COUR D'APPEL D'ANGERS CHAMBRE COMMERCIALE IF/IL ARRET N : 276 AFFAIRE N : 05/02383 Jugement du 20 Septembre 2005 Tribunal de Grande Instance du MANS no d'inscription au RG de première instance 05/02085 ARRET DU 19 SEPTEMBRE 2006
APPELANTS : Monsieur André X... né le 03 Septembre 1954 à PARIGNE L'EVEQUE (72) ... 72200 LA FLECHE Madame Jacqueline Y... épouse X... née le 21 Juillet 1953 à CHALLES (72) ... 72200 LA FLECHE représentés par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour assistés de Maître Jean-Luc VIRFOLET, avocat au barreau du MANS INTIMES : Monsieur Jean Z... ... 06600 ANTIBES Madame Guylène A... épouse Z... ... 06600 ANTIBES représentés par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour assistés de Maître Michel MEMIN, avocat au barreau du MANS COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Juin 2006 à 14 H 15, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame FERRARI, Président, qui a été préalablement entendu en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame FERRARI, Président de chambre
Madame LOURMET, Conseiller
Monsieur FAU, Conseiller Greffier lors des débats : Monsieur BOIVINEAU. ARRET :
contradictoire
Prononcé publiquement le 19 septembre 2006 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du Nouveau Code de procédure civile ;
Signé par Madame FERRARI, Président, et par Monsieur BOIVINEAU, Greffier.
Les époux X... exploitent un fonds de commerce de librairie-papeterie-presse à La Flèche, dans des locaux commerciaux qui leur sont donnés à bail par les époux Z...
Se plaignant de l'état de l'immeuble et du chauffage, ils ont obtenu en référé, le 7 janvier 2005, la désignation de l'expert B... pour examiner les désordres allégués.
Après dépôt du rapport, ils ont fait assigner le 18 mars 2005 leur bailleur en référé pour être autorisés à faire effectuer les travaux urgents d'électricité et chauffage, obtenir une provision et la condamnation du bailleur à l'exécution de travaux de consolidation du bâti.
Par ordonnance du 15 avril 2005 le juge des référés du tribunal de grande instance du Mans a renvoyé l'affaire devant la formation de jugement, statuant au fond.
Le tribunal, par jugement du 20 septembre2005, a : - dit que les travaux de consolidation du bâti effectués par le bailleur présentaient un caractère satisfactoire - débouté les époux X..., preneur, de leur demandes en réparation de l'installation électrique, remplacement des chaudières et réfection de la toiture - débouté le preneur de sa demande en réduction du loyer - et a condamné les époux X... aux dépens.
LA COUR
Vu l'appel formé contre ce jugement par les époux X... ;
Vu les dernières conclusions du 2 mai 2006, par lesquelles les
appelants demandent à la cour d'infirmer le jugement et condamner le bailleur à : - effectuer les travaux de mise en conformité de l'installation électrique et du système de chauffage et à leur payer la somme de 2764,10ç au titre des travaux urgents dont ils ont faits l'avance, - effectuer, au besoin après nouvelle expertise aux fins de déterminer la nature des travaux déjà réalisés, les travaux nécessaires à la reprise du bâti et à la réfection des toitures - réduire le loyer annuel de 250ç jusqu'à l'exécution des travaux - et à leur payer deux indemnités de procédure et les dépens ;
Vu les dernières conclusions du 5 mai 2006, par lesquelles les époux Z..., intimés, demandent à la cour de confirmer le jugement en son principe, mais, formant appel incident, de condamner le locataire à leur payer deux indemnités de procédure ;
SUR CE,
Attendu que les époux X... sont entrés dans les lieux loués, pour partie à usage commercial et pour partie à usage d'habitation, après avoir acquis de la société le Temps de vivre, le 27 juillet 2004, le fonds de commerce qui y est exploité et obtenu la cession du droit au bail en cours, antérieurement consenti par les époux C... - Laplacette à la société Magg le 16 novembre 1999 ;
Attendu que ce bail stipule que le locataire ne pourra exiger du bailleur, pendant la durée du bail, aucune mise en état ni aucune réparation de quelque nature ou de quelque importance que ce soit, sauf les grosses réparations telles que prévues à l'article 606 du Code civil et le cas échéant les travaux de ravalement ;
Attendu que c'est sur le fondement de cette clause que le tribunal, déniant aux travaux réclamés le caractère de grosses réparations selon l'énumération de l'article 606, a débouté les preneurs de leurs demandes ;
Attendu que les preneurs contestent cette solution en faisant valoir
que leur action est fondée, en raison de l'état des lieux, sur le manquement des bailleurs à leur obligation de délivrance prévue par l'article 1719 du Code civil, au moment de la prise d'effet du bail de la société Magg le 1er décembre 1999 ;
Attendu que c'est effectivement au 1er décembre 1999 - date contestée par le bailleur- qu'il convient de se placer pour apprécier l'exécution de l'obligation de délivrance ; qu'en effet, le nouveau bail renouvelé consenti à la société Magg a pris effet à cette date, après l'expiration du bail précédent du fait du congé que le bailleur a fait délivrer à la locataire le 28 mai 1999, avec une offre de renouvellement ;
Attendu que l'expert B... relève dans son rapport du 23 mai 2005 que :
- la vétusté du bâtiment, très ancien, non entretenu depuis quelques décennies provoquent des infiltrations en toiture, un risque d'effondrement du mur de façade et un pourrissement des poutres, interdisant l'utilisation de locaux, notamment des réserves, et diminuant de ce fait la surface utilisable,
- l'installation de chauffage n'est pas conforme en l'absence de ventilation du local, les chaudières sont hors d'usage et ont dépassé largement la durée admise de fonctionnement, d'une quinzaine d'années ; elles présentent un caractère de dangerosité extrême en raison d'un risque d'incendie et d'explosion et ne remplissent pas leur fonction de production d'eau chaude et de chaleur ;
- l'installation électrique est insuffisante en nombre d'appareils, vétuste, obsolète, hors normes et dangereuse ;
Attendu que, comme l'affirment les époux X..., il se déduit de la nature des désordres relevés par l'expert et de la description qu'il en donne que ceux-ci existaient déjà à la prise d'effet du bail le 1er décembre 1999 ;
Attendu que le bail en cause prévoit cependant que le locataire "prendra le bien loué dans l'état où il se trouvera le jour de l'entrée en jouissance et de l'habiter par lui-même sans pouvoir changer la disposition. A défaut d'état des lieux, il sera réputé avoir reçu les locaux en parfait état" ; que cette clause, valable, est dérogatoire à la règle de l'article 1720 du Code civil suivant laquelle le bailleur est obligé de délivrer la chose louée en bon état de réparations de toute espèce ; qu'il s'ensuit que le locataire, à la prise d'effet du bail le 1er décembre 1999, a accepté les lieux dans l'état dans lequel ils se trouvaient ; qu'il ne peut plus, comme les cessionnaires successifs du bail, se plaindre d'un manquement du bailleur à son obligation de délivrance ;
Attendu qu'en conséquence, les époux X... ne peuvent pas exiger du bailleur l'exécution des réparations qui s'imposaient alors en 1999 ; Attendu que les époux X... invoquent aussi les dispositions de l'article 1719 du Code civil, suivant lesquelles le bailleur doit entretenir la chose louée en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ;
Mais attendu qu'en raison de la clause déchargeant le bailleur de toute obligation d'entretien hormis les grosses réparations, limitativement visées à l'article 606 du Code civil, les époux X... ne peuvent obtenir la prise en charge des travaux de mise en sécurité et mise en conformité de l'installation électrique, de remplacement des chaudières et de vérification et reprises des différents bardages en couverture pour en assurer l'étanchéité, lesquels travaux, visés par l'expert qui n'envisage pas une réfection totale de la couverture, n'entrent pas dans l'énumération des grosses réparations ; que, de surcroît, le bail prévoit expressément que le preneur doit entretenir à ses frais tous équipements spécifiques tels les
installations électriques conformément aux normes en vigueur ; que la demande, en ce qu'elle est fondée sur le texte susvisé, ne peut donc pas aboutir ;
Attendu que le preneur invoque aussi à l'appui de sa demande les dispositions de l'article 1755 et soutient qu'en vertu de ce texte les travaux nécessités par la vétusté de l'immeuble et des installations doivent incomber aux bailleurs ; que cependant, même causés par la vétusté, les travaux demandés n'entrent pas dans la catégorie des grosses réparations énumérées à l'article 606 du Code civil, qui sont seules à la charge du bailleur aux termes du bail ;
Attendu qu'enfin, en ce qui concerne le bâti, il est établi que les bailleurs ont fait réaliser les travaux de mise en sécurité des maçonneries préconisés par l'expert dans l'immédiat, notamment la pose d'étais, pour un montant de 3900ç HT ; que le preneur demande que soient réalisés les travaux nécessaires à la reprise du bâti, mais que la nature de ces travaux n'est pas définie ; que les désordres en cause n'intéressent qu'une petite partie de l'immeuble loué édifiée sur le corridor qui permet une sortie sur l'arrière, dont le bailleur envisage la démolition en signalant qu'elle est économiquement irréparable ; que l'expert a indiqué que la reprise ultérieure de la maçonnerie en cause supposait réflexion et analyse des possibilités, en accord avec les services du patrimoine, l'immeuble se situant en zone protégée ;
Attendu qu'en raison de l'indétermination de la demande du preneur quant à la nature et l'ampleur des travaux dont l'urgence n'est pas démontrée, et dès lors que la mise en sécurité a été accomplie, la demande sera écartée ;
Attendu que, compte tenu de ce que, sauf la maçonnerie, tous les travaux réclamés incombent au preneur, le trouble de jouissance
allégué ne peut pas être imputé au bailleur ; que la demande en réduction de loyers présentée par les époux X... sera écartée ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu en la cause à l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que les appelants, qui n'obtiennent pas gain de cause, supporteront les dépens ;
PAR CES MOTIFS,
statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Rejette toute autre demande ;
Condamne les époux X... aux dépens d'appel, recouvrés dans les conditions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER,D. BOIVINEAU
LE PRESIDENT, I.FERRARI