La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/05/2001 | FRANCE | N°2000/00744

France | France, Cour d'appel d'Angers, 21 mai 2001, 2000/00744


COUR D'APPEL D'ANGERS CHAMBRE COMMERCIALE YM/CG ARRET N AFFAIRE N :

00/00744 AFFAIRE : X... C/ CAISSE DE CREDIT MUTUEL D'ANJOU, CAISSE DE CREDIT MUTUEL Jugement du T.C. ANGERS du 16 Février 2000

ARRÊT RENDU LE 21 Mai 2001

APPELANT : Monsieur Alphonse X... né le 16 Septembre 1946 à BEAUPREAU (49600) 6 rue des Charbonniers 17290 VIRSON représenté par Me DELTOMBE, avoué à la Cour assisté de Me DESSENS, avocat au barreau de LA ROCHELLE INTIMEES : CAISSE DE CREDIT MUTUEL D'ANJOU 23 rue Maréchal Foch 49600 BEAUPREAU CAISSE DE CREDIT MUTUEL 23 rue Maréchal Foch 49600

BEAUPREAU représentées par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour assist...

COUR D'APPEL D'ANGERS CHAMBRE COMMERCIALE YM/CG ARRET N AFFAIRE N :

00/00744 AFFAIRE : X... C/ CAISSE DE CREDIT MUTUEL D'ANJOU, CAISSE DE CREDIT MUTUEL Jugement du T.C. ANGERS du 16 Février 2000

ARRÊT RENDU LE 21 Mai 2001

APPELANT : Monsieur Alphonse X... né le 16 Septembre 1946 à BEAUPREAU (49600) 6 rue des Charbonniers 17290 VIRSON représenté par Me DELTOMBE, avoué à la Cour assisté de Me DESSENS, avocat au barreau de LA ROCHELLE INTIMEES : CAISSE DE CREDIT MUTUEL D'ANJOU 23 rue Maréchal Foch 49600 BEAUPREAU CAISSE DE CREDIT MUTUEL 23 rue Maréchal Foch 49600 BEAUPREAU représentées par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour assistées de Me De MASCUREAU, avocat au barreau d'ANGERS COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Monsieur LE GUILLANTON, Président de Chambre, Madame Y... et Monsieur MOCAER, conseillers GREFFIER lors des débats et du prononcé : Madame Z..., agent adminis-tratif assermenté faisant fonction de greffier DEBATS : A l'audience publique du 23 Avril 2001 Prononcé par l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience publique du 21 Mai 2001, date indiquée par le Président à l'issue des débats. ARRET : contradictoire - 2 -

Vu les dernières conclusions de Alphonse X... du 26 / 03 / 2001

Vu les dernières conclusions de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU du 16 / 03 / 2001

Vu l'ordonnance de clôture en date du 26 / 03 / 2001 RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Alphonse X... et son épouse ont contracté 8 emprunts auprès de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU entre 1992 et 1995 pour financer des opérations immobilières et les a remboursés par anticipation le 20 septembre 1998. Alphonse X... conteste le montant des intérêts qui lui ont été facturés par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU à cette occasion et est appelant du jugement qui l'a débouté de sa

demande de remboursement partiel, a débouté la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU de sa demande de dommages et intérêts et l'a condamné à payer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU la somme de 4.500 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Il demande à la Cour de condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU à lui payer la somme de 257.201 francs avec intérêts au taux légal et 30.000 francs à titre de dommages et intérêts.

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU conclut à la confirmation du jugement déféré et demande de condamner Alphonse X... à lui payer la somme de 10.000 francs à titre de dommages et intérêts pour appel abusif.

Chacune des parties forme une demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. MOTIFS Sur la recevabilité de l'action de Alphonse X...

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU soutient qu'en lui payant la somme réclamée de 800 749,17 francs, Alphonse X... a manifesté son accord, ce qui rendrait son action irrecevable.

Mais Alphonse X... avait négocié un autre emprunt et était en conséquence dans l'obligation d'obtenir la mainlevée des hypothèques inscrites par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU. Il a réglé la somme réclamée, mais a fait précéder son règlement d'une lettre recommandée avec AR en date du 09 / 09 / 1998 contestant la réclamation de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU et précisant que " ce règlement ne vaut pas acceptation ". - 3 -

Le règlement opéré par Alphonse X... ne peut donc avoir la valeur d'un accord et son action en remboursement est recevable. Sur la somme due par Alphonse X...

Alphonse X... et son épouse ont fait l'acquisition, du 25 février 1992 au 25 février 1995 de 8 immeubles au moyen de huit prêts

consentis par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU, remboursables sur des durées allant de 10 à 15 ans, à des taux fixes allant de 8,75 % à 11 %.

Ces prêts, conclus sous la forme d'actes authentiques, présentent la particularité de comporter une clause au terme de laquelle le paiement des intérêts était différé de plusieurs années ( 6 pour les premiers, 5 pour les suivants et 3 pour les derniers ) de sorte que pendant ce délai l'emprunteur ne remboursait, par échéances mensuelles, que le capital.

Le cas du remboursement anticipé est prévu par une clause identique selon laquelle " Les intérêts compensateurs non payés s'ajouteront au capital dû ".

L'article11.8 des Conditions générales ajoute que " si le prêt bénéficie d'un barème progressif, l'emprunteur versera des intérêts compensatoires, de façon à ce que le taux de rendement sur la période courue soit égal à celui qu'aurait produit le prêt sur la durée initialement prévue ".

S'agissant de crédits immobiliers, les dispositions du Code de la consommation et notamment l'article R. 312- 2 sont applicables. Ce texte, d'ordre public, dont Alphonse X... demande l'application, est ainsi rédigé :

" L'indemnité éventuellement due par l'emprunteur, prévue à l'article L. 312- 21 en cas de remboursement par anticipation, ne peut excéder la valeur d'un semestre d'intérêt sur le capital remboursé au taux moyen du prêt, sans pouvoir dépasser 3% du capital restant dû avant le remboursement.

Dans le cas où un contrat de prêt est assorti de taux d'intérêts différents selon les périodes de remboursement, l'indemnité prévue à l'alinéa précédent peut-être majorée de la somme permettant d'assurer au prêteur, sur la durée courue depuis l'origine, le taux moyen prévu

lors de l'octroi du prêt ".

Les dispositions contractuelles ne prévoient aucune variation du taux d'intérêt, ce dont les parties conviennent. Le taux intérêt est en conséquence fixe, de sorte que les seules dispositions applicables sont celles du premier alinéa de cet article et non celles du second. Si les échéances sont en effet différentes selon les périodes, ce n'est pas parce que le taux varie, mais seulement parce que les parties ont convenu de différer le paiement des intérêts dus pour les premières années. - 4 -

Les contrats ne prévoyaient pas, en cas de remboursement anticipé, le paiement d'une indemnité, mais seulement des intérêts. La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU a effectivement droit aux intérêts, non aux intérêts compensatoires prévus par l'alinéa 2 de l'article R 312-2 précité, mais à ceux, contractuellement prévus, dont le paiement a été différé, c'est à dire à ceux normalement dus à chaque échéance mensuelle et dont les parties ont retardé l'exigibilité et qu'il convient donc de calculer. Aucune disposition contractuelle ne prévoit que ces intérêts porteront eux-mêmes intérêts. Or, à défaut de convention spéciale, les intérêts ne peuvent produire intérêts, en vertu des dispositions de l'article 1154 du Code civil.

Les dispositions particulières ci-dessus rappelées indiquent que les intérêts compensateurs s'ajouteront au capital, mais le contrat ne permet pas de déterminer ce que sont ces intérêts compensateurs. L'article R. 312-2 ci-dessus rappelé, auquel l'article 11.8 du contrat fait tacitement référence, prévoit en son alinéa 2 le paiement d'intérêts compensatoires en cas de remboursement anticipé d'un prêt à taux progressif.

Un tel contrat d'adhésion doit s'interpréter en faveur de celui qui a contracté l'obligation (article L. 133- 2 alinéa 2 du Code de la consommation et 1162 du Code civil).

La clause ci-dessus rappelée sera donc interprétée comme un rappel des dispositions de l'alinéa 2 de l'article R. 312-2 du Code de la consommation, disposition inapplicable en l'espèce mais auquel le contrat se réfère pourtant, les intérêts compensateurs se confondant avec les intérêts compensatoires qui ne sont eux-mêmes pas dus.

Il convient donc de rechercher, à la date du 20 septembre 1998, soit à celle du remboursement anticipé, le montant des intérêts dont le paiement a été différé. C'est à juste titre que Alphonse X... en a calculé le montant en divisant le total contractuellement prévu des intérêts par le nombre prévu des échéances, puis en multipliant la somme ainsi obtenue par le nombre des échéances écoulées entre la conclusion du prêt et le 20 / 09 / 1998. Ce calcul permet de chiffrer la créance de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU à la somme de 543 548,17 F, soit une différence de 257 201 F en faveur de Alphonse X...

Cette différence s'explique par le fait que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU a, selon ses propres termes " actualisé les échéances " , mais pour les raisons ci-dessus exposées une telle actualisation, qui s'analyse en un anatocisme, n'est pas admissible faute d'avoir été prévue par une convention spécifique. - 5 -

Le calcul de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU aboutit certes à rétablir la rentabilité initialement convenue, comme le prévoit l'alinéa 2 de l'article R. 312-2 précité, mais c'est à tort que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU applique cet article en l'espèce seul l'alinéa 1 est applicable. Elle sera en conséquence condamnée à rembourser à Alphonse X... la somme de 257 201 francs avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation soit à compter du 27 août 1999. *

En raison de la complexité du dossier, la résistance de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU n'était pas abusive et il n'y a donc pas

lieu d'allouer à Alphonse X... les dommages et intérêts qu'il réclame, alors surtout qu'il ne démontre pas avoir subi le moindre préjudice.

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU sera condamnée à payer à Alphonse X... la somme de 10 000 F au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et supportera les dépens de première instance et d'appel. PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement

Infirme le jugement déféré

Statuant à nouveau

Condamne la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU à payer à Alphonse X... somme de 257.201 francs avec intérêts au taux légal à compter du 29 / 08 / 1999

Condamne la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU payer à Alphonse X... la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires

Condamne la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BEAUPREAU aux dépens de première instance et d'appel et en autorise le recouvrement selon les dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER

LE PRESIDENT C. Z...

Y. LE GUILLANTON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 2000/00744
Date de la décision : 21/05/2001
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit immobilier - Remboursement anticipé - Indemnité due au prêteur - Intérêts compensatoires - Conditions

Des prêts immobiliers comportant des clauses de paiement différé des intérêts ont été contractés auprès d'un organisme bancaire, par des particuliers. Ces derniers ayant remboursé par anticipation, l'organisme prêteur a sollicité l'application de la clause contractuelle prévoyant dans cette hypothèse, avec l'appui d'un article des Conditions générales, des intérêts compensatoires habiles à rendre "le taux de rendement sur la période courue (...) égal à celui qu'aurait produit le prêt sur la durée initialement prévue". En vertu de l'article R. 312-2 alinéa premier du Code de la consommation, dont l'application est d'ordre public en matière de crédit immobilier, l'indemnité due par le particulier ayant sollicité un remboursement anticipé de son emprunt immobilier est plafonnée. L'alinéa second de ce même article, qui seul autorise à prévoir une indemnité à titre d'intérêt compensateur afin d'assurer au prêteur le taux moyen prévu lors de l'octroi du prêt, ne saurait être appliqué, faute pour le prêt de répondre à l'exigence légale de variabilité du taux d'intérêt. Dès lors, dans son principe, la compensation contractuelle dont la modalité d'exécution et le calcul ne sont pas précisés, doit être considérée comme se rattachant à l'article R. 312-2 alinéa second du Code de la consommation et partant, doit être dite inapplicable, puisque si les dispositions contractuelles retardent l'exigibilité des intérêts elles ne prévoient nullement une variation du taux. Les emprunteurs doivent donc verser à l'organisme bancaire, au titre de leur emprunt, les seuls intérêts dus, prorata temporis, intérêts qu'ils auraient dû payer jusqu'au jour du remboursement anticipé, si leur versement n'avait pas été retardé. Cette somme ne saurait être augmentée ni "actualisée" par l'organisme prêteur, dans la mesure où, à défaut de convention spéciale et en vertu de l'article 1154 du Code civil, les intérêts ne peuvent produire des intérêts


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2001-05-21;2000.00744 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award