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04/09/2007 | FRANCE | N°06/1925

France | France, Cour d'appel d'Angers, 04 septembre 2007, 06/1925


COUR D'APPEL
D'ANGERS
1ère CHAMBRE A
RENVOI DE CASSATION FV / IM
ARRET N 279

AFFAIRE N : 06 / 01925

Jugement du 25 Mars 2002
Tribunal de Grande Instance de NIORT
no d'inscription au RG de première instance 01 / 00482
Arrêt C. A. POITIERS du 28 Septembre 2004
Arrêt C. CASS du 5 juillet 2006

ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Michel Y...


...-85150 ST GEORGES DE POINTINDOUX

(bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale numéro 07 / 000392 du 23 / 04 / 2007 accordée par le bureau d'aide j

uridictionnelle d'ANGERS)

représenté par la SCP DUFOURGBURG-GUILLOT, avoués à la Cour
assisté de Me MAIGNAN substituant M...

COUR D'APPEL
D'ANGERS
1ère CHAMBRE A
RENVOI DE CASSATION FV / IM
ARRET N 279

AFFAIRE N : 06 / 01925

Jugement du 25 Mars 2002
Tribunal de Grande Instance de NIORT
no d'inscription au RG de première instance 01 / 00482
Arrêt C. A. POITIERS du 28 Septembre 2004
Arrêt C. CASS du 5 juillet 2006

ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Michel Y...

...-85150 ST GEORGES DE POINTINDOUX

(bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale numéro 07 / 000392 du 23 / 04 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ANGERS)

représenté par la SCP DUFOURGBURG-GUILLOT, avoués à la Cour
assisté de Me MAIGNAN substituant Me Ludovic GAUVIN, avocats au barreau d'ANGERS,

INTIMEE :

LA CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES (CRAMA) CENTRE ATLANTIQUE exerçant sous l'enseigne " GROUPAMA CENTRE ATLANTIQUE "

...-B. P. 8527-79044 NIORT CEDEX 9

représentée par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour
assistée de Me Philippe HUVEY, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 Mai 2007 à 13 H 45, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame CHAUVEL, conseiller, désignée par ordonnance du Premier Président en date du 22 décembre 2006 pour exercer les fonctions de président, Madame BLOCK, conseiller, et Madame VERDUN, conseiller ayant été entendu en son rapport,

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame LEVEUF

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 04 septembre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

Signé par Madame CHAUVEL, président, et par Madame LEVEUF, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Michel Y..., toiletteur et éleveur de chats, a souscrit auprès de la CRAMA de Centre Atlantique, exerçant sous l'enseigne GROUPAMA, une police d'assurance « Capital Santé » comprenant outre l'assurance obligatoire des accidents et maladies professionnelles des exploitants agricole (A. A. Ex. A.), des garanties complémentaires, notamment au titre de l'invalidité consécutive à un accident. Ce contrat a pris effet le 7 janvier 1997.

Le 27 novembre suivant, Michel Y... a été victime d'une chute accidentelle sur son lieu de travail, dont a résulté une rupture du tendon distal du biceps droit. Cette blessure n'ayant pas été réparée chirurgicalement, a entraîné une ITT de plusieurs mois, prise en charge par le GROUPAMA jusqu'au 20 juillet 1998, date de la consolidation.

Estimant que les séquelles de cet accident lui interdisaient de reprendre son activité professionnelle, Michel Y... a demandé à l'assureur la mise en œ uvre de la garantie inaptitude totale au travail agricole et de la garantie complémentaire invalidité.

Après deux expertises amiables concluant à la persistance d'une IPP de 6 à 8 %, le GROUPAMA a refusé de faire jouer ces garanties au motif que les conditions de leur mise en œ uvre n'étaient pas remplies.

Michel Y... a fait assigner son assureur en paiement des prestations prévues au titre des garanties « inaptitude totale » et « invalidité » devant le tribunal de grande instance de NIORT. Après une expertise judiciaire et la radiation de l'affaire, ce tribunal a débouté l'assuré de l'intégralité de ses demandes au motif que ce dernier avait repris son activité de toiletteur éleveur par le biais d'une SARL dont il était le gérant unique et l'unique salarié, qu'il ne justifiait ni d'une inaptitude totale à l'exercice de sa profession agricole au sens de la législation sur les accidents de travail en matière agricole, ni d'une invalidité excédant la franchise de 33 % contractuellement prévue par l'assurance complémentaire, et qu'il ne formait aucune demande au titre de l'indemnisation d'une incapacité partielle dans le cadre de l'assurance obligatoire.

Sur l'appel de Michel Y..., la cour d'appel de POITIERS a, par un arrêt en date du 28 septembre 2004, confirmé cette décision par motifs adoptés, en ajoutant qu'alors que la société avait commencé son activité en août 1998, Michel Y... n'établissait pas avoir fait la moindre démarche pour engager un salarié. Elle a déduit de ces mêmes motifs que la demande subsidiaire en paiement de la pension d'invalidité pour incapacité partielle prévue par le régime de l'A. A. Ex. A. n'était pas fondée.

Par un arrêt du 5 juillet 2006, la Cour de Cassation a cassé cette décision en toutes ses dispositions, au visa de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, en relevant que les motifs retenus par la cour d'appel étaient impropres à fonder le rejet de cette dernière demande.

Michel Y... a saisi la cour d'appel d'ANGERS, désignée comme juridiction de renvoi, par déclaration du 6 septembre 2006.

Les parties ont constitué avoué et conclu. La clôture de l'instruction a été prononcée le 19 avril 2007.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par des conclusions n° 2 déposées le 7 mars 2007, Michel Y... conteste les motifs qui ont conduit le tribunal à considérer qu'il n'était pas inapte à reprendre son activité professionnelle initiale en s'appuyant notamment sur une décision d'inaptitude en catégorie B de la COTOREP de Vendée du 18 mars 1999, reconduite en 2004 pour 5 ans, et sur la décision de prise en charge d'un emprunt réalisé par un autre assureur au titre de la garantie invalidité. Il sollicite, à titre principal, le versement de l'indemnité forfaitaire de changement de profession et de l'indemnité forfaitaire annuelle due au titre de la garantie invalidité soit la somme de 20 331, 95 euros, et très subsidiairement, la mise en œ uvre de la garantie A. A. Ex. A. en cas d'incapacité partielle, qui prévoit le versement d'une pension égale aux 3 / 5ème de la pension due en cas d'inaptitude totale.

Michel Y... demande, en outre, une somme de 4 573, 47 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, ainsi qu'une indemnité de 1 500 euros par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par des conclusions déposées le 21 mars 2007, la CRAMA Centre Atlantique exerçant sous l'enseigne GROUPAMA Centre Atlantique soutient que, nonobstant les mentions du dispositif de l'arrêt de cassation, la portée de la cassation ne pourrait atteindre que la demande subsidiaire relative à l'incapacité partielle relevant de l'assurance obligatoire, dans les limites du moyen dont la Cour de Cassation était saisie et du motif de cassation qui ne vise que la demande présentée au titre de l'incapacité partielle. Elle conclut donc à l'irrecevabilité des demandes ayant trait à l'inaptitude totale, à l'invalidité ou au changement de profession.

Sur le fond, l'assureur demande la confirmation du jugement déféré quant à l'absence d'inaptitude totale ou d'obligation de changer de profession. En réponse à la demande subsidiaire de mise en œ uvre de la garantie légale en cas d'inaptitude partielle, il rappelle le caractère restrictif du domaine d'application de son contrat, qui n'est pas une assurance accident corporel mais un contrat de prévoyance complémentaire à l'A. A. Ex. A, régime qui ne garantit pas l'incapacité permanente partielle mais l'inaptitude partielle résultant au moins pour moitié des séquelles d'un accident pris en charge, et entraînant une réduction de capacité au travail exercé des 2 / 3. Elle demande donc subsidiairement la mise en œ uvre d'une expertise socio-économique avec adjonction d'un sapiteur spécialisé dans le régime maladie accidents des exploitants agricoles.

MOTIFS DE LA DECISION

I) Sur la portée contestée de la cassation
Attendu qu'aux termes de l'article 624 du nouveau Code de procédure civile, la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ;

Attendu qu'il ressort des pièces de procédure que Michel Y... n'a invoqué, au soutien de son pourvoi, qu'un moyen unique de cassation, rédigé en ces termes « en rejetant la demande subsidiaire de M. Y... fondée sur son incapacité partielle par des motifs inopérants tirés d'une absence d'incapacité totale à la profession d'éleveur et toiletteur de chats, et par simple affirmation dénuée d'analyse d'aucun des éléments de preuve produits et invoqués par l'exposant au soutien de sa demande, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile » ;

Attendu que ce moyen ne critique que le rejet de la demande subsidiaire de l'assuré, laquelle tendait à la reconnaissance d'une incapacité partielle indemnisable au titre de l'assurance obligatoire des exploitants agricoles ; qu'il dénonce l'inopérance de motifs qui, en démontrant l'absence d'inaptitude totale pour des raisons tirées de la poursuite personnelle de l'activité professionnelle initiale sous une autre forme, ne se prononcent pas sur les conditions de la garantie « incapacité partielle » ;

Qu'un tel moyen, intrinsèquement limité au rejet d'une demande subsidiaire, n'aurait permis de censurer les dispositions se prononçant sur les demandes principales qu'en cas d'indivisibilité ou de lien de dépendance nécessaire ; que les garanties dues en cas d'inaptitude totale ou d'invalidité avec changement de profession sont subordonnées à des conditions différentes et ouvrent droit à des prestations distinctes et autonomes de celle due en cas d'incapacité partielle ; que l'absence d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire entre ces différents chefs de la décision résulte, au demeurant, des motifs de la cassation, fondés sur le constat que les motifs retenus par la cour pour écarter l'inaptitude totale sont « impropres à fonder le rejet de la demande de M. Y... au titre de son incapacité partielle » ;

Qu'il s'ensuit que, nonobstant les mentions du dispositif de l'arrêt de cassation, la censure qu'il emporte est nécessairement limitée au rejet de la demande de prise en charge de l'incapacité partielle et à ses accessoires, dans les limites du moyen base de la cassation ; que Michel Y... est donc irrecevable à remettre en cause, devant la cour de renvoi, le rejet des demandes principales fondées sur la reconnaissance d'une inaptitude totale comme l'affirme justement l'assureur ; que le jugement déféré ne peut donc qu'être confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes ;

II) Sur la demande de prise en charge au titre de la garantie A. A. Ex. A. de l'incapacité partielle

Attendu, d'abord, que Michel Y... ne peut faire utilement grief au tribunal de n'avoir pas appliqué cette garantie d'office, ce pouvoir n'étant qu'une simple faculté et impliquant, au demeurant, une réouverture des débats ;

Que cette demande, nouvellement formée en cause d'appel, se fonde sur l'article 7-2 des conditions générales du contrat « capital santé » souscrit par Michel Y... et implique, outre la reconnaissance de l'origine accidentelle des séquelles, la caractérisation d'une inaptitude réduisant au moins des deux tiers la capacité de l'exploitant à exercer la profession agricole ;

Que l'origine accidentelle des séquelles, consécutives à une chute de Michel Y... sur son lieu de travail alors qu'il toilettait un chat, n'est pas sérieusement contestable ; que l'ITT consécutive à cet accident a été prise en charge au titre de la garantie A. A. Ex. A. ;

Qu'il ressort de l'ensemble des rapports d'expertise médicaux, amiables ou judiciaire, que les séquelles de la rupture du tendon inférieur du biceps droit dont Michel Y... a été victime le 27 novembre 1997, se traduisent essentiellement par des douleurs et une diminution de la force musculaire du bras droit dans les mouvements de supination, c'est-à-dire de rotation de l'avant-bras qui portent la paume vers le haut, geste que le toilettage oblige à accomplir de façon longue et répétée ; que les experts ont unanimement conclu que ce handicap interdisait à Michel Y..., droitier, de reprendre le toilettage à titre professionnel ; que l'expert judiciaire, le Dr C..., a également précisé que ces séquelles avaient réduit la capacité de Michel Y... à pratiquer le toilettage et l'élevage de chats, activités indivisiblement liées ainsi qu'il résulte des lettres ou attestations d'éleveurs ou de vétérinaires communiquées en première instance (pièces de Michel Y... no 27 à 31), dans une proportion de plus des 2 / 3 ;

Que si Michel Y... a tenté, après sa consolidation en juillet 1998, de se reconvertir dans la formation professionnelle, en y étendant son objet social en 2000, tout en poursuivant ses activités d'élevage et de pension féline, il a dû confier le toilettage des animaux à une tierce personne (attestation de Mme Martine D...), puis mettre son entreprise en sommeil dès la fin de l'année 2000, jusqu'à sa liquidation judiciaire, prononcée le 15 mai 2002 (lettre du contrôleur des impôts des Sables d'Olonne du 11 juin 2003) ; qu'il n'est nullement établi qu'il ait pu reprendre, à titre professionnel, une activité régulière et lucrative en rapport avec celle qu'il exerçait avant l'accident ;

Que ces éléments suffisent à démontrer, sans qu'il y ait lieu de recourir à une nouvelle expertise, que Michel Y... remplissait, dès le 20 juillet 1998, date de sa consolidation, les conditions de mise en œ uvre de la garantie contre l'inaptitude partielle à l'exercice de la profession agricole, les séquelles de son accident réduisant aux 2 / 3 sa capacité à reprendre son activité initiale, qui avait déterminé son assujettissement au régime de l'A. A. Ex. A. ; qu'il s'ensuit que le GROUPAMA est redevable de la pension stipulée à l'article 7-6 § 3 des conditions générales de son contrat, laquelle est égale aux 3 / 5ème du montant de la pension pour inaptitude totale, elle-même égale au quart du salaire annuel minimum fixé par arrêté pris chaque année, outre la revalorisation contractuellement prévue ;

Que la demande de Michel Y... sera donc accueillie dans cette limite ;

Attendu qu'il n'apparaît pas que le GROUPAMA, qui ne succombe que partiellement, ait fait preuve d'une résistance abusive ou injustifiée en déclinant sa garantie au titre d'une inaptitude totale non démontrée ;

Qu'en revanche, il n'existe aucune considération d'équité qui permette de le dispenser de contribuer aux frais irrépétibles que son adversaire a dû exposer pour voir reconnaître son droit à une pension d'inaptitude partielle ; qu'il convient, en conséquence, d'accueillir la demande formée par ce dernier sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

STATUANT sur renvoi après cassation, publiquement et contradictoirement,

Vu l'article 624 du nouveau Code de procédure civile,

DECLARE irrecevables les demandes principales fondées sur les garanties de l'inaptitude totale à l'exercice de la profession agricole et de l'invalidité avec changement de profession ;

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions non contraires à celles du présent arrêt ;

Le REFORMANT,

CONDAMNE la CRAMA Centre Atlantique, exerçant sous l'enseigne GROUPAMA Centre Atlantique, à servir à Michel Y... la pension en cas d'inaptitude partielle prévue aux articles 7-2, § 3 et 7-6 des conditions générales du contrat « Capital santé », et égale aux 3 / 5ème du montant de la pension pour inaptitude totale, elle-même égale au quart du salaire annuel minimum fixé par arrêté pris chaque année, outre la revalorisation contractuellement prévue ;

DEBOUTE Michel Y... de sa demande en dommages-intérêts pour résistance abusive ;

CONDAMNE la CRAMA Centre Atlantique à payer à Michel Y... la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

La CONDAMNE aux entiers dépens d'appel, qui comprendront ceux de l'arrêt annulé, et seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

C. LEVEUF S. CHAUVEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Numéro d'arrêt : 06/1925
Date de la décision : 04/09/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-09-04;06.1925 ?
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