irrégulière et de nul effet ainsi que toute la procédure de redressement, · l'octroi d'une indemnité de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile, · la condamnation de l'Administration aux entiers dépens de la présente instance conformément aux articles L. 207 et R. 207-1 du Livre des procédures fiscales.

MOTIFS DE LA DECISION
I) Sur le moyen pris de la nullité de la proposition de rectification du 24 décembre 2004 qui est préalable
Attendu que les époux X... soutiennent que la proposition de rectification datée du 24 décembre 2004 ne viserait pas spécifiquement l'article 885 H du Code général des impôts, de sorte qu'il ne serait pas motivé en droit, et encourerait donc la nullité en application de l'article L. 57 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que ce moyen manque en fait, puisque ce texte est mentionné en page trois de la proposition de rectification, où il est précisé « les bois peuvent bénéficier de l'exonération partielle prévue à l'article 793-2, 2o en matière de mutation à titre gratuit, qui est étendue à l'ISF par l'article 885 H du CGI » ;
Que cette mention du texte prétendument omis, qui permet de reconstituer son rôle dans le redressement, dont la base légale est en réalité constituée par les articles 793-2, 2o et 885 D, lesquels définissent le dispositif d'exonération dont l'Administration a refusé le bénéfice aux époux X..., répond aux exigences de motivation de l'article L. 57 du Livre des procédures fiscales ;
Que le moyen de nullité invoqué par les contribuables, et qui est préalable au débat au fond, ne peut qu'être rejeté ;
II) Sur le bien fondé du redressement
Attendu que, pour accueillir la contestation des époux X... et juger que ces derniers étaient fondés à bénéficier de l'exonération partielle en matière de bois et forêts pour le calcul de l'ISF, le tribunal a d'abord retenu qu'il n'existait aucun texte de portée normative imposant en matière d'ISF une condition formelle spécifique pour bénéficier de l'exonération applicable aux bois et forêts dans les termes de l'article 793-2, 2o du CGI, et qu'en particulier, rien ne justifiait que l'exonération soit attachée au modèle de l'imprimé utilisé dès lors que ce modèle renseigne sur les conditions précises posées pour y prétendre ; qu'il ajoute que les différents imprimés utilisés par la DDAF au titre des mutations à titre gratuit et de l'ISF ont le même contenu pour l'essentiel et renseignent sur le nom du demandeur, sa profession, son domicile, l'énumération des parcelles concernées avec leur localisation cadastrale et leur superficie et la position du directeur de la DDAF qui, dans les deux cas, certifie que cette propriété est susceptible d'aménagement ou d'exploitation régulière ; qu'il précise encore que l'Administration n'explique pas en quoi la décision de la DDA dépendrait de critères différents selon que l'on est en matière de droits de mutation ou d'ISF ;
Attendu que l'Administration objecte que l'ISF présente des règles propres qui le distingue des droits de mutation, au nombre desquelles son annualité, qui ont imposé une adaptation des dispositions de l'article 793-2, 2o du CGI en matière de certificat et qui sont l'objet de la doctrine administrative 7- S-341 du 1er octobre 1999, applicable pendant la période concernée par le redressement, imposant le remise du certificat délivré par la DDAF lors du dépôt de la déclaration souscrite au titre de l'ISF ;
Mais attendu que, et contrairement à ce que soutient l'Administration, cette doctrine n'était pas applicable lors de la souscription de la première déclaration d'ISF, en 1996 ;
Qu'il est constant que le certificat n'est demandé, malgré l'annualité de l'ISF, que lorsque les biens sont portés pour la première fois sur la déclaration souscrite au titre de cet impôt et reste valable 10 ans, au terme desquels il doit être renouvelé, ce qui a été le cas ; qu'il apparaît donc que l'argumentation déduite par l'Administration des dispositions d'une instruction administrative, publiée, mais inapplicable à la situation fiscale des époux X... avant 2005, est inopérante ;
Attendu que l'Administration objecte également que le certificat et l'engagement auraient pour fonction d'authentifier la garantie de gestion pour chaque type d'impôt, justifiant elle-même l'exonération fiscale et qu'en s'abstenant de déposer l'engagement et le certificat spécifiques à l'ISF, les contribuables auraient empêché tout contrôle du service de l'agriculture et de la forêt ; qu'elle développe également sur 3 pages de conclusions écrites, l'incidence du certificat qui assure la bonne forme de l'engagement pris par le contribuable vis-à-vis des administrations agricole et fiscale, qu'elle regarde comme interdépendantes, sur le caractère distinct des contrôles opérés par la DDAF ainsi que sur le délai de reprise de l'engagement ;
Mais attendu que l'Administration fiscale n'est pas juge des conditions de délivrance du certificat et n'a pas à intervenir dans la recherche d'infraction aux règles de jouissance qui peuvent être commises dans l'exploitation par le propriétaire de la forêt ; que ce pouvoir appartient aux seuls agents du service de l'agriculture et de la forêt (réponse ministérielle du 16 décembre 1996) ; qu'a fortiori, elle n'est pas recevable à se prévaloir des conditions auxquelles pourrait être subordonnée l'efficience de ce contrôle ;

Quant au moyen pris de ce que le délai de reprise de trois ans dépendrait de la date de l'engagement, de sorte qu'en entérinant l'argumentation des époux X..., le tribunal créerait une distortion de traitement entre les contribuables engagés à respecter un plan de gestion de sa forêt et les contribuables non engagés, il procède du postulat que les époux X... n'auraient souscrit aucun engagement valable en termes de gestion de leur forêt, ce qui est inexact ;
Qu'en effet l'existence de cet engagement et la connaissance qu'en a eu l'Administration par les certificats délivrés par la DDAF en 1995, résultent du fait même qu'elle a non seulement « pas réagi » de 1996 à 2000 sur l'absence d'engagement ou de certificats spécifiques à l'ISF mais encore annulé le redressement opéré à titre rétroactif jusqu'à l'entrée en vigueur de l'instruction du 1er octobre 1999 dont il a été démontré qu'elle n'était pas applicable au cas des époux X... ;
Attendu, qu'enfin, la cour adoptera les motifs pertinents desquels les premiers juges ont déduit que les engagement et certificats remis à l'occasion de la déclaration des droits de mutation répondaient aux renseignements requis pour permettre à l'Administration de vérifier en temps utile que les conditions de l'exonération partielle étaient remplies au titre de l'ISF ;
Que pour ces motifs, et ceux non contraires du tribunal, le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé que les époux X... remplissaient les conditions pour bénéficier de cette exonération pour les années 2001 à 2004 ;
Attendu qu'il n'existe aucune considération d'équité qui permette de dispenser l'Administration des Impôts, prise en la personne du directeur de services fiscaux de la SARTHE, de contribuer aux frais irrépétibles que les contribuables ont dû exposer pour obtenir le dégrèvement de l'imposition injustement établie ; qu'il convient, en conséquence, de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, dans les limites prévues au dispositif ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,
DIT n'y avoir lieu à annulation de la proposition de rectification du 24 décembre 2004 ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
CONDAMNE l'Administration des Impôts, prise en la personne du directeur des services fiscaux de la SARTHE à payer aux époux X... une indemnité de 2 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
La CONDAMNE aux entiers dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT

C. LEVEUF S. CHAUVEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Ct0146
Numéro d'arrêt : 242
Date de la décision : 24/06/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance du Mans, 22 mai 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2008-06-24;242 ?
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