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18/12/2007 | FRANCE | N°06/02332

France | France, Cour d'appel d'Angers, 18 décembre 2007, 06/02332


COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE COMMERCIALE



IF/CG

ARRET N



AFFAIRE N : 06/02332

jugement du 27 Septembre 2006

Tribunal de Commerce de LAVAL

no d'inscription au RG de première instance : 05/002461





ARRÊT DU 18 DECEMBRE 2007



APPELANTES :



LA SARL AK MULLER FRANCE

14 Espaces Multiservices

Boulevard Courcerin

77183 CROISSY BEAUBOURG



LA SOCIETE AK MULLER GMBH ET CO

PO BOX 180351 - Dresdener Strasse 162 D

40595 DUSSELDORF (ALLEMA

GNE)



représentées par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour

No du dossier 43.525

assistées de Maître PITON, avocat au barreau de PARIS



INTIMEE :



LA S.A.S. SERAP

Route de Fougère...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE COMMERCIALE

IF/CG

ARRET N

AFFAIRE N : 06/02332

jugement du 27 Septembre 2006

Tribunal de Commerce de LAVAL

no d'inscription au RG de première instance : 05/002461

ARRÊT DU 18 DECEMBRE 2007

APPELANTES :

LA SARL AK MULLER FRANCE

14 Espaces Multiservices

Boulevard Courcerin

77183 CROISSY BEAUBOURG

LA SOCIETE AK MULLER GMBH ET CO

PO BOX 180351 - Dresdener Strasse 162 D

40595 DUSSELDORF (ALLEMAGNE)

représentées par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour

No du dossier 43.525

assistées de Maître PITON, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

LA S.A.S. SERAP

Route de Fougères

53120 GORRON

représentée par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour

No du dossier 29490

assistée de Maître DELAFOND, avocat au barreau de LAVAL

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Novembre 2007 à 13 h 45 en audience publique, Madame BRETON, Conseiller ayant été préalablement entendu en son rapport, devant la Cour composée de :

Madame FERRARI, Président de Chambre

Madame LOURMET, Conseiller

Madame BRETON, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur BOIVINEAU

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 18 décembre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du Nouveau Code de procédure civile ;

Signé par Madame FERRARI, Président, et Monsieur BOIVINEAU, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~

La société Serap construit et commercialise des refroidisseurs de lait ou tanks à lait, qui sont équipés d'électrovannes.

A partir de l'année 1986 et jusqu'en septembre 1999, elle s'est habituellement approvisionnée en électrovannes fabriquées à l'usine Müller de Düsseldorf.

Elles les a acquises :

- au cours des mois de juillet 1997 à août 1998 (période de fermeture du revendeur français), directement auprès de la société de droit allemand AK Müller GMBH § Co, dénommée AK Müller Düsseldorf,

- pour le reste du temps, auprès de la filiale de celle-ci, distributeur du produit sur le territoire national, soit la société AK Müller France, dont le siège est en Seine-et-Marne.

Se plaignant de la défaillance du bobinage des électrovannes fournies, la société Serap a obtenu en référé, le 29 octobre 1999, la désignation de l'expert Philippe B..., qui a déposé son rapport le 3 mars 2003.

La société Serap a fait assigner les deux sociétés Müller, les 8 et 11 juillet 2003, pour obtenir la réparation de son préjudice sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Le tribunal de commerce de Mayenne a, par un premier jugement confirmé en appel, rejeté l'exception d'incompétence soulevée au profit de la juridiction allemande par la société AK Müller Düsseldorf.

Puis, par jugement du 27 septembre 2006, le tribunal de commerce de Mayenne, après avoir retenu que les électrovannes étaient atteintes d'un vice caché, a :

- rejeté la fin de non-recevoir, prise de ce que l'action n'aurait pas été exercée à bref délai,

- écarté la clause limitative de responsabilité opposée à la société Serap,

- condamné solidairement les sociétés Ak Müller France et Ak Müller Düsseldorf à payer à la société Serap la somme de 102 863 euros à titre de dommages-intérêts au titre des électrovannes achetées en France, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- condamné Ak Müller Düsseldorf à lui payer la somme de 135 165 euros, à titre de dommages-intérêts au titre des électrovannes achetées en Allemagne, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- condamné solidairement les sociétés Ak Müller France et Ak Müller Düsseldorf à payer à la société Serap la somme de 7 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens comprenant les frais d'expertise et du référé.

LA COUR

Vu l'appel formé par la Sarl Ak Müller France et la société Ak Müller Düsseldorf contre ce Jugement ;

Vu les dernières conclusions du 19 septembre 2007 par lesquelles les appelantes, AK Müller France et Düsseldorf, poursuivant l'infirmation du jugement, demandent à la cour de :

-juger l'action irrecevable en raison de son caractère tardif

à titre subsidiaire,

-juger la société Serap non fondée en sa demande de dommages et intérêts

-juger que la société Serap doit restituer les électrovannes objets des contrats résiliés pour prétendre à la restitution du prix

-juger la société Serap entièrement responsable de son préjudice

- et condamner dans tous les cas, la société Serap à leur payer une indemnité de procédure de 15 000 euros à chacune ;

Vu les dernières conclusions du 14 septembre 2007 par lesquelles la société Serap, intimée, formant appel incident sur le montant de la réparation, demande à la cour de :

-rejeter les conclusions en réponse et récapitulatives des appelantes, du 5 septembre 2007, comme tardives ;

-les débouter de leur appel

-porter à la somme de 138 259 euros le montant de la condamnation prononcée solidairement contre les sociétés Ak Müller France et Ak Müller Dusseldorf et à la somme de 177 121 euros celle prononcée contre AK Müller Düsseldorf, à titre de dommages et intérêts

-condamner in solidum les appelantes à lui payer une indemnité de procédure de 10 000 euros ;

Vu l'ordonnance de clôture du 3 octobre 2007 ;

SUR CE,

Sur la demande tendant au rejet des conclusions dites tardives

Attendu que les parties ont été informées le 31 mai 2007 que la clôture de l'instruction interviendrait le 5 septembre, l'affaire étant fixée à l'audience du 9 octobre 2007 ;

Attendu que le 5 septembre, les appelantes ont conclu en invoquant, pour la première fois, l'application de la loi allemande et la Convention de Vienne du 11 avril 1980, relativement au bref délai et à la clause de limitation de garantie qu'elles opposent à la société Serap ;

Attendu que la société Serap, par ses dernières conclusions du 14 septembre, demande le rejet des écritures adverses de dernière heure, du 5 septembre ;

Mais attendu que, d'une part, la cour ne statue que sur les dernières conclusions des appelantes du 19 septembre 2007 ;

Que d'autre part, aucune atteinte n'a été portée aux droits de la défense et au principe du contradictoire dès lors que l'ordonnance de clôture a été reportée au 3 octobre et que la société Serap a été mise en mesure de répliquer et a effectivement répondu aux conclusions qui invoquaient un moyen nouveau ;

Que la demande doit ainsi être écartée ;

Sur la loi applicable au litige

Attendu que les parties ne prétendent pas avoir passé une convention, antérieure à leur différend, sur la détermination du droit régissant leurs rapports ; que les appelantes ne se prévalent pas, concernant la loi applicable, des conditions générales de vente rédigées en allemand au dos de leurs documents commerciaux, initialement invoquées par le vendeur Müller à l'appui de son exception d'incompétence ;

Attendu que tant la société Müller Düsseldorf que la société Müller France invoquent aujourd'hui l'application de la Convention de Vienne ; qu'elles invoquent aussi le Code civil allemand, sans expliciter les raisons de son application ;

Attendu que la Convention de Vienne du 11 avril 1980, instituant un droit uniforme sur les ventes internationales de marchandises, en constitue le droit substantiel français ; qu'à ce titre, elle s'impose au juge français, qui doit en faire application sous réserve de son exclusion, même tacite, selon l'article 6, dès lors que les parties se sont placées sous l'empire d'un droit déterminé ;

Attendu que, devant le juge saisi après expertise, la société Serap a fondé sans équivoque sa demande sur la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du Code civil ; que les vendeurs d'électrovannes n'ont pas mis en cause le droit applicable et ont discuté sans réserve de la garantie des choses vendues, définie par les textes précités ;

Attendu qu'il s'ensuit que les parties ont, en connaissance du caractère international d'une partie des ventes en cause, volontairement placé la solution de leur litige sous le régime du droit interne français de la vente, éludant tacitement l'application la Convention de Vienne en s'abstenant de l'invoquer en première instance ;

Que le droit interne de la garantie des vices cachés est dès lors applicable au litige ;

Sur le vice de la chose vendue

Attendu que la défaillance, objet du litige, ne concerne que les bobines des électrovannes ;

Attendu qu'il résulte de l'historique des difficultés dressé par la société Serap, auquel se réfère les appelantes elles-mêmes, qu'en 1995 le fabricant a modifié l'intérieur de l'électrovanne pour la rendre entièrement étanche, de manière à remédier à un phénomène d'oxydation sur le noyau en inox ; que le problème a persisté en 1996 ; qu'en 1997 le fabricant a modifié la bobine et équipé les électrovannes d'un varistor ; que le client a signalé que les bobines "grillaient "; que le fabricant a mis en cause l'utilisation d'un nettoyeur à haute pression, quoique le produit réponde à la norme IP65, c'est à dire présente une protection contre la pénétration des poussières et contre un jet d'eau venant de toutes les directions ;

Attendu qu'il est établi que, par écrit envoyé en télécopie le 29 janvier 1998 par la société SERAP à son fournisseur, mentionnant en objet "électrovanne de vidange, défaut de qualité", celle-ci l'a informé de la persistance de "problèmes" sur les électrovannes de type DN 40 après quelques mois d'utilisation et ce, malgré les améliorations apportées par le fabricant ; qu'elle a expliqué que 7 bobines avaient "grillés" et indiqué qu'elle lui retournait les pièces pour expertise, afin d'en rechercher les causes et les remèdes ;

Attendu que, par lettre du 11 mars 1999, la société Serap a demandé à son fournisseur la prise en charge des préjudices subis, faute d'avoir apporté une réponse fiable, malgré les évolutions techniques apportées, aux problèmes de qualité qui ont commencé avec l'oxydation du noyau ; que la société AK Müller Düsseldorf lui a répondu par la négative en contestant les défauts de ses produits et en se prévalant de l'expiration de la garantie contractuelle ;

Attendu que l'expert judiciaire relate, dans son rapport du 3 mars 2003, que la société SERAP a constaté début 1997 que les bobines "grillaient", qu'elles ont été retournées par la SERAP jusqu'au début juillet 1999, époque à partir de laquelle elle a changé de fournisseur ; que les incidents ont cessé ; qu'à partir de mars 1999, les électrovannes Müller fournies présentaient un degré de protection IP68 (protection contre l'immersion illimitée) ;

Attendu que, dans l'ignorance de la cause de ce phénomène, à l'origine du préjudice qu'elle allègue, la société SERAP a saisi, à l'automne 1999, le juge des référés ; que la mission d'expertise, ordonnée le 29 octobre 1999, porte sur l'examen des bobinages et la détermination des causes de leur "claquage" ;

Attendu que l'expert conclut que les électrovannes fournies par la maison mère ou sa filiale à partir de l'année 1997 et principalement à partir de 1999 ont présenté des dysfonctionnements dont le nombre est nettement supérieur au taux admissible ;

Que la société Serap indique que le taux admissible est de 5% maximum, y compris pour les électrovannes en fin de vie ;

Attendu que l'expert a eu recours, pour ses opérations, au laboratoire d'essai IC 2000 ;

Attendu que le laboratoire a constaté, sur les électrovannes défectueuses examinées, soit des dégradations par échauffement, soit une mise à la masse de la bobine ; qu'il conclut ses travaux en indiquant que :

" la cause la plus probable semble être une dégradation des caractéristiques d'isolement du fil émaillé constituant la bobine.

Dans certains cas ce désordres se manifeste par la mise en court circuit d'une spire et corrélativement un échauffement important, que ne détectent pas les protections électriques, qui, de ce fait, peut durer.

Dans d'autres cas, c'est un défaut d'isolement entre une spire et la masse qui se produira. Ce dernier défaut peut, en principe être détecté par une protection différentielle.

L'altération de l'isolation pourrait provenir des surtensions transitoires générées par les manoeuvres répétées de l'électrovanne."

Attendu que, dans son rapport du 3 mars 2003, l'expert, reprenant à son compte l'hypothèse émise par le laboratoire et se fondant sur ses constatations et les essais réalisés, énonce, en la présentant comme certaine (§ 4.15), que la cause des désordres réside dans un manque de tenue du bobinage à la surtension provoquée par la manoeuvre d'ouverture de l'électrovanne (§ 4.4, 4.9, 4.11, 4.15), en précisant que la surtension est inhérente à son fonctionnement ; qu'il ajoute qu'il s'agit d'un défaut sériel ;

Qu'il a expressément écarté la thèse émise par le fabricant suivant laquelle les désordres seraient la conséquence de l'agressivité chimique de l'air ambiant ; qu'il a également exclu, en raison du taux de défaillance des électrovannes, que le claquage des bobines provienne d'une surtension du réseau électrique de l'utilisateur ; qu'aujourd"hui, et alors que les désordres ont continué malgré le renforcement de l'indice de protection, le vendeur n'impute plus la panne au nettoyage à haute pression ;

Attendu que, malgré l'avis de l'expert sur l'origine des désordres tel qu'énoncé ci-dessus, les appelantes affirment que l'expertise n'a pas pu déterminer les causes des "claquages" ; qu'elles se fondent pour ce faire, sur la conclusion finale du rapport aux termes duquel " Ces dysfonctionnements, qui sont vraisemblablement dus à une modification que nous n'avons pu identifier...";

Attendu qu'en réalité, les appelantes dénaturent à dessein les conclusions d'expertise ; que la conclusion dont elles se prévalent répond à un point spécifique de la mission de l'expert, auquel le juge des référés a demandé, en liaison avec la recherche des causes de "dire si les incidents peuvent être dus à une évolution du moulage des bobines par AK Müller entre le début des années 1990 et l'année 1998, au cours de laquelle la société SERAP a constaté un taux de claquage important" ;

Qu'en effet, l'ordonnance de référé ordonnant l'expertise expose que la société Serap disait que les "claquages" pourraient être en relation avec les modifications apportées par la société Müller pour renforcer l'étanchéité des bobines ;

Attendu qu'il est indifférent de savoir quelle est la modification des bobines apportée par le fabricant qui a eu pour effet, à partir de 1997, en raison d'un défaut d'isolement, d'entraîner le "claquage" à la surtension provoquée par l'ouverture de l'électrovanne ;

Attendu que les critiques formulées contre le rapport d'expertise ne remettent pas utilement en cause l'analyse du laboratoire d'essai et de l'expert judiciaire sur l'origine des dysfonctionnements ; que cette analyse est d'ailleurs confortée par les notes techniques établies par le cabinet Conseil Puyo & associés (CPA) produites par la société Serap qu'il a assistée ;

Attendu que le défaut des bobines des électrovannes constitue un vice interne à la chose vendue (rapport § 4.17) ;

Que ce vice n'a pu être révélé qu'après des essais techniques en laboratoire ; qu'il était indécelable pour la société Serap qui n'est pas spécialisée dans les électrovannes ; qu'elle n'en connaissait que sa manifestation, résidant dans le "claquage" des bobines dans des proportions anormales ; qu'elle n'a pu donc se convaincre elle-même de l'existence du vice au moment des achats réitérés des électrovannes ;

Attendu que ce vice rend l'électrovanne, d'une durée de vie d'une quinzaine d'années, impropre à son usage, dès lors qu'elle doit être changée si la panne, anormalement fréquente, survient ;

Sur la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'action en garantie

Attendu que la société Serap a sollicité une mesure d'expertise, en 1999, en raison de ce que, à cette époque, le claquage des bobines, qui ne constitue que la manifestation du dysfonctionnement, demeurait techniquement inexpliqué ;

Que la réalité même du défaut des électrovannes était à cette date discutée, le phénomène pouvant résulter de toutes causes et, en particulier, des conditions de leur utilisation comme la surtension des réseaux électriques ou encore du nettoyage à haute pression des installations ;

Attendu que ce n'est qu'à la date du dépôt du rapport d'expertise, en mars 2003, que l'acheteur a eu connaissance du vice de la chose vendue, dans son existence et sa cause technique ;

Attendu qu'en ayant assigné son vendeur, en juillet 2003, la société Serap a satisfait aux exigences de l'article 1648 du Code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, le point de départ du bref délai accordé à l'acheteur pour exercer l'action prévue par ce texte commençant à courir le jour où il a eu une connaissance effective du vice ;

Que la fin de non-recevoir prise de ce que l'action a été exercée tardivement doit en conséquence être écartée, comme l'ont décidé à bon droit les premiers juges ;

Sur la fin de non-recevoir tirée de la clause limitative de responsabilité

Attendu qu'à la suite d'une réunion tenue le 10 juillet 1995 entre les représentants de la société Serap et la société Müller France, le vendeur a informé l'acheteur, par lettre du 17 juillet 1995, de ce que la garantie consentie par lui sur le matériel vendu avait une durée de 6 mois ;

Attendu que, par lettre du 26 juillet 1995, la société Serap a demandé à la société Müller France de lui accorder une garantie de 18 mois sur les électrovannes qu'elles lui achetaient pour les intégrer à ses refroidisseurs, dans la mesure où la garantie de 6 mois proposée par le vendeur expirait avant la mise en service des refroidisseurs ;

Attendu que, le 24 novembre 1995, la société Serap a soumis à son vendeur un projet de "convention de réparation" en ce sens ; que, le 13 décembre 1995, la société Müller France a répondu exactement en ces termes "objet : convention de réparation, nous venons d'avoir confirmation d'Allemagne, notre garantie est de 6 mois. Pas de commentaire sur la teneur de votre convention."

Attendu qu'il s'ensuit qu'en continuant à se fournir auprès de la société Müller, la société Serap a adhéré à une limitation à 6 mois de la garantie contractuelle imposée par le vendeur qui l'en a informée sans ambiguïté, et ce

indépendamment des conditions générales de vente figurant en allemand sur les documents commerciaux que la société Serap dit inopposables, en se prévalant de la chose jugée par l'arrêt rendu sur contredit de compétence ;

Attendu que les sociétés Müller invoquent cette clause limitative de responsabilité dans le temps, pour conclure à l'irrecevabilité des demandes de la société Serap formées plus de 6 mois après la fourniture des marchandises défectueuses ;

Attendu que, cependant, l'expiration de la durée de la garantie conventionnelle ne fait pas obstacle à la mise en jeu de la garantie légale des vices cachés ;

Qu'en effet, en sa qualité de vendeur professionnel d'électrovannes, les deux sociétés Müller étaient présumées connaître les vices de la chose de manière irréfragable ;

Que la circonstance que la société Serap ait passé les contrats successifs de vente pour l'exercice de son activité industrielle n'est pas susceptible de faire échapper le vendeur à ses obligations légales, dès lors qu'elle ne connaissait pas le vice des électrovannes à leur acquisition et alors, de surcroît, que, contrairement à ce qui est allégué, en tant que fabricant de machines intégrant des électrovannes, elle n'en était pas une professionnelle ;

Attendu que les deux sociétés Müller ne peuvent donc s'exonérer contractuellement de la garantie légale ; que c'est dès lors à juste titre que le tribunal de commerce a écarté la clause de limitation de garantie et, partant, la fin de non-recevoir ;

Sur la réparation

Attendu que l'acheteur, sur le fondement de la garantie des vices cachés n'exerce contre son vendeur qu'une action en réparation, comme il en a le choix ;

Attendu que l'expert a évalué les frais de remise en état exposés par la société Serap et le préjudice commercial subi par celle-ci à raison du défaut des électrovannes Müller, qui équipaient les refroidisseurs vendus à ses clients notamment en Angleterre et au Japon, à 138 259 € pour ce qui concerne la marchandise vendue par le distributeur français et à 177 121 € pour celle fournie directement par le constructeur allemand ;

Attendu que la société Serap demande paiement de ces montants à titre de dommages-intérêts ;

Attendu que les premiers juges ont divisé par deux les évaluations du préjudice commercial proposées par l'expert, "en raison de la poursuite par la société Serap de ses relations commerciales, au delà des premières constations, qui ne pouvaient qu'aggraver son préjudice"

Attendu que, cependant, le fait pour la société Serap, qui ignorait la cause des pannes, d'avoir poursuivi jusqu'en 1999, malgré les difficultés, ses relations d'affaires avec son fournisseur en électrovannes depuis de nombreuses années, ne constitue ni une faute de sa part, ni un motif d'exonération partielle de garantie pour le vendeur de la chose défectueuse ;

Attendu que, néanmoins, la réparation demandée est, pour partie, sans rapport de causalité certaine avec le vice caché ci-dessus analysé, qui a entraîné des "claquages" dans une proportion excessive à partir de 1997 et qui tient au bobinage ;

Qu'en effet, l'expert ne pouvait pas prendre en compte, pour l'évaluation du dommage, l'ensemble des retours pour service après vente auxquels a procédé l'acheteur depuis l'année 1996, sans que l'on en connaisse les motifs, tout en concluant, sur la base des explications fournies par la société Serap, que le défaut ne s'était manifesté qu'à partir de 1997 ;

Attendu que le vice des électrovannes et, partant, leur défaut de fiabilité rendait légitime leur remplacement systématique par la société Serap à titre préventif ; que les vendeurs ne sont pas fondés à soutenir que le préjudice de l'acheteur, qui en avait équipé les machines commercialisées, n'était qu'éventuel ;

Attendu qu'eu égard au tableau de chiffrage détaillé et circonstancié du préjudice, poste par poste, produit par la société Serap, et à l'avis exprimé par l'expert dans le tableau qu'il a dressé des préjudices retenus, non utilement contredit par les appelantes, le dommage découlant du vice caché au cours des années 1997 à 1999, comprenant les frais de déplacement auprès des clients, les frais d'échange curatifs et préventifs, les coûts des kits de remplacement, les baisses de marge et le manque à gagner ainsi que l'atteinte à l'image de marque, sera réparé par une indemnité de 100 000 € à raison des ventes passées avec la filiale française et de 150 000 € à raison des ventes passées avec la maison mère ;

Que le jugement sera dès lors réformé sur le montant de la réparation ;

Attendu que, par application de l'article 1153-1 du Code civil, les indemnité produiront intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 11 juillet 2003 ;

Attendu que la société allemande, en tant que fabricant de la marchandise défectueuse, ne conteste pas être tenue in solidum avec son revendeur envers le sous-acquéreur Serap ;

Attendu que les appelantes, qui n'obtiennent pas gain de cause, supporteront tous les dépens d'appel ainsi qu'une indemnité compensant les frais de procédure de l'intimée, en sus de celle allouée en première instance, confirmée ;

PAR CES MOTIFS,

statuant publiquement et contradictoirement,

Rejette la demande tendant à ce que soit écartées les conclusions des appelantes du 5 septembre 2007 ;

Confirme le jugement déféré, hormis sur le montant de réparation,

Réformant de ce seul chef,

Condamne in solidum les sociétés Ak Müller France et Ak Müller Düsseldorf à payer à la société Serap la somme de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts à raison des électrovannes achetées en France, avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2003 ;

Condamne la Société Ak Müller Düsseldorf à lui payer la somme de 150 000 euros, à titre de dommages-intérêts à raison des électrovannes achetées en Allemagne, avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2003,

Y ajoutant,

Condamne in solidum les sociétés Ak Müller France et Ak Müller Düsseldorf à payer à la société Serap la somme de 8000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Les condamne in solidum aux dépens, recouvrés dans les conditions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

D. BOIVINEAUI. FERRARI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Numéro d'arrêt : 06/02332
Date de la décision : 18/12/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-12-18;06.02332 ?
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