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28/05/2008 | FRANCE | N°264

France | France, Cour d'appel d'Angers, Ct0063, 28 mai 2008, 264


COUR D'APPEL
D'ANGERS
1ère CHAMBRE B

BD / SM
ARRÊT N 264

AFFAIRE N : 07 / 01272

Jugement du 19 Mars 2007
Tribunal de Grande Instance de LAVAL
no d'inscription au RG de première instance 04 / 01767

ARRÊT DU 28 MAI 2008

APPELANT :

Monsieur Messaoud X...
né le 09 Octobre 1947 à CHETAIBI (ALGÉRIE)
...
...
22300 LANNION

représenté par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour-No du dossier 44207
assisté de Maître GISSELBRECHT, avocat au barreau de LAVAL.

INTIMÉ :

Maître Danie

l Y...
...
22000 SAINT BRIEUC

représenté par la SCP DELTOMBE ET NOTTE, avoués à la Cour-No du dossier 07133
assisté de Maître BESSY, avocat au...

COUR D'APPEL
D'ANGERS
1ère CHAMBRE B

BD / SM
ARRÊT N 264

AFFAIRE N : 07 / 01272

Jugement du 19 Mars 2007
Tribunal de Grande Instance de LAVAL
no d'inscription au RG de première instance 04 / 01767

ARRÊT DU 28 MAI 2008

APPELANT :

Monsieur Messaoud X...
né le 09 Octobre 1947 à CHETAIBI (ALGÉRIE)
...
...
22300 LANNION

représenté par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour-No du dossier 44207
assisté de Maître GISSELBRECHT, avocat au barreau de LAVAL.

INTIMÉ :

Maître Daniel Y...
...
22000 SAINT BRIEUC

représenté par la SCP DELTOMBE ET NOTTE, avoués à la Cour-No du dossier 07133
assisté de Maître BESSY, avocat au barreau de RENNES.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 02 Avril 2008 à 13 H 45, en audience publique, Monsieur DELETANG, président, ayant été préalablement entendu en son rapport, devant la Cour composée de :

Monsieur DELÉTANG, président de chambre
Monsieur TRAVERS, conseiller
Madame VAUCHERET, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame PRIOU

ARRÊT : contradictoire

Prononcé publiquement le 28 mai 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur DELETANG, président, et par Madame PRIOU, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR

Par jugement du Tribunal de Grande Instance de Laval, en date du 19 mars 2007, il a été statué en ces termes :

Déboute Monsieur X... de toutes ses demandes ;

Déboute Maître Y... de ses demandes de dommages et intérêts et au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne Monsieur X... aux dépens, avec application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile au profit de la SCP BARBARY-LAIGNEAU et MORICE, avocats ;

Vu les dernières conclusions de monsieur Messaoud X... en date du 14 mars 2008 ;

Vu les dernières conclusions de Maître Daniel Y... en date du 14 mars 2008 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 25 mars 2008.

*****

Par acte du 28 avril 1988, les époux X... ont fait donation à leurs enfants mineurs Sami et Mehdi de la nue propriété de leur maison d'habitation.

Par jugement du 29 janvier 1992, le tribunal de grande instance de GUINGAMP, statuant en matière commerciale, a prononcé le redressement judiciaire de monsieur X... et, le même jour, sa liquidation.

Maître Z..., ès qualités de liquidateur, a fait assigner les époux X... et leurs enfants en inopposabilité de la donation à son égard.

Il a été fait droit à sa demande par jugement du tribunal de grande instance de GUINGAMP du 3 novembre 2000.

Le conseil de monsieur X..., Maître Y..., avocat à SAINT-BRIEUC, a alors mandaté Maître A..., avoué à la cour, aux fins d'interjeter appel de cette décision.

Par arrêt du 24 juin 2003, la cour d'appel de RENNES a confirmé le jugement déféré, à l'exception des dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

L'arrêt a été signifié à avoué le 8 juillet 2003 et à partie le 21 juillet suivant.

Par lettre du 11 juillet 2003, Maître Y... a informé monsieur X... qu'il n'allait pas tarder à recevoir la signification de l'arrêt du 24 juin et il l'a avisé qu'il disposerait alors d'un délai de 2 mois pour former un pourvoi en cassation. Il lui a indiqué qu'il restait dans l'attente de ses instructions écrites.

Lors d'un rendez-vous pris au cabinet de Maître Y..., et en l'absence de son conseil habituel, monsieur X... a été reçu le 7 août 2003 par Maître B..., sa collaboratrice, pour évoquer une autre affaire pour laquelle il était convoqué le 20 août suivant devant le tribunal de grande instance de GUINGAMP.

Au début du mois de septembre, monsieur X... a déposé un chèque de 1. 200 € au cabinet de Maître Y..., dont il lui a été accusé réception le 8 septembre suivant.

Lors d'un rendez-vous avec Maître Y... le 21 octobre 2003, monsieur X... a appris qu'aucun pourvoi n'avait été régularisé contre l'arrêt du 24 juin 2003.

Monsieur X..., estimant que son conseil avait commis une faute, a fait assigner Maître Y... devant le tribunal de grande instance de LAVAL par acte du 21 octobre 2004, sur le fondement des articles 1134 et 1382 du Code civil, pour mettre en cause la responsabilité de l'avocat à raison de sa perte de chance d'obtenir la cassation de l'arrêt de la cour d'appel de RENNES.

Par jugement du 19 mars 2007, le tribunal l'a débouté de toutes ses demandes et a débouté Maître Y... de ses demandes reconventionnelles en dommages-intérêts et au titre des frais irrépétibles.

Monsieur X... demande à la cour de le recevoir en son appel, y faire droit et
• réformer partiellement le jugement entrepris
• condamner Maître Y... en sa qualité d'avocat à lui verser une somme de 500. 000 € à titre de dommages-intérêts toutes causes de préjudices confondues
• condamner Maître Y..., en sa qualité d'avocat, à lui verser une somme de 3. 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile
• rejeter toutes prétentions contraires
• condamner Maître Y... en sa qualité d'avocat aux entiers dépens de première instance et d'appel lesquels seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile

Maître Y... demande :
Vu l'assignation introductive d'instance du 21 octobre 2004
Vu la communication tardive par le demandeur de ses pièces le 20 janvier 2005
Vu l'absence de communication aux débats :
du jugement du 29 janvier 1992
de l'assignation délivrée pour compte du liquidateur
de l'acte de donation critiqué
du jugement du tribunal de grande instance de GUINGAMP du 3 novembre 2000
des significations des 8 et 21 juillet 2003
des lettres de Maître Y... des 11 et 30 juillet 2003
de l'assignation à comparaître à l'audience du 20 août 2003
• constater que monsieur X... ne rapporte par aucun moyen admissible en preuve la justification de ce qu'il aurait invité Maître Y... à faire toute diligence pour l'inscription d'un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt du 24 juin 2003
• confirmer la décision déférée et débouter en conséquence monsieur X... de l'ensemble de ses demandes
• à titre subsidiaire, dire que monsieur X... est sans intérêt à agir, à défaut d'avoir lui-même supporté le préjudice qu'il invoque
• à titre encore plus subsidiaire, constater que monsieur X... ne propose à la juridiction saisie aucun moyen de nature à permettre de considérer que la cour de Cassation, si elle avait été saisie, aurait, par un motif de pur droit, réformé l'arrêt de la cour d'appel de RENNES du 24 juin 2003
• dès lors débouté purement et simplement monsieur X... de l'ensemble de ses demandes
• condamner monsieur X... à lui payer la somme de 5. 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par une procédure abusive et injustifiée, outre la somme de 3. 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile
• condamner monsieur X... aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ces derniers au bénéfice de l'avoué, selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile

MOTIFS

Sur la responsabilité

Il n'est pas contesté que monsieur X... était depuis plus de vingt ans client de Maître Y..., avec lequel il entretenait des relations de confiance et auquel il avait confié la défense de ses intérêts dans de nombreuses procédures, notamment commerciales.

Parmi celles-ci, la procédure opposant devant le tribunal de grande instance de GUINGAMP puis devant la cour d'appel de RENNES monsieur X... et les membres de sa famille à Maître Z..., son liquidateur, sur l'inopposabilité de la donation de sa maison d'habitation à ses enfants.

Par courrier du 11 juillet 2003 Maître Y... avait informé son client de l'arrêt rendu par la cour le 24 juin précédent. Cette correspondance prévenait monsieur X... de ce qu'il allait recevoir une signification de la décision, que celle-ci faisait courir un délai de deux mois pour former un pourvoi en cassation et qu'il restait en conséquence dans l'attente d'instructions écrites. Monsieur X... était donc dûment alerté des événements à venir et de la conduite à tenir.

L'arrêt a été signifié à personne le 21 juillet 2003.

Monsieur X... soutient avoir donné instruction à son conseil de former un pourvoi en cassation contre l'arrêt. Maître Y... affirme n'avoir reçu aucun mandat en ce sens.

L'appelant, à l'appui de ses prétentions fait valoir

1- d'une part, que compte tenu des relations qu'il entretenait de longue date avec son avocat, il lui donnait de manière habituelle ses instructions de manière orale et qu'en l'espèce, il l'a fait le 7 août 2003 lorsqu'il a rencontré Maître B..., la collaboratrice de Maître Y....

Mais cette circonstance est démentie par la mise en cause. Par une attestation du 18 janvier 2005, cette dernière explique que le rendez-vous avait été pris pour la préparation d'une audience fixée le 20 août suivant devant le tribunal de grande instance de GUINGAMP sur les poursuites engagées contre monsieur X... aux fins de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer (qui donnera lieu à un jugement du 23 septembre 2003 prononçant la faillite personnelle de l'intéressé pour une durée de 15 ans). Elle admet qu'à cette occasion, d'autres difficultés judiciaires de son client ont été évoquées (arrêt de la cour de RENNES, contrainte des AGF, poursuites pour travail clandestin...), mais qu'il ne lui a pas été remis copie de la signification, qu'il ne lui a été donné aucune instruction formelle de faire un pourvoi en cassation, qu'elle n'a demandé aucune provision dans cette perspective et qu'elle a recommandé à son interlocuteur d'évoquer la question avec Maître Y..., s'agissant d'un dossier suivi par lui. Elle précise que, si elle avait reçu des instructions verbales, elle aurait pris la précaution d'inscrire sur l'agenda la date limite de pourvoi et aurait demandé un écrit.

2- d'autre part, qu'il a donné des instructions écrites sous la forme d'une lettre accompagnant l'envoi d'une somme de 1. 200 € de provision.

La réception d'un chèque de 1. 200 € n'est pas contestée quant à sa matérialité, et a donné lieu à l'établissement d'une facture du 8 septembre 2003. Monsieur X... corrobore son affirmation par la production d'une attestation en date du 19 janvier 2006, établie par sa compagne, mademoiselle Anne C..., laquelle indique avoir fait et posté le 1 septembre 2003 un chèque de 1. 200 € à l'ordre de Maître Y... accompagné d'une lettre précisant que ce chèque était pour " affaire maison ".

Il n'est cependant produit aucune copie de cette lettre, au contenu sibyllin, que Maître Y... conteste avoir reçue.

Maître Y... soutient que ces fonds, adressés sans une demande de sa part, n'avaient pas pour objet un pourvoi en cassation dans la procédure relative au litige concernant la donation de la maison de monsieur X... à ses enfants.

Cependant, la facture du 8 septembre 2003 fait référence à une procédure X... / Z... et monsieur X... souligne qu'elle ne peut s'appliquer qu'à l'affaire relative à la maison d'habitation.

Toutefois, le tribunal a de manière pertinente relevé que, outre le litige relatif à la maison, une autre procédure, ci-dessus évoquée et qui a donné lieu au jugement du 23 septembre 2003 sur la faillite personnelle, opposait monsieur X... au même liquidateur et que, si, pour cette instance, une provision de 638, 15 € a été perçue antérieurement à l'audience, le cabinet de Maître Y... a assuré une défense effective du client à l'audience en dépit de l'absence de celui-ci, ce qui pouvait justifier un complément d'honoraires.

Cette ambiguïté n'est pas levée par le courrier du 8 septembre 2003 (X... / Z...), par lequel Maître Y... accuse réception à monsieur X... de son règlement du chèque de 1. 200 € et par lequel il indique " je pense qu'il serait désormais utile que vous preniez contact avec mon cabinet afin que nous convenions d'un rendez-vous pour faire ensemble le point de votre dossier ", courrier qui peut concerner l'une ou l'autre des procédures.

A tout le moins, si ce courrier (et donc la provision) concernait le litige relatif à l'habitation, il démontrerait qu'à cette date, Maître Y... était toujours en l'attente d'instructions, lesquelles auraient d'ailleurs pu être encore utilement données, le délai de pourvoi n'étant pas expiré.

Il n'a pas été donné suite à cette lettre par monsieur X... qui se trouvait alors hors de France ;

Monsieur X... ne rapporte donc pas la preuve qui lui incombe qu'il avait donné des instructions formelles à son avocat pour que soit formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES du 24 juin 2003, étant rappelé qu'un mandat verbal ne pouvait suffire et que le pourvoi, aux termes de l'article 984 du Code de procédure civile est formé par déclaration écrite de la partie ou de son mandataire muni d'un pouvoir spécial.

C'est de manière exacte que le premier juge a estimé en conséquence que la preuve de la faute de Maître Y... n'était pas rapportée et qu'il a débouté monsieur X... de l'ensemble de ses demandes.

Sur les autres demandes

Il n'est pas démontré que monsieur X..., qui a développé son argumentation et produit des pièces, a engagé contre Maître Y... une procédure abusive et a été animé d'une intention malicieuse.

Maître Y... sera en conséquence débouté de sa demande de dommages-intérêts

Il sera alloué à Maître Y... une somme de 2. 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur X... qui échoue en son recours sera débouté de sa demande aux mêmes fins et supportera les entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Condamne monsieur X... à verser à Maître Y... une somme de 2. 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne monsieur X... aux entiers dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

D. PRIOU B. DELÉTANG


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Ct0063
Numéro d'arrêt : 264
Date de la décision : 28/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Laval, 19 mars 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2008-05-28;264 ?
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